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Date : 20060918

Dossier : T-1570-05

Référence : 2006 CF 1104

Ottawa (Ontario), le 18 septembre 2006

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE DE MONTIGNY

ENTRE :

MOSSADEG NIAKI

demandeur

et

 

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

défendeur

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

[1]               Le demandeur, M. Mossadeg Niaki, cherche à faire annuler une décision de la Commission canadienne des droits de la personne (la Commission) datée du 17 août 2005. Cette dernière a rejeté les deux plaintes que M. Niaki avait déposées contre le ministère de la Défense nationale (le Ministère), pour conduite discriminatoire en matière d’emploi à trois occasions distinctes. Il soutenait que le Ministère avait enfreint les articles 7, 8 et 10, l’alinéa 14(1)c) et l’article 14.1 de la Loi canadienne sur les droits de la personne, L.R.C. 1985, ch. H-6 (la Loi). Les allégations de discrimination fondée sur l’origine raciale, nationale ou ethnique de M. Niaki faisaient suite à une entrevue d’emploi qu’il avait passée le 12 juin 2002, ainsi qu’à deux demandes d’emploi qu’il avait présentées en avril et en septembre 2003, ou vers ces deux dates.

 

[2]               La Commission a rejeté les deux plaintes de M. Niaki après avoir conclu que la preuve ne confirmait pas l’allégation selon laquelle le Ministère avait fait preuve de discrimination contre M. Niaki en rejetant ses diverses demandes d’emploi.

 

[3]               M. Niaki soutient que la décision prise par la Commission de rejeter ses plaintes était erronée en fait et en droit, cette dernière n’ayant pas examiné entièrement la preuve présentée et ayant appliqué les mauvais principes juridiques en rapport avec la notion de discrimination. Il fait valoir aussi que la Commission n’a pas respecté les règles d’équité procédurale en retardant le processus d’enquête, en limitant sa capacité de répondre au rapport de l’enquêtrice de manière complète et en omettant de prendre en considération la totalité de la preuve lorsqu’elle a pris la décision de ne pas renvoyer l’affaire au Tribunal canadien des droits de la personne (le Tribunal).

 

[4]               Après avoir examiné avec soin le dossier et les observations des parties, j’ai conclu que la Commission n’a pas commis d’erreur en rejetant les plaintes du demandeur et en classant les dossiers sur cette affaire. Voici les motifs qui sous-tendent cette conclusion.

 

LE CONTEXTE

[5]               M. Niaki est un Irano-Canadien qui détient un baccalauréat et une maîtrise en génie mécanique de l’Université d’Ottawa. Le 28 février 2002, il a posé sa candidature à un poste d’ingénieur en système de combat maritime auprès du Ministère. Il était l’un des 147 candidats inscrits au concours. Trente-sept candidats ont été présélectionnés et vingt-quatre ont été interviewés, dont M. Niaki.

 

[6]               L’entrevue de M. Niaki a eu lieu le 12 juin 2002 devant un comité de sélection (le Comité) formé de MM. Patrick Or, Greg Walker, Steve Forman et Richard Caron. Le Comité s’est servi, notamment, d’une liste de contrôle comportant une série de questions à poser. Interrogé sur ses compétences linguistiques en français, M. Niaki a, semble-t-il, révélé qu’il était né en Iran et était arrivé au Canada en 1987 en tant que réfugié politique.

 

[7]               À la fin de l’entrevue, on a demandé à M. Niaki de remplir un formulaire autorisant la vérification de ses antécédents, au niveau secret . À ce moment, M. Caron lui a demandé s’il était au courant d’un facteur quelconque qui l’empêcherait d’obtenir une attestation de sécurité, et il s’est enquis des voyages qu’il avait faits dans des pays étrangers, plus précisément au Proche-Orient. Selon M. Niaki, M. Caron a paru préoccupé par ses antécédents de voyage, et il lui a demandé également s’il détenait un passeport autre que canadien en cours de validité. M. Niaki lui a répondu qu’il détenait un passeport iranien, mais que celui-ci était expiré depuis de nombreuses années et qu’il ne serait plus capable d’en obtenir un à cause de son statut de réfugié politique.

 

[8]               Le défendeur a informé l’enquêtrice désignée par la Commission qu’on avait demandé à tous les candidats s’il y avait un élément quelconque qui les empêcherait d’obtenir l’attestation de sécurité de niveau Secret qui serait exigée au moment de leur nomination. Selon le défendeur, la discussion qui a suivi n’était pas prévue et résultait davantage de la réponse que M. Niaki avait donnée aux questions posées que d’un intérêt quelconque de la part des membres du Comité.

 

[9]               Le 11 juillet 2002, M. Niaki a été informé que le Comité était arrivé à la conclusion qu’il ne satisfaisait pas aux exigences du poste. Une semaine plus tard, il s’est présenté à une entrevue postérieure à l’entrevue de sélection devant MM. Or et Caron, et on l’a informé qu’il avait été exclu pour des questions de qualités personnelles. En particulier, le Comité avait jugé que le candidat retenu devait pouvoir travailler de façon autonome, avec peu d’orientation ou de supervision, et conclu que le demandeur ne satisfaisait pas à cette exigence, ce que corroboraient, semble-t-il, des vérifications de références.

 

[10]           M. Niaki a par la suite porté plainte auprès de la Direction générale des recours de la Commission de la fonction publique, le 3 octobre 2002, alléguant que le Comité avait mal évalué ses qualités personnelles car les résultats de ses vérifications de références contredisaient ses appréciations de rendement. En conséquence, une vérification complémentaire a été menée auprès de l’une des références du demandeur, et elle a confirmé semble-t-il les doutes antérieurs du Comité au sujet de la motivation, de l’esprit d’initiative et du jugement de M. Niaki.

 

[11]           M. Niaki a ensuite déposé une plainte relative aux droits de la personne le 11 juin 2003. Une enquêtrice a été affectée au dossier le 20 juin 2003, et une enquête a été entreprise. Pendant toute la durée de cette dernière, M. Niaki a eu la possibilité de présenter des observations, de commenter les observations du défendeur, ainsi que de commenter le rapport de l’enquêtrice. Au cours de l’enquête, l’enquêtrice a interrogé les références de M. Niaki ainsi que les membres du Comité, et elle a aussi passé en revue les documents relatifs au concours ainsi que des renseignements transmis par courriel par la Commission de la fonction publique.

 

[12]           Les faits liés à la seconde plainte sont un peu moins complexes. En avril 2003, le demandeur a posé sa candidature dans le cadre d’un second concours de recrutement d’un ingénieur en système de combat maritime auprès du Ministère. La description de tâches et les exigences applicables à ce second concours étaient à toutes fins pratiques semblables au premier auquel M. Niaki s’était inscrit en février 2002. Le 24 août 2003, M. Niaki a été informé de vive voix qu’on l’avait exclu du concours parce qu’il ne satisfaisait pas à l’un des trois facteurs d’expérience requis. Cela a été suivi d’une notification écrite, le 26 novembre 2003, dans laquelle M. Niaki a été informé qu’il avait été déterminé qu’il ne satisfaisait à aucun des trois critères d’expérience exigés pour le concours.

