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Date : 20061025

Dossier : IMM-5547-06

Référence : 2006 CF 1280

Ottawa (Ontario), le 25 octobre 2006

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE HARRINGTON

 

ENTRE :

KASTURI ARACHCH PERERA (alias JOSEPH GAMINI

PERERA) et NILUPA DILAKSHA FERNANDO

 

demandeurs

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION et

LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE

ET DE LA PROTECTION CIVILE

 

défendeurs

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

 

[1]               Il est prévu que les demandeurs, qui sont mariés, seront renvoyés du Canada la semaine prochaine. Bien qu’ils soient citoyens du Sri Lanka, M. Perera doit être renvoyé aux États‑Unis et Mme Fernando, au Sri Lanka. Cette dernière a l’intention d’emmener avec elle leurs deux enfants nés au Canada.

 

[2]               Ils sollicitent un sursis à la mesure de renvoi prise contre eux en attendant que soient tranchées les procédures actuellement devant la Cour. Après le rejet de leur demande d’asile, ils ont demandé un examen des risques avant renvoi (ERAR) sur la situation au Sri Lanka ainsi que la permission de demeurer au Canada pour des circonstances d’ordre humanitaire (demande CH). Les deux demandes ont été rejetées.

 

[3]               Leurs demandes d’autorisation et de contrôle judiciaire visant ces décisions ont été déposées il y a peu. Aucune décision n’a encore été rendue.

 

[4]               Le sursis à la mesure de renvoi a été demandé dans le dossier de la Cour numéro IMM‑5547‑06, soit le dossier de la demande d’autorisation et de contrôle judiciaire visant la décision d’ERAR. La demande CH se trouve dans le dossier numéro IMM-5460-06. Cependant, les ministres n’ont pas contesté cette irrégularité et je n’en tiendrai pas compte.

 

[5]               Il est bien établi que, pour obtenir un sursis au moyen d’un recours interlocutoire, le demandeur doit montrer qu’il soulève une question sérieuse dans la procédure principale qui n’a pas encore été tranchée, qu’il subira un préjudice irréparable et que la prépondérance des inconvénients lui est favorable. Le demandeur doit prouver ces trois points (Toth c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1988] A.C.F. n587 (QL), (1988), 86 N.R. 302 (C.A.F.); RJR -- MacDonald Inc. c. Canada (Procureur général), [1994] 1 R.C.S. 311).

 

[6]               Parce que je ne suis pas convaincu que le préjudice irréparable ait été prouvé, il n’est pas nécessaire d’examiner si une question sérieuse est soulevée dans l’une ou l’autre des procédures principales. Il n’a pas été établi que les demandeurs subiront un préjudice irréparable durant la période relativement courte qui s’écoulera avant que les demandes soient tranchées. L’agente qui a rendu les décisions d’ERAR et CH a été critiquée pour s’être appuyée sur des conclusions défavorables quant à la crédibilité tirées dans la décision rejetant la demande d’asile. Il a été avancé qu’elle aurait dû tirer ses propres conclusions quant à la crédibilité. Cependant, comme l’a affirmé le juge Nadon dans Hussain c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [2000] A.C.F. n751 (QL), au paragraphe 12 :

Les demandeurs semblent croire que s’ils continuent à ajouter des documents au dossier, les conclusions de la Commission du statut de réfugié quant à leur crédibilité seront « infirmées » ou « oubliées ». Selon moi, ils sont dans l’erreur puisque l’agent qui traite une demande pour motifs humanitaires ne siège ni en appel ni en contrôle de la Commission du statut de réfugié ou de la décision de l’agente chargée de la CDNRSRC. Par conséquent, en traitant la demande pour motifs humanitaires, M. St. Vincent ne pouvait se fonder sur le fait que M. Hussain aurait été membre du MMQ, étant donné les conclusions de la Commission du statut de réfugié sur cette question. En bref, l’objectif d’une demande pour motifs humanitaires n’est pas de rediscuter des faits dont avait été saisie la Commission du statut de réfugié, non plus que de faire indirectement ce qui ne peut être fait directement, savoir contester les conclusions de la Commission du statut de réfugié.

 

[7]               L’agente est également critiquée pour ne pas avoir tenu compte de la possibilité que les époux soient séparés et que l’épouse et les enfants risquaient d’être persécutés au Sri Lanka en tant que famille dont le chef est une mère seule.

 

[8]               L’agente a effectivement pris en compte l’intérêt des enfants nés au Canada, qui ont tous deux moins de cinq ans, et a pris sa décision en supposant que la famille ne serait pas séparée. Elle a expressément affirmé que rien ne prouvait que l’intérêt supérieur des enfants serait compromis [traduction] « s’ils retournaient au Sri Lanka avec leurs parents ».

 

[9]               Toutefois, M. Perera et Mme Fernando, quoiqu’ils fussent déjà mariés, sont entrés au Canada séparément. M. Perera est entré par les États‑Unis, de sorte que, conformément aux accords entre le Canada et ce pays, il pourra y être renvoyé, ce qui n’est pas le cas pour Mme Fernando et les enfants.

 

[10]           L’agent d’exécution chargé de renvoyer le couple (mais pas les enfants, qui ont le droit de demeurer ici) était bien au courant de la situation et a donné trois semaines à M. Perera pour décider s’il préférait retourner directement au Sri Lanka avec son épouse. Tous les deux semblent préférer que les enfants demeurent avec Mme Fernando plutôt qu’au Canada avec les parents de cette dernière. M. Perera a affirmé qu’il préférait retourner aux États‑Unis, apparemment dans le but de prouver que sa crainte est légitime, bien qu’elle ait été jugée sans fondement jusqu’à maintenant. En fait, il laisse entendre qu’il pourrait y rester pendant des années, ce qui donne à penser qu’il y demandera l’asile.

 

[11]           Une bonne partie de la demande de Mme Fernando, qui était distincte de celle de son époux, s’appuyait sur la documentation de la CISR sur le pays d’origine au sujet des veuves, des femmes seules et des mères seules au Sri Lanka. Cependant, c’est le choix de son mari, et non celui de l’agent d’exécution, qui fera d’elle une mère seule au Sri Lanka et il est tout à fait inapproprié de blâmer l’agente d’ERAR. Quoique l’agente ait bien pris en considération la

 

 

 

violence faite aux femmes, rien n’exigeait qu’elle examine la situation peu enviable des mères seules.

« Sean Harrington »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

Elisabeth Ross


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                    IMM-5547-06

 

INTITULÉ :                                                   KASTURI ARACHCH PERERA (alias JOSEPH GAMINI PERERA) et NILUPA DILAKSHA FERNANDO

c.

                                                                        LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION et LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE 

 

LIEU DE L'AUDIENCE :                             OTTAWA (ONTARIO)

 

DATE DE L'AUDIENCE :                           LE 23 OCTOBRE 2006

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE :              LE JUGE HARRINGTON

 

DATE DES MOTIFS :                                  LE 25 OCTOBRE 2006

 

 

COMPARUTIONS :

 

Dan Bohbot

 

POUR LES DEMANDEURS

Annie Van Der Meerschen

 

POUR LES DÉFENDEURS

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Dan Bohbot

Avocat

Montréal (Québec)

 

POUR LES DEMANDEURS

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

 

POUR LES DÉFENDEURS

 

 

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