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Date : 20061004

Dossier : T-2237-05

Référence : 2006 CF 1175

ENTRE :

JUDITH CARTER-SMITH

demanderesse

et

 

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

défendeur

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

LE JUGE GIBSON

 

INTRODUCTION

[1]               Les présents motifs font suite à l’audition à Vancouver (Colombie‑Britannique), le 28 septembre 2006, d’une demande de contrôle judiciaire visant la décision par laquelle un fonctionnaire (le fonctionnaire) de l’Agence des douanes et du revenu du Canada, devenue l’Agence du revenu du Canada, a refusé, au nom du ministre du Revenu national, la demande présentée au deuxième palier en vue de faire annuler les pénalités et intérêts accumulés en raison de la production tardive des déclarations de revenus de la demanderesse pour les années d’imposition 2000, 2001 et 2002.

 

[2]               À la fin de l’audition, j’ai informé la demanderesse et l’avocate du défendeur que la demande de contrôle judiciaire allait être accueillie, et j’ai exposé mes motifs. Je les ai avisées que les présents motifs écrits allaient suivre.

 

CONTEXTE

[3]               La demanderesse a d’abord demandé l’annulation des pénalités et intérêts accumulés en raison de la production tardive de ses déclarations de revenus par lettre datée du 11 mai 2005. Elle a invoqué l’énorme stress que lui avait causé le fait d’être la seule personne à prendre soin de sa mère gravement malade et de sa sœur adulte atteinte de déficience développementale. Elle a également invoqué ses propres maux de dos qui lui auraient causé une douleur chronique et auraient limité ses déplacements. Elle a conclu sa lettre en ces termes :

[traduction] Malheureusement, mes obligations familiales et ma propre santé chancelante m’ont obligée à mettre une grande partie de ma vie en veilleuse durant la période en question. Depuis que ma mère est entrée dans un établissement de soins et que ma sœur s’est stabilisée, je me suis efforcée de rattraper le temps perdu dans d’importants volets de ma vie qui méritaient une attention. Vous remarquerez que, comme convenu, j’ai bien produit toutes mes déclarations, accompagnées de chèques émis pour les sommes dues, et que j’ai produit à l’avance ma déclaration pour l’année d’imposition 2004. Je regrette de ne pas avoir respecté les délais, mais la situation a accaparé toute mon attention et toute mon énergie. J’espère qu’il sera possible d’en tenir compte et que la décision de m’imposer des pénalités et des intérêts sera réexaminée.

 

[4]               Par une lettre subséquente, la demanderesse a soumis une lettre de son psychologue attestant que, durant la période en question, elle l’avait consulté sur une base hebdomadaire et/ou mensuelle [traduction] « …pour l’aider à combattre le stress croissant que lui causait le fait d’être l’unique soutien d’une mère malade et d’une sœur adulte atteinte de déficiences développementales ». La demanderesse a également fourni une lettre de son physiothérapeute concernant ses maux de dos, qui ont par la suite nécessité une intervention chirurgicale très délicate.

 

[5]               La demande d’annulation au premier palier de la demanderesse a été refusée par lettre datée du 31 août 2005.

 

[6]               Par lettre en date du 22 octobre 2005, la demanderesse a demandé un réexamen au deuxième palier fondé sur l’équité. Elle a invoqué les mêmes motifs d’annulation. Sa demande d’annulation a encore une fois été refusée, par lettre datée du 17 novembre 2005. C’est cette décision qui fait l’objet du présent contrôle.

 

LA DÉCISION FAISANT L’OBJET DU CONTRÔLE

[7]               L’essentiel de la décision faisant l’objet du contrôle tient en ces termes :

[traduction]

Les pénalités pour production tardive peuvent être annulées si elles découlent de situations indépendantes de la volonté du contribuable. Bien que nous puissions compatir aux difficultés que vous avez rencontrées avec votre famille, notamment celles liées à la santé de votre mère et aux problèmes auxquels votre sœur a été confrontée au cours de la période en question, les dispositions législatives en matière d’équité exigent que nous examinions tous les faits entourant la période pendant laquelle vos déclarations auraient dû être produites. Vous avez déclaré que votre mère avait été hospitalisée pour quatre mois en juillet 2001. La déclaration de revenus pour l’année 2000 aurait en fait dû être produite avant cela.

