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Date :  20061101

Dossier :  IMM-1315-06

Référence :  2006 CF 1320

Ottawa (Ontario), le 1er novembre 2006

En présence de Monsieur le juge Blanchard

 

ENTRE :

 

ELIZABETH SYLVIA STAPLETON

DONETTE DESREE JOHN

Demanderesses

et

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

Défendeur

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

1.         Introduction

[1]               La présente porte sur une demande de contrôle judiciaire d’une décision de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié, section de la protection des réfugiés (la Commission), rendue le 16 janvier 2006. Par cette décision, les demanderesses se sont vues refuser la qualité de réfugié et de personne à protéger. Elles réclament de cette Cour qu’elle infirme la décision de la Commission et qu’elle renvoie le dossier devant un tribunal différemment constitué.

 

2.         Contexte factuel

[2]               La demanderesse principale, Mme Stapleton, est une ressortissante de l’État de Saint-Vincent-et-les Grenadines, née le 19 avril 1974. La co-demanderesse, Mlle John, née le 22 octobre 1990, également ressortissante de cet état, est la fille de la demanderesse principale.

 

[3]               La demanderesse principale a été victime de sévères abus sexuels et d’épisodes de violence physique et psychologique depuis son jeune âge, soit depuis qu’elle a l’âge de dix ans, à cette occasion, de la part de son père d’où d’ailleurs est né un enfant qu’elle a dû abandonner par la suite. Tout de suite après, elle a rencontré un homme duquel elle est devenue enceinte presque immédiatement. Elle a eu une fille (la co-demanderesse) et un autre enfant qu’elle abandonnera encore par la suite du fait que son mari était devenu abusif à son égard.

 

[4]               En 1993, la police est intervenue contre son mari. La demanderesse a également obtenu une ordonnance de pension alimentaire en 1992 et une « protection order » contre son mari en 1993.

 

[5]               Le mari en question a abusé sexuellement la fille de la demanderesse. Elle a donc quitté cet homme et elle est venue au Canada en 2001 pour être, par la suite, expulsée. Conséquemment, elle est retournée dans son pays. Le couple a divorcé et elle est partie vivre avec un autre homme.

 

[6]               Tout se passait bien avec cet autre conjoint jusqu’au jour où sa fille lui a dit que ce dernier avait touché ses seins. Par la suite, les choses se sont compliquées entre le conjoint et la jeune fille.

 

[7]               Au mois de février 2004, le conjoint a battu la fille, ce qui a amené la demanderesse à quitter le domicile familial avec sa fille. Elle a appelé la police et une action en justice a été entreprise contre le conjoint. Cette action a été abandonnée en raison du départ de la demanderesse pour le Canada. Cette dernière prétend avoir peur que son conjoint ne se venge contre elle et sa fille si elles retournaient à Saint-Vincent, en raison de la poursuite qui a été intentée contre lui.

 

[8]               La demanderesse principale est arrivée au Canada le 16 mars 2004 et sa fille le 20 décembre, 2004. Elles ont demandé la protection du Canada le 13 septembre 2005.

 

[9]               La demanderesse principale allègue qu’elle conserve à ce jour de profondes séquelles psychologiques.

 

[10]           Elles ont toutes les deux revendiqué le statut de réfugié le 13 septembre 2005, et fondent leur demande d’asile sur les abus sexuels qu’elles ont subis. Dans le cadre de cette demande, la demanderesse Stapleton a été nommée représentante désignée de la co-demanderesse, Mlle John.

 

[11]           Le 16 janvier 2006, à Montréal, leur revendication a été rejetée oralement par le Tribunal.

 

[12]           Le 10 mars 2006, les demanderesses ont introduit une demande d’autorisation et demande de contrôle judiciaire.

 

3.         Décision contestée

[13]           Tout d’abord, dans la décision du tribunal, le Commissaire a constaté les faits suivants :

-                     à chaque fois que la demanderesse est venue au Canada, elle a laissé sa fille à Saint-Vincent-et-les Grenadines et ce, même si elle affirme que cette dernière était en danger;

-                     à l’exception du mois de février 2004, il n’y a jamais eu de violence physique contre les demanderesses; et

-                     le tribunal ne constate pas qu’il y aurait eu refus de protection de l’État en tant que tel;

-                     le tribunal constate plutôt que la police est intervenue à plusieurs reprises à la demande de Mme Stapleton.