 

[13]           M. Niaki s’est également inscrit, en septembre 2003, ou vers cette date, à un concours du Ministère pour travailler comme agent d’achat et d’approvisionnement. Les candidats étaient tenus d’évaluer eux-mêmes leur degré d’expérience en rapport avec chaque facteur d’expérience requis, en remplissant par voie électronique un formulaire de demande personnalisé. Comme M. Niaki avait indiqué qu’il ne satisfaisait à aucun des facteurs d’expérience énumérés, sa demande a été rejetée. Il a reçu un avis électronique indiquant que sa demande ne répondait pas aux exigences du Ministère.

 

[14]           Le 8 décembre 2003, M. Niaki a déposé une seconde plainte relative aux droits de la personne, alléguant que le Ministère avait fait preuve de discrimination en rejetant ses demandes d’emploi en guise de représailles contre la première plainte relative aux droits de la personne. La même enquêtrice a été chargée de faire enquête sur la plainte le 8 janvier 2004.

 

[15]           Au cours de cette enquête, l’enquêtrice a interrogé les membres du Comité. Il a été confirmé que ce second comité ignorait que M. Niaki avait déposé une plainte relative aux droits de la personne contre le Ministère.

 

[16]           L’enquêtrice a produit ses rapports sur les deux plaintes le 9 mai 2005, et elle a donné aux deux parties la possibilité de les commenter. M. Niaki a présenté ses commentaires concernant ces deux rapports le 8 juin 2005. Le 17 août suivant, la Commission a informé M. Niaki qu’elle avait rejeté les deux plaintes relatives aux droits de la personne.

 

LA DÉCISION FAISANT L’OBJET DU CONTRÔLE

[17]           Après avoir examiné les rapports de l’enquêtrice et les observations déposées en réponse par les parties, la Commission a rejeté la première plainte parce que la preuve ne confirmait pas que le Comité avait agi de manière discriminatoire. Elle a aussi jugé qu’il ressortait de la preuve que l’on avait conclu que M. Niaki était inapte à occuper le poste d’ingénieur en système de combat maritime Eng-04 pour des raisons non liées à son origine raciale, nationale ou ethnique.

 

[18]           La seconde plainte a été rejetée elle aussi parce que la preuve ne corroborait pas l’argument de M. Niaki à propos des représailles exercées. La Commission a conclu aussi que, d’après la preuve, M. Niaki avait été exclu des deux concours en raison de facteurs non discriminatoires.

[19]           En agissant ainsi, la Commission a simplement entériné les recommandations de l’enquêtrice. Comme les tribunaux ont traité les rapports d’un enquêteur comme s’il s’agissait du raisonnement de la Commission (Syndicat des employés de production du Québec et de l’Acadie c. Canada (Commission canadienne des droits de la personne), [1989] 2 R.C.S. 879, au paragraphe 35; Bell Canada c. S.C.C.E.P. (1999), 167 D.L.R. (4th) 432, [1999] 1 C.F. 113, au paragraphe 30 (C.A.); Société Radio-Canada c. Paul (2001),  274 N.R. 47, 2001 CAF 93, au paragraphe 43 (C.A.)), il est utile de reproduire ici la partie analytique des rapports.

 

[20]           Au sujet de la première plainte, l’enquêtrice a écrit ce qui suit (au paragraphe 32 de son rapport) :

[traduction]

Il ressort de la preuve que certaines des questions liées au processus d’attestation de sécurité et certaines des questions de citoyenneté qui figurent dans la liste de contrôle visent à déterminer les délais futurs et/ou les préoccupations liés au processus d’attestation de sécurité. La preuve indique que les réponses à ces questions permettraient peut-être de déterminer le pays d’origine des candidats, leurs antécédents de voyage ainsi que leur citoyenneté. Le plaignant soutient avoir eu l’impression que M. Caron se préoccupait de ses antécédents de voyage et il a fourni des renseignements sur le motif de sa venue au Canada. Selon la preuve, les candidats étaient tenus de passer avec succès l’entrevue orale pour pouvoir passer à l’étape suivante du concours, ou l’on vérifiait les références du candidat. La preuve indique que le plaignant est passé à l’étape suivante de vérification des références. Au vu de la preuve, les réponses notées par M. Caron et Mme Durocher aux questions posées au sujet de la référence - M. Choueiry - ont été consignées de manière exacte. D’après le résumé que M. Caron a établi, le comité de sélection a exprimé l’avis unanime qu’il manquait au plaignant certaines qualités que le comité jugeait essentielles au poste ENG-04. Les membres du comité de sélection ont exprimé l’avis qu’ils ne s’étaient pas sentis bousculés par M. Caron pour trouver que le plaignant était inapte, qu’ils n’avaient pas trouvé que M. Caron avait interrogé de manière exagérément agressive l’un quelconque des candidats et qu’ils n’avaient pas été témoins d’un comportement qui les aurait amenés à croire que ce dernier avait un préjugé de nature raciale à l’endroit du plaignant.

 

 

[21]           L’analyse de l’enquêtrice au sujet de la seconde plainte est rédigée comme suit (aux paragraphes 35 et 36 du rapport) :

[traduction]

Il ressort de la preuve qu’en 2003, le plaignant a posé sa candidature à deux postes au MDN. Le premier concours avait trait à un poste d’ingénieur en système de combat maritime. La preuve démontre que les membres du comité de sélection, MM. Holmes, Ames et Nelson, ignoraient que le plaignant avait déposé une plainte relative aux droits de la personne contre le MDN au sujet du concours d’ingénieur en système de combat maritime tenu en 2002, et aucune preuve indiquant le contraire n’a été fournie. Selon la preuve, le plaignant n’a pas satisfait aux facteurs d’expérience requis lorsque ces derniers ont été évalués par rapport aux renseignements qu’il avait fournis dans son curriculum vitæ ainsi que dans la lettre d’accompagnement. Il ressort également de la preuve que l’avis de poste et l’énoncé de qualités indiquaient que les candidats devaient fournir des exemples précis prouvant qu’ils possédaient l’expérience requise.

 

En ce qui concerne le second concours, relatif au poste d’agent d’achat et d’approvisionnement, il ressort de la preuve que l’on a eu recours au Système de ressourcement de la fonction publique pour présélectionner les candidats externes. Or, la preuve indique que le plaignant faisait partie de cette catégorie. À l’étape d’auto-évaluation du concours, le plaignant a lui-même indiqué qu’il n’avait aucune expérience dans six secteurs. Au vu de la preuve, les candidats devaient indiquer un niveau minimal d’expérience pour chaque question, sans quoi ils étaient automatiquement exclus. La preuve démontre que le plaignant a été exclu à cause de son auto-évaluation.

