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Date : 20060824

Dossier : IMM-405-06

Référence :  2006 CF 1005

Ottawa (Ontario), le 24 août 2006

En présence de Monsieur le juge Shore 

 

ENTRE :

NAVJOT SINGH SANDHU

HARPREET KAUR SANDHU

LUCIANA KAUR SANDHU

NICOLAS NAVKERA SINGH

demandeurs

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

INTRODUCTION

 

[1]               “On admet généralement qu'une commission est dans une meilleure position pour apprécier la crédibilité d'une demande et tirer les inférences nécessaires. Dans le contexte d'un contrôle judiciaire, les conclusions quant à la crédibilité sont examinées d'après la norme de la décision manifestement déraisonnable : Aguebor c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1993] A.C.F. no 732  (QL). L'alinéa 18.1(4)d) de la Loi sur les Cours fédérales, L.R. 1985, ch. F-7, mod. par 2002, ch. 8, prévoit que la Cour n'interviendra que si ces conclusions sont fondées sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte de la preuve. »

 

(Comme spécifié dans Grewal c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 875, [2005] A.C.F. no 1093 (QL), au paragraphe 17.)

NATURE DE LA PROCÉDURE JUDICIAIRE

[2]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, c. 27 (Loi) de la décision de la Section de protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (Commission), datée du 29 décembre 2005, selon laquelle les demandeurs n’ont pas la qualité de réfugiés au sens de la Convention ni de personnes à protéger selon les articles 96 et 97 de la Loi.

 

FAITS

[3]               Les demandeurs, monsieur Navjot Singh Sandhu, et son épouse, madame Harpreet Kaur Sandhu, sont citoyens de l’Inde. Leurs enfants, Luciana Kaur Sandhu et Nicolas Navkera Singh, quant à eux, sont citoyens de l’Argentine. Ils ont fait une demande d’asile, alléguant une crainte bien fondée de persécution en raison d’opinions politiques imputées. Mme Sandhu et leurs enfants basent leur demande sur celle de M. Sandhu.

 

[4]               M. Sandhu allègue qu’il était professeur d’espagnol à Ludhiana, en Inde, à partir de janvier 2000. Le 11 février 2004, la police aurait fait une descente dans sa classe et aurait arrêté un élève, prénommé Salim, qui était soupçonné d’activités illégales. M. Sandhu aurait tenté d’intervenir mais la police lui aurait dit de se taire et l’aurait ensuite arrêté lui aussi.

 

[5]               Au poste de police, M. Sandhu allègue avoir été torturé, battu et accusé d’aider les militants. Le 14 février 2004, il aurait été libéré grâce à l’intervention de son conseiller municipal, moyennant le paiement d’un pot-de-vin et sous condition de se rapporter au poste le 15 mars 2004.

 

[6]               Le 15 mars 2004, M. Sandhu se serait présenté au poste de police où il aurait été interrogé, détenu, battu et torturé à nouveau. Le 17 mars 2004, il aurait encore une fois été libéré grâce à l’intervention du conseiller municipal et au paiement d’un pot-de-vin. La police lui aurait fait signer un document vierge, pris ses empreintes digitales et sa photo et lui aurait ordonné de se présenter au poste le 15 avril 2004 avec des informations concernant Salim et ses associés.

 

[7]               Après chaque épisode de détention et de torture, M. Sandhu aurait été traité par un médecin pour les blessures occasionnées.

 

[8]               Le 28 mars 2004, M. Sandhu et sa famille se seraient cachés chez un cousin, Yadvinder Singh, à Chandigarh. Ce dernier aurait alors entrepris des démarches afin qu’ils quittent l’Inde. M. Sandhu a donc quitté l’Inde le 21 mai 2004 avec l’aide d’un passeur pour venir au Canada. Quant à Mme Sandhu et leurs enfants, ils l’ont rejoint le 9 juin 2004.

 

DÉCISION CONTESTÉE

[9]               La Commission a jugé que M. Sandhu n’était pas crédible sur certains éléments au cœur de sa demande d’asile. À plusieurs reprises, pendant son témoignage, M. Sandhu était hésitant et mal à l’aise, il a changé sa version des faits et il n’a pas répondu à certaines questions.

 

[10]           Tout d’abord, puisque M. Sandhu avait témoigné que son épouse et lui détenaient un visa pour l’Argentine valide jusqu’au 4 avril 2004 et que ses enfants sont citoyens de l’Argentine, ils auraient pu se réfugier en Argentine au lieu de demeurer en Inde jusqu’après l’expiration de leur visa puis de venir au Canada. La Commission a rejeté les explications de M. Sandhu à ce sujet, jugeant que ce comportement était incompatible avec celui d’une personne qui dit craindre pour sa vie. 