 

[14]           Au soutien de ses conclusions, la Commission réfère à l’arrêt Canada (Procureur général) c. Ward, [1993] 2 R.C.S. 689, de la Cour suprême du Canada, dans laquelle elle a décidé qu’ : « [e]n l’absence de l’effondrement complet de l’appareil étatique, il y a lieu de présumer que l’État est capable de protéger le demandeur ». Elle cite ensuite l’arrêt Szorenyi, Gabor c. M.C.I. (C.F., IMM-2817-02), dans lequel la Cour a souligné qu’il existe de nombreuses situations aux termes desquelles la Commission serait justifiée d’exiger des demandeurs, qu’en plus de s’adresser à la police, ils épuisent tous les recours possibles pour obtenir la protection de l’État. Enfin, elle réfère à l’arrêt Kadenko c. Canada (Procureur General), (1995), 32 Imm. L.R. (2d) 275, qui établit que le défaut des autorités locales d’assurer une protection adéquate n’indique pas un manque de protection de la part de l’État à moins qu’il ne s’agisse d’une situation plus générale, où que l’État soit incapable ou refuse d’offrir sa protection.

 

[15]           Ensuite, le tribunal examine la preuve documentaire à propos de la capacité de Saint-Vincent-et-les Grenadines à protéger ses citoyens. La Commission, après avoir considéré la preuve documentaire supportant l’idée que Saint-Vincent-et-les Grenadines a une police et système judiciaire efficace, décide que : « le tribunal ne peut certes conclure qu’il n’y a pas de protection de l’État ou que cette protection serait inefficace dans les cas de violences conjugales ou domestiques à Saint Vincent ». Au sujet de la fille de la demanderesse, elle décide que « rien dans la preuve qui m’a été présentée ne me permet de conclure qu’elle risquerait d’être persécutée et/ou que sa vie serait menacée si elle devait retourner dans son pays d’origine ». Par conséquent, la Commission rejette les demandes d’asile.

 

4.         Questions en litige

A.        La Commission a-t-elle erré en omettant d’appliquer les Directives relatives à la persécution fondée sur le sexe?

B.         La Commission a-t-elle erré en concluant que les demanderesses ne s’étaient pas déchargé de leur fardeau de renverser la présomption que leur pays, l’état de      St-Vincent-et-les Grenadines, était capable de les protéger?

C.        La Commission, a-t-elle erré en omettant d’examiner la question à savoir si les demanderesses devaient bénéficier de l’application du paragraphe 108(4) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (la Loi)?

D.        L’instance de la Commission en rendant sa décision sur le banc se traduit-elle en un manquement à un principe de justice naturelle?

 

 

5.         Analyse

A.                 La Commission a-t-elle erré en omettant d’appliquer les Directives relatives à la persécution fondée sur le sexe?

 

[16]           Les demanderesses allèguent que le tribunal a erré en omettant d’appliquer les Directives relatives à la persécution fondée sur le sexe (Directives) en faisant preuve de manque de connaissance, de compréhension et de sensibilité relativement aux questions de violence conjugale. Pour appuyées leur allégations les demanderesses identifient plusieurs exemples de ce manquement durant l’audience devant la Commission. En voici quelques exemples :

-         à la page 17 des transcriptions :

53        Q.        What happened then, you became pregnant?

            A.        Yes, I became pregnant.

54        Q.        How many days or weeks after you abandoned your child, how many days after that?

            A.        I got pregnant?

55        Q.        Yes.

            A.        I got pregnant maybe one or two days after.

56        Q.        You got pregnant one or two days after you abandoned your child?

            A.        Yes.

57        Q.        Did you want to get pregnant?

            A.        No.     

58        Q.        Did you ever learn about protection? Was there no protection over there?

A.        I never learned. I never had someone to talk to me.

 

 

59        Q.        Okay, you didn’t know you could have been protected?

A.        No. [Les demanderesses soulignent.]

 

-         à la page 28 des transcriptions :

126      Q.        And you took him back every time? When he came back you allowed him to come into the house?

            A.        But when he comes he don’t stay to my room with me.

127      Q.        He wouldn’t stay five minutes with me, but you know – [Les demanderesses soulignent.]

 

-         à la page 33 des transcriptions  :

158      Q.        What did you do then?

A.        I waited until he left the house and I take my stuff and leave

159      Q.        About time, yes.

            A.        Yes.

160      Q.        A good decision. […] [Les demanderesses soulignent.]

 

-         à la page 35 des transcriptions :

 

169      Q.        Did you go to the police then?

            A.        No, I didn’t.

170      Q.        Why not?

            A.        Because I was ashamed.

171      Q.        Ashamed of what?

            A.        Because when it gets to the people hearing they are going to boo my daughter when she walks on the street. It is not easy to walk knowing that your father had sex with you. It is very hard. It is something that people would harass you every day. [Les demanderesses soulignent.]

