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Date : 20060927

Dossier : T‑1383‑05

Référence : 2006 CF 1147

Halifax (Nouvelle‑Écosse), le 27 septembre 2006

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE O'KEEFE

 

ENTRE :

LA PREMIÈRE NATION DE KWANLIN DÜN

demanderesse

et

 

JENNIFER EDZERZA, HELEN CHARLIE

ET JACINE FOX

 

défenderesses

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

LE JUGE O’KEEFE

 

[1]               La demanderesse, la Première nation de Kwanlin Dün, sollicite le contrôle judiciaire d’une décision de la Commission d’appel en matière électorale de la Première nation de Kwanlin Dün (la Commission), en date du 27 juillet 2005, par laquelle la Commission se déclarait compétente pour statuer sur la validité de la loi de la Première nation, à savoir les Règles et Procédures régissant la tenue d’un scrutin pour l’élection d’un chef et d’un conseil, Première nation de Kwanlin Dün, avril 2005 (les Règles électorales de 2005).

 

[2]               Les défenderesses Jennifer Edzerza et Helen Charlie sont membres de la Première nation, et la défenderesse Jacine Fox, candidate à l’élection en cause, a été défaite.

 

[3]               La demanderesse voulait que soit rendue une ordonnance interdisant à la Commission d’examiner les Règles électorales de 2005 et de statuer sur leur validité.

 

[4]               Les défenderesses ont donné leur assentiment au redressement sollicité par la demanderesse.

 

Les faits

 

[5]               Le 1er avril 2005, le conseil de la Première nation de Kwanlin Dün (le conseil) adoptait la Constitution de la Première nation de Kwanlin Dün (la Constitution) et les Règles électorales de 2005. Les 3 et 4 juin 2005, un scrutin a eu lieu pour l’élection d’un chef et d’un conseil conformément aux Règles électorales de 2005.

 

[6]               Le 28 juin 2005, les défenderesses ont fait appel des résultats de l’élection au motif que le scrutin ne s’était pas déroulé conformément au Code électoral et référendaire contenu dans l’annexe 3 de la Constitution, mais plutôt conformément aux Règles électorales de 2005. Les défenderesses (appelantes devant la Commission) disaient que les Règles électorales de 2005 étaient invalides parce qu’elles avaient été adoptées par le conseil d’une manière incompatible avec la Constitution.

 

[7]               Le 4 juillet 2005, les défenderesses déposaient devant la Cour suprême du Territoire du Yukon une requête en vue d’obtenir une ordonnance déclarant nulles les Règles électorales de 2005 et déclarant nul le scrutin des 3 et 4 juin 2005, au motif qu’il ne s’était pas déroulé conformément aux règles et procédures prévues par la Constitution.

 

[8]               Le 7 juillet 2005, la Commission fut constituée pour entendre l’appel des défenderesses.

 

[9]               Le 18 juillet 2005, les défenderesses priaient le conseil de réexaminer sa décision du 1er avril 2005 d’adopter les Règles électorales de 2005. Elles voulaient que soit réexaminée cette décision au motif que les modifications de fond apportées aux règles et procédures électorales n’étaient pas conformes aux exigences de la Constitution et qu’elles étaient donc nulles et sans effet.

 

[10]           Le 21 juillet 2005, la Cour suprême du Territoire du Yukon suspendait la requête des défenderesses en attendant une décision finale de la Commission.

 

[11]           Une question préliminaire soulevée par les défenderesses était de savoir si la Commission avait compétence pour instruire l’appel. Les défenderesses prétendaient que la Commission n’avait pas compétence parce que la Constitution, qui était entrée en vigueur le 1er avril 2005, prévoyait qu’un appel formé contre les résultats d’une élection devait être jugé par le conseil de la magistrature de la Première nation de Kwanlin Dün (le conseil de la magistrature). Cependant, le conseil de la magistrature n’avait pas encore été nommé, pour des raisons qui n’ont pas été précisées. La position avancée par la demanderesse était que la Commission, un tribunal envisagé par un règlement antérieur à la Constitution, le Règlement électoral de 1999 de la Première nation de Kwanlin Dün (le Règlement électoral de 1999), avait compétence pour statuer sur l’appel à défaut d’un conseil de la magistrature. Selon la demanderesse, une conclusion autre eût entraîné, dans la procédure d’appel, un vide qui n’était pas envisagé ou voulu par la Constitution.