 

[11]           En second lieu, la Commission a trouvé étrange que M. Sandhu, qui allègue être recherché par la police, a pu quitter l’Inde sans aucun problème, en utilisant son propre passeport. De plus, alors qu’il était caché à Chandigarh, il aurait payé son compte de taxe à Ludhiana. Les explications de M. Sandhu, hésitantes et contradictoires, n’ont pas convaincu la Commission, qui est d’avis qu’elles étaient inventées.

 

[12]           La Commission a aussi questionné la raison pour laquelle M. Sandhu n’a pas revendiqué l’asile en Angleterre où il est passé en venant au Canada ou immédiatement après son arrivée au Canada. Elle n’était pas satisfaite par les explications de M. Sandhu, croyant que son comportement était incompatible avec celui d’une personne qui dit craindre pour sa vie.

 

[13]           La Commission a noté que le témoignage de M. Sandhu était contredit par la preuve documentaire, qui fait état de la fin du terrorisme au Punjab. La Commission a rejeté un affidavit, un certificat médical et une photo de la clinique, documents déposés par M. Sandhu pour supporter son témoignage au sujet des traitements médicaux qu’il aurait reçus à la suite des deux détentions, déterminant que de faux documents peuvent être facilement obtenus en Inde.

 

[14]           Enfin, la Commission a conclu que Mme Sandhu et leurs enfants n’avaient eu aucun problème en Inde. De plus, les enfants ne seraient pas en danger s’ils retournaient dans leur pays de citoyenneté, soit l’Argentine.

QUESTION EN LITIGE

[15]           Il y a une seule question en litige en l’espèce, soit :

1.      La Commission a-t-elle commis une erreur susceptible de révision judiciaire en rejetant la demande d’asile de M. Sandhu et sa famille?

 

ANALYSE

            Cadre législatif

[16]           Selon l’article 96 de la Loi, une personne est un réfugié si elle craint la persécution basée sur sa race, sa religion, sa nationalité, son appartenance à un groupe social ou ses opinions politiques :

96.      A qualité de réfugié au sens de la Convention – le réfugié – la personne qui, craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques :

 

a) soit se trouve hors de tout pays dont elle a la nationalité et ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de chacun de ces pays;

 

b) soit, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle, ne peut ni, du fait de cette crainte, ne veut y retourner.

96.      A Convention refugee is a person who, by reason of a well-founded fear of persecution for reasons of race, religion, nationality, membership in a particular social group or political opinion,

 

 

(a) is outside each of their countries of nationality and is unable or, by reason of that fear, unwilling to avail themself of the protection of each of those countries; or

 

(b) not having a country of nationality, is outside the country of their former habitual residence and is unable or, by reason of that fear, unwilling to return to that country.

 

 

[17]           Le paragraphe 97(1) de la Loi discute de ce qui constitue une personne à protéger :

97.      (1) A qualité de personne à protéger la personne qui se trouve au Canada et serait personnellement, par son renvoi vers tout pays dont elle a la nationalité ou, si elle n’a pas de nationalité, dans lequel elle avait sa résidence habituelle, exposée :

 

a) soit au risque, s’il y a des motifs sérieux de le croire, d’être soumise à la torture au sens de l’article premier de la Convention contre la torture;

 

b) soit à une menace à sa vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités dans le cas suivant :

 

(i)                  elle ne peut ou, de ce fait, ne veut se réclamer de la protection de ce pays,

 

 

(ii)                elle y est exposée en tout lieu de ce pays alors que d’autres personnes originaires de ce pays ou qui s’y trouvent ne le sont généralement pas,

 

(iii)               la menace ou le risque ne résulte pas de sanctions légitimes – sauf celles infligées au mépris des normes internationales – et inhérents à celles-ci ou occasionnés par elles,

 

(iv)              la menace ou le risque ne résulte pas de l’incapacité du pays de fournir des soins médicaux ou de santé adéquats.

