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Date :  20061031

Dossier :  T-1949-05

Référence :  2006 CF 1313

Ottawa, Ontario, le 31 octobre 2006

En présence de Monsieur le juge Blanchard

 

ENTRE :

 

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

Demandeur

et

ALAIN PARENT et LA COMMISSION

CANADIENNE DES DROITS DE LA PERSONNE

 

Défendeurs

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

1.         Introduction

[1]               La présente porte sur une demande de contrôle judiciaire d’une décision du Tribunal canadien des droits de la personne rendue le 3 octobre 2005 par le commissaire Athanios D. Hadjis permettant l’amendement de la plainte du défendeur Alain Parent/plaignant.

 

[2]               La date de l’audience devant le Tribunal n’est pas encore fixée.

 

[3]               Le demandeur réclame de cette Cour qu’elle casse la décision de la Commission au motif que le Tribunal avait erré dans l’exercice de sa discrétion en permettant l’amendement de la plainte.

 

2.         Contexte Factuel

[4]               Le 5 septembre 2002, le défendeur Alain Parent déposait une plainte à l’encontre des Forces canadiennes (l’intimé). Dans le formulaire de plainte, il est allégué que dès le 19 octobre 2001, le médecin en chef au service du demandeur donnait au plaignant la catégorie médicale «inapte au travail civil ou militaire». Le plaignant prétend qu’il a été maltraité et harcelé par ses supérieurs en raison de sa déficience (syndrome de stress post-traumatique), et qu’on lui a refusé des traitements médicaux auxquels il avait droit, le tout en contravention de l’article 7 de la Loi canadienne sur les droits de la personne, L.R. 1985, ch. H-6 (la Loi). Il prétend en outre qu’il a été libéré par mesure de représailles parce qu’il avait déposé une plainte, et ce, aussi en contravention de l’article 7 de la Loi.

 

[5]               Le 19 novembre 2002, l’intimé décide de libérer le plaignant. Le 30 octobre 2003, le rapport d’enquête recommande que la plainte soit instruite devant le Tribunal. La plainte est instruite au Tribunal le 25 mai 2004.

 

[6]               Le 5 octobre 2004, le plaignant demande la permission d’amender sa plainte et le 21 octobre 2004 en informe le Tribunal. Le 6 octobre 2004, l’intimé s’objecte à cette demande d’amendement. Le 28 octobre 2004, le Tribunal annule la médiation prévue entre les parties et indique qu’il appartenait au plaignant de répondre à l’objection de l’intimé telle qu’exprimée dans la lettre de 21 octobre 2004.

 

[7]               Le 31 janvier 2005, les parties produisent leur Réponses au questionnaire du Tribunal et le 27 avril 2005 le Tribunal ordonne que les parties produisent des observations écrites au sujet de la demande d’amendement du plaignant. Le 29 juin 2005, Alain Parent produit le document intitulé « Observations du plaignant concernant sa requête pour amender la plainte »; et le 21 juillet 2005, l’intimé produit sa contestation. Le 30 septembre 2005, le Tribunal accueille la requête en modification du plaignant, décision qui fut amendée le 3 octobre 2005.

 

[8]               Une conférence préparatoire est fixée pour le 5 octobre 2005 afin de déterminer l’échéancier applicable aux mesures préparatoires et à l’audition du dossier. Le 4 octobre 2005, l’intimé demande au Tribunal la remise de cette conférence préparatoire au motif qu’il étudiait la possibilité de présenter une demande de contrôle judiciaire. Le Tribunal rejette la demande de remise, et le 5 octobre 2005, une conférence préparatoire a lieu. À ce moment, le Tribunal fixe les échéances suivantes : le plaignant doit fournir son exposé des précisions et sa divulgation le ou avant le 6 décembre 2005; l’intimé doit fournir son exposé des précisions et sa divulgation le ou avant le 21 février 2006; et le plaignant doit fournir sa réplique à l’exposé des précisions de l’intimé le ou avant le 7 mars 2006. Les dates d’audience de ce dossier seront fixées lors de la conférence préparatoire du 7 novembre 2006.

 

3.         Rapport de l’enquêtrice

[9]               Dans son rapport, l’enquêtrice considère les neuf allégations suivantes :

(1)        Le mis en cause a demandé au plaignant de changer de médecin. [Selon l’enquêtrice, la preuve démontre plutôt que le mis en cause lui a plutôt demandé de choisir un médecin à Bagotville, en plus de son médecin-traitant pour assurer un suivi médical, selon les procédures en vigueur];

(2)        Le plaignant n’a reçu aucun suivi médical entre novembre 2001 et avril 2002. [Selon l’enquêtrice, la preuve démontre qu’il a été vu par un médecin en décembre 2001 et a fait l’objet d’une évaluation psychologique en janvier 2002];

