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Date : 20060823

Dossier : T-1519-02

Référence : 2006 CF 1017

ENTRE :

 

ANDREW MARK MARSHALL

LASCELLES MARSHALL et

BEVERLY MARSHALL

 

demandeurs

et

 

 

SA MAJESTÉ LA REINE

 

défenderesse

 

 

MOTIFS DE LA TAXATION DES DÉPENS

Charles E. Stinson

Officier taxateur

 

 

[1]               La décision de la Cour rendue le 17 février 2005, qui accueillait la requête présentée par la défenderesse en vue d’obtenir un jugement sommaire rejetant l’action avec dépens, faisait mention de nombreux chefs de réparation soulevés au sujet des difficultés en matière de citoyenneté du demandeur, Andrew Mark Marshall, et notait au paragraphe 8 que « l'objectif des demandeurs, dans l'action qu'ils avaient intentée, est uniquement d'obtenir de la Cour un jugement déclaratoire affirmant que Andrew Marshall est un citoyen canadien, ce qui aurait pour effet de faire échouer les mesures prises par la défenderesse pour le renvoyer vers son pays d'origine ». J’ai établi un calendrier quant à la taxation sur dossier du mémoire de frais de la défenderesse.

 

[2]               Par la suite, l’avocate des demandeurs a présenté une demande et a obtenu l’autorisation de cesser d’occuper à titre d’avocate inscrite au dossier. Les documents de la demande faisaient référence à l’existence apparente d’un nouvel avocat pour les demandeurs, qui, à ce jour, n’a pas été inscrit au dossier. Je n’ai trouvé aucune mention de cet avocat dans le Canadian Law List 2006 (Aurora (Ontario) : Canada Law Book, 2006), qui n’est pas tout à fait à jour. J’ai donné des directives supplémentaires, celles données le 24 avril 2006 comprises, afin de m’assurer que les demandeurs, qui, à toute fin pratique, se représentaient eux-mêmes à ce moment, connaissaient les paramètres de la taxation des dépens :

[traduction]

L’officier taxateur, Charles E. Stinson, a pris note des efforts, consignés au dossier, de Roxanne Haniff-Darwent, l’avocate actuelle des demandeurs qui est inscrite au dossier, en vue de faire parvenir à ses clients les preuves principales au sujet des dépens qui lui avaient été signifiées par l’avocat de la défenderesse, conformément au calendrier établi quant à la taxation sur dossier du mémoire de frais de la défenderesse. De plus, l’officier taxateur est au courant de la requête de l’avocate, fondée sur l’article 125 des Règles des Cours fédérales (les Règles), en vue de cesser d’occuper à titre d’avocate inscrite au dossier, et des renseignements au dossier qui indiquent que le demandeur, Lascelles Marshall, a retenu les services d’un nouvel avocat. Bien que la lecture du dossier ne lui permette pas d’affirmer que ce nouvel avocat représente aussi les deux autres demandeurs, l’officier taxateur ne relève rien dans la méthode suivie à date qui laisse entendre le contraire. L’officier taxateur conclut que les demandeurs ont donc maintenant en leur possession les preuves principales de la défenderesse et qu’ils ont eu le temps nécessaire pour retenir les services d’un nouvel avocat, s’ils le désiraient.

 

L’officier taxateur remarque que les difficultés que l’avocate a éprouvées pour faire parvenir aux demandeurs les preuves au sujet des dépens sont attribuables aux demandeurs mêmes. Quoi qu’il en soit, il déclare que la date limite du 7 avril 2006, prévue pour la signification et le dépôt des documents de réponse des demandeurs au sujet de la taxation du mémoire de frais de la défenderesse, est reportée au 19 mai 2006. La date limite du 28 avril 2006, prévue pour la signification et le dépôt de tout document en réplique de la défenderesse, est reportée au 12 juin 2006.

