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Date : 20060824

Dossier : IMM-347-06

Référence :  2006 CF 1004

Ottawa (Ontario), le 24 août 2006

En présence de Monsieur le juge Shore 

 

ENTRE :

 

CESAR AUGUSTO SALOMON HERRADA

CARMEN LUZ RAZETO SILVA

ERICKA PAOLO SALOMON RAZETO

CESAR ABDEL SALOMON RAZETO

CESAR NAIF SALOMON RAZETO

demandeurs

et

 

MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

INTRODUCTION

[1]               La Cour d’appel fédérale a souligné que lorsque la seule preuve soumise au tribunal qui relie le demandeur à sa demande est celle que ce dernier fournit lui-même (outre, peut-être les dossiers sur différents pays dont on ne peut rien déduire directement à l’égard de la revendication du demandeur), la perception du tribunal à l’effet que le demandeur n’est pas un témoin crédible équivaut en fait à la conclusion qu’il n’existe aucun élément crédible.

 

(Comme spécifié dans Sheikh c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1990] 3 C.F. 238 (C.A.F.), [1990] A.C.F. no 604 (QL).)

NATURE DE LA PROCÉDURE JUDICIAIRE

[2]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, c. 27 (Loi), de la décision d’un agent d’immigration datée du 13 décembre 2005, selon laquelle la demande d’Examen des risques avant le renvoi (ERAR) des demandeurs a été rejetée.   

 

FAITS

[3]               Les demandeurs, M. Cesar Augusto Salomon Herrada, son épouse, Mme Carmen Luz Razeto Silva, et leurs trois enfants, Ericka Paola Salomon Razeto, Cesar Abdel Salomon Razeto et Cesar Naif Salomon Razeto, sont tous citoyens du Pérou.

 

[4]               Ils sont venus au Canada le 22 septembre 2002 pour revendiquer le statut de réfugiés puisqu’ils allèguent avoir été persécutés au Pérou par les membres du « Sentier Lumineux ». Mme Razeto Silva et leurs enfants basent leur demande sur celle de M. Salomon Herrada.

 

[5]               M. Salomon Herrada travaillait comme avocat et conseiller juridique dans deux Universités au Pérou. Mme Razeto Silva est psychologue de formation. Leur fille, Ericka, est médecin chirurgien et travaillait dans un hôpital au Pérou. Leurs fils étaient tous les deux aux études avant leur départ pour le Canada, Abdel étudiait le droit et Naif terminait ses études secondaires.

 

[6]               En juin 2002, un étudiant de la faculté de droit à l’Université San Martin de Porres (où M. Salomon Herrada travaillait) aurait été arrêté, étant accusé d’être membre du Sentier Lumineux. L’étudiant en question (Carlos Garcia Robles) aurait avoué avoir participé au meurtre en 2000 d’un comptable travaillant à la faculté de comptabilité, en complicité avec deux autres étudiants de la même faculté (soit Willy Martinez Ramos et Moïses Begazo Malpartida).

 

[7]               Le recteur de l’Université, M. Antonio Chang Escobedo aurait chargé M. Salomon Herrada d’étudier le dossier pénal de M. Garcia Robles afin de découvrir s’il y avait d’autres participants actifs du Sentier Lumineux au sein de l’Université San Martin de Porres.

 

[8]               Dans ses recherches, M. Salomon Herrada aurait constaté que les noms de Willy Martinez Ramos et Moïses Begazo Malpartida apparaissaient dans le dossier criminel de M. Garcia Robles et il en aurait informé le recteur de l’Université.

 

[9]               Vers 19h00 le 28 juin 2002, Willy Martinez Ramos et Moïses Begazo Malpartida et trois autres individus seraient présentés chez M. Salomon Herrada et seraient entrés dans la maison. M. Martinez Ramos aurait pointé une arme à feu sur M. Salomon Herrada et l’aurait menacé de mort, lui et sa famille, s’il poursuivait ses recherches sur le Sentier Lumineux.

 

[10]           Le lendemain, M. Salomon Herrada aurait déposé une plainte à la police et aurait demandé des garanties personnelles pour sa famille et lui-même. Il aurait aussi raconté l’incident au recteur de l’Université qui lui laissa le choix de continuer ou d’abandonner l’étude du dossier. M. Salomon Herrada allègue avoir décidé de continuer ses recherches mais il aurait pris un congé de son emploi à l’Université et aurait engagé un garde du corps et chauffeur pour le protéger.