 

[12]           Après réception des prétentions écrites des parties sur la question de la compétence, la Commission a rendu le 21 juillet 2005 une décision provisoire dans laquelle elle concluait qu’elle avait bel et bien compétence pour juger l’appel. Les motifs de cette décision ont été communiqués le 25 juillet 2005. L’un des aspects clés de la décision de la Commission portait sur l’interprétation des règles transitoires régissant un appel formé contre les résultats d’une élection.

 

[13]           Dans ses motifs, la Commission invoquait le paragraphe 66(4) de la Constitution, ainsi rédigé :

[traduction] Toute loi, ordonnance, résolution ou entente adoptée ou conclue par le conseil de bande de la Première nation de Kwanlin Dün, et en vigueur immédiatement avant la date d’entrée en vigueur de la Constitution, reste en vigueur dans la mesure où elle est compatible avec la Constitution, sous réserve de toute modification ou abrogation ultérieure, ou conformément à la Constitution.

 

[14]           La Commission a aussi invoqué le paragraphe 19(1) de l’annexe 3 de la Constitution, qui prévoit ce qui suit :

[traduction] Jusqu’à ce que le conseil modifie la présente Loi, ou jusqu’à ce que le conseil de la magistrature adopte des règles de procédure régissant les appels en matière électorale, les articles 16.06, 16.07.01 et 16.08 à 16.17 inclusivement du Règlement administratif sur la procédure électorale de la Première nation de Kwanlin Dün, en vigueur immédiatement avant la date d’entrée en vigueur de la Constitution, s’appliqueront à un appel interjeté en vertu de la présente annexe, mais toute référence, dans l’une de ces dispositions, à la Commission d’appel en matière électorale de la Première nation de Kwanlin Dün doit être considérée comme une référence au conseil de la magistrature.

 

[Non souligné dans l’original]

 

 

[15]           La Commission a reconnu avec la demanderesse que, en l’absence d’un conseil de la magistrature, la portion soulignée du paragraphe 19(1) devrait être considérée comme inopérante, et que la Commission devrait donc être investie de la même compétence que celle dont serait investi le conseil de la magistrature s’il était constitué ou s’il pouvait être constitué pour statuer sur cet appel. La Commission a estimé que cette interprétation s’accordait avec l’esprit, l’objet et l’intention de la Constitution, c’est‑à‑dire la promotion de l’autonomie gouvernementale selon la Constitution. La Commission a dit aussi qu’elle ne devrait assumer la compétence du conseil de la magistrature, comme le prévoit la Constitution, que dans la mesure raisonnablement nécessaire pour rendre une décision sur le présent appel.

 

[16]           Le 27 juillet 2005, la Commission a tenu audience pour examiner les questions de fond soulevés dans l’appel. Toutes les parties ont admis que le scrutin s’était déroulé d’après les Règles électorales de 2005. Le président de la Commission a demandé que des arguments soient présentés à la Commission sur la question de savoir si le conseil s’était conformé au paragraphe 49(1) de la Constitution lorsqu’il avait adopté les Règles électorales de 2005. L’avocat de la demanderesse s’y est opposé au motif que la Commission n’avait pas compétence pour statuer sur des questions de droit ou sur la promulgation de la loi, et au motif que la compétence de la Commission se limitait uniquement à la question de savoir si le scrutin s’était déroulé dans le respect des Règles électorales de 2005. Comme les parties avaient admis qu’il n’y avait eu sur ce point aucune irrégularité, l’avocat de la demanderesse a prétendu que la Commission n’avait d’autre choix que de rejeter l’appel.