(3)        Le plaignant a reçu une copie du rapport d’enquête final de la firme Textus plusieurs mois après que le mis en cause l’ait reçu. [Toutefois, selon l’enquêtrice, le plaignant se devait de faire une demande officielle en passant par le Bureau d’accès à l’information. Les allégations n’étaient pas examinées dans l’enquête, parce qu’elles mettent en question l’intégrité d’une tierce partie];

(4)        Le mis en cause a informé le plaignant de son acceptation à un cours à Borden, plusieurs semaines après avoir reçu le message;

(5)        Le mis en cause a refusé de lui accorder une promotion. [Selon l’enquêtrice, en juin 2001, la preuve appui l’allégation du plaignant, toutefois, cette situation a été redressée en novembre 2001, suite au dépôt d’un grief];

(6)        L’affichage d’une note à la vue de tout le personnel, à l’effet que le plaignant ne pouvait prendre son arme de service. [L’enquêtrice constate que ce n’est pas la procédure normale. Par conséquent, le plaignant était traité de façon différentielle et défavorisé en cours d’emploi];

(7)        En août 2001, le mis en cause n’a pas tenu compte de la recommandation du médecin traitant du plaignant de le muter parce que son état de santé se dégradait. [L’enquêtrice constate que le plaignant a été muté 7 mois plus tard à Valcartier];

(8)        Le Lcol Faucher a émis deux avis de mise en garde et surveillance au plaignant alors qu’il était en congé de maladie et ce, malgré le fait qu’il était au courant de son état de santé; et

(9)        Le 28 août 2000, alors que le plaignant était en congé de maladie autorisé du 17 août au 15 septembre 2000, le mis en cause a décidé de le relever de ses fonctions d’enquêteur-chef et de le remplacer par une autre personne, en raison de son état de santé. En outre, le 25 septembre 2000, le mis en cause a refusé de réintégrer le plaignant dans son poste d’enquêteur-chef, malgré une note de son médecin traitant attestant qu’il était apte à reprendre ses fonctions.

 

[10]           Dans son rapport, l’enquêtrice explique que les deux premières allégations n’étaient pas appuyées par la preuve. Bien que les autres allégations étaient appuyées dans la preuve, elles ne démontraient pas, sauf la dernière, que les mesures reprochées au mis en cause étaient prises en guise de représailles envers le plaignant en raison de son état de santé. L’enquêtrice a toute fois souligné que certaines mesures ne reflétaient pas la procédure normale.

 

[11]           En ce qui a trait à la dernière allégation, elle a déterminé que la preuve appuie l’allégation du plaignant selon laquelle il a été relevé de ses fonctions d’enquêteur-chef en raison de son état de santé. Elle recommande que cette allégation de la plainte soit instruite devant le Tribunal.

 

4.         Décision contestée

[12]           Devant le Tribunal, le plaignant demande de modifier sa plainte pour pouvoir y alléguer que son état de santé est un facteur qui a été pris en compte dans la décision de le libérer. La Commission a accueilli la requête du plaignant. C’est la décision qui fait l’objet de cette demande de contrôle judiciaire.

 

[13]           En opposant la requête devant le Tribunal, l’intimé soulève plusieurs questions. Il prétend qu’elle devrait être rejetée parce qu’il n’y a pas d’affidavit au soutien des faits allégués. Le Tribunal décide que les règles de procédure ne sont pas aussi formelles que celles d’un tribunal judiciaire. Par conséquent, il n’est pas nécessaire qu’un affidavit soit produit au soutien des requêtes. De plus, le Tribunal maintient qu’il « dispose d’un pouvoir discrétionnaire lui permettant de modifier une plainte afin d’y ajouter d’autres allégations, dans la mesure où un avis suffisant est donné à l’intimé afin qu’il ne subisse pas de préjudice et qu’il puisse se défendre de façon appropriée ».

 

[14]           L’intimé prétend aussi qu’il n’y a aucun lien entre la libération du plaignant et sa plainte initiale en matière de droits de la personne. Le Tribunal est d’avis que le bien-fondé de cette prétention peut être apprécié seulement après une instruction complète de la plainte et qu’à cette étape, le plaignant demande simplement d’ajouter certaines allégations qu’il aura le fardeau de prouver par la suite.

 

[15]           Devant le Tribunal, l’intimé prétend aussi que le plaignant essaie de court-circuiter le processus en tentant de renvoyer une plainte directement au Tribunal sans l’avoir déposée à la Commission pour qu’elle procède à un examen et à une enquête. Le Tribunal rejette cet argument et décide que les nouveaux faits allégués ne constituent pas une plainte distincte de celle qui a été déposée auprès de la Commission en 2002. Le Tribunal accepte les prétentions du plaignant à l’effet que la discrimination dont il a fait l’objet et le dépôt de la plainte sont des facteurs qui ont joué un rôle dans sa libération subséquente.