 

Selon l’alinéa 10a) de la circulaire d’information 92-2, nous devons nous demander si le demandeur a respecté, par le passé, la Loi de l’impôt sur le revenu. Nos dossiers indiquent que, de 1989 à 1998, vos déclarations de revenus ont été produites en retard. Aucune pénalité pour production tardive n’a été imposée parce que votre déclaration de revenus s’est soldée, chaque année, par un remboursement. Nous devons notamment tenir compte du fait que vous étiez capable de travailler à votre compte pendant cette période. Nous nous sommes également demandé si vous aviez agi avec diligence pour remédier à tout retard. En février 2002, nous avons fait une demande formelle concernant l’année d’imposition 2000. Vous n’avez produit la déclaration de revenus pour cette année qu’en décembre 2004. Nous soulignons par ailleurs qu’en novembre 2004, après avoir été contactée par un agent de contact du bureau, vous avez produit rapidement, soit dans un délai d’un mois, les trois déclarations de revenus qui restaient à produire.

 

Nous avons examiné les faits susmentionnés et avons conclu qu’on a eu raison d’imposer la pénalité pour production tardive à l’égard des déclarations de revenus T1 pour les années 2000, 2001 et 2002. Votre demande en vue de faire annuler ladite pénalité imposée à l’égard de ces déclarations est donc refusée.

 

LE RÉGIME LÉGISLATIF

[8]               L’« initiative en matière d’équité » prise en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu[1] (la Loi) se fonde sur le paragraphe 220(3.1) de la Loi, qui prévoit ce qui suit :

220. (3.1) Le ministre peut, à tout moment, renoncer à tout ou partie de quelque pénalité ou intérêt payable par ailleurs par un contribuable ou une société de personnes en application de la présente loi, ou l’annuler en tout ou en partie. Malgré les paragraphes 152(4) à (5), le ministre établit les cotisations voulues concernant les intérêts et pénalités payables par le contribuable ou la société de personnes pour tenir compte de pareille annulation.

 

220. (3.1) The Minister may at any time waive or cancel all or any portion of any penalty or interest otherwise payable under this Act by a taxpayer or partnership and, notwithstanding subsections 152(4) to 152(5), such assessment of the interest and penalties payable by the taxpayer or partnership shall be made as is necessary to take into account the cancellation of the penalty or interest.

 

[9]               Le pouvoir discrétionnaire du ministre en vertu du paragraphe 220(3.1) de la Loi peut être délégué suivant le paragraphe 220(2.01). La question de savoir si le fonctionnaire qui a rendu la décision refusant les demandes de la demanderesse était bien désigné pour le faire au nom du ministre n’était pas en litige dans la présente affaire.

 

[10]           Le large pouvoir discrétionnaire que le paragraphe 220(3.1) de la Loi confère au ministre est complété par la circulaire d’information IC-92-2, datée du 18 mars 1992, et intitulée « Lignes directrices concernant l’annulation des intérêts et des pénalités ».

 

[11]           Les articles 5, 6 et 7 des Lignes directrices sont ainsi libellés :

5.             Il sera convenable d’annuler la totalité ou une partie des intérêts ou des pénalités, ou de renoncer à ceux‑ci, si ces intérêts ou ces pénalités découlent de situations indépendantes de la volonté du contribuable ou de l’employeur. Voici des exemples de situations extraordinaires qui pourraient empêcher un contribuable, un agent d’un contribuable, l’exécuteur d’une succession ou un employeur de faire un paiement dans les délais exigés ou de se conformer à d’autres exigences de la Loi de l’impôt sur le revenu :

 

a)             une calamité naturelle ou une catastrophe provoquée par l’homme comme une inondation ou un incendie;

 

b)            des troubles civils ou l’interruption de services comme une grève des postes.

 

c)             une maladie grave ou un accident grave;

 

d)            des troubles émotifs sérieux ou une souffrance morale grave comme un décès dans la famille immédiate.

 

6.             L’annulation des intérêts ou des pénalités ou la renonciation à ceux-ci peuvent également être justifiées si ces intérêts ou pénalités découlent principalement d’actions attribuables au Ministère comme dans les cas suivants :

 

a)             des retards de traitement, ce qui a eu pour effet que le contribuable n’a pas été informé, dans un délai raisonnable, de l’existence d’une somme en souffrance;

 

b)            des erreurs dans la documentation mise à la disposition du public, ce qui a amené des contribuables à soumettre des déclarations ou à faire des paiements en se fondant sur des renseignements erronés;

 

c)             une réponse erronée qu’un contribuable ou un employeur a reçue concernant une demande de renseignements comme dans le cas où le Ministère a informé par erreur un contribuable qu’aucun acompte provisionnel n’est nécessaire pour l’année en cours;

 

d)            des erreurs de traitement;

 

e)             des renseignements fournis en retard comme dans le cas où un contribuable n’a pu faire les paiements voulus d’acomptes provisionnels ou d’arriérés parce qu’il n’avait pas les renseignements nécessaires.