 

 

LES QUESTIONS EN LITIGE

[22]           La présente demande de contrôle judiciaire soulève les questions suivantes :

1.   Quelle est la norme de contrôle applicable?

2.   La Commission a-t-elle commis une erreur de fait ou de droit en décidant de ne pas renvoyer les plaintes au Tribunal?

3.   L’appelant a-t-il été victime d’un déni d’équité procédurale?

 

 

LES DISPOSITIONS LÉGISLATIVES APPLICABLES

 

[23]           Un certain nombre de dispositions de la Loi, précitée, s’appliquent en l’espèce. Pour plus de commodité, ces dispositions sont jointes aux présents motifs en tant qu’annexe « A ».

 

ANALYSE

[24]           Dans ses observations écrites, l’avocate du défendeur s’est opposée à un certain nombre de documents que M. Niaki avait déposés en tant que pièces jointes à son affidavit. Ces documents avaient été soit soumis à l’enquêtrice mais non transmis à la Commission, soit non soumis à l’enquêtrice ou à la Commission. Le défendeur soutient qu’il est bien établi que des documents dont la Commission n’a pas été saisie ne peuvent pas être présentés devant la Cour dans le cadre d’une demande de contrôle judiciaire, à moins d’allégations précises de manquement à la justice naturelle.

 

[25]           L’avocat du demandeur n’a pas traité de cette question dans ses observations écrites ou orales, mais je crois que la position du défendeur est inattaquable. La Cour a confirmé tout récemment que lorsqu’une partie sollicite le contrôle d’une décision de ne pas renvoyer une affaire au Tribunal, la seule preuve qu’un juge est tenu d’examiner est le dossier que la Commission avait en main lorsqu’elle a pris la décision faisant l’objet du contrôle. Comme l’a écrit le juge J.D. Denis Pelletier dans l’arrêt Hutchinson c. Canada (Ministre de l’Environnement), 2003 CAF 133, [2003]4 C.F. 580, [2003] A.C.F. no 439 (QL), au paragraphe 49, le « droit de connaître la preuve à réfuter et d’y répondre se rapporte à des éléments qui seront mis à la disposition du décideur plutôt qu’à des éléments qui passent entre les mains d’un enquêteur dans le cadre de l’enquête ».

 

[26]           La seule exception à cette règle générale, qui vaut pour toutes les demandes de contrôle judiciaire, semble être le cas dans lequel le demandeur soulève une question d’équité procédurale ou dans lequel l’intégralité du rapport de l’enquêteur est en jeu. Comme l’a écrit le juge Edgar Sexton dans l’arrêt S.R.-C. c. Paul, précité, au paragraphe 69 :

Il semble acquis que les observations que les parties formuleront devant la Commission lorsque l’affaire sera renvoyée à cette dernière porteront sur la question de la neutralité et de l’intégralité du rapport. Dans un cas comme celui-ci, dans lequel une partie allègue que le rapport qui a été soumis à la Commission était partial ou incomplet, les parties doivent avoir la possibilité de présenter des éléments de preuve sur cette question et de formuler des observations sur ces éléments de preuve. En conséquence, lorsqu’elles formuleront leurs observations, les parties doivent avoir le loisir de citer le résumé des entrevues des témoins rédigées par l’enquêteur.

 

 

[27]           En l’espèce, les documents auxquels s’oppose le défendeur ne sont pas liés aux questions d’équité procédurale que soulève le demandeur. Par ailleurs, les documents additionnels que celui-ci a produits n’étayent pas une allégation de manque de rigueur des rapports de l’enquêtrice. Il semble plutôt que les documents soient conçus pour réitérer les plaintes relatives aux droits de la personne du demandeur sur le fond. Je crois qu’au moment de contrôler la décision de la Commission de ne pas renvoyer une plainte au Tribunal, la Cour ne devrait normalement examiner que le dossier que la Commission avait en main lorsqu’elle a rendu la décision faisant l’objet du contrôle. En fait, nous devrions tenir compte des commentaires qu’a faits le juge Barry Strayer dans l’arrêt S.R.-C. c. Paul, précité, au paragraphe 78 :

Il n’y a à mon sens rien qui nuise autant au règlement informel, efficace et rapide des plaintes par ceux qui s’estiment victimes de violations des droits de la personne, au moyen notamment et si cela est nécessaire, d’une audition impartiale par un tribunal compétent dans un délai raisonnable après les événements en question, que le fait de soumettre l’examen préalable sur lequel la Commission fait reposer sa procédure à une analyse judiciaire minutieuse avant que les parties aient eu même l’occasion de faire valoir leur point de vue devant un tribunal administratif. À mon humble avis, la jurisprudence la plus récente de notre Cour n’exige pas un examen aussi méticuleux de l’enquête. Je conviens toutefois parfaitement que si l’affaire est effectivement portée devant un tribunal administratif, la décision de celui-ci est susceptible d’un contrôle judiciaire.

 

 

[28]           En conséquence, je suis d’avis que l’analyse qui suit devrait reposer sur les documents dont la Commission était saisie au moment où elle a rendu sa décision. Cela inclut le certificat visé à la règle 318, que la Commission a déposé, les rapports de l’enquêtrice, les sommaires des plaintes, les formulaires de plainte, les réponses du défendeur et du plaignant au rapport de l’enquêtrice sur la première plainte, de même que les chronologies des deux plaintes. Quoi qu’il en soit, j’ajouterais que les documents additionnels que l’avocat du demandeur a déposés n’ont pas été utilisés dans une large mesure à l’audience et n’ajoutent pas grand-chose à son argumentation.

 

a) La norme de contrôle

[29]           Les deux parties conviennent que la norme de contrôle qu’il convient d’appliquer lorsque la Commission rejette une plainte est celle de la décision raisonnable, à juste titre d’ailleurs. La Cour suprême du Canada, la Cour d’appel fédérale et cette Cour ont toutes trois confirmé, dans le passé que la Commission fait office d’organisme administratif et d’examen préalable lorsqu’elle décide s’il convient de renvoyer une plainte au Tribunal pour enquête en vertu des articles 44 et 49 de la Loi. La Commission ne se prononce pas à ce stade sur le bien-fondé d’une plainte, mais décide si, eu égard à la totalité des circonstances, elle est convaincue qu’il est justifié de faire enquête sur la plainte. Cette décision est de nature administrative, et donc discrétionnaire (voir Syndicat, précité; Cooper c. Canada (Commission des droits de la personne), [1996] 3 R.C.S. 854, à la page 891).