 

En donnant ces directives, l’officier taxateur note qu’il est possible que les demandeurs n’apprécient pas l’issue du litige, y compris l’adjudication défavorable des dépens, mais c’est un risque qu’entraîne l’introduction d’une action et les demandeurs ne peuvent pas se soustraire à l’obligation de payer les dépens, même s’ils attendent une décision au sujet d’une requête portant sur le statut de leur avocate. De plus, afin de s’assurer que les demandeurs comprennent les paramètres et l’objet de tout document de réponse, l’officier taxateur rappelle, pour la gouverne des demandeurs, que la taxation des dépens n’est pas une occasion pour les demandeurs de faire valoir à nouveau le bien-fondé de leur cause en vue de faire annuler l’adjudication des dépens qui a été prononcée dans le jugement statuant sur leur action. Pour être plus précis, l’officier accorde aux demandeurs une prorogation de délai pour qu’ils préparent des documents de réponse aux articles inscrits dans le mémoire de frais de la défenderesse et non pour qu’ils mandatent un autre avocat ou qu’ils contestent le jugement dans lequel les dépens ont été adjugés. L’officier taxateur n’a pas le pouvoir de traiter une telle contestation. Les demandeurs sont tenus d’agir en conséquence.

 

Finalement, compte tenu des difficultés à faire parvenir des documents aux demandeurs, l’officier taxateur ordonne que les présentes directives soient expédiées par la poste à leur dernière adresse connue, mais qu’une copie soit aussi envoyée à leur avocate actuelle. Si la Cour n’a pas encore rendu de décision au sujet de la demande présentée en vertu de l’article 125 des Règles, ou si cette demande a été rejetée, au moment où l’avocat de la défenderesse doit signifier tout document en réplique, il doit signifier ces documents à l’avocate actuelle des demandeurs. Elle peut alors choisir l’une ou l’autre des deux méthodes de signification prescrites dans les directives de la Cour du 18 avril 2006 pour la signification aux demandeurs du dossier de requête prévu à l’article 125 des Règles et ensuite faire parvenir les documents de réplique à ses clients. Subsidiairement, si la Cour accueille la demande présentée en vertu de l’article 125 des Règles, l’avocat de la défenderesse peut choisir l’une des deux méthodes susmentionnées pour signifier les documents aux demandeurs.

 

 

[3]               Le 30 mai 2006, j’ai donné les directives suivantes :

L’officier taxateur a tenu compte de votre lettre du 19 mai 2006 et des objections que l’avocat de la défenderesse a formulées dans sa lettre du 24 mai 2006, et il donne les directives suivantes :

 

(i) Il ne relève rien dans la lettre qui puisse indiquer que les demandeurs aient fait quoi que ce soit pour aider à faire avancer le processus de la taxation des dépens de la défenderesse. C’est inacceptable.

 

(ii) Un juge de la Cour fédérale a exercé son pouvoir discrétionnaire, prévu au paragraphe 400(1) des Règles, pour accorder les dépens à la défenderesse. L’officier taxateur qui effectue la taxation des dépens conformément aux Règles et au Tarif n’a pas le pouvoir d’annuler ou de changer une telle décision. En fait, le rôle de l’officier taxateur est, essentiellement, d’établir une valeur pécuniaire pour la taxation des dépens en fonction des paramètres des Règles et du Tarif.

 

(iii) Les dépens d’un litige sont composés des frais et des débours. Les frais portent sur le travail de l’avocat du parti ayant eu gain de cause (la défenderesse en l’espèce). Les Règles et le Tarif (voir le TABLEAU sous le Tarif B4(3)) ne permettent des demandes que pour certains articles de frais d’avocat pour chaque étape de la procédure et limitent le montant demandé pour chaque article, peu importe le montant réel qui a été payé à l’avocat pour chaque service. Par exemple, dans son mémoire de frais, la défenderesse réclame 600 $ sous l’article 2 du Tarif pour le mémoire de défense.