 

[16]           Le Tribunal détermine, en s’appuyant sur la décision Cook c. Première nation d’Onion Lake (2002), 43 C.H.R.R. D/77, que les questions qui découlent d’un même ensemble de circonstances devraient être entendues ensemble. Toutefois, la modification de la plainte ne devrait pas être autorisée si elle cause un préjudice injuste à l’autre partie. Les Forces canadiennes prétendent qu’elles subiront un préjudice si la requête est accueillie, à savoir l’obligation de préparer une défense aux allégations additionnelles. Le Tribunal n’est pas convaincu que cela constitue un préjudice réel et important. Il est également en désaccord avec la prétention de l’intimé selon laquelle elles subiraient un préjudice du fait que les nouvelles allégations ne seront pas soumises aux processus d’enquête et de conciliation de la Commission à l’instar de la plainte originale. Selon le Tribunal, l’avantage pour le plaignant consiste en la possibilité de régler la plainte à une étape moins avancée, soit avant le renvoi au Tribunal. Cependant, une fois la plainte renvoyée, l’intimée peut présenter au Tribunal les arguments qu’elle aurait présentés à l’enquêteur de la Commission.

 

 

 

 

5.         Question en litige

A.     Est-ce que le Tribunal canadien des droits de la personne a erré dans l’exercice de sa compétence en permettant que soit amendée la plainte du défendeur, Alain Parent?

 

6.         Norme de contrôle

[17]           La Cour Suprême du Canada a clairement indiqué que le juge doit, dans le cadre d’une révision judiciaire, effectuer une analyse pragmatique et fonctionnelle « chaque fois que la loi délègue un pouvoir à une instance administrative décisionnelle » (Dr Q c. College of Physicians and Surgeons of British Columbia, [2003] 1 R.C.S. 226). La décision Sketchley c. Canada (Procureur général), [2005] A.C.F. no 2056 (QL), de la Cour d’appel fédérale abonde également en ce sens comme le démontre le passage suivant au para. 50 : « …l’analyse doit être effectué de nouveau pour chaque décision et non seulement pour chaque type général de décision d’un décideur en particulier en vertu d’une disposition législative précise ». (Souligné dans l’original.)

 

[18]           Dans le cas qui nous occupe, la question précise qui va être l’objet de l’analyse fonctionnelle et pragmatique est la suivante : est-ce que le Tribunal a erré dans l’exercice de sa discrétion en permettant l’amendement?

 

[19]           Le Tribunal jouit d’une discrétion considérable relativement à l’instruction des plaintes en vertu du paragraphe 48.9(2) de la Loi. L’exercice de cette discrétion afin d’accorder une demande d’amendement à une plainte repose non seulement sur la Loi mais aussi sur l’appréciation des faits. Il s’agit donc d’une question mixte de fait et de droit.

 

(i)         Présence ou absence d’une clause privative ou d’un droit d’appel prévu par la Loi

 

[20]           Le premier facteur qui doit être considéré par la cour est la présence ou l’absence d’une clause privative ou d’un droit d’appel dans la loi. En l’espèce la disposition qui fonde la compétence du tribunal se lit comme suit :

 

44(3) Sur réception du rapport d’enquête prévu au paragraphe (1), la Commission :

 

a) peut demander au président du Tribunal de désigner, en application de l’article 49, un membre pour instruire la plainte visée par le rapport, si elle est convaincue :

 

(i) d’une part, que, compte tenu des circonstances relatives à la plainte, l’examen de celle-ci est justifié,

(ii) d’autre part, qu’il n’y a pas lieu de renvoyer la plainte en application du paragraphe (2) ni de la rejeter aux termes des alinéas 41c) à e);

 

b) rejette la plainte, si elle est convaincue :

 

 

(i) soit que, compte tenu des circonstances relatives à la plainte, l’examen de celle-ci n’est pas justifié,

 

(ii) soit que la plainte doit être rejetée pour l’un des motifs énoncés aux alinéas 41c) à e).

44(3) On receipt of a report referred to in subsection (1), the Commission

 

 

(a) may request the Chairperson of the Tribunal to institute an inquiry under section 49 into the complaint to which the report relates if the Commission is satisfied

 

(i) that, having regard to all the circumstances of the complaint, an inquiry into the complaint is warranted, and

 

(ii) that the complaint to which the report relates should not be referred pursuant to subsection (2) or dismissed on any ground mentioned in paragraphs 41(c) to (e); or

 

(b) shall dismiss the complaint to which the report relates if it is satisfied

 

(i) that, having regard to all the circumstances of the complaint, an inquiry into the complaint is not warranted, or

 

(ii) that the complaint should be dismissed on any ground mentioned in paragraphs 41(c) to (e).