 

[17]           Le président a déclaré à l’audience que la Commission avait compétence pour examiner non seulement la question de la conformité aux Règles électorales de 2005, mais également la validité constitutionnelle des Règles électorales de 2005. La demanderesse s’est opposée à ce que la Commission se déclare compétente pour statuer sur la validité constitutionnelle des Règles électorales de 2005. Le chef Mike Smith, appuyé en cela par l’avocat de la demanderesse, a obtenu de la Commission un ajournement afin de pouvoir consulter ses avocats.

 

[18]           Le 9 août 2005, la demanderesse déposait sa demande de contrôle judiciaire contestant la décision du 27 juillet 2005 de la Commission par laquelle la Commission s’était déclarée compétente pour statuer sur la validité des Règles électorales de 2005. La Commission décida de ne pas poursuivre l’audition de l’appel formé contre les résultats de l’élection, jusqu’à l’issue de la demande. Elle n’a adopté aucune position concernant le redressement sollicité par la demanderesse et elle n’a pas été jointe comme défenderesse dans cette demande.

 

[19]           Les défenderesses ne s’opposent pas à la demande de contrôle judiciaire.

 

Les points en litige

 

[20]           La demanderesse a soumis les points suivants pour examen dans son exposé des faits et du droit :

1.         La Commission a‑t‑elle compétence pour examiner les Règles électorales de 2005 et statuer sur leur validité; et

2.         Un bref de prohibition interdisant à la Commission d’examiner les Règles électorales de 2005 et de statuer sur leur validité devrait‑il être délivré?

 

Les prétentions de la demanderesse

 

[21]           Selon la demanderesse, la Commission est un office fédéral, et la Cour a compétence pour instruire la demande de contrôle judiciaire et délivrer le bref de prohibition demandé.

 

[22]           Selon la demanderesse, l’intention de l’Entente sur l’autonomie gouvernementale de la Première nation de Kwanlin Dün, du Règlement électoral de 1999 et des Règles électorales de 2005 est de faire de la Commission une juridiction finale d’appel pour ce qui concerne la tenue d’élections, et de conférer au conseil, au conseil de la magistrature, à la Cour suprême du Territoire du Yukon et à la Cour fédérale une compétence exclusive pour ce qui concerne la contestation de la validité des lois de la Première nation de Kwanlin Dün.

 

[23]           Selon la demanderesse, la Constitution contient un code complet régissant la promulgation des lois de la Première nation de Kwanlin Dün et la contestation de telles lois, par le dépôt de recours devant le conseil, puis devant le conseil de la magistrature, puis devant la Cour suprême du Territoire du Yukon. Elle a prétendu que la validité d’une loi de la Première nation de Kwanlin Dün peut être contestée devant la Cour suprême du Territoire du Yukon (paragraphe 52(1) de la Constitution). Cependant, avant qu’un justiciable puisse contester la validité d’une loi de la Première nation de Kwanlin Dün devant la Cour suprême du Territoire du Yukon, il doit d’abord épuiser les autres recours prévus par les lois de Kwanlin Dün pour la contestation de la validité d’une telle loi (paragraphe 52(2) de la Constitution). Elle a donc fait valoir que, avant que les défenderesses puissent contester la validité des Règles électorales de 2005 devant la Cour suprême du Territoire du Yukon, elles doivent d’abord, conformément à l’alinéa 47(1)e) de la Constitution, demander au conseil de réexaminer sa décision d’adopter les Règles électorales de 2005 au motif que cette décision semble incompatible avec les procédures décrites dans la partie 4 du chapitre 7 de la Constitution.

 

[24]           La demanderesse a fait valoir que le législateur peut, expressément ou implicitement, conférer à un tribunal administratif le pouvoir de statuer sur des questions de droit (voir l’arrêt Cooper c. Canada (Commission des droits de la personne), [1996] 3 R.C.S. 854). Selon elle, aucune disposition du Règlement électoral de 1999 ou des Règles électorales de 2005 ne confère à la Commission le pouvoir de statuer sur la validité d’une loi de la Première nation de Kwanlin Dün, tandis que la Constitution confère expressément ce pouvoir au conseil, au conseil de la magistrature et à la Cour suprême du Territoire du Yukon.