 

 

 

-         à la page 43 des transcriptions :

231      Q.        And what happened with him?

A.        We – by December, in December of that same year, he had – when I met him we went to rent an apartment, and then by December he had – we both had built a wooden house, so we were living together” Everything was okay. I was doing farming, he was going to the city to sell stuff, and one evening when I came home from farming my daughter said that Claydon had touched her on her breasts.

232      Q.        Here we go again. [Les demanderesses soulignent.]

 

[17]           En déterminant la crédibilité d’une demanderesse qui allègue la persécution fondée sur le sexe, la jurisprudence a établit que la Commission doit faire preuve de connaissance, de compréhension et de sensibilité, en application des Directives. En l’espèce, bien que les commentaires du Commissaires semblent quelques fois peu judicieux, à la lecture de l’ensemble de la transcription de l’audience ainsi que les motifs de décision, je suis satisfait que la Commission n’ait pas manqué à son devoir d’appliquer les Directives.  Il apparaît tant des motifs de décision que du procès verbal que la Commission a acceptée que les demanderesses fondaient leur demande d’asile sur des épisodes de violence sexuelle qu’elle n’a pas mis en doute. La Commission a cru l’histoire des demanderesses qu’elle a jugé de triste et a quelques reprises le Commissaire aurait même rassuré la demanderesse principale en lui expliquant qu’il n’était pas pour juger son comportement. Nonobstant les commentaires peu judicieux du Commissaires, repris plus haut, je suis d’avis que la décision de la Commission a été rendue en conformité avec les Directives et que l’intervention de la Cour n’est pas justifiée pour ce motif.

 

B.         La Commission a-t-elle erré en concluant que les demanderesses ne s’étaient pas déchargé de leur fardeau de renverser la présomption que leur pays, l’état de St-Vincent-et-les Grenadines, était capable de les protéger?

 

[18]           La deuxième question en litige implique l’application du test développé par la Cour suprême dans Canada (Procureur général) c. Ward, [1993] 2 R.C.S. 689. C’est une question mixte de fait et de droit, puisqu’elle implique l’application d’une norme juridique, à savoir, confirmer d'une façon claire et convaincante l'incapacité de l'État d'assurer sa protection à un ensemble de faits. La juge Danièle Tremblay-Lamer dans l’arrêt Chaves c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2005 CF 193, au paragraphe 9-11, a considéré les facteurs contextuels dans le cadre de l’analyse pragmatique et fonctionnelle afin de déterminé la norme de contrôle applicable a cette question. Suite à son analyse, elle a déterminé que la norme applicable est celle de la question raisonnable simpliciter.  Je suis en accord avec son analyse, et pour les fins de cette demande j’appliquerai donc cette même norme pour traiter de la deuxième question en litige.

 

[19]           La Cour suprême dans Ward a constaté qu’ « [e]n l'absence d'une preuve quelconque, la revendication devrait échouer, car il y a lieu de présumer que les nations sont capables de protéger leurs citoyens ». Un demandeur qui souhaite démontrer qu’un état est incapable de protéger ses citoyens doit renverser une présomption élaborée dans cette décision. Le fardeau de la preuve demeure donc sur les épaules du demandeur.

 

[20]           Les demanderesses soutiennent que la Commission a erré en déterminant que l’État de Saint-Vincent-et-les Grenadines, était en mesure de les protéger. Selon les demanderesses, ce n’est que par une lecture morcelée, incomplète et abusive de la preuve documentaire que la Commission pouvait en arriver à cette conclusion. En plus, les demanderesses prétendent qu’on leur a niée une analyse personnalisée à leur situation et à leur vécu à la lumière des Directives.