 

[11]           Le 6 septembre 2002, alors qu’il sortait de la maison pour aller au travail, un coup de feu aurait atteint son garde du corps qui serait mort en essayant de protéger M. Salomon Herrada d’une attaque. Plus tard le même jour, M. Salomon Herrada allègue avoir reçu un appel téléphonique lui disant qu’il était l’objectif et non le chauffeur et que le Sentier Lumineux les tuerait lui et sa famille.

 

[12]           Suite à la mort de son garde du corps, M. Salomon Herrada aurait déposé une seconde plainte auprès de la police.

 

[13]           Le 16 septembre 2002, M. Salomon Herrada allègue avoir trouvé sous sa porte une lettre le menaçant de mort s’il ne retirait pas les plaintes qu’il avait déposées.

 

[14]           Vu la mort de son garde du corps et les menaces qu’il avait reçues, M. Salomon Herrada aurait décidé de quitter le Pérou. Il aurait retiré ses deux fils des centres de formation professionnelle où ils étudiaient et aurait demandé à sa fille de d’abandonner son travail. Toute la famille quitta le Pérou et arriva à Montréal le 22 septembre 2002, en passant par les États-Unis. Ils ont revendiqué le statut de réfugié immédiatement en arrivant au Canada.

 

[15]           Le 15 octobre 2003, leur demande d’asile a été refusée; la Section de la protection des réfugiés (SPR) de la Commission d’immigration et des réfugiés a conclu que leur récit n’était pas crédible et que la protection de l’État leur était disponible au Pérou. Leur demande d’autorisation pour une demande de contrôle judiciaire a été rejetée le 4 mars 2004.

 

[16]           Le 21 février, M. Salomon Herrada et sa famille ont présenté une demande d’ERAR. Le 25 février, ils ont présenté une demande de résidence permanente pour des motifs humanitaires en vertu du paragraphe 25(1) de la Loi. Ces deux demandes ont été refusées par le même agent d’immigration le 13 décembre 2005. La présente demande de contrôle judiciaire vise le rejet de la demande d’ERAR. M. Salomon Herrada et sa famille ont aussi déposé une demande de contrôle judiciaire visant le rejet de la demande de résidence permanente pour des motifs humanitaires (dossier IMM-346-06).

 

DÉCISION CONTESTÉE

[17]           L’agent chargé de l’ERAR a rejeté la demande d’ERAR de la famille puisqu’il a déterminé qu’ils ne risquaient pas d’être torturés ou persécutés, de subir des traitements ou châtiments cruels ou inhabituels ou de voir leur vie menacée s’ils étaient retournés au Pérou.

 

[18]           Malgré le fait que l’agent chargé de l’ERAR ait accepté la preuve démontrant que le Sentier Lumineux soit toujours actif au Pérou, il était d’avis que M. Salomon Herrada n’avait pas démontré que lui et sa famille étaient personnellement à risque par le Sentier Lumineux. Au contraire, le Sentier Lumineux pose un risque général à certaines parties de la population du Pérou.

 

[19]           De plus, en se basant sur la preuve devant lui, l’agent chargé de l’ERAR a déterminé que l’État péruvien est en mesure de protéger ses citoyens.

 

 

 

QUESTION EN LITIGE

[20]           La seule question en litige en l’espèce est la suivante :

1.      L’agent chargé de l’ERAR a-t-il commis une erreur susceptible de révision en rejetant la demande d’ERAR de M. Salomon Herrada et sa famille?

 

ANALYSE

 

            Cadre législatif

[21]           Le paragraphe 112(1) de la Loi énonce qu’un individu visé par une mesure de renvoi peut faire une demande de protection :

112.      (1) La personne se trouvant au Canada et qui n’est pas visée au paragraphe 115(1) peut, conformément aux règlements, demander la protection au ministre si elle est visée par une mesure de renvoi ayant pris effet ou nommée au certificat visé au paragraphe 77(1).

112.      (1) A person in Canada, other than a person referred to in subsection 115(1), may, in accordance with the regulations, apply to the Minister for protection if they are subject to a removal order that is in force or are named in a certificate described in subsection 77(1).