 

[25]           Selon la demanderesse, la Commission ne dispose pas du mécanisme requis pour statuer comme il convient sur les multiples facettes des questions constitutionnelles. Ainsi, la Commission n’est pas liée par les règles traditionnelles de preuve, et elle pourrait donc recevoir des témoignages non produits sous serment, des preuves par ouï‑dire et de simples témoignages d’opinion. La demanderesse soutient qu’un flux aussi libre de l’information est inopportun lorsqu’il s’agit de juger de la validité d’une loi. Elle soutient aussi que la Commission n’a pas la spécialisation requise pour statuer sur les questions de droit.

 

[26]           Selon la demanderesse, l’un des objectifs du contrôle judiciaire est d’empêcher les organismes administratifs d’accomplir des actes qu’ils n’ont pas le pouvoir d’accomplir, et l’un des moyens pour ce faire, qui est reconnu dans la Loi sur les Cours fédérales, consiste à obtenir un bref de prohibition (voir l’arrêt Canada (Procureur général) c. Canada (Commissaire de l’enquête sur l’approvisionnement en sang), [1997] 2 C.F. 36, au paragraphe 25 (C.A.), conf. : [1997] 3 R.C.S. 440). Pour la demanderesse, un bref de prohibition a une fonction préventive et non corrective (voir l’arrêt Krause c. Canada, [1999] 2 C.F. 476, au paragraphe 17 (C.A.)). Elle soutient qu’un bref de prohibition ne devrait être délivré et maintenu que si le tribunal excède son pouvoir ou s’il a exercé un pouvoir dont il n’est pas investi (voir la décision Bauer c. Canada (Commission de l’immigration), [1984] 2 C.F. 455, au paragraphe 12 (1re inst.)).

 

[27]           Selon la demanderesse, le redressement qui s’impose, compte tenu de l’intention explicite de la Commission de statuer sur la validité des Règles électorales de 2005, consiste à délivrer un bref de prohibition interdisant à la Commission d’examiner les Règles électorales de 2005 et de statuer sur leur validité.

 

Les prétentions des défenderesses

 

[28]           Les défenderesses n’ont pas déposé de prétentions écrites.

 

Analyse et décision

 

[29]           Le 1er avril 2005, la Première nation de Kwanlin Dün adoptait sa Constitution et les Règles électorales de 2005. La Constitution et les Règles électorales de 2005 contiennent des dispositions régissant l’élection du chef et du conseil et remplacent le Règlement électoral de 1999, auparavant en vigueur.

 

[30]           Conformément au paragraphe 16(1) de l’annexe 3 de la Constitution, un appel se rapportant au processus électoral peut être déposé devant le conseil de la magistrature. Conformément au paragraphe 22(1) des Règles électorales de 2005, tout appel portant sur la tenue d’un scrutin doit être déposé devant le conseil de la magistrature.

 

[31]           Aucun conseil de la magistrature n’a été constitué. Cependant, la Commission a été nommée pour juger l’appel formé contre les résultats électoraux en cause. La Commission est un organisme administratif établi en vertu d’un règlement antérieur à la Constitution, le Règlement électoral de 1999, [TRADUCTION ] « pour juger les appels formés contre le déroulement d’un scrutin » (article 16.01 du Règlement électoral de 1999). Ce règlement habilite la Commission à faire droit à l’appel (article 16.15.01) ou à rejeter l’appel (article 16.15.05), et, si les circonstances le justifient, à décréter la tenue d’un nouveau scrutin ou d’une élection partielle ou à déclarer que certains candidats sont inhabiles à occuper une charge (articles 16.15.02 à 16.15.04). La Commission a estimé que, en l’absence d’un conseil de la magistrature, il était juste qu’elle se déclare compétente pour juger l’appel comme si elle était le conseil de la magistrature dûment constitué.