97.      (1) A person in need of protection is a person in Canada whose removal to their country or countries of nationality or, if they do not have a country of nationality, their country of former habitual residence, would subject them personally

 

 

(a) to a danger, believed on substantial grounds to exist, of torture within the meaning of Article 1 of the Convention Against Torture; or

 

(b) to a risk to their life or to a risk of cruel and unusual treatment or punishment if

 

 

(i)                  the person is unable or, because of that risk, unwilling to avail themself of the protection of that country,

 

(ii)                the risk would be faced by the person in every part of that country and is not faced generally by other individuals in or from that country,

 

(iii)               the risk is not inherent or incidental to lawful sanctions, unless imposed in disregard of accepted international standards, and

 

 

(iv)              the risk is not caused by the inability of that country to provide adequate health or medical care.

 

 

Norme de contrôle

[18]           Dans Grewal c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 875, [2005] A.C.F. no 1093 (QL), au paragraphe 17, la Cour a déterminé que la norme de contrôle pour les conclusions basées sur la crédibilité est celle de la décision manifestement déraisonnable :

On admet généralement qu'une commission est dans une meilleure position pour apprécier la crédibilité d'une demande et tirer les inférences nécessaires. Dans le contexte d'un contrôle judiciaire, les conclusions quant à la crédibilité sont examinées d'après la norme de la décision manifestement déraisonnable : Aguebor c. Canada (Ministre de l'Emploi et de l'Immigration), [1993] A.C.F. no 732  (QL). L'alinéa 18.1(4)d) de la Loi sur les Cours fédérales, L.R. 1985, ch. F-7, mod. par 2002, ch. 8, prévoit que la Cour n'interviendra que si ces conclusions sont fondées sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte de la preuve.

 

(Voir aussi : Aguebor c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1993] A.C.F. no 732 (QL), au paragraphe 4; Monteiro c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CFPI 1258, [2002] A.C.F. no 1720 (QL), aux paragraphes 13-15; Singh c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CF 1146, [2003] A.C.F. no 1451 (QL), aux paragraphes 10-11.)

 

La Commission a-t-elle commis une erreur susceptible de révision judiciaire en rejetant la demande d’asile de M. Sandhu et sa famille?

 

 

[19]           La Commission était d’avis, et a mentionné au début des motifs de sa décision, que M. Sandhu n’était pas crédible sur des éléments au cœur de sa demande d’asile. De plus, la Commission a remarqué à plusieurs reprises dans les motifs de sa décision que M. Sandhu était hésitant, mal à l’aise, qu’il ne répondait pas à la question posée, qu’il changeait sa version des faits.

 

[20]           Dans leur mémoire, M. Sandhu et sa famille ne contestent pas la conclusion de la Commission à l’effet que le témoignage de M. Sandhu n’était pas crédible parce qu’il était hésitant, évasif et inconstant.

 

[21]           La Cour d’appel fédérale a déjà décidé que cette Cour ne devrait pas intervenir dans une telle conclusion d’un tribunal administratif (Wen c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1994] A.C.F. no 907 (C.A.F.) (QL)).  

 

[22]           M. Sandhu et sa famille prétendent que le raisonnement de la Commission s’est fondé sur une erreur centrale, soit que M. Sandhu et son épouse détenaient des visas valides pour se rendre en Argentine. Ils argumentent que Mme Sandhu n’avait aucun visa pour l’Argentine.

 

[23]           Aux pages 35 à 38 du Dossier des demandeurs, se trouve une copie de quelques pages du passeport de M. Sandhu. À la page 38, il apparaît un visa pour l’Argentine, valide du 4 avril 2003 au 4 avril 2004. Aucune traduction de ce document n’est fournie. M. Sandhu et sa famille ne contestent pas le fait que M. Sandhu détenait un visa valide pour l’Argentine pendant la période en question.

[24]           Pour appuyer leur prétention que Mme Sandhu ne détenait aucun visa pour l’Argentine, M. Sandhu et sa famille se réfèrent aux pages 129 à 139 du Dossier des demandeurs, où l’on retrouve une copie du passeport de Mme Sandhu. À la page 132 du Dossier des demandeurs, il apparaît que Mme Sandhu avait un visa pour l’Argentine, lequel a été remis en février 1998. Cependant, comme il n’y a aucune traduction de ce document dans le dossier, on ne peut être certain de son contenu. De même, à la page 131 du Dossier des demandeurs, il y a des notations, dont la suivante : « P.C.C. issued to Argentina », une ligne, une étampe et d’autres notations. Ces notations indiquent qu’il est possible que Mme Sandhu ait reçu un autre visa lui permettant d’aller en Argentine.

 

[25]           M. Sandhu et sa famille ont le fardeau de prouver que la Commission a erré en concluant que Mme Sandhu avait un visa valide pour l’Argentine. La preuve qu’ils ont fournie dans leur demande sur cet aspect est loin d’être concluante.