 

[30]           En outre, la jurisprudence indique que la Loi confère à la Commission une latitude considérable lorsqu’elle exécute sa fonction d’examen préalable. Le législateur n’avait pas l’intention que les tribunaux interviennent dans les décisions de la Commission, sauf dans les cas les plus graves. À moins d’un manquement à l’équité procédurale ou d’une erreur de droit, la Cour ne devrait intervenir que s’il est établi que la décision de la Commission est déraisonnable. Comme l’a écrit le juge Robert Décary dans l’arrêt Bell Canada c. S.C.C.E.P., précité, au paragraphe 38 :

La Loi confère à la Commission un degré remarquable de latitude dans l’exécution de sa fonction d’examen préalable au moment de la réception d’un rapport d’enquête. Les paragraphes 40(2) et 40(4), et les articles 41 et 44 regorgent d’expressions comme « à son avis », « devrait », « normalement ouverts », « pourrait avantageusement être instruite », « des circonstances », « estime indiqué dans les circonstances », qui ne laissent aucun doute quant à l’intention du législateur. Les motifs de renvoi à une autre autorité (paragraphe 44(2)), de renvoi au président du Comité du Tribunal des droits de la personne (alinéa 44(3)a)) ou, carrément, de rejet (alinéa 44(3)b)) comportent, à divers degrés, des questions de fait, de droit et d’opinion (voir Latif c. Commission canadienne des droits de la personne, [1980] 1 C.F. 687, à la page 698 (C.A.F.), le juge Le Dain), mais on peut dire sans risque de se tromper qu’en règle générale, le législateur ne voulait pas que les cours interviennent à la légère dans les décisions prises par la Commission à cette étape.

 

 

[31]           Il est indubitable que des décisions différentes appellent des degrés de retenue différents. Par principe, un tribunal qui procède au contrôle d’une décision rendue en vertu du paragraphe 44(3) de la Loi doit appliquer à nouveau l’approche dite pragmatique et fonctionnelle, plutôt que de s’appuyer sur des précédents. Cela dit, un certain nombre de mes collègues, de même que la Cour d’appel fédérale, ont procédé récemment à cet exercice et il est généralement convenu que dans une affaire comme la présente la norme générale de contrôle à appliquer est celle de la décision raisonnable. J’ai moi-même passé en revue cette jurisprudence et appliqué l’analyse pragmatique et fonctionnelle dans l’affaire Bastide c. Canada (Procureur général), 2005 CF 1410, et je ne vois pas pourquoi je devrais m’écarter de ces motifs en l’espèce.

 

[32]           Je m’empresse toutefois de dire que cette norme ne s’applique manifestement pas lorsque la décision contestée que la Commission a rendue soulève une question d’équité procédurale. Comme l’a fait remarquer le juge Ian Binnie dans l’arrêt S.C.F.P. c. Ontario (Ministre du Travail), [2003] 1 R.C.S. 539, au paragraphe 102 : « [l’]équité procédurale concerne la manière dont le ministre est parvenu à sa décision, tandis que la norme de contrôle s’applique au résultat de ses délibérations ». Comme un manquement à l’équité procédurale ou à la justice naturelle ne peut donner lieu à un degré quelconque de retenue judiciaire, il frappera habituellement de nullité la décision faisant l’objet du contrôle. C’est donc à cette approche que je recourrai pour examiner les arguments du demandeur alléguant un manquement à l’équité procédurale.

 

[33]           Il y a une autre mise en garde à faire avant d’analyser les observations de M. Niaki. Dans ses observations tant orales qu’écrites, l’avocat de M. Niaki a fait valoir qu’en décidant de rejeter les plaintes de M. Niaki, la Commission s’est fondée sur les mauvais principes juridiques. Plus précisément, ce dernier soutient que la Commission a appliqué le mauvais fardeau de preuve pour rejeter les plaintes. Plutôt que de décider s’il existe « une justification raisonnable pour passer à l’étape suivante » (Syndicat, précité, au paragraphe 28), la Commission se serait censément demandée si l’on avait établi une preuve prima facie, ce qui est une norme nettement plus exigeante. Il s’agit manifestement là d’une question mixte de fait et de droit, qui appelle un degré appréciable de retenue. La situation aurait peut-être été différente si la Commission avait eu à décider quel degré de fardeau de preuve appliquer avant de se prononcer sur la plainte. Tout comme dans l’arrêt Sketchley c. Canada (Procureur général), 2005 CAF 404, 263 D.L.R. (4th) 113, où la Commission avait à décider si une politique du Conseil du Trésor était discriminatoire avant d’évaluer une plainte, il aurait alors fallu que cette dernière se prononce sur une question de droit fondamentale avant de décider de rejeter la plainte. Dans la mesure où une telle décision aurait eu valeur de précédent, sa décision aurait été soumise à une norme de contrôle exigeant moins de retenue.

 

b) La décision qu’a prise la Commission de rejeter les plaintes était-elle raisonnable?

[34]           M. Niaki fait état de trois erreurs précises qui auraient été commises dans le rapport de l’enquêtrice. Premièrement, cette dernière aurait omis de signaler que les questions qu’on lui avait posées au sujet de la sécurité ne figuraient pas dans la liste de contrôle. La seule question relative à la sécurité qui figurait dans cette liste est la suivante : [traduction] « Êtes-vous au courant d’un facteur quelconque qui vous empêcherait d’obtenir une attestation de sécurité de niveau “SECRET”? ». M. Niaki soutient que l’enquêtrice a omis de traiter convenablement du fait que les questions de M. Caron étaient liées à son statut de citoyen iranien. Il soutient également que les questions portant sur ses antécédents de voyage et ses passeports ne figuraient pas dans la liste de contrôle et n’ont pas été posées aux autres candidats. Selon lui, cela dénote clairement qu’il était traité de façon différente à cause de son origine ethnique et nationale.

 

[35]           Deuxièmement, M. Niaki prétend que l’enquêtrice a omis d’enquêter sur des contradictions entre les réponses données par l’un des arbitres et le dossier de M. Caron concernant ces réponses. Il soutient aussi que l’enquêtrice aurait dû examiner d’autres contradictions entre les réponses originales de l’un des arbitres et les réponses données au moment de la deuxième vérification des références. En ce qui concerne cette dernière, il allègue que l’enquêtrice n’a pas reconnu qu’il s’agissait du superviseur de M. Niaki et non d’un ancien collègue, le mettant ainsi dans une situation plus désavantageuse puisqu’il s’agissait d’une référence positive. En faisant abstraction des commentaires de cette seconde référence, l’enquêtrice, soutient M. Niaki, n’a pas formé un tableau complet de la discrimination dont il était victime.

 

[36]           Enfin, M. Niaki affirme que l’enquêtrice a omis d’analyser la question des représailles en rapport avec la façon dont il a été interviewé. En examinant sa seconde plainte, il estime que l’enquêtrice n’a pas tenu compte de l’élément « représailles » dans son analyse et a examiné la preuve de manière non contextuelle.