 

7.             Il peut être convenable dans des situations où il y a incapacité de verser le montant exigible d’examiner la possibilité de renoncer ou d’annuler la totalité ou une partie des intérêts afin d’en faciliter le recouvrement, par exemple dans les cas suivants :

 

a)             lorsque les mesures de recouvrement ont été suspendues à cause de l’incapacité de payer;

 

b)            lorsqu’un contribuable ne peut conclure une entente de paiement qui serait raisonnable parce que les frais d’intérêts comptent pour une partie considérable des versements; dans un tel cas, il faudrait penser à renoncer à la totalité ou à une partie des intérêts pour la période où les versements débutent jusqu’à ce que le montant exigible soit payé pourvu que les versements convenus soient effectués à temps.

5.             Penalties and interest may be waived or cancelled in whole or in part where they result in circumstances beyond a taxpayer’s or employer’s control. For example, one of the following extraordinary circumstances may have prevented a taxpayer, a taxpayer’s agent, the executor of an estate, or an employer from making a payment when due, or otherwise complying with the Income Tax Act:

 

 

 

(a)           natural or human-made disasters such as, flood or fire;

 

 

(b)           civil disturbances or disruptions in services such as, a postal strike;

 

(c)           a serious illness or accident; or

 

(d)           serious emotional or mental distress such as, death in the immediate family.

 

6.             Cancelling or waiving interest or penalties may also be appropriate if the interest or penalty arose primarily because of actions of the Department, such as:

 

 

(a)           processing delays which result in the taxpayer not being informed, within a reasonable time, that an amount was owing;

 

(b)           material available to the public contained errors which led taxpayers to file returns or make payments based on incorrect information;

 

 

(c)           a taxpayer or employer received incorrect advise such as in the case where the Department wrongly advises a taxpayer that no instalment payments will be required for the current year;

 

 

(d)           errors in processing; or

 

(e)           delays in providing information such as the case where the taxpayer could not make the appropriate instalment or arrears payments because the necessary information was not available.

 

7.             It may be appropriate, in circumstances where there is an inability to pay amounts owing, to consider waiving or canceling interest in all or in part to facilitate collection. For example,

 

 

(a)           When collection has been suspended due to an inability to pay.

 

(b)           When a taxpayer is unable to conclude a reasonable payment arrangement because the interest charges absorb a significant portion of the payments. In such a case, consideration may be given to waiving interest in all or in part for the period from when payments commence until the amounts owing are paid provided the agreed payments are made on time.

 

 

[12]           En résumé, les Lignes directrices prévoient l’annulation des pénalités et intérêts, ou la renonciation à ceux‑ci, dans les cas où ces pénalités et intérêts ont, en tout ou en partie, été accumulés en raison de « situations indépendantes de la volonté du contribuable », lorsqu’ils découlent « principalement d’actions attribuables au Ministère », c’est‑à‑dire l’Agence du revenu du Canada, ou lorsque l’annulation ou la renonciation « faciliter[a] le recouvrement ».

 

[13]           Eu égard aux faits de la présente affaire, la demanderesse soutient que les pénalités et intérêts accumulés auraient dû faire l’objet d’une renonciation parce que l’accumulation découlait de situations indépendantes de sa volonté, à savoir l’accomplissement de ses obligations envers sa mère et sa sœur adulte et ses propres troubles émotifs sérieux ou souffrance morale grave et incapacité physique, lesquels étaient tous, selon elle, étroitement liés.

 

[14]           Bien que la demanderesse, à l’audience et dans ses documents écrits, ait exprimé des inquiétudes au sujet des difficultés à communiquer avec les fonctionnaires compétents de l’Agence du revenu du Canada, de l’absence de communication claire et efficace concernant la nature, les détails et le processus associés à l’initiative en matière d’équité et du fait que la responsabilité de l’initiative était confiée à des fonctionnaires dont la principale fonction était vraisemblablement de recouvrer les taxes, intérêts et pénalités, donnant ainsi lieu à une apparence de conflit d’intérêt de leur part, ces inquiétudes n’ont pas été directement invoquées pour justifier l’annulation des intérêts ou des pénalités, ou la renonciation à ceux‑ci, au motif qu’ils découlent « principalement d’actions attribuables au Ministère ».

 

[15]           La question de la renonciation visant à « faciliter le recouvrement » ne se pose pas eu égard aux faits de la présente affaire.