 

[32]           L’un des points soulevés dans l’appel était de savoir si les Règles électorales de 2005 sont invalides selon la Constitution de la Première nation de Kwanlin Dün. Lors de l’audience du 27 juillet 2005, la Commission a estimé qu’elle avait compétence pour entendre les arguments et statuer sur la validité des Règles électorales de 2005. La demanderesse a prié la Cour de dire si la Commission a compétence pour statuer sur cette question. Selon la demanderesse, la Constitution, les Règles électorales de 2005 et le Règlement électoral de 1999 n’habilitent pas la Commission, expressément ou implicitement, à juger de la validité d’une loi. Je partage son avis. Les textes prévoient que la Commission est constituée pour juger les appels formés contre le déroulement d’un scrutin. Le conseil de la magistrature, qui selon la nouvelle Constitution remplace la Commission, a le pouvoir de juger un appel se rapportant au processus électoral (paragraphe 16(1) de l’annexe 3 de la Constitution). La législation ne renferme aucune disposition attestant l’intention des législateurs de conférer à la Commission ou au conseil de la magistrature le pouvoir de statuer sur la validité des lois de la Première nation de Kwanlin Dün dans le contexte d’un appel formé contre les résultats d’une élection. Les questions touchant la validité d’une telle législation, y compris la question de savoir si une disposition a été validement adoptée en vertu de la Constitution, doivent être décidées par le conseil, par le conseil de la magistrature, ou par la Cour suprême du Territoire du Yukon, en conformité avec la Constitution.

 

[33]           Je relève que les défenderesses, qui ne se sont pas opposées à la demande de contrôle judiciaire, ont voulu contester la validité de la législation en déposant une requête devant la Cour suprême du Territoire du Yukon (requête qui a été suspendue jusqu’à la décision de la Commission), et aussi en priant le conseil de réexaminer sa décision d’adopter les Règles électorales de 2005 conformément à l’alinéa 47(1)e) de la Constitution. Je reconnais, avec la demanderesse, que le moyen à employer pour contester la validité des Règles électorales de 2005 consiste en premier lieu à épuiser les procédures officielles de contestation de la validité des lois (paragraphe 52(2) de la Constitution), et notamment en présentant une demande au conseil, comme les défenderesses l’ont fait.

 

[34]           Selon moi, la Commission n’a pas compétence pour statuer sur la validité des Règles électorales de 2005, et il est donc nécessaire de délivrer un bref de prohibition.

 

[35]           La demande de contrôle judiciaire est donc accordée. Un bref de prohibition sera délivré, interdisant à la Commission de statuer sur la validité constitutionnelle des Règles électorales de 2005.

 

 

JUGEMENT

 

[36]           LA COUR ORDONNE : la demande de contrôle judiciaire est accordée et un bref de prohibition sera délivré, interdisant à la Commission de statuer sur la validité constitutionnelle des Règles électorales de 2005.

 

« John A. O’Keefe »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

Alphonse Morissette, trad. a., LL.L

 


ANNEXE

 

 

 

Textes applicables

 

 

 

Les dispositions applicables de la Constitution de la Première nation de Kwanlin Dün sont les suivantes :

 

               [TRADUCTION]

1.   (1) Conformément au droit inhérent à l’autonomie gouvernementale, et conformément à l’Entente sur l’autonomie gouvernementale de la Première nation de Kwanlin Dün, le peuple Kwanlin Dün déclare et confirme l’établissement de la Première nation de Kwanlin Dün pour :

 

a)   promouvoir le bien commun et le bien‑être du peuple Kwanlin Dün; et

 

b)   donner effet :

 

(i) à l’Entente définitive de la Première nation de Kwanlin Dün, une Première nation reconnue et protégée par la Constitution du Canada, et à

 

(ii) l’Entente sur l’autonomie gouvernementale de la Première nation de Kwanlin Dün.

 

 

2.   (1) La présente Constitution est la loi suprême de la Première nation de Kwanlin Dün.