 

[37]           Pour évaluer la décision de la Commission et, indirectement, les rapports de l’enquêtrice sur lesquels repose cette décision, il faut garder à l’esprit que le rôle de la Cour n’est pas de décider si elle serait arrivée à la même conclusion, mais si celle-ci est étayée par des motifs convaincants. Comme l’a expliqué le juge Frank Iacobucci dans l’arrêt Barreau du Nouveau-Brunswick c. Ryan, [2003] 1 R.C.S. 247, au paragraphe 55 :

La décision n’est déraisonnable que si aucun mode d’analyse, dans les motifs avancés, ne pouvait raisonnablement amener le tribunal, au vu de la preuve, à conclure comme il l’a fait.  Si l’un quelconque des motifs pouvant étayer la décision est capable de résister à un examen assez poussé, alors la décision n’est pas déraisonnable et la cour  de révision ne doit pas intervenir (Southam, par. 56).  Cela signifie qu’une décision peut satisfaire à la norme du raisonnable si elle est fondée sur une explication défendable, même si elle n’est pas convaincante aux yeux de la cour de révision (voir Southam, par. 79).

 

 

[38]           Après avoir soigneusement examiné les rapports de l’enquêtrice et les observations des parties, il m’est impossible de conclure que les erreurs alléguées justifient que la Cour intervienne. L’enquêtrice a effectué convenablement l’enquête, a interrogé toutes les personnes pertinentes, a passé en revue les documents applicables et a tenu compte de toutes les préoccupations du demandeur. Rien ne prouve que l’enquête n’a pas été rigoureuse et neutre. En fait, le sommaire des allégations des parties, et en particulier de celles du demandeur, reproduit l’essentiel des observations qu’il a soumises à la Cour à propos des pratiques discriminatoires présumées du Ministère, et montre que l’enquêtrice a été clairement attentive et sensible aux motifs de plainte du demandeur.

 

[39]           La plupart des erreurs alléguées ont trait à la façon discrétionnaire dont l’enquêtrice a évalué les faits lors de son enquête. Essentiellement, le demandeur n’est pas d’accord avec la façon dont l’enquêtrice a posé ses questions et a évalué la preuve révélée dans le cadre du processus d’enquête. Cet aspect du processus d’enquête a manifestement droit au degré le plus élevé de retenue.

 

[40]           En fait, les parties ont eu toutes les possibilités voulues de formuler des observations en réponse au rapport de l’enquêtrice et de porter quelque omission que ce soit à son attention. Dans ces conditions, la Cour ne devrait intervenir que s’il est démontré que l’exercice de ce droit ne pourrait surmonter l’obstacle que constitue le préjudice causé par l’enquête lacunaire. Les commentaires du juge Marc Nadon dans la décision Slattery c. Canada (Commission des droits de la personne), [1994] 2 C.F. 574, [1994] A.C.F. no 181 (1re inst.) (QL), à la page 605, sont particulièrement pertinents en l’espèce :

Le fait que l'enquêteuse n'ait pas interrogé chacun des témoins recommandés par la requérante et le fait que la conclusion tirée par l'enquêteuse ne mentionne pas chacun des prétendus incidents de discrimination n'ont pas non plus de conséquence absolue. Cela est encore plus vrai lorsque la requérante a l'occasion de combler les lacunes laissées par l'enquêteuse en présentant subséquemment ses propres observations. En l'absence de règlements qui lui donnent des lignes directrices, l'enquêteuse, tout comme la CCDP, doit être maître de sa propre procédure, et le contrôle judiciaire d'une enquête prétendument déficiente ne devrait être justifié que lorsque l'enquête est manifestement déficiente.

 

 

[41]           En conséquence, je ne puis trouver aucun motif pour conclure que la Commission a agi de manière déraisonnable en décidant de rejeter les plaintes de M. Niaki.

 

c) L’équité procédurale

[42]           M. Niaki soutient de plus que la Commission a manqué à l’équité procédurale à son égard en retardant le processus d’enquête, en limitant sa capacité de répondre de manière complète au rapport de l’enquêtrice et en négligeant de soumettre la totalité de la preuve à la Commission au moment où celle-ci a décidé de ne pas renvoyer l’affaire au Tribunal. En ce qui concerne les limites imposées à sa réponse, M. Niaki estime qu’il est injuste de lui avoir imposé un maximum de dix pages d’observations, sans annexe ou renseignement liés à des discussions de règlement confidentielles. Il croit aussi que la Commission a été amenée à prendre une décision manifestement déraisonnable en n’étant pas en mesure d’examiner directement la preuve que lui-même et le Ministère avaient fournie à l’enquêtrice.

 

[43]           Rien n’est prévu dans la loi au sujet de la longueur des observations à soumettre à la Commission. Pour démontrer que la limite constituait un manquement aux garanties d’équité procédurale, le demandeur doit établir que cette limite lui a causé un certain préjudice. Il ne l’a pas fait. Il a eu l’occasion de faire des observations au sujet de sa plainte, ainsi que d’examiner et de commenter la réponse du défendeur à sa plainte, et il l’a fait. Il n’y a pas la moindre preuve qu’il lui a été impossible de présenter des observations appropriées, et M. Niaki n’a pas fait état de renseignements nouveaux ou pertinents qu’on l’aurait empêché de porter à l’attention de la Commission. En l’absence d’un tel préjudice, le simple fait de limiter le nombre de pages n’équivaut pas à un déni d’équité procédurale.

 

[44]           S’agissant du temps pris pour faire enquête sur sa plainte, il a été décrété à maintes reprises qu’un délai ne suffit pas à lui seul à entraîner l’annulation d’une décision de la Commission. Pour obtenir gain de cause en rapport avec une allégation de délai, il faut que le demandeur établisse deux choses : qu’il y a eu un délai excessif, et que le demandeur, à cause de ce délai, a subi un préjudice véritable. En l’espèce, le processus tout entier (depuis le dépôt de la première plainte jusqu’à la communication du rapport d’enquête) a duré environ 23 mois. Il s’agit certes d’un long délai, sans nul doute causé, en partie du moins, par les deux changements d’enquêteur, mais je ne suis pas convaincu qu’il soit excessif. Quoi qu’il en soit, M. Niaki n’a pas présenté de preuve que ce délai lui avait causé un préjudice véritable. Je suis disposé à accepter que le demandeur a subi un certain stress au cours de cette période, mais pas à conclure que le délai était excessif et qu’il a causé un préjudice véritable dont l’ampleur heurterait « le sens de la justice et de la décence de la société », comme l’écrit la Cour suprême dans l’arrêt Blencoe c. Colombie-Britannique (Human Rights Commission), [2000] 2 R.C.S. 307, au paragraphe 132.