 

LES QUESTIONS EN LITIGE

[16]           Dans l’exposé des faits et du droit qu’a déposé la demanderesse, les points en litige portent la mention [traduction] « modifiés ». Ils sont imprécis.

 

[17]           Outre celle relative à la norme de contrôle, le défendeur, par contre, dans son exposé des faits et du droit, définit ainsi la question en litige : « Le ministre s’est‑il acquitté de son devoir d’agir équitablement dans l’exercice du pouvoir discrétionnaire que lui confère le paragraphe 220(3.1) de la Loi de refuser la deuxième demande de la demanderesse? »

 

ANALYSE

Norme de contrôle

[18]           Je suis convaincu que la norme de contrôle applicable à la décision dont la Cour se trouve présentement saisie est celle de la décision raisonnable simpliciter. Dans Succession Dort c. Canada (Ministre du Revenu national)[2], mon collègue le juge Sean Harrington a écrit ceci au paragraphe 8 de ses motifs :

Conformément aux arrêts Dr Q. c. College of Physicians and Surgeons of British Columbia […] et Barreau du Nouveau-Brunswick c. Ryan […] de la Cour suprême du Canada, le contrôle judiciaire des décisions des tribunaux administratifs doit se faire selon une analyse fonctionnelle et pragmatique. Suivant les circonstances, la norme de contrôle applicable est la décision correcte, la décision déraisonnable ou la décision manifestement déraisonnable. Dans l’arrêt Lanno c. Canada (Agence des douanes et du revenu) […] la Cour d’appel fédérale a infirmé le jugement du juge de première instance, qui avait appliqué la norme de la décision manifestement déraisonnable, et elle a déclaré que la norme applicable était celle de la décision raisonnable. La décision en cause dans cette affaire était celle d’un agent du fisc, qui avait refusé d’exercer le pouvoir discrétionnaire que lui confère le paragraphe 152(4.2) de la Loi de manière à permettre d’établir une nouvelle cotisation concernant l’impôt de M. Lanno après la fin de la période normale de nouvelle cotisation, laquelle nouvelle cotisation se serait soldée par un remboursement. Tout comme la disposition en litige en l’espèce, le paragraphe 220(3.1), la disposition en cause faisait partie du Dossier d’équité introduit en 1991. Mme Dort affirme en l’espèce que la décision discrétionnaire relative à la renonciation aux intérêts est elle aussi assujettie à la norme de contrôle de la décision raisonnable. Cet argument est bien fondé. La Cour d’appel fédérale a tout récemment élargi la portée de l’arrêt Lanno, précité, au paragraphe 220(3.1) de la Loi de l’impôt sur le revenu (Comeau c. Agence des douanes et du Revenu du Canada […]).

[citations omises]

 

 

[19]           Selon la norme de la décision raisonnable ou raisonnable simpliciter, le tribunal ne devrait pas modifier la décision à moins qu’elle ne soit entachée d’erreur flagrante en ce sens qu’elle est fondée sur un mauvais principe ou sur une mauvaise appréciation des faits. Est déraisonnable la décision qui, dans l’ensemble, n’est étayée par aucun motif capable de résister à un examen assez poussé. Toutefois, une décision raisonnable n’est pas nécessairement une décision correcte, et l’application d’une disposition législative discrétionnaire à une situation factuelle particulière peut mener à plusieurs décisions raisonnables[3].

 

[20]           À l’appui de ce qui précède, le défendeur affirme ceci au paragraphe 22 de son exposé des faits et du droit :

[traduction] Plus particulièrement, la Cour ne devrait intervenir que si le ministre a pris sa décision de mauvaise foi, n’a pas tenu compte de faits pertinents, a tenu compte de faits non pertinents ou a pris une décision contraire au droit…

[non souligné dans l’original]

 

À l’appui de cette affirmation, le défendeur cite les arrêts Sa Majesté la Reine c. Barron[4] et Lanno c. Canada (Agence des douanes et du revenu)[5].

 

APPLICATION DE LA NORME DE CONTRÔLE À LA DÉCISION FAISANT L’OBJET DU CONTRÔLE

[21]           L’essentiel de la décision faisant l’objet du présent contrôle est reproduit ci‑dessus. On y précise que les pénalités pour production tardive et, bien entendu, les intérêts, peuvent être annulés s’ils découlent de situations indépendantes de la volonté du contribuable. On y exprime de la compassion pour les difficultés que la demanderesse a rencontrées [traduction] « avec votre famille, notamment celles liées à la santé de votre mère et aux problèmes auxquels votre sœur a été confrontée », mais on n’y fait aucunement mention de ses propres troubles émotifs ou souffrance morale, dont fait foi l’aide psychologique qu’elle a demandée et reçue, ni de son mal de dos débilitant, attesté par la correspondance échangée avec son physiothérapeute. On n’y explique aucunement comment le décideur a pu conclure que les difficultés avec lesquelles la demanderesse était aux prises durant la période en question ne constituaient pas des « situations indépendantes de [s]a volonté ».