 

[21]           Il ressort de la lecture de cette disposition qu’aucune directive concernant l’appel n’est donnée et, par conséquent, ce facteur n’a pas d’influence sur la norme de contrôle. En effet, dans Dr. Q, au paragraphe 27, la cour a spécifié que « le silence est neutre et n’implique pas une norme élevée de contrôle » (citant Pushpanathan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), [1998] 1 R.C.S. 1222, au paragraphe 30).

 

(ii)        Expertise relative

[22]           La décision de Sketchley précise que la cour doit considérer trois dimensions lorsqu’elle examine le facteur de l’expertise du tribunal, c’est-à-dire qu’elle doit examiner l’expertise du tribunal en question; qu’elle doit examiner sa propre expertise par rapport à celle du tribunal; et qu’elle doit identifier la nature de la question précise dont était saisi le tribunal administratif par rapport à son expertise (Pushpanathan, précité, au paragraphe 33).

 

[23]           Comme je l’ai mentionné précédemment, la question devant la Cour est une question mixte de fait et de droit. L’expertise de la Commission en est une de détermination des faits. De plus, la question de droit est étroitement liée au domaine d’expertise du tribunal, à savoir l’interprétation de sa loi habilitante. Alors, dans le domaine des droits de la personne, la détermination d’une question mixte de faits et de droit fait appel à l’expertise particulière du tribunal. Le tribunal s’est vu accordé un degré remarquable de latitude dans l’établissement de ses règles de procédure et en ce sens conserve un certain avantage sur la Cour où la question est de savoir si un amendement devrait être permis. À mon avis, l’expertise relative du tribunal sur cette question favorise l’application d’une norme qui commande une plus grande retenue judiciaire.

 

(iii)       Objet de la Loi en général et de la disposition en particulier

[24]           L’objet de la Loi, décrit à l’article 2, est essentiellement d’empêcher les pratiques discriminatoires fondées sur certains motifs illicites. Comme la cour l’a d’ailleurs rappelé dans la décision Sketchley au paragraphe 74, « La protection des droits humains et individuels est une valeur fondamentale au Canada et les institutions, organismes ou personnes qui ont reçu le mandat, en vertu de la loi, d'examiner ces questions sont assujettis à un certain contrôle de la part des autorités judiciaires ».

 

[25]           Le but du paragraphe 48.9(1) est de donner le pouvoir à la Commission de faire son travail avec efficacité, tout en respectant les principes d’équité procédurale. Cette disposition doit recevoir une interprétation large de manière à ce qu’elle soit en mesure de traiter les questions imprévues. Vraisemblablement, le Parlement a promulgué cette disposition pour couvrir toutes les situations relatives à la procédure. Cette conclusion constitue une indication qu’il convient d’appliquer une norme qui commande une grande déférence.

 

(iv)       Nature du problème

[26]           Une question mixte de fait et de droit appelle « une déférence plus grande si la question est principalement factuelle, et moins grande si elle est principalement de droit » (Dr. Q, au paragraphe 34). Dans la mesure où la Commission décide de rejeter une demande  d’amendement en s’appuyant sur une conclusion qu’elle a tirée relativement à une question de droit, le degré de déférence qui sera exercée lors de la révision de cette décision sera moindre. En l’espèce, la Commission a considéré principalement si l’acte de discrimination allégué dans l’amendement était fondé sur les mêmes circonstances qui ont fondées la plainte initiale. Le Tribunal devait se pencher également sur la question du préjudice. Ce sont là essentiellement des questions factuelles qui justifient que le degré de déférence sera plus élevé.

 

[27]           Je conclus donc, suite à l’analyse pragmatique et fonctionnelle, que la norme de contrôle applicable sur la question qui nous occupe est celle de la décision raisonnable simpliciter.

 

[28]           En ce qui a trait aux questions mixtes de fait et de droit, la Cour d’appel fédérale en est venue à la même détermination dans l’arrêt La Commission canadienne des droits de la personne c. Le Procureur général du Canada, 2005 CAF 154, au paragraphe 22 :

Dans l'arrêt Lincoln c. Bay Ferries Ltd., (2004), 322 N.R. 50, 2004 CAF 204, la Cour a dit (paragraphe 16) que les parties s'étaient entendues sur les normes de contrôle applicables aux différents genres de questions tranchées par un tribunal en vertu de la Loi canadienne sur les droits de la personne. Par conséquent, les questions de droit tranchées par le Tribunal sont susceptibles d'examen selon la norme de la décision correcte; les questions mixtes de fait et de droit sont susceptibles d'examen selon la norme de la décision raisonnable simpliciter; et « l'appréciation des faits et les décisions dans le contexte des droits de la personne » sont susceptibles d'examen selon la norme de la décision manifestement déraisonnable. (Je souligne.)