 

Les débours sont les sommes payées à d’autres personnes que l’avocat pour du travail ou des services nécessaires à la procédure. Par exemple, dans le mémoire de frais de la défenderesse, 863,60 $ sont réclamés pour des frais payés à la compagnie Gabe’s Reporting Services Ltd. pour l’interrogatoire préalable et la transcription. Contrairement à la disposition pour les frais d’avocat, il n’existe aucune liste limitant les débours. En fait, le Tarif B prévoit que les débours sont en général payable s’ils répondent au critère de la nécessité raisonnable.

 

(iv) Le mémoire des dépens est la liste des demandes pour les articles de frais d’avocat et pour les débours. Il s’agit de la première étape du processus de taxation des dépens.

 

(v) Le processus de taxation des dépens (soit l’objet de la présente lettre) donne une chance aux parties déboutées (les demandeurs en l’espèce) qui doivent payer les dépens de contester la pertinence et/ou le montant de chaque article demandé dans le mémoire des frais. Ils peuvent le faire en traitant chaque article du mémoire de frais tour à tour par voie d’observations écrites, en notant quels articles devraient être accordés, rejetés ou réduits et en ajoutant une justification pour chacune des observations, par exemple : les 600 $ réclamés pour le mémoire de défense devraient être réduits parce qu’il n’a pas été compliqué de préparer cet acte de procédure. Il est difficile d’accepter que les demandeurs ne comprennent pas le pourquoi des montants demandés dans le mémoire des frais, car la plupart des articles réclamés sont semblables ou identiques aux frais qu’ils ont dû engager pour les services de leur propre avocate lors de discussions et d’instructions entre les demandeurs et l’avocate à chaque étape du litige.

 

En ce qui a trait au deuxième paragraphe de la lettre du 19 mai 2006 des demandeurs portant sur des renseignements de la part de Roxanne Haniff-Darwent dont ils ont besoin, y compris des factures, les demandeurs peuvent signer des affidavits individuels dans lesquels ils précisent les renseignements dont ils ont besoin et de quelle façon ces renseignements sont pertinents quant à leur opposition au mémoire des frais. Ils doivent ensuite ajouter à leurs observations écrites des justifications exposant l’analyse qu’ils ont effectuée et démontrant pour quelle raison et de quelle façon lesdits renseignements peuvent affecter la taxation du mémoire des frais de la défenderesse. Ces justifications doivent comprendre les motifs pour lesquels les demandeurs ont retardé la taxation des dépens.

 

(vi) Par conséquent, la date prévue pour la signification et le dépôt des documents de réponse des demandeurs est reportée une dernière fois, au 23 juin 2006. Cette prorogation du délai est péremptoire et les demandeurs sont tenus d’agir en conséquence. La défenderesse à jusqu’au 14 juillet 2006 pour signifier et déposer des documents en réplique.

 

Les demandeurs n’ont déposé aucun document de réponse au sujet du mémoire de frais dans lequel ils analysaient les articles un à un.


 

I.          Taxation

[4]               L’absence d’observations pertinentes de la part des demandeurs, qui auraient pu m’aider à cibler des questions à examiner et à prendre une décision, signifie que le mémoire des frais ne fait l’objet d’aucune opposition. Comme je l'ai déjà exprimé dans des circonstances comparables, à mon avis, les Règles des Cours fédérales n'entrevoient pas la possibilité qu'une partie au litige reçoive un avantage quelconque parce que l’officier taxateur a mis de côté le principe de la neutralité et a pris son parti dans la contestation de certains articles compris dans le mémoire de frais. Cependant, l'officier taxateur ne peut certifier des articles illégitimes, c'est-à-dire, des articles qui ne sont visés ni par l'autorité du jugement ni par le Tarif. J'ai examiné chacun des articles réclamés dans le mémoire de frais ainsi que les documents justificatifs en tenant compte de ces paramètres. Il y a toutefois certains aspects qui justifient mon intervention en fonction des paramètres susmentionnés et en raison de ce que je perçois être une opposition générale au mémoire des dépens.