 

[26]           De plus, lorsque M. Sandhu a quitté l’Inde pour le Canada, il était seul. Sa famille ne l’a rejoint qu’environ un mois plus tard. Il était donc prêt à voyager sans son épouse et ses enfants. Donc, on peut se questionner à savoir pourquoi M. Sandhu n’a pas décidé de quitter l’Inde seul pour aller se réfugier en Argentine où il détenait un visa valide. Sa femme et ses enfants, qui n’étaient pas à risque en Inde, auraient pu l’y rejoindre plus tard, comme ils l’ont fait au Canada. Mme Sandhu aurait alors pu entreprendre les démarches afin d’obtenir un visa pour l’Argentine.

 

[27]           En conséquence, même si la Commission avait erré en affirmant que M. Sandhu et son épouse avaient chacun un visa valide pour l’Argentine, il demeure que M. Sandhu, la seule personne dans la famille qui allègue avoir été persécutée en Inde, a décidé d’y rester, après qu’il ait été détenu et torturé par la police à deux occasions alors qu’il avait la possibilité de se réfugier en Argentine.

 

[28]           Tenant compte de ce qui précède, la Commission avait de bonnes raisons de conclure que le comportement de M. Sandhu et sa famille était incompatible avec celui de personnes qui craignent pour leur vie ou leur sécurité dans leur pays.

 

[29]           Il appert que des erreurs se sont glissées dans la décision de la Commission par rapport à la date d’arrivée de M. Sandhu au Canada et son délai pour y demander l’asile. En effet, comme la Commission le mentionne elle-même dans sa décision et conformément au Formulaire de renseignements personnels de M. Sandhu, il est arrivé au Canada le 21 mai 2004 (et non en janvier 2004 tel qu’énoncé plus tard). Il a réclamé la protection du Canada le 5 juillet 2004, soit environ un mois et demi après son arrivée.

 

[30]           Dans une décision récente, Grewal, ci-dessus, au paragraphe 19, le juge Edmond Blanchard a rejeté une demande de contrôle judiciaire dans un cas où le tribunal a erré en concluant que le demandeur avait attendu un an et demi, au lieu de six mois, pour demander l’asile au Canada. Au sujet de l’erreur du tribunal, le juge Blanchard s’est exprimé comme suit :

La Commission s'est enquise de la date du dépôt de la demande et on l'a informée que c'était le 12 mars 2004. Il semble que l'erreur de la Commission en soit une de calcul, puisqu'elle disposait déjà de cette information dans la preuve documentaire du demandeur qu'elle voulait  faire confirmer à l'audience. Sur ce point, je suis d'accord avec le défendeur pour dire que l'erreur de la Commission n'est pas décisive puisque l'élément essentiel considéré était le fait que le demandeur avait attendu avant de demander l'asile. La Commission a également rejeté l'explication du demandeur quant à l'important intervalle écoulé entre son arrivée au Canada et le dépôt de sa demande, et notamment l'explication selon laquelle il n'était pas familier avec le système d'immigration du Canada et craignait d'être en danger également au Canada. Je suis d'avis que la Commission pouvait rejeter l'explication du demandeur.

 

[31]           Dans des cas similaires, le juge Michel Beaudry et le juge William McKeown, respectivement, sont arrivés à la même conclusion, soit qu’une erreur quant au délai pour demander l’asile n’est pas nécessairement une erreur déterminante (Erulandy c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CFPI 790, [2002] A.C.F. no 1056 (QL), aux paragraphes 26-30; De La Torre c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2001 CFPI 452, [2001] A.C.F. no 735 (QL), aux paragraphes 7-9).

 

[32]           En l’espèce, considérant l’absence de crédibilité de M. Sandhu et le comportement qui n’était pas compatible avec une crainte véritable, l’erreur de la Commission n’était pas déterminante.