 

 

 

 

 

 

[22]           L’article 113 de la Loi ce lit comme suit :   

113.      Il est disposé de la demande comme il suit :

 

 

a) le demandeur d’asile débouté ne peut présenter que des éléments de preuve survenus depuis le rejet ou qui n’étaient alors pas normalement accessibles ou, s’ils l’étaient, qu’il n’était pas raisonnable, dans les circonstances, de s’attendre à ce qu’il les ait présentés au moment du rejet;

 

 

 

b) une audience peut être tenue si le ministre l’estime requis compte tenu des facteurs réglementaires;

 

 

c) s’agissant du demandeur non visé au paragraphe 112(3), sur la base des articles 96 à 98;

 

 

d) s’agissant du demandeur visé au paragraphe 112(3), sur la base des éléments mentionnés à l’article 97 et, d’autre part :

 

 

(i)         soit du fait que le demandeur interdit de territoire pour grande criminalité constitue un danger pour le public au Canada,

 

 

 

(ii)        soit, dans le cas de tout autre demandeur, du fait que la demande devrait être rejetée en raison de la nature et de la gravité de ses actes passés ou du danger qu’il constitue pour la sécurité du Canada.

113.      Consideration of an application for protection shall be as follows:

 

(a) an applicant whose claim to refugee protection has been rejected may present only new evidence that arose after the rejection or was not reasonably available, or that the applicant could not reasonably have been expected in the circumstances to have presented, at the time of the rejection;

 

(b) a hearing may be held if the Minister, on the basis of prescribed factors, is of the opinion that a hearing is required;

 

(c) in the case of an applicant not described in subsection 112(3), consideration shall be on the basis of sections 96 to 98;

 

(d) in the case of an applicant described in subsection 112(3), consideration shall be on the basis of the factors set out in section 97 and

 

(i)                  in the case of an applicant for protection who is inadmissible on grounds of serious criminality, whether they are a danger to the public in Canada, or

 

(ii)                in the case of any other applicant, whether the application should be refused because of the nature and severity of acts committed by the applicant or because of the danger that the applicant constitutes to the security of Canada.

 

Norme de contrôle

 

[23]           La norme de contrôle à l’égard des conclusions portant sur la crédibilité, au cœur de la décision sur l’ERAR, est la norme de la décision manifestement déraisonnable. La norme de révision quant aux conclusions de fait spécifiques relève de l’alinéa 18.1(4)d) de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. 1985, c. F-7, qui prévoit que la Cour doit être convaincue qu’un tribunal a rendu une décision ou une ordonnance fondée sur une « conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments dont il dispose » (Tekie c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 27, [2005] A.C.F. no 39 (QL), au paragraphe 6; Figurado c. Canada (Solliciteur général), 2005 CF 347, [2005] A.C.F. no 458 (QL), au paragraphe 51; Kim c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 437, [2005] A.C.F. no 540 (QL), au paragraphe 22).

 

[24]           Pour ce qui est de la décision de l’ERAR globalement, c’est-à-dire l’application du droit aux faits par l’agent d’immigration, la norme de contrôle dans ce cas est celle de la décision raisonnable simpliciter puisqu’il s’agit d’une question mixte de droit et de fait (Figurado, ci-dessus; Kim, ci-dessus, aux paragraphes 19-20).

 

Remarques préliminaires

[25]           M. Salomon Herrada et sa famille ont déposé plusieurs documents en preuve qui n’étaient pas devant l’agent chargé de l’ERAR, des documents plus récents ou qu’ils ont obtenu récemment. Dans le cadre d’une demande de contrôle judiciaire, cette Cour ne peut considérer que la preuve qui était devant l’agent chargé d’ERAR. Si ces documents étaient pertinents à leur demande, M. Salomon Herrada et sa famille auraient dû les acheminer à l’agent chargé de l’ERAR dès leur réception, avant que la décision soit prise, afin qu’il puisse en tenir compte dans son examen de la demande.

 

[26]           M. Salomon Herrada et sa famille allèguent que puisqu’une lettre leur avait été envoyée les convoquant à une rencontre le 10 janvier 2006 pour mettre leur dossier à jour, ils s’attendaient à pouvoir déposer, lors de cette rencontre, de la preuve additionnelle qu’ils venaient de recevoir. Par contre, la décision avait déjà été prise le 13 décembre 2005. Malgré l’importance que cette lettre aurait revêtue pour M. Salomon Herrada et sa famille, celle-ci n’est pas incluse ni dans le Dossier des demandeurs ni dans le Dossier du tribunal. Cette Cour n’est donc pas en mesure de déterminer s’il y aurait eu une violation de justice naturelle à ce sujet.