 

[45]           Quant au présumé déni d’équité procédurale imputable au fait que la Commission n’a pas examiné le dossier d’enquête en entier, il s’agit-là d’une thèse qui n’est tout simplement pas fondée. La seule exigence pertinente figure à l’article 44 de la Loi qui prévoit que la Commission doit recevoir le rapport d’enquête une fois que ce dernier est terminé, avant de rendre sa décision. Rien n’exige que la Commission examine le dossier complet de l’enquête, comme l’ont décidé antérieurement cette Cour ainsi que la Cour d’appel : Canada (Commission des droits de la personne) c. Pathak, [1995] 2 C.F. 455, [1995] A.C.F. no 555 (C.A.) (QL), aux paragraphes 23-24; S.R.-C. c. Paul, précité, au paragraphe 75.

 

[46]           En fait, je suis d’accord avec le défendeur que les seules exigences procédurales qui s’appliquent à l’examen d’une plainte déposée auprès de la Commission ont été énoncées dans un certain nombre de décisions que la Cour d’appel fédérale a résumées dans l’arrêt S.R.-C. c. Paul, précité, au paragraphe 43 [renvois omis] :

Les tribunaux, appliquant le principe de l’équité procédurale, ont imposé d’autres obligations que la Commission doit respecter avant d’agir en vertu du paragraphe 44(3). La Commission doit informer les parties « de la substance de la preuve réunie par l'enquêteur et produite devant la Commission ». Pour ce faire, la Commission doit divulguer le rapport d’enquête aux parties. La Commission est également tenue d’accorder aux parties la possibilité de formuler toutes les observations utiles en réponse au rapport et de tenir compte de ces observations pour rendre sa décision. Elle n’est pas tenue de motiver sa décision. Les tribunaux ont statué que les motifs de la Commission sont ceux qui sont exposés dans le rapport d'enquête lui-même.

 

 

[47]           Il ressort du dossier que la Commission a parfaitement satisfait à ces exigences. M. Niaki a eu droit à une divulgation complète du fond de la preuve que l’enquêtrice avait obtenue. Il a eu l’occasion de formuler des observations pertinentes en réponse, et la Commission en a tenu compte au moment de rendre sa décision. Rien ne permet donc de conclure que M. Niaki a subi un déni d’équité procédurale, et il convient de maintenir la décision de la Commission.

 

[48]           Au vu de l’analyse qui précède, la présente demande de contrôle judiciaire est rejetée, avec dépens en faveur du défendeur.

 

 


JUGEMENT

            LA COUR ORDONNE :

La demande de contrôle judiciaire est rejetée, avec dépens en faveur du défendeur.

 

« Yves de Montigny »

Juge

 

Traduction certifiée conforme

Alphonse Morissette, LL.L.


 

ANNEXE « A »

 

2. La présente loi a pour objet de compléter la législation canadienne en donnant effet, dans le champ de compétence du Parlement du Canada, au principe suivant : le droit de tous les individus, dans la mesure compatible avec leurs devoirs et obligations au sein de la société, à l’égalité des chances d’épanouissement et à la prise de mesures visant à la satisfaction de leurs besoins, indépendamment des considérations fondées sur la race, l’origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, l’âge, le sexe, l’orientation sexuelle, l’état matrimonial, la situation de famille, la déficience ou l’état de personne graciée.

 

 

3. (1) Pour l’application de la présente loi, les motifs de distinction illicite sont ceux qui sont fondés sur la race, l’origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, l’âge, le sexe, l’orientation sexuelle, l’état matrimonial, la situation de famille, l’état de personne graciée ou la déficience.

 

2) Une distinction fondée sur la grossesse ou l’accouchement est réputée être fondée sur le sexe.

 

***

 

7. Constitue un acte discriminatoire, s’il est fondé sur un motif de distinction illicite, le fait, par des moyens directs ou indirects :

a) de refuser d’employer ou de continuer d’employer un individu;

b) de le défavoriser en cours d’emploi.

 

 

 

***

 

8. Constitue un acte discriminatoire, quand y sont exprimées ou suggérées des restrictions, conditions ou préférences fondées sur un motif de distinction illicite :

a) l’utilisation ou la diffusion d’un formulaire de demande d’emploi;

b) la publication d’une annonce ou la tenue d’une enquête, oralement ou par écrit, au sujet d’un emploi présent ou éventuel.

 

 

 

 

 

***

 

10. Constitue un acte discriminatoire, s’il est fondé sur un motif de distinction illicite et s’il est susceptible d’annihiler les chances d’emploi ou d’avancement d’un individu ou d’une catégorie d’individus, le fait, pour l’employeur, l’association patronale ou l’organisation syndicale :

a) de fixer ou d’appliquer des lignes de conduite;

b) de conclure des ententes touchant le recrutement, les mises en rapport, l’engagement, les promotions, la formation, l’apprentissage, les mutations ou tout autre aspect d’un emploi présent ou éventuel.

 

 

 

 

***

 

14. (1) Constitue un acte discriminatoire, s’il est fondé sur un motif de distinction illicite, le fait de harceler un individu :

a) lors de la fourniture de biens, de services, d’installations ou de moyens d’hébergement destinés au public;

b) lors de la fourniture de locaux commerciaux ou de logements;

c) en matière d’emploi

 

 

 

 

(2) Pour l’application du paragraphe (1) et sans qu’en soit limitée la portée générale, le harcèlement sexuel est réputé être un harcèlement fondé sur un motif de distinction illicite.

 

14.1 Constitue un acte discriminatoire le fait, pour la personne visée par une plainte déposée au titre de la partie III, ou pour celle qui agit en son nom, d’exercer ou de menacer d’exercer des représailles contre le plaignant ou la victime présumée.

 

***

 

40. (1) Sous réserve des paragraphes (5) et (7), un individu ou un groupe d’individus ayant des motifs raisonnables de croire qu’une personne a commis un acte discriminatoire peut déposer une plainte devant la Commission en la forme acceptable pour cette dernière.

 

(2) La Commission peut assujettir la recevabilité d’une plainte au consentement préalable de l’individu présenté comme la victime de l’acte discriminatoire.

 

 

 

 

(3) La Commission peut prendre l’initiative de la plainte dans les cas où elle a des motifs raisonnables de croire qu’une personne a commis un acte discriminatoire.

 

 

3.1) La Commission ne peut prendre l’initiative d’une plainte qui serait fondée sur des renseignements qu’elle aurait obtenus dans le cadre de l’application de la Loi sur l’équité en matière d’emploi.