 

[5]               Comme je l’ai établi dans Balisky c. Canada (Ministre des Ressources naturelles), [2004] A.C.F. no 536 (O.T.), au paragraphe 6, et dans Aird c. Country Park Village Properties (Mainland) Ltd., [2005] A.C.F. no 1426 (O.T.), au paragraphe 10, je n’ai pas le pouvoir de taxer des dépens relativement à une ordonnance muette sur les dépens. Par conséquent, je refuse d’accorder les demandes pour les articles 5 et 6 (préparation et comparution, respectivement) portant sur la requête présentée en vue d’obtenir l’ajournement de la conférence préparatoire jusqu’à ce qu’une décision soit rendue au sujet de la requête de la défenderesse en jugement sommaire. J’estime les débours liés à ces articles au montant de 150 $, que je déduis du montant total.

 

[6]               L’article 4 et le paragraphe 5.1(1) de la Loi sur les Cours fédérales, qui définissent la Cour fédérale, et l'article 2 des Règles des Cours fédérales, qui définit l’officier taxateur, signifient que les termes « Cour » (tel qu’il est utilisé à l’article 24 de la colonne III du Tarif B pour le déplacement de l’avocat pour assister à l’audience) et « officier taxateur » visent des entités distinctes. Comme la Cour n'a pas exercé son pouvoir discrétionnaire quant aux frais réclamés pour le déplacement de l’avocat pour assister à l’interrogatoire préalable, je n'ai pas le pouvoir d'accorder quelque montant que ce soit au titre de l’article 24. Cette restriction ne s'applique pas aux frais de déplacement connexes, pour lesquels je garde compétence en vertu de l'article 405 des Règles. Les frais d’avocat et les débours sont des articles de dépens distincts qui sont traités dans des parties différentes du Tarif, c’est-à-dire que les articles 1 à 28 du TABLEAU du Tarif B portent sur les frais d’avocat et que le Tarif B1 traite des débours. Par conséquent, l’article 24 porte sur les frais d’avocat et non sur les débours. Le pouvoir discrétionnaire réservé à la Cour d'autoriser les officiers taxateurs à octroyer certaines sommes en vertu de l'article 24, ou même de l’article 14b) pour un second avocat, s'exerce indépendamment du pouvoir discrétionnaire qui m'est accordé par l'article 405 des Règles et par le Tarif B1. Il n'existe aucune interdiction implicite qui m'empêcherait, en l'absence d'une directive de la Cour portant sur les honoraires des avocats, d'octroyer les débours liés aux déplacements de l’avocat pour les déplacements vers le lieu de l’audience et au retour de celle-ci, prévus à l'article 24. L’indemnisation pour le temps de déplacement d’un avocat est certainement différente de l’indemnisation pour les frais qu’une personne doit engager pour que son avocat soit présent à l’audience (transport aérien, hôtel et repas). Je rejette donc la demande de l’article 24 du mémoire de frais, mais j’accorde les débours réclamés pour les déplacements (1 922,23 $), qui sont raisonnables à mon avis. À tous les autres égards, le mémoire de frais de la défenderesse est défendable tel que présenté et les sommes demandées sont accordées. Le mémoire de frais de la défenderesse, présenté au montant de 13 964,90 $, est taxé et le montant de 12 494,90 $ est accordé.

 

 

« Charles E. Stinson »

Officier taxateur

 

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Evelyne Swenne, traductrice


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        T-1519-02

 

ANDREW MARK MARSHALL et al.

 

c.

 

SA MAJESTÉ LA REINE

 

 

 

TAXATION DES DÉPENS SUR DOSSIER SANS COMPARUTION DES PARTIES

 

 

MOTIFS DE LA TAXATION DES DÉPENS :                   CHARLES E. STINSON

 

DATE DES MOTIFS :                                                          Le 23 août 2006

 

 

 

OBSERVATIONS ÉCRITES :

 

Andrew Mark Marshall, Lascelles Marshall et Beverly Marshall

 

POUR LEUR PROPRE COMPTE

Rick Garvin

POUR LA DÉFENDERESSE

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

s/o

POUR LES DEMANDEURS

 

John H. Sims, c.r.

Ministère de la Justice

 

POUR LA DÉFENDERESSE

 

 

 

 

 

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