 

L’agent chargé de l’ERAR a-t-il commis une erreur susceptible de révision en rejetant la demande d’ERAR de M. Salomon Herrada et sa famille?

 

 

[27]           Le programme d’ERAR a pour seul objet d’évaluer les risques auxquels une personne pourrait être exposée à la suite de son renvoi vers son pays d’origine, à la lumière de faits nouveaux qui seraient survenus depuis la décision rendue sur sa demande d’asile par la SPR. L’alinéa 113a) de la Loi ne laisse planer aucune ambiguïté sur ce sujet.

 

[28]           L’alinéa 113a) de la Loi énonce qu’un demandeur ne peut présenter que des éléments de preuve survenus depuis le rejet de sa demande d’asile qui n’étaient alors pas normalement accessibles.

 

[29]           Contrairement à ce qu’exige la Loi, M. Salomon Herrada et sa famille se sont contentés de soumettre à l’appui de leur demande d’ERAR les mêmes allégations que celles présentées à la SPR.  

 

[30]           Toutefois, l’agent chargé de l’ERAR a rappelé que ces allégations ont été jugées non crédibles par la SPR. De plus, M. Salomon Herrada et sa famille ont tenté de contester ces conclusions devant cette Cour mais elle a refusé d’intervenir.

 

[31]           M. Salomon Herrada et sa famille semblent croire que s’ils ajoutent des documents au dossier, au stade de leur demande d’ERAR, les conclusions de la SPR quant à leur crédibilité seront infirmées ou oubliées. Par contre, l’agent qui traite une demande d’ERAR ne siège ni en appel ni en contrôle de la décision de la SPR (Hussain c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2000] A.C.F. no 751 (C.F. 1ère inst.) (QL), au paragraphe 12; Ahmed c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2001] 1 C.F. 483, au paragraphe 27) :

Selon moi, le processus d'attribution de la qualité de DNRSRC est de nature administrative. De ce fait, le rôle de l'agent se limite à un examen de la preuve versée au dossier, y compris les nouveaux documents et les nouvelles observations présentés par les demandeurs. L'agent n'est donc pas libre de procéder à une nouvelle évaluation de la crédibilité du demandeur et d'infirmer les conclusions sur la crédibilité [page493] tirées par la section du statut de réfugié. Le juge Nadon a affirmé, dans l'affaire Hussain c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2000] A.C.F. no 751 (1re inst.) (QL), au par. 12, qu'un agent d'immigration saisi d'une demande fondée sur des motifs d'ordre humanitaire, dont le but n'est pas de plaider à nouveau les faits présentés à l'origine devant la Commission du statut de réfugié, ne siège ni en appel ni en contrôle de la décision de la Commission; je crois que cela vaut aussi en ce qui concerne les DNRSRC.

(Ahmed, ci-dessus)

 

[32]           Par conséquent, en traitant la demande d’ERAR, l’agent n’était pas libre de procéder à une nouvelle évaluation de la crédibilité de M. Salomon Herrada et sa famille et d’infirmer les conclusions sur la crédibilité tirées par la SPR. Plus particulièrement, l’agent chargé de l’ERAR ne pouvait se fonder sur le fait que M. Salomon Herrada et sa famille auraient été visés par le Sentier Lumineux, étant donné les conclusions de la SPR sur cette question.

 

[33]           L’agent d’ERAR pouvait raisonnablement écarter la preuve qui n’était pas personnellement liée à M. Salomon Herrada et sa famille, même si cette preuve était postérieure à l’audition de la SPR et même si cette preuve indiquait que le Sentier Lumineux était une organisation puissante. Il en est ainsi parce que la preuve ne corrobore aucunement un risque personnel et objectivement identifiable pour M. Salomon Herrada et sa famille. Ceux-ci n’ont jamais réussi à convaincre aucun tribunal qu’ils étaient vraiment visés par le Sentier Lumineux.

 

[34]           En effet, dans l’affaire Sheikh c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1990] 3 C.F. 238 (C.A.F.), [1990] A.C.F. no 604 (QL), la Cour d’appel fédérale a souligné que lorsque la seule preuve soumise au tribunal qui relie le demandeur à sa demande est celle que ce dernier fournit lui-même (outre, peut-être les dossiers sur différents pays dont on ne peut rien déduire directement à l’égard de la revendication du demandeur), la perception du tribunal à l’effet que le demandeur n’est pas un témoin crédible équivaut en fait à la conclusion qu’il n’existe aucun élément crédible.