 

(4) En cas de dépôt, conjoint ou distinct, par plusieurs individus ou groupes de plaintes dénonçant la perpétration par une personne donnée d’actes discriminatoires ou d’une série d’actes discriminatoires de même nature, la Commission peut, pour l’application de la présente partie, joindre celles qui, à son avis, soulèvent pour l’essentiel les mêmes questions de fait et de droit et demander au président du Tribunal d’ordonner, conformément à l’article 49, une instruction commune.

 

 

(5) Pour l’application de la présente partie, la Commission n’est validement saisie d’une plainte que si l’acte discriminatoire :

 

 

a) a eu lieu au Canada alors que la victime y était légalement présente ou qu’elle avait le droit d’y revenir;

 

 

b) a eu lieu au Canada sans qu’il soit possible d’en identifier la victime, mais tombe sous le coup des articles 5, 8, 10, 12 ou 13;

 

c) a eu lieu à l’étranger alors que la victime était un citoyen canadien ou qu’elle avait été légalement admise au Canada à titre de résident permanent.

 

 

(6) En cas de doute sur la situation d’un individu par rapport à une plainte dans les cas prévus au paragraphe (5), la Commission renvoie la question au ministre compétent et elle ne peut procéder à l’instruction de la plainte que si la question est tranchée en faveur du plaignant.

 

(7) La Commission ne peut connaître, au titre du paragraphe (1), d’une plainte qui porte sur les conditions et les modalités d’une caisse ou d’un régime de pensions, lorsque le redressement demandé aurait pour effet de priver un participant de droits acquis avant le 1er mars 1978 ou de prestations de pension ou autres accumulées jusqu’à cette date, notamment :

a) de droits ou de prestations attachés à un âge déterminé de retraite;

b) de prestations de réversion.

 

 

 

***

 

43. (1) La Commission peut charger une personne, appelée, dans la présente loi, « l’enquêteur », d’enquêter sur une plainte.

 

(2) L’enquêteur doit respecter la procédure d’enquête prévue aux règlements pris en vertu du paragraphe (4).

 

 

(2.1) Sous réserve des restrictions que le gouverneur en conseil peut imposer dans l’intérêt de la défense nationale ou de la sécurité, l’enquêteur muni du mandat visé au paragraphe (2.2) peut, à toute heure convenable, pénétrer dans tous locaux et y perquisitionner, pour y procéder aux investigations justifiées par l’enquête.

 

 

(2.2) Sur demande ex parte, un juge de la Cour fédérale peut, s’il est convaincu, sur la foi d’une dénonciation sous serment, qu’il y a des motifs raisonnables de croire à la présence dans des locaux d’éléments de preuve utiles à l’enquête, signer un mandat autorisant, sous réserve des conditions éventuellement fixées, l’enquêteur qui y est nommé à perquisitionner dans ces locaux.

 

 

 

(2.3) L’enquêteur ne peut recourir à la force dans l’exécution du mandat que si celui-ci en autorise expressément l’usage et que si lui-même est accompagné d’un agent de la paix.

 

 

(2.4) L’enquêteur peut obliger toute personne se trouvant sur les lieux visés au présent article à communiquer, pour examen, ou reproduction totale ou partielle, les livres et documents qui contiennent des renseignements utiles à l’enquête.

 

 

 

(3) Il est interdit d’entraver l’action de l’enquêteur.

(4) Le gouverneur en conseil peut fixer, par règlement :

a) la procédure à suivre par les enquêteurs;

b) les modalités d’enquête sur les plaintes dont ils sont saisis au titre de la présente partie;

c) les restrictions nécessaires à l’application du paragraphe (2.1).

 

 

 

44. (1) L’enquêteur présente son rapport à la Commission le plus tôt possible après la fin de l’enquête.

 

 

(2) La Commission renvoie le plaignant à l’autorité compétente dans les cas où, sur réception du rapport, elle est convaincue, selon le cas :

a) que le plaignant devrait épuiser les recours internes ou les procédures d’appel ou de règlement des griefs qui lui sont normalement ouverts;

b) que la plainte pourrait avantageusement être instruite, dans un premier temps ou à toutes les étapes, selon des procédures prévues par une autre loi fédérale.

 

 

(3) Sur réception du rapport d’enquête prévu au paragraphe (1), la Commission :

 

a) peut demander au président du Tribunal de désigner, en application de l’article 49, un membre pour instruire la plainte visée par le rapport, si elle est convaincue :

 

 

  (i) d’une part, que, compte tenu des circonstances relatives à la plainte, l’examen de celle-ci est justifié,

 

  (ii) d’autre part, qu’il n’y a pas lieu de renvoyer la plainte en application du paragraphe (2) ni de la rejeter aux termes des alinéas 41c) à e);

 

b) rejette la plainte, si elle est convaincue :

 

 

  (i) soit que, compte tenu des circonstances relatives à la plainte, l’examen de celle-ci n’est pas justifié,

 

  (ii) soit que la plainte doit être rejetée pour l’un des motifs énoncés aux alinéas 41c) à e).

 

(4) Après réception du rapport, la Commission :

 

a) informe par écrit les parties à la plainte de la décision qu’elle a prise en vertu des paragraphes (2) ou (3);

 

b) peut informer toute autre personne, de la manière qu’elle juge indiquée, de la décision qu’elle a prise en vertu des paragraphes (2) ou (3);

2. The purpose of this Act is to extend the laws in Canada to give effect, within the purview of matters coming within the legislative authority of Parliament, to the principle that all individuals should have an opportunity equal with other individuals to make for themselves the lives that they are able and wish to have and to have their needs accommodated, consistent with their duties and obligations as members of society, without being hindered in or prevented from doing so by discriminatory practices based on race, national or ethnic origin, colour, religion, age, sex, sexual orientation, marital status, family status, disability or conviction for an offence for which a pardon has been granted.

 

3. (1) For all purposes of this Act, the prohibited grounds of discrimination are race, national or ethnic origin, colour, religion, age, sex, sexual orientation, marital status, family status, disability and conviction for which a pardon has been granted.

 

 

(2) Where the ground of discrimination is pregnancy or child-birth, the discrimination shall be deemed to be on the ground of sex.

 

***

 

7. It is a discriminatory practice, directly or indirectly,

 

(a) to refuse to employ or continue to employ any individual, or

(b) in the course of employment, to differentiate adversely in relation to an employee,

on a prohibited ground of discrimination.

***

 

8. It is a discriminatory practice

 

 

 

(a) to use or circulate any form of application for employment, or

(b) in connection with employment or prospective employment, to publish any advertisement or to make any written or oral inquiry

 

that expresses or implies any limitation, specification or preference based on a prohibited ground of discrimination.

 

***

 

10. It is a discriminatory practice for an employer, employee organization or employer organization

 

 

 

 

(a) to establish or pursue a policy or practice, or

(b) to enter into an agreement affecting recruitment, referral, hiring, promotion, training, apprenticeship, transfer or any other matter relating to employment or prospective employment,

that deprives or tends to deprive an individual or class of individuals of any employment opportunities on a prohibited ground of discrimination.