 

[21]           Je rejette ces prétentions. En ce qui a trait l’aspect subjectif du test prévu dans Ward, je suis d’avis que la Commission a apprécié les circonstances particulières des demanderesses. Tel que souligné par le défendeur, la preuve démontre que :

-           La demanderesse n’a pas signalé à la police l’inceste dont sa fille a été victime;

 

-                     La demanderesse principale s’était déjà adressée deux fois au tribunal de la famille concernant des demandes de pensions alimentaires contre son mari;

 

-                     La demanderesse principale avait déjà, à deux reprises, en décembre 2003 et en février 2004, appelé la police en raison du comportement de son conjoint Claydon Lewis;

 

-                     La première fois elle a refusé de porter plainte;

 

-                     Par contre la deuxième fois elle a porté plainte, mais les procédures intentées par la police en 2004 se sont soldées par le rejet des accusations en raison de l’absence de la demanderesse principale alors au Canada.

 

[22]           Il ressort de la preuve que la police a répondu à chaque appel qu’elle a fait, ont intervenu et déposé les accusations qui s’imposaient. Il n’y a aucune indication dans la preuve que l’État de Saint-Vincent-et-les Grenadines n’étaient pas disposé à venir en aide aux demanderesses dans leurs situations particulières. La preuve démontre plutôt qu’elles n’ont soit pas porté plainte ou lorsque des accusations furent déposées, elles se sont absentées de sorte que les plaintes furent éventuellement rejetées faute de preuve.

 

[23]           Pour ce qui est de l’aspect objectif du test, il y a dans la documentation sur la situation à Saint-Vincent-et-les Grenadines de la preuve sur laquelle la Commission pouvait raisonnablement fonder sa conclusion sur la capacité de l’État de protéger sa population. Bien que la preuve démontre que la situation n’est pas parfaite, la jurisprudence reconnaît qu’aucune démocratie qui affirme son respect pour les droits de la personne ne peut garantir la protection des ses citoyens en tout temps. Voir : Canada (Minister of Employment and Immigration) v. Villafranca, [1992] F.C.J. no. 1189 (QL); et: Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) c. Kadenko, [1996] A.C.F. no 1376 (C.A.F.) (QL). D’ailleurs, en l’espèce, la Commission dans ses motifs de décision, a fait mention des documents dans la preuve documentaire qui mettaient en cause le système visé à la protection des femmes violentées à Saint-Vincent-et-les Grenadines. Malgré ce constat, la Commission en vient à la conclusion que l’État de Saint-Vincent-et-les Grenadines était en mesure de protéger sa population.

 

[24]           À la lecture de la preuve documentaire, je suis d’avis que la Commission était en droit de conclure que les demanderesses ne s’étaient pas déchargé de leur fardeau de renverser la présomption que leur pays avait la capacité de les protéger. Cette conclusion n’est pas déraisonnable. Je suis satisfait que la Commission ait tenu compte de la preuve dans son ensemble, et n’a pas fait preuve d’un manque de compréhension en ce qui a trait à la question de la dynamique des relations de violence domestique.

 

C.        La Commission, a-t-elle erré en omettant d’examiner la question à savoir si les demanderesses devaient bénéficier de l’application du paragraphe 108(4) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (la Loi)?

 

[25]           Le paragraphe 108(4) de la Loi est rédigé comme suit :

108. (1) Est rejetée la demande d’asile et le demandeur n’a pas qualité de réfugié ou de personne à protéger dans tel des cas suivants :

[...]

e) les raisons qui lui ont fait demander l’asile n’existent plus.

[…]

(4) L’alinéa (1)e) ne s’applique pas si le demandeur prouve qu’il y a des raisons impérieuses, tenant à des persécutions, à la torture ou à des traitements ou peines antérieurs, de refuser de se réclamer de la protection du pays qu’il a quitté ou hors duquel il est demeuré.

 

108. (1) A claim for refugee protection shall be rejected, and a person is not a Convention refugee or a person in need of protection, in any of the following circumstances:

(e) the reasons for which the person sought refugee protection have ceased to exist.

(4) Paragraph (1)(e) does not apply to a person who establishes that there are compelling reasons arising out of previous persecution, torture, treatment or punishment for refusing to avail themselves of the protection of the country which they left, or outside of which they remained, due to such previous persecution, torture, treatment or punishment.