 

[35]           De toute façon, l’agent chargé de l’ERAR a reconnu que le Sentier Lumineux était une organisation puissante, mais il a noté que la preuve documentaire n’indiquait pas que l’État était incapable de protéger ses citoyens.

 

[36]           Ayant noté que M. Salomon Herrada et sa famille n’ont apporté aucun nouvel élément de preuve permettant de croire que ces derniers seraient à risque dans leur pays d’origine, l’agent chargé de l’ERAR pouvait raisonnablement rejeter leur demande d’ERAR.

 

[37]           De plus, l’agent chargé de l’ERAR a noté que la SPR avait rejeté leur demande d’asile non seulement parce qu’elle avait conclu que M. Salomon Herrada et sa famille n’étaient pas crédibles, mais aussi parce qu’ils pouvaient se prévaloir de la protection de l’État.

 

[38]           Après avoir considéré toute la preuve au dossier, l’agent chargé de l’ERAR a conclu dans le même sens. Il était d’avis que M. Salomon Herrada et sa famille n’avaient pas réfuté la présomption selon laquelle l’État est en mesure de les protéger, ce qui est un élément essentiel pour que leur demande soit acceptée.

 

[39]           Il appartient à M. Salomon Herrada et sa famille d’apporter une preuve clair et convaincante montrant l’incapacité de l’État d’apporter une protection à ses nationaux (Canada (Procureur général) c. Ward, [1993] 2 R.C.S. 689, [1993] S.C.J. No. 74, aux paragraphes 49-50).

 

[40]           Rien ne donne à penser que l’agent chargé de l’ERAR a commis une erreur lorsqu’il a conclu que M. Salomon Herrada et sa famille n’avaient pas réfuté cette présomption. Cette Cour ne devrait pas intervenir lorsque le tribunal spécialisé apprécie les faits en se basant sur la preuve devant lui et ce, même si la Cour arriverait à une conclusion différente.

 

[41]           Dans plusieurs décisions récentes, cette Cour a confirmé qu’il existe au Pérou une protection étatique adéquate pour ceux qui craignent le Sentier Lumineux (Bustamente c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CFPI 499, [2002] A.C.F. no 643 (QL); Mejia c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 925, [2004] A.C.F. no 1148 (QL); Mendiz c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 1708, [2004] A.C.F. no 2100 (QL); Valencia c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 1136, [2005] A.C.F. no 1536 (QL); Villanueva c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 1320, [2004] A.C.F. no 1619 (QL)).

 

CONCLUSION

[42]           Il appartient à l’agent chargé de l’ERAR d’évaluer les risques auxquels seraient exposés M. Salomon Herrada et sa famille s’ils devaient retourner au Pérou. Si l’agent chargé de l’ERAR a considéré toute la preuve dans le dossier et que la décision est raisonnable, cette Cour ne peut intervenir, même si elle serait arrivée à un autre résultat. La demande de contrôle judiciaire de la décision portant sur l’ERAR est donc refusée.

 


JUGEMENT

 

LA COUR ORDONNE que

1.         La demande de contrôle judiciaire soit rejetée;

2.         Aucune question grave de portée générale soit certifiée. Les parties n’ont préposé aucune question à la certification et la Cour estime que la présente affaire repose uniquement sur ses propres faits.

 

 

« Michel M.J. Shore »

Juge


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                         IMM-347-06

 

INTITULÉ :                                        CESAR AUGUSTO SALOMON HERRADA

CARMEN LUZ RAZETO SILVA

ERICKA PAOLO SALOMON RAZETO

CESAR ABDEL SALOMON RAZETO

CESAR NAIF SALOMON RAZETO

c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                le 15 août 2006

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT:                               LE JUGE SHORE

 

DATE DES MOTIFS :                      le 24 août 2006

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Me Jean-François Fiset

 

POUR LES DEMANDEURS

Me Alexandre Tavadian

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

JEAN-FRANÇOIS FISET, Avocat

Montréal (Québec)

 

POUR LES DEMANDEURS

JOHN H. SIMS, c.r.

Sous-procureur general du Canada

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

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