 

7.         Analyse

[29]           Les articles pertinents de la Loi sont reproduits en Annexe.

 

[30]           Le Tribunal jouit d’une discrétion considérable relativement à l’instruction des plaintes en vertu des paragraphes 48.9(1) et (2) et des articles 49 et 50 de la Loi. En ce qui a trait à l’exercice de cette discrétion pour traiter d’une demande d’amendement, dans l’arrêt Canderel Ltée c. Canada (C.A.), [1994] 1 C.F. 3, 1993 IIJCan 2990 (C.A.F.), le juge Robert Décary a rappelé que : « […] la règle générale est qu'une modification devrait être autorisée à tout stade de l'action aux fins de déterminer les véritables questions litigieuses entre les parties, pourvu, notamment, que cette autorisation ne cause pas d'injustice à l'autre partie que des dépens ne pourraient réparer, et qu'elle serve les intérêts de la justice ».

 

[31]           Les tribunaux judiciaires font preuve d’une déférence considérable face à l’exercice de cette discrétion. Dans l’arrêt Bell Canada c. Syndicat canadien des communications, de l'énergie et du papier (C.A.), [1999] 1 C.F. 113, [1998] A.C.F. no 1609, le juge Décary a souligné que tel était l’intention du législateur :

 

La Loi confère à la Commission un degré remarquable de latitude dans l'exécution de sa fonction d'examen préalable au moment de la réception d'un rapport d'enquête. Les paragraphes 40(2) et 40(4), et les articles 41 et 44 regorgent d'expressions comme « à son avis », « devrait », « normalement ouverts », « pourrait avantageusement être instruite », « des circonstances », « estime indiqué dans les circonstances », qui ne laissent aucun doute quant à l'intention du législateur.[…] le législateur ne voulait pas que les cours interviennent à la légère dans les décisions prises par la Commission à cette étape.

 

 

[32]           Le demandeur soutient que les modifications apportées par le défendeur Alain Parent ne découlent pas des mêmes faits que la plainte originale, et donc qu’elles ne devraient pas être permises. Plus précisément, il prétend que la décision de libérer le défendeur Alain Parent a été prise par des personnes différentes que celles visées par la plainte originale.

 

[33]           Dans l’affaire Cook c. Première nation d’Onion Lake, [2002] D.C.D.P. no. 12, le membre Groarke écrit : « [l]a règle de pratique est par conséquent que les questions qui découlent d’un même ensemble de circonstances factuelles devraient normalement être entendues ensemble ».

 

[34]           Dans la décision Kavanagh c. S.C.C. (31 Mai 1999), T505/2298 (T.C.D.P.), la présidente du tribunal a repris le raisonnement appliqué par la Commission d’enquête de l’Ontario dans Entrop c. Compagnie pétrolière impériale Ltée (1994) 23 C.H.R.R. D/186. Il est écrit au paragraphe 9 de cette décision qu’il : « serait difficile au plan pratique, inefficace et injuste d’exiger que les personnes présentent des allégations de représailles seulement dans le cadre d’une procédure distincte ». La même démarche a été suivie dans Fowler c. Flicka Gymnastics Club, 31 C.H.R.R. D/397 (B.C.H.R.C.). Dans cette affaire, la partie plaignante a soutenu que l’amendement découlait [traduction] « des faits constituant le fondement de la plainte initiale ».

 

[35]           Par ailleurs, la Cour d’appel de la Nouvelle Écosse dans la décision I M P Group Ltd. c. Dillman, [1995] N.S.J. No. 326, a critiqué une commission d’enquête parce que cette dernière avait permis une modification qui allait au-delà des faits de la plainte initiale. Au paragraphe 35 de la décision, la Cour a déclaré ce qui suit :

 

Soulever une nouvelle plainte à l’étape de l’audience contournerait tout le processus législatif qui est structuré de manière à permettre des tentatives de conciliation et de règlement. Cette question n’a pas été l’objet des étapes préliminaires d’enquête, de conciliation et de renvoi par la Commission pour faire instruire la plainte en vertu d’alinéa 32a) de la Loi. La commission d’enquête a traité d’une question dont elle n’avait jamais été saisie.

 

 

[36]           En l’espèce, la décision de la Commission de recommander qu’une plainte soit inscrite devant le Tribunal était basée sur la preuve qui « à démontrer que ces mesures ont été prises en guise de représailles envers le plaignant, en raison de son état de santé ». La Commission a décidé que l’allégation selon laquelle le plaignant a été relevé de son poste d’enquêteur-chef en raison de sa déficience méritait d’être retenue.

 

[37]           Le demandeur ne conteste pas que le défendeur Alain Parent, durant l’enquête de la plainte initiale, aurait informé l’enquêtrice de sa libération par l’intimé pour raison dite discriminatoire. D’ailleurs, ce fait est expressément mentionné dans le rapport de l’enquêtrice.