 

[33]           Cette Cour est d’accord avec le défendeur que la jurisprudence indique clairement que la Commission peut tenir compte du comportement d’un demandeur pour apprécier ses propos ainsi que ses gestes. Dans certaines circonstances, le comportement d’un demandeur peut être suffisant, à lui seul, pour rejeter une demande d’asile. (Huerta c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1993] A.C.F. no 271 (C.A.F.) (QL); Ilie c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1994] A.C.F. no 1758 (C.A.F.) (QL), au paragraphe 15; Riadinskaia c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2001] A.C.F. no 30 (QL), au paragraphe 7; Cheema c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CFPI 2006, [2002] A.C.F. no 1672 (QL), au paragraphe 21; Monteiro, ci-dessus, au paragraphe 18; Fernando c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CFPI 993, [2002] A.C.F. no 1325 (QL), aux paragraphes 4-7; Singh, ci-dessus, au paragraphe 29; Nazir v. Canada (Minister of Citizenship and Immigration), 2005 CF 168, [2005] F.C.J. No. 182 (QL))

Même si les membres n'en ont pas fait une mention expresse dans leur décision, il apparaît clairement de la transcription des débats à l'audience qu'ils trouvaient ce comportement de l'appelante difficilement compatible et conciliable avec celui d'une personne qui dit craindre pour sa vie et fuir son pays pour rechercher la protection des autorités canadiennes. Le retard à formuler une demande de statut de réfugié n'est pas un facteur déterminant en soi. Il demeure cependant un élément pertinent dont le tribunal peut tenir compte pour apprécier les dires ainsi que les faits et gestes d'un revendicateur. (Huerta, ci-dessus)

 

[34]           Il faut souligner les faits en l’espèce. M. Sandhu allègue avoir été détenu et torturé par la police pour la deuxième fois le 15 mars 2004 et libéré le 17 mars 2004. Cependant, il a attendu jusqu’au 21 mai 2004, soit environ deux mois, pour quitter son pays.

 

[35]           M. Sandhu avait un visa valide jusqu’au 4 avril 2004 pour l’Argentine. Cependant, au lieu de profiter de la possibilité de s’y réfugier, il a préféré attendre quelques semaines pour venir au Canada. Lorsque M. Sandhu est arrivé au Canada, il a attendu un mois et demi avant de demander l’asile. Même après l’arrivée de son épouse et leurs enfants le 9 juin 2004, ils ont attendu un mois avant de réclamer la protection au Canada.

 

[36]           La Commission pouvait certainement conclure que le délai pour demander l’asile au Canada et le défaut d’aller en Argentine étaient manifestement incompatibles avec le comportement d’une personne qui craint pour sa vie ou sa sécurité dans son pays. Dans ce cas, le comportement de M. Sandhu et sa famille était suffisant, à lui seul, pour rejeter leur demande d’asile.

 

[37]           Tenant compte du témoignage hésitant et évasif de M. Sandhu et de l’absence de crainte subjective de M. Sandhu et sa famille, cette Cour est d’accord avec le Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration que M. Sandhu et sa famille n’ont pas démontré que la Commission a erré en concluant que M. Sandhu n’était pas crédible « sur des éléments qui vont au cœur de sa demande d’asile ».

 

CONCLUSION

[38]           En conclusion, M. Sandhu et sa famille n’ont pas démontré que les conclusions de la Commission concernant leur crédibilité et l’absence de crainte subjective sont manifestement déraisonnables. Il n’est donc pas nécessaire de répondre aux autres arguments de M. Sandhu concernant la preuve documentaire qui est pertinente à leur crainte subjective.

 

[39]           Il est également clair que la Commission n’a pas erré en concluant que Mme Sandhu et leurs enfants ne sont pas à risque advenant un retour en Inde. À cet égard, la Commission a souligné que ces derniers n’ont jamais eu de problèmes ni en Inde ni en Argentine.

 

[40]           Puisque la décision de la Commission n’est pas manifestement déraisonnable, cette Cour ne peut intervenir dans la décision. La présente demande de contrôle judiciaire est donc rejetée.

 

 


JUGEMENT

 

LA COUR ORDONNE que

1.         La demande de contrôle judiciaire soit rejetée;

2.         Aucune question grave de portée générale soit certifiée. Les parties n’ont préposé aucune question à la certification et la Cour estime que la présente affaire repose uniquement sur ses propres faits.

 

 

 

 

« Michel M.J. Shore »

Juge


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM-405-06

 

INTITULÉ :                                       NAVJOT SINGH SANDHU

HARPREET KAUR SANDHU

LUCIANA KAUR SANDHU

NICOLAS NAVKERA SINGH

c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                                            ET DE L'IMMIGRATION

 

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               le 16 août 2006

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              LE JUGE SHORE

 

DATE DES MOTIFS :                      le 24 août 2006

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Me Michel Le Brun

 

POUR LES DEMANDEURS

Me Gretchen Timmins

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

MICHEL LE BRUN, AVOCAT

LaSalle, (Montréal), Québec

 

POUR LES DEMANDEURS

JOHN H. SIMS, c.r.

Sous-procureur général du Canada

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

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