 

[22]           La lettre de refus met à juste titre l’accent sur d’autres facteurs pertinents quant à la décision, notamment les antécédents de la demanderesse en matière de production tardive et, dans le cas d’une demande de paiement en particulier, sa lenteur à répondre. On n’y explique aucunement pourquoi on a accordé plus de poids à ces deux derniers facteurs qu’aux difficultés et fardeaux que la demanderesse a expérimentés durant la période en question.

 

[23]           Il convient particulièrement de souligner que, bien que le document intitulé [traduction] « Feuille de travail relative à une demande fondée sur l’équité – Examen au deuxième palier » figurant aux pages 36 et 37 du dossier du défendeur mentionne les [traduction] « troubles émotifs et souffrance morale » comme [traduction] « motifs applicables » à la demande d’annulation et fasse état des documents justificatifs mentionnés au paragraphe précédent, ce document ne mentionne pas la [traduction] « maladie grave », que constituaient sans aucun doute les maux de dos de la demanderesse, comme « motif applicable », et la très brève analyse contenue dans ce document ayant donné lieu à la recommandation de refus de la demande fondée sur l’équité minimise l’importance du fardeau que la demanderesse a dû porter durant la période en question.

 

[24]           Au regard de la norme de contrôle de la décision raisonnable simpliciter, je suis convaincu que la décision faisant l’objet du présent contrôle doit être annulée. Il ne s’agit tout simplement pas d’une décision qui est étayée par des motifs capables de résister à « un examen assez poussé ». En d’autres termes, et contrairement aux propres observations du défendeur, je ne puis tout simplement me convaincre, au vu de la décision à elle seule, ou de cette décision lue de concert avec la feuille de travail relative à une demande fondée sur l’équité susmentionnée, laquelle n’a pas été remise à la demanderesse avec la décision, que le décideur a tenu compte de tous les faits pertinents que lui a soumis la demanderesse et leur a accordé le poids qui leur revenait. S’il est vrai que la décision à laquelle on est arrivé aurait pu raisonnablement être rendue, elle ne résiste tout simplement pas à une brève analyse de l’ensemble des facteurs pertinents qui la sous‑tendent.

 

CONCLUSION

[25]           Pour les motifs qui précèdent, la décision faisant l’objet du présent contrôle sera annulée, et la demande de la demanderesse en vue de faire annuler les pénalités et intérêts imposés à l’égard des années d’imposition 2000, 2001 et 2002 est renvoyée au défendeur pour qu’un fonctionnaire différent l’examine de nouveau et rende une nouvelle décision.

 

[26]           Je suis convaincu que les dépens doivent suivre l’issue de la cause. La demanderesse, qui se représente elle‑même, a droit à ses dépens à l’encontre du défendeur, lesquels seront fixés à la somme forfaitaire de 200 $.

 

« Frederick E. Gibson »

Juge

Ottawa (Ontario)

Le 4 octobre 2006

 

 

Traduction certifiée conforme

Diane Provencher, LL.B.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        T-2237-05

 

INTITULÉ :                                       JUDITH CARTER-SMITH

 

demanderesse

                                                            et

 

                                                            PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

défendeur

 

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 VANCOUVER (COLOMBIE-BRITANNIQUE)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               LE 28 SEPTEMBRE 2006

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE :  LE JUGE GIBSON

 

DATE DES MOTIFS :                      LE 4 OCTOBRE 2006

 

 

COMPARUTIONS :

 

Judith Carter-Smith

 

POUR SON PROPRE COMPTE

Johanna Russell

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Judith Carter-Smith

Vancouver (C.-B.)

 

POUR SON PROPRE COMPTE

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Vancouver (C.-B.)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 



[1] L.R.C. 1985, ch. 1 (5e suppl.).

[2] [2005] A.C.F. no 1460 (1re inst.), 2005 C.F. 1201, 2 septembre 2005.

[3] Voir Maloshicky c. Canada (Agence des douanes et du revenu), [2005] A.C.F. no 1203, 2005 C.F. 978, 12 juillet 2005, par. 10.

[4] 97 D.T.C. 5121 (C.A.F.), p. 5122.

[5] 2005 D.T.C. 5245 (C.A.F.), p. 5246.

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