 

(2) Si une loi adoptée par la Première nation de Kwanlin Dün est incompatible avec la Constitution, ladite loi sera, dans la mesure de l’incompatibilité, nulle et de nul effet.

 

(3) Chacune des annexes accompagnant la Constitution fait partie intégrante de la Constitution, à moins qu’une disposition de la Constitution ne dispose expressément qu’une annexe donnée a le statut de loi ordinaire de la Première nation de Kwanlin Dün.

 

 

47. (1) Tout citoyen peut demander au Conseil de réexaminer l’une de ses décisions, notamment celle d’adopter ou de modifier toute loi de la Première nation de Kwanlin Dün, aux motifs que la décision semble :

 

 

e)   avoir été prise d’une manière incompatible avec les procédures exposées dans la partie 4 du présent chapitre, si la décision a entraîné l’adoption ou la modification d’une loi de la Première nation de Kwanlin Dün.

 

(2) Le Conseil doit étudier toute demande prévue par le paragraphe (1) à sa réunion qui suit la réception de la demande.

 

(3) La décision qui est l’objet d’une demande selon le présent article conserve son effet à moins que le Conseil ne la modifie ou ne l’annule, sous réserve d’une décision du conseil de la magistrature selon l’alinéa 56(1)d).

 

 

49. (1) Le Conseil adoptera une loi ou un règlement quand les événements suivants auront eu lieu :

 

a)   à la réunion du Conseil durant laquelle la motion est d’abord présentée, le Conseil a décidé par vote préliminaire d’accepter pour examen ultérieur le dépôt de ladite loi ou dudit règlement;

 

b)   un avis concernant la loi projetée ou le règlement projeté a été publié, des copies ont été mises à la disposition des citoyens, et les citoyens ont été informés de la manière dont ils pouvaient faire connaître leurs vues concernant la loi projetée ou le règlement projetée;

 

c)   lors d’une seconde réunion du Conseil tenue après la période réservée à l’examen public, le Conseil a débattu à la fois l’objet général et les détails de la loi projetée ou du règlement projeté, et a décidé par vote préliminaire d’accepter avec ou sans modification la loi projetée ou le règlement projeté;

 

d)   lors d’une troisième réunion du Conseil tenue au moins 14 jours après la réunion mentionnée dans l’alinéa c), le Conseil a décidé par vote final d’adopter la loi projetée ou le règlement projeté; et

 

e)   le chef et le nombre minimum requis de conseillers ont ratifié la loi ou le règlement.

 

 

 

52. (1) Sous réserve du paragraphe (2), la validité d’une loi de la Première nation de Kwanlin Dün peut être contestée devant la Cour suprême du Yukon.

 

(2) Le justiciable qui souhaite contester la validité d’une loi de la Première nation de Kwanlin Dün devant la Cour suprême du Yukon doit d’abord épuiser les autres recours prévus par les lois de la Première nation pour la contestation de la validité de cette loi.

 

 

 

56. (1) Le conseil de la magistrature a les attributions suivantes :

 

 

d)   étudier la demande d’un citoyen qui conteste une décision du Conseil selon l’un des motifs exposés au paragraphe 47(1), si telle décision a été confirmée par le Conseil en vertu de l’article 47, et rendre un jugement déclaratoire

 

(i) confirmant la décision du Conseil; ou

 

(ii) annulant la décision du Conseil.

 

 

(2) Un justiciable ne peut pas déposer une demande mentionnée dans l’alinéa (1)d) s’il n’a pas d’abord présenté au Conseil une demande de réexamen de l’affaire en application de l’article 47.

 

 

66.

 

(4) Toute loi, ordonnance, résolution ou entente adoptée ou conclue par le Conseil de bande de la Première nation de Kwanlin Dün, et en vigueur immédiatement avant la date d’entrée en vigueur de la Constitution, reste en vigueur dans la mesure où elle est compatible avec la Constitution, sous réserve de toute modification ou abrogation ultérieure, ou conformément à la Constitution.