 

[38]           Les faits qui constituent le fondement de la plainte initiale, notamment la déficience dont souffrait le défendeur Alain Parent, à savoir le syndrome de stress post-traumatique, sont les mêmes que ceux qui constituent le fondement de l’amendement accordé par le Tribunal.  En autres mots, la déficience qui lui aurait causé d’être relevé de son poste d’enquêteur-chef selon sa plainte initiale, lui aurait aussi causé sa libération. Alors, les actes de discrimination allégués contre l’intimé dans la plainte initiale et dans l’amendement accordé sont fondés sur ce même facteur, la déficience dont souffrait le défendeur Alain Parent.

 

[39]           Il aurait été préférable que le défendeur Alain Parent demande l’amendement de la plainte au moment de sa libération, ce qui aurait permis que la question bénéficie des étapes préliminaires d’enquêtes. Malgré ce manquement, je suis d’avis que le Tribunal n’a pas erré dans l’exercice de sa discrétion en permettant l’amendement. L’amendement ne constitue pas à mon avis une nouvelle plainte puisque les deux actes de discrimination allégués sont essentiellement fondés sur les mêmes faits.

 

[40]           La question du préjudice est le facteur prédominent a être considéré dans de telles circonstances. L’amendement ne doit pas être accordé s’il cause un préjudice à l’intimé. Ici, bien que la plainte ait pu être amendée à un stade moins avancé des procédures, rien dans la preuve n’indique que les Forces canadiennes n’étaient en mesure de se préparer et de faire valoir sa position sur les questions soulevées. L’amendement n’a causé aucun préjudice à l’intimée et dans les circonstances, la prépondérance des inconvénients penche en faveur du défendeur Alain Parent.

 

[41]           Le Tribunal jouit d’une large discrétion accordée par la Loi pour la prise de décisions à cette étape. Compte tenu des circonstances en l’espèce où le même facteur « la santé du défendeur Alain Parent » aurait motivé les deux actes discriminatoires allégués et compte tenu du fait que la libération dudit défendeur a été soulevée dans le rapport d’enquête, je suis d’avis que le Tribunal avait compétence pour rendre sa décision et n’a pas erré dans l’exercice de sa discrétion. Je suis donc d’avis que le Tribunal était en droit de conclure que les nouveaux faits allégués ne constituent pas une plainte distincte de celle qui aurait été apportée auprès de la Commission en 2002.

 

[42]           Le demandeur prétend aussi que le Tribunal a court-circuité le processus d’analyse et d’enquête de la Commission canadienne des droits de la personne, prévu à l’article 49 de la Loi. Il explique qu’il appartient à la Commission de décider après enquête si une plainte sera référée ou non au Tribunal pour audition. Lorsque l’amendement intègre de nouveaux faits et qu’il survient alors que le dossier est encore au stade de l’enquête devant la Commission, le demandeur est d’avis que le défendeur Alain Parent ne peut pas attendre presque deux ans avant de demander la permission d’y procéder.

 

[43]           Je ne retiens pas cette prétention du demandeur. Dans les circonstances, il existe un facteur commun qui fonde les allégations de discrimination dans la plainte initiale et dans l’amendement accordé, à savoir la santé du défendeur Alain Parent. Cela constitue le lien qui permet au Tribunal de conclure comme il l’a fait. La discrimination dont se plaint ledit défendeur est alléguée être également un facteur dans sa libération.

 

[44]           Alors, bien qu’on puisse parler d’un nouvel acte discriminatoire allégué, la libération dudit défendeur, l’acte résulte des mêmes circonstances et on ne peut parler, en terme absolu, d’une nouvelle plainte. En l’absence de préjudice au demandeur, le Tribunal était en droit d’accorder l’amendement et, tel que déterminé plus haut, n’a pas erré dans l’exercice de sa discrétion.

 

[45]           Enfin, je rejette aussi les prétentions du demandeur quant à l’absence de preuve pour permettre l’amendement, je suis en accord avec les propos du Tribunal à ce sujet :

 

Les Règles de procédure du Tribunal ne sont pas aussi formelles que celles d’une cour. Il n’est pas nécessaire qu’un affidavit soit produit au soutien des requêtes (voir l’article 3 des Règles). En fait, les requêtes n’ont à respecter aucune forme particulière […]. Le principal objectif consiste à s’assurer que toutes les parties ont la possibilité pleine et entière d’être entendues par le Tribunal.

 

 

[46]           Il convient de noter que les allégations faites dans une plainte amendée doivent nécessairement être prouvées au stade de l’audience devant le Tribunal.

 

8.         Conclusion

[47]           En l’espèce, la décision par le Tribunal de permettre l’amendement ne constitue pas une atteinte aux règles d’équité procédurale. Le Tribunal avait la compétence de permettre l’amendement et n’a pas erré dans l’exercice de sa compétence. Je suis donc d’avis que la demande de contrôle judiciaire devra être rejetée avec dépens.