 

 

[26]           La norme de contrôle applicable à une question portant sur des raisons impérieuses telle que prévu au paragraphe 108(4) de la Loi, a été déterminé par mon collègue le juge Richard Mosley dans l’arrêt  Decka c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2005 F 822. Au paragraphe 5 de ses motifs de décision, ce dernier écrit :

[…] qu’étant donné que la question exige une interprétation de la loi, la norme de contrôle applicable lorsqu'il s'agit de savoir si la Commission devait appliquer l'analyse relative aux raisons impérieuses est celle de la décision correcte. L’examen du contenu de l’analyse, si cette analyse avait été effectuée, aurait été fondé sur la norme de la décision raisonnable simpliciter : Baker c. Canada (Ministre de la citoyenneté et de l’Immigration), [1999] 2 R.C.S. 817; Pushpanathan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1998] 1 R.C.S. 982.

 

 

 

[27]           Pour les fins de cette demande, j’adopte le raisonnement et la conclusion de mon collègue sur la norme applicable pour cette troisième question en litige.

 

[28]           La juge Carolyn Layden-Stevenson a décidé dans l’arrêt Brovina c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2004 CF 635, que le paragraphe 108(4) de la Loi n’est applicable que dans certaines circonstances : Aux paragraphe 5 de ses motifs de décision, elle écrit :  

[…] Pour que la Commission entreprenne une analyse des raisons impérieuses, elle doit d'abord conclure qu'il existait une demande valide du statut de réfugié (ou de personne à protéger) et que les motifs de la demande ont cessé d'exister (en raison d'un changement de la situation dans le pays). C'est alors seulement que la Commission doit évaluer si la nature des expériences du demandeur dans l'ancien pays était à ce point épouvantable que l'on ne devrait pas s'attendre à ce qu'il ou elle rentre dans son pays et se réclame de la protection de l'État.

 

[29]           En l’espèce, la Commission n’a jamais reconnu, aux demanderesses, la qualité de réfugiées ou de personnes à protéger. Alors, on ne peut conclure qu'il existait une demande valide du statut de réfugié (ou de personne à protéger) et que les motifs de la demande ont cessé d'exister (en raison d'un changement de la situation dans le pays). La Commission n’avait donc pas à entreprendre une analyse des raisons impérieuses. Il s’ensuit que la Commission n’a pas erré dans son interprétation ou de son application du paragraphe 108(4) de la Loi.

 

D.        L’instance de la Commission en rendant sa décision sur le banc se traduit-elle en un manquement à un principe de justice naturelle?

 

[30]           Je rejette l’affirmation voulant que la courte durée du délibéré d’un décideur établissait, en soi, que ce dernier était préjugé avant même d’entendre la preuve et les arguments de l’une ou l’autre des parties. A la lecture des motifs de décision, je suis satisfait que la Commission ait bien tenu compte des allégations des demanderesses et de l’ensemble de la preuve soumise. Rien dans la preuve ne me permet de conclure qu’il y eut une contravention aux principes de justice naturelle en l’espèce en raison de la courte durée du délibéré.  

 

6.         Conclusion

[31]           Pour les motifs exposés plus haut, je suis d’avis qu’en rendant sa décision, la Commission n’a commise aucune erreur susceptible de justifiée l’intervention de cette Cour. Par conséquent, la demande de contrôle judiciaire sera rejetée.

 

[32]           Les parties n’ont pas proposé la certification d’une question grave de portée générale telle qu’envisagée à l’alinéa 74(d) de la Loi. Je suis satisfait qu’une telle question ne soit soulevée en l’espèce. Aucune question ne sera certifiée.

 


ORDONNANCE

 

            LA COUR ORDONNE que :

 

1.         La demande de contrôle judiciaire soit rejetée.

 

2.         Aucune question ne soit certifiée.

 

 

 

 

 

« Edmond P. Blanchard »

Juge

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

DOSSIER :                                        IMM-1315-06

 

INTITULÉ :                                       Elizabeth Sylvia Stapleton et al. C. MCI

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               le 18 octobre 2006

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE :              le juge Blanchard

 

DATE :                                               le 1er novembre 2006

 

 

COMPARUTIONS :

 

Me Nino Karamaoun                                                                POUR LE DEMANDEUR

 

Me Suzon Létourneau                                                               POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Me Nino Karamaoun                                                                POUR LE DEMANDEUR

Montréal (Québec)

 

John H. Sims, c.r.                                                                     POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

Montréal (Québec)

 

 

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