 

 

68. (1) Dans l’interprétation de la Constitution ou de l’une de ses annexes, le conseil de la magistrature, une cour de justice, un tribunal ou une assemblée doit :

 

a)   défendre les valeurs qui y sont énoncées ou qui en sont à l’origine; et

 

b)   défendre l’esprit, l’objet et les desseins de la Constitution.

 

 

 

L’annexe 3 de la Constitution (le Code électoral et référendaire) renferme les dispositions suivantes concernant l’appel formé contre les résultats d’une élection :

 

               [TRADUCTION]

16. (1) Un appel se rapportant au processus électoral peut être déposé devant le conseil de la magistrature de la Première nation de Kwanlin Dün :

 

a)   dans les 30 jours qui suivent les résultats électoraux dont appel est interjeté; ou

 

b)   à l’intérieur du délai plus court qui est prévu dans un cas donné par les Règles de procédure du conseil de la magistrature.

 

(2)  Lorsqu’il étudie un appel, le conseil de la magistrature doit se conformer aux procédures décrites dans la Constitution, ainsi qu’à ses propres règles de procédure.

 

(3)  La décision rendue en appel par le conseil de la magistrature est définitive.

 

 

19. (1) Jusqu’à ce que le conseil modifie la présente Loi, ou jusqu’à ce que le conseil de la magistrature adopte des règles de procédure régissant les appels en matière électorale, les articles 16.06, 16.07.01 et 16.08 à 16.17 inclusivement du règlement administratif en matière électorale de la Première nation de Kwanlin Dün, en vigueur immédiatement avant la date d’entrée en vigueur de la Constitution, s’appliqueront à un appel interjeté en vertu de la présente annexe, mais toute référence, dans l’une de ces dispositions, à la Commission d’appel en matière électorale de la Première nation de Kwanlin Dün doit être considérée comme une référence au conseil de magistrature.

 

 

Les dispositions du Règlement électoral de 1999 de la Première nation de Kwanlin Dün concernant la Commission d’appel en matière électorale de la Première nation de Kwanlin Dün sont reproduites ci‑après :

 

               [TRADUCTION]

16.01 Une commission d’appel sera établie pour juger les appels formés contre le déroulement d’un scrutin. Cette commission d’appel sera appelée Commission d’appel en matière électorale de la Première nation de Kwanlin Dün.

 

16.06 Tout électeur inscrit peut interjeter appel d’une élection tenue au sein de la Première nation de Kwanlin Dün :

 

16.06.01 en déposant, dans un délai de trente jours après l’élection, un document écrit indiquant :

 

16.06.02 les motifs sur lesquels est fondé l’appel, selon ce que prévoient les règlements administratifs et le Règlement,

 

16.06.03 les preuves au soutien des motifs, et

 

16.06.04 la signature de la personne qui fait appel.

 

16.06.05 L’avis d’appel :

 

16.06.06 sera signifié en main propre au directeur général des élections, ou communiqué par lettre recommandée, mise à la poste durant cette période, à la Commission d’appel en matière électorale de la Première nation de Kwanlin Dün, à l’adresse suivante : …

 

16.07.01 Dès réception d’un appel, la Commission d’appel en matière électorale de la Première nation de Kwanlin Dün fera signifier une copie de l’appel à tous les candidats aux postes de conseillers de la Première nation de Kwanlin Dün, ainsi qu’au directeur général des élections.

 

 

16.11 À l’expiration du délai de dépôt des réponses, la Commission d’appel en matière électorale de la Première nation de Kwanlin Dün se réunira pour statuer sur l’appel.

 

16.12 Durant sa délibération, la Commission d’appel en matière électorale de la Première nation de Kwanlin Dün pourra, selon son appréciation exclusive :

 

16.12.01 prendre des règlements et des ordonnances régissant la conduite de ses audiences ou procédures,

 

16.12.02 tenir des audiences avec l’appelant, avec l’intimé et avec les témoins que les parties pourraient vouloir produire ou être autorisés à produire,

 

16.12.03 faire comparaître les témoins de l’appelant ou de l’intimé, et toute autre personne qui pourrait, d’après la commission, favoriser l’issue de la procédure,

 

16.12.04 examiner les dossiers, et

 

16.12.05 de façon générale, conduire la procédure de la manière que la commission, selon son appréciation exclusive, jugera nécessaire et adéquate pour rendre une décision réfléchie.