ORDONNANCE

 

            LA COUR ORDONNE QUE :

 

1.         La demande de contrôle judiciaire soit rejetée avec dépens.

 

 

 

« Edmond P. Blanchard »

Juge

 

 


 

                                             APPENDICE

 

 

41. (1) Sous réserve de l’article 40, la Commission statue sur toute plainte dont elle est saisie à moins qu’elle estime celle-ci irrecevable pour un des motifs suivants :

a) la victime présumée de l’acte discriminatoire devrait épuiser d’abord les recours internes ou les procédures d’appel ou de règlement des griefs qui lui sont normalement ouverts;

b) la plainte pourrait avantageusement être instruite, dans un premier temps ou à toutes les étapes, selon des procédures prévues par une autre loi fédérale;

c) la plainte n’est pas de sa compétence;

d) la plainte est frivole, vexatoire ou entachée de mauvaise foi;

e) la plainte a été déposée après l’expiration d’un délai d’un an après le dernier des faits sur lesquels elle est fondée, ou de tout délai supérieur que la Commission estime indiqué dans les circonstances.

 

41. (1) Subject to section 40, the Commission shall deal with any complaint filed with it unless in respect of that complaint it appears to the Commission that

(a) the alleged victim of the discriminatory practice to which the complaint relates ought to exhaust grievance or review procedures otherwise reasonably available;

(b) the complaint is one that could more appropriately be dealt with, initially or completely, according to a procedure provided for under an Act of Parliament other than this Act;

(c) the complaint is beyond the jurisdiction of the Commission;

(d) the complaint is trivial, frivolous, vexatious or made in bad faith; or

(e) the complaint is based on acts or omissions the last of which occurred more than one year, or such longer period of time as the Commission considers appropriate in the circumstances, before receipt of the complaint.

 

 

 

48.9 (1) L’instruction des plaintes se fait sans formalisme et de façon expéditive dans le respect des principes de justice naturelle et des règles de pratique.

(2) Le président du Tribunal peut établir des règles de pratique régissant, notamment :

a) l’envoi des avis aux parties;

b) l’adjonction de parties ou d’intervenants à l’affaire;

c) l’assignation des témoins;

d) la production et la signification de documents;

e) les enquêtes préalables;

f) les conférences préparatoires;

g) la présentation des éléments de preuve;

h) le délai d’audition et le délai pour rendre les décisions;

i) l’adjudication des intérêts.

 

49. (1) La Commission peut, à toute étape postérieure au dépôt de la plainte, demander au président du Tribunal de désigner un membre pour instruire la plainte, si elle est convaincue, compte tenu des circonstances relatives à celle-ci, que l’instruction est justifiée.

(2) Sur réception de la demande, le président désigne un membre pour instruire la plainte. Il peut, s’il estime que la difficulté de l’affaire le justifie, désigner trois membres, auxquels dès lors les articles 50 à 58 s’appliquent.

(3) Le président assume lui-même la présidence de la formation collégiale ou, lorsqu’il n’en fait pas partie, la délègue à l’un des membres instructeurs.

 

(4) Le président met à la disposition des parties un exemplaire des règles de pratique.

 

(5) Dans le cas où la plainte met en cause la compatibilité d’une disposition d’une autre loi fédérale ou de ses règlements d’application avec la présente loi ou ses règlements d’application, le membre instructeur ou celui qui préside l’instruction, lorsqu’elle est collégiale, doit être membre du barreau d’une province ou de la Chambre des notaires du Québec.

(6) Le fait qu’une partie à l’enquête soulève la question de la compatibilité visée au paragraphe (5) en cours d’instruction n’a pas pour effet de dessaisir le ou les membres désignés pour entendre l’affaire et qui ne seraient pas autrement qualifiés pour l’entendre.

50. (1) Le membre instructeur, après avis conforme à la Commission, aux parties et, à son appréciation, à tout intéressé, instruit la plainte pour laquelle il a été désigné; il donne à ceux-ci la possibilité pleine et entière de comparaître et de présenter, en personne ou par l’intermédiaire d’un avocat, des éléments de preuve ainsi que leurs observations.

 

(2) Il tranche les questions de droit et les questions de fait dans les affaires dont il est saisi en vertu de la présente partie.

 

(3) Pour la tenue de ses audiences, le membre instructeur à le pouvoir :

a) d’assigner et de contraindre les témoins à comparaître, à déposer verbalement ou par écrit sous la foi du serment et à produire les pièces qu’il juge indispensables à l’examen complet de la plainte, au même titre qu’une cour supérieure d’archives;

 

b) de faire prêter serment;

c) de recevoir, sous réserve des paragraphes (4) et (5), des éléments de preuve ou des renseignements par déclaration verbale ou écrite sous serment ou par tout autre moyen qu’il estime indiqué, indépendamment de leur admissibilité devant un tribunal judiciaire;

d) de modifier les délais prévus par les règles de pratique;

e) de trancher toute question de procédure ou de preuve.