 

***

 

14. (1) It is a discriminatory practice,

 

 

(a) in the provision of goods, services, facilities or accommodation customarily available to the general public,

(b) in the provision of commercial premises or residential accommodation, or

(c) in matters related to employment, ro harass an individual on a prohibited ground of discrimination.

 

(2) Without limiting the generality of subsection (1), sexual harassment shall, for the purposes of that subsection, be deemed to be harassment on a prohibited ground of discrimination.

 

14.1 It is a discriminatory practice for a person against whom a complaint has been filed under Part III, or any person acting on their behalf, to retaliate or threaten retaliation against the individual who filed the complaint or the alleged victim.

 

***

 

40. (1) Subject to subsections (5) and (7), any individual or group of individuals having reasonable grounds for believing that a person is engaging or has engaged in a discriminatory practice may file with the Commission a complaint in a form acceptable to the Commission.

 

(2) If a complaint is made by someone other than the individual who is alleged to be the victim of the discriminatory practice to which the complaint relates, the Commission may refuse to deal with the complaint unless the alleged victim consents thereto.

 

(3) Where the Commission has reasonable grounds for believing that a person is engaging or has engaged in a discriminatory practice, the Commission may initiate a complaint.

 

(3.1) No complaint may be initiated under subsection (3) as a result of information obtained by the Commission in the course of the administration of the Employment Equity Act.

 

(4) If complaints are filed jointly or separately by more than one individual or group alleging that a particular person is engaging or has engaged in a discriminatory practice or a series of similar discriminatory practices and the Commission is satisfied that the complaints involve substantially the same issues of fact and law, it may deal with the complaints together under this Part and may request the Chairperson of the Tribunal to institute a single inquiry into the complaints under section 49.

 

(5) No complaint in relation to a discriminatory practice may be dealt with by the Commission under this Part unless the act or omission that constitutes the practice

 

(a) occurred in Canada and the victim of the practice was at the time of the act or omission either lawfully present in Canada or, if temporarily absent from Canada, entitled to return to Canada;

(b) occurred in Canada and was a discriminatory practice within the meaning of section 5, 8, 10, 12 or 13 in respect of which no particular individual is identifiable as the victim; or

(c) occurred outside Canada and the victim of the practice was at the time of the act or omission a Canadian citizen or an individual lawfully admitted to Canada for permanent residence.

 

(6) Where a question arises under subsection (5) as to the status of an individual in relation to a complaint, the Commission shall refer the question of status to the appropriate Minister and shall not proceed with the complaint unless the question of status is resolved thereby in favour of the complainant.

 

(7) No complaint may be dealt with by the Commission pursuant to subsection (1) that relates to the terms and conditions of a superannuation or pension fund or plan, if the relief sought would require action to be taken that would deprive any contributor to, participant in or member of, the fund or plan of any rights acquired under the fund or plan before March 1, 1978 or of any pension or other benefits accrued under the fund or plan to that date, including

(a) any rights and benefits based on a particular age of retirement; and

(b) any accrued survivor’s benefits.

 

***

 

43. (1) The Commission may designate a person, in this Part referred to as an "investigator", to investigate a complaint.

 

(2) An investigator shall investigate a complaint in a manner authorized by regulations made pursuant to subsection (4).

 

(2.1) Subject to such limitations as the Governor in Council may prescribe in the interests of national defence or security, an investigator with a warrant issued under subsection (2.2) may, at any reasonable time, enter and search any premises in order to carry out such inquiries as are reasonably necessary for the investigation of a complaint.

 

(2.2) Where on ex parte application a judge of the Federal Court is satisfied by information on oath that there are reasonable grounds to believe that there is in any premises any evidence relevant to the investigation of a complaint, the judge may issue a warrant under the judge’s hand authorizing the investigator named therein to enter and search those premises for any such evidence subject to such conditions as may be specified in the warrant.

 

(2.3) In executing a warrant issued under subsection (2.2), the investigator named therein shall not use force unless the investigator is accompanied by a peace officer and the use of force has been specifically authorized in the warrant.

 

(2.4) An investigator may require any individual found in any premises entered pursuant to this section to produce for inspection or for the purpose of obtaining copies thereof or extracts therefrom any books or other documents containing any matter relevant to the investigation being conducted by the investigator.

 

(3) No person shall obstruct an investigator in the investigation of a complaint.

 

(4) The Governor in Council may make regulations

(a) prescribing procedures to be followed by investigators;

(b) authorizing the manner in which complaints are to be investigated pursuant to this Part; and

(c) prescribing limitations for the purpose of subsection (2.1).

 

44. (1) An investigator shall, as soon as possible after the conclusion of an investigation, submit to the Commission a report of the findings of the investigation.

 

(2) If, on receipt of a report referred to in subsection (1), the Commission is satisfied

 

(a) that the complaint ought to exhaust grievance or review procedures otherwise reasonably available, or

 

(b) that the complaint would more appropriately be dealt with, initially or completely, by means of a procedure provided for under an Act of Parliament other that this Act, it shall refer the complainant to the appropriate authority.

 

(3) On receipt of a report referred to in subsection (1), the Commission

 

(a) may request the Chairperson of the Tribunal to institute an inquiry under section 49 into the complaint to which the report related is the Commission is satisfied

 

  (i) that, having repard to all the circumstances of the complaint, an inquiry into the complaint is warranted and

 

  (ii) that the complaint to which the report relates should not be referred pursuant to subsection (2) or dismissed on any ground mentioned in paragraphs 41(c) to (e); or

 

(b) shall dismiss the complaint to which the report relates if it is satisfied

 

  (i) that, having regard to all the circumstances, of the complaint, an inquiry into the complaint is not warranted, or

 

  (ii) that the complaint should be dismissed on any ground mentioned in paragraphs 41(c) to (e).

 

(4)  After receipt of a report referred to in subsection (1), the Commission

 

(a)         shall notify in writing the complainant and the person against whom the complaint was made of its action under subsection (2) or (3); and

(b) may, in such manner as it sees fit, noify any other person whom it considers necessary to notify of its action under subsection (2) or (3).

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        T-1570-05

 

INTITULÉ :                                       MOSSADEG NIAKI

                                                            c.

                                                            LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 OTTAWA (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               1ER MAI 2006

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE :  LE JUGE DE MONTIGNY

 

DATE DES MOTIFS :                      LE 18 SEPTEMBRE 2006

 

 

COMPARUTIONS :

 

Kourosh Farrokhzad

 

POUR LE DEMANDEUR

Elizabeth Richards

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Kourosh Farrokhzad

Sack Goldblatt Mitchell LLP

Avocats

Ottawa (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

Elizabeth Richards

Ministère de la Justice

POUR LE DÉFENDEUR

 

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