 

 

16.15 La décision finale de la Commission d’appel en matière électorale de la Première nation de Kwanlin Dün devra être l’une des décisions suivantes :

 

16.15.01 faire droit à l’appel et, selon l’appréciation exclusive de la commission,

 

16.15.02 communiquer des instructions au directeur général des élections, si les circonstances le justifient, pour que l’élection tout entière soit annulée et pour qu’un nouveau scrutin soit organisé, en conséquence de quoi tous les sièges du conseil de la Première nation de Kwanlin Dün sont déclarés vacants et un nouveau scrutin est organisé immédiatement,

 

16.15.03 si les circonstances font qu’un seul ou plusieurs sièges seulement du conseil doivent être déclarés vacants, ordonner la tenue immédiate d’une élection partielle portant sur la période initiale pour laquelle l’élection contestée avait été déclenchée, et cela pour le reste de la durée initiale,

 

16.15.04 déclarer qu’un candidat ou des candidats aux postes de l’un quelconque des organes directeurs n’ont pas respecté les règlements administratifs ou le Règlement et qu’ils sont inhabiles à occuper une charge, et déclarer élu le candidat ayant obtenu le deuxième plus grand nombre de voix, ou

 

16.15.05 rejeter l’appel.

 

16.16 La décision de la Commission d’appel en matière électorale de la Première nation de Kwanlin Dün est définitive et elle lie les parties.

 

16.17 L’auteur de l’appel peut, à tout moment avant que la Commission d’appel en matière électorale de la Première nation de Kwanlin Dün rende une décision définitive, se désister de son appel, et l’appel sera dès lors rejeté.

 

 

Les Règles et Procédures régissant la tenue d’un scrutin pour l’élection d’un chef et d’un conseil, Première nation de Kwanlin Dün, avril 2005, contiennent la disposition suivante relative à un appel formé contre les résultats d’une élection :

 

               [TRADUCTION]

22. (1) Tout appel portant sur la tenue d’un scrutin doit être déposé devant le conseil de la magistrature de la PNKD :

 

a)   dans un délai de 30 jours après les résultats de l’élection; ou

 

b)   à l’intérieur du délai plus court prévu, dans un cas donné, par les règles de procédure du conseil de la magistrature.

 

(2) Lorsqu’il examine un appel, le conseil de la magistrature de la PNKD doit se conformer aux procédures décrites dans la Constitution de la KD, ainsi qu’à ses propres règles de procédure.

 

(3) La décision du conseil de la magistrature rendue dans un appel est définitive.

 

(4) Si le conseil de la magistrature n’est pas encore constitué, les règles établies par la Première nation de Kwanlin Dün (avant le 1er avril 2005) s’appliqueront selon ce que prévoit la Constitution de la PNKD.

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        T‑1383‑05

 

INTITULÉ :                                       LA PREMIÈRE NATION DE KWANLIN DÜN

 

-         et –

 

                                                            JENNIFER EDZERZA, HELEN CHARLIE

                                                            et JACINE FOX

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Whitehorse (Territoires du Yukon)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               LE 30 MARS 2006

 

MOTIFS DU JUGEMENT :            LE JUGE O’KEEFE

 

DATE DES MOTIFS :                      LE 27 SEPTEMBRE 2006

 

 

COMPARUTIONS :

 

Gary W. Whittle                                   POUR LA DEMANDERESSE

 

Nul n’a comparu                                   POUR LES DÉFENDERESSES

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Whittle et Compagnie                           POUR LA DEMANDERESSE

Whitehorse (Territoire du Yukon)

 

Miller Thomson LLP                             POUR LES DÉFENDERESSES

Whitehorse (Territoire du Yukon)

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