(4) Il ne peut admettre en preuve les éléments qui, dans le droit de la preuve, sont confidentiels devant les tribunaux judiciaires.

(5) Le conciliateur n’est un témoin ni compétent ni contraignable à l’instruction.

 

(6) Les témoins assignés à comparaître en vertu du présent article peuvent, à l’appréciation du membre instructeur, recevoir les frais et indemnités accordés aux témoins assignés devant la Cour fédérale.

48.9 (1) Proceedings before the Tribunal shall be conducted as informally and expeditiously as the requirements of natural justice and the rules of procedure allow.

(2) The Chairperson may make rules of procedure governing the practice and procedure before the Tribunal, including, but not limited to, rules governing

(a) the giving of notices to parties;

(b) the addition of parties and interested persons to the proceedings;

(c) the summoning of witnesses;

(d) the production and service of documents;

(e) discovery proceedings;

(f) pre-hearing conferences;

(g) the introduction of evidence;

(h) time limits within which hearings must be held and decisions must be made; and

(i) awards of interest.

49. (1) At any stage after the filing of a complaint, the Commission may request the Chairperson of the Tribunal to institute an inquiry into the complaint if the Commission is satisfied that, having regard to all the circumstances of the complaint, an inquiry is warranted.

(2) On receipt of a request, the Chairperson shall institute an inquiry by assigning a member of the Tribunal to inquire into the complaint, but the Chairperson may assign a panel of three members if he or she considers that the complexity of the complaint requires the inquiry to be conducted by three members.

(3) If a panel of three members has been assigned to inquire into the complaint, the Chairperson shall designate one of them to chair the inquiry, but the Chairperson shall chair the inquiry if he or she is a member of the panel.

(4) The Chairperson shall make a copy of the rules of procedure available to each party to the complaint.

(5) If the complaint involves a question about whether another Act or a regulation made under another Act is inconsistent with this Act or a regulation made under it, the member assigned to inquire into the complaint or, if three members have been assigned, the member chairing the inquiry, must be a member of the bar of a province or the Chambre des notaires du Québec.

(6) If a question as described in subsection (5) arises after a member or panel has been assigned and the requirements of that subsection are not met, the inquiry shall nevertheless proceed with the member or panel as designated.

 

50. (1) After due notice to the Commission, the complainant, the person against whom the complaint was made and, at the discretion of the member or panel conducting the inquiry, any other interested party, the member or panel shall inquire into the complaint and shall give all parties to whom notice has been given a full and ample opportunity, in person or through counsel, to appear at the inquiry, present evidence and make representations.

(2) In the course of hearing and determining any matter under inquiry, the member or panel may decide all questions of law or fact necessary to determining the matter.

(3) In relation to a hearing of the inquiry, the member or panel may

(a) in the same manner and to the same extent as a superior court of record, summon and enforce the attendance of witnesses and compel them to give oral or written evidence on oath and to produce any documents and things that the member or panel considers necessary for the full hearing and consideration of the complaint;

(b) administer oaths;

(c) subject to subsections (4) and (5), receive and accept any evidence and other information, whether on oath or by affidavit or otherwise, that the member or panel sees fit, whether or not that evidence or information is or would be admissible in a court of law;

(d) lengthen or shorten any time limit established by the rules of procedure; and

(e) decide any procedural or evidentiary question arising during the hearing.

(4) The member or panel may not admit or accept as evidence anything that would be inadmissible in a court by reason of any privilege under the law of evidence.

(5) A conciliator appointed to settle the complaint is not a competent or compellable witness at the hearing.

 

(6) Any person summoned to attend the hearing is entitled in the discretion of the member or panel to receive the same fees and allowances as those paid to persons summoned to attend before the Federal Court.

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

DOSSIER :                                        T-1949-05

 

INTITULÉ :                                       PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA V. ALAIN PARENT et al.

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Québec, Québec

 

DATE DE L’AUDIENCE :               le 5 octobre 2006

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE :              le juge Blanchard

 

DATE :                                               le 31 octobre 2006

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Me Pierre Lecavalier                                                                POUR LE DEMANDEUR

 

Me Josée Potvin                                                                       POUR LES DÉFENDEURS

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

John H. Sims, c.r.                                                                     POUR LE DEMANDEUR

Sous-procureur général du Canada

Montréal (Québec)

 

Fradette, Gagnon, Têtu, Le Bel, Potvin                                     POUR LES DÉFENDEURS

Chicoutimi (Québec)

 

 

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