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Date : 20061124

Dossier : IMM‑7765‑05

Référence : 2006 CF 1406

Halifax (Nouvelle‑Écosse), le 24 novembre 2006

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE O’KEEFE

 

 

ENTRE :

SUNDARARAJAN SRIKRISHNARAJAH

demandeur

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

défendeur

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

LE JUGE O’KEEFE

 

[1]               Le demandeur sollicite, en application du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la LIPR), le contrôle judiciaire d’une décision de la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (la Commission), en date du 5 décembre 2005, qui lui a refusé le statut de réfugié au sens de la Convention et le statut de personne à protéger.

 

[2]               Le demandeur sollicite une ordonnance annulant la décision et renvoyant l’affaire à une autre formation de la Commission, pour nouvelle décision.

 

Le contexte

 

[3]               Le demandeur est un Tamoul du Sri Lanka. Il disait craindre d’être persécuté par :

1.         les Tigres de libérations de l’Eelam tamoul (les TLET), parce qu’ils le considèrent comme un informateur de l’armée et qu’il a refusé, alors qu’il se trouvait à l’étranger, de faire des dons aux œuvres de bienfaisance des TLET;

2.         l’Organisation populaire de libération de l’Eelam tamoul (la PLOTE), parce qu’il a décidé de ne pas joindre les rangs de cette organisation et qu’il est devenu un membre du Conseil de la jeunesse; et

3.         les autorités sri‑lankaises, qui le soupçonnent d’appartenir aux TLET.

 

[4]               Le demandeur et sa famille sont allés vivre dans la région de Jaffna, au Sri Lanka, durant les années 80. Le demandeur soutient que, durant son séjour dans cette région, il a été battu par des membres de la Force indienne de maintien de la paix (l’IPKF) et interrogé sur les liens qu’on lui prêtait avec les TLET. Le demandeur a dit avoir cherché à donner l’impression de coopérer avec les membres de l’IPKF, sans leur donner de renseignements précis. L’IPKF s’est retirée du Sri Lanka en 1990, et Jaffna est tombée sous la coupe des TLET. Le demandeur dit qu’il a fui en Inde en 1990 parce qu’il craignait d’être tué par les TLET, qui le voyaient comme un informateur de l’armée. Le demandeur a vécu dans un camp de réfugiés durant deux ans, puis a été renvoyé au Sri Lanka en 1992, après avoir été pris à l’aéroport de Chennai en possession d’un faux passeport. À son retour au Sri Lanka, le demandeur fut dissuadé de rester à Colombo et s’établit à Vavuniya, une ville tenue par les forces gouvernementales.

 

[5]               La PLOTE était une milice tamoule pro‑gouvernementale qui recrutait de jeunes Tamouls. Elle a fait pression sur lui pour qu’il joigne ses rangs car il pourrait ainsi attirer de jeunes électeurs, mais il a plutôt joint les rangs du Conseil de la jeunesse, parrainé par le gouvernement, pour finalement devenir le président de ce conseil. Le demandeur a dit que, en avril 1995, il a été enlevé et battu par des membres de la PLOTE pour avoir refusé d’adhérer à cette organisation. Un membre du Conseil de la jeunesse, apprenant que le demandeur avait été enlevé, avait réclamé sa libération. Comme la PLOTE était une organisation appuyée par le gouvernement, elle a été contrainte de relâcher le demandeur car il était membre du Conseil de la jeunesse et un employé de l’État.

 

[6]               En avril 1995, le demandeur a décidé de quitter le Sri Lanka et de rejoindre sa famille au Canada. Il s’est d’abord rendu à Colombo, où il a été détenu par la police en août 1995. Le demandeur a dit qu’il avait été battu par la police et interrogé par elle à propos de sa présence à Colombo, parce qu’il était soupçonné de soutenir les TLET. Le demandeur a dit à la police qu’il était membre du Conseil de la jeunesse et en quête de travail, et il a été relâché après que son explication fut confirmée par le Conseil de la jeunesse.

 

[7]               Le demandeur a fui le Sri Lanka en août 1995, puis, grâce à un passeur, est entré clandestinement en Angleterre en septembre 1995. L’asile lui a été refusé en Angleterre, et il est entré clandestinement au Canada le 14 février 2005. Il a sollicité l’asile deux jours plus tard. La demande d’asile devait être examinée à Toronto au cours d’une entrevue selon le processus accéléré, mais le dossier du demandeur fut ensuite transféré à Montréal pour audition en règle. Sa demande d’entrevue selon le processus accéléré fut rejetée.

 

[8]               La demande d’asile fut instruite le 24 octobre 2005. L’avocat du demandeur a déposé une opposition auprès de la Commission afin d’empêcher l’application des Directives n° 7 (ordre inverse des interrogatoires), en affirmant qu’elles contrevenaient à la justice naturelle. Une requête fut aussi présentée, dès le début de l’audience, en opposition aux Directives n° 7. L’avocat du demandeur a fait valoir que le demandeur était tendu et qu’il devrait être interrogé d’abord par son avocat afin de faciliter son témoignage. La Commission a rejeté la requête, affirmant dans sa décision que, en l’absence d’une évaluation psychologique du demandeur, les raisons invoquées par son avocat ne suffisaient pas à justifier une modification de l’ordre des interrogatoires. La Commission a relevé que, selon la jurisprudence canadienne, les Directives n° 7 n’ont pas pour effet de refuser à un demandeur d’asile l’occasion de présenter ses arguments, ni ne constituent un manquement aux principes de justice naturelle.

 

[9]               La Commission a interrogé le demandeur la première, suivie par l’avocat du demandeur. L’avocat s’est opposé à la méthode d’interrogatoire employée par la Commission, affirmant qu’elle était assimilable à un contre‑interrogatoire hostile. La requête de l’avocat du demandeur pour qui la commissaire devait se récuser pour cause de partialité fut elle aussi rejetée. Par décision datée du 5 décembre 2005, la Commission a refusé la demande d’asile. C’est à cette décision de la Commission que se rapporte la présente procédure de contrôle judiciaire.

 

Les motifs de la décision de la Commission

 

[10]           La Commission a d’abord dit qu’elle rejetait la requête déposée à l’encontre de l’application des Directives n° 7. La requête en récusation de la commissaire pour cause de partialité n’est pas mentionnée.

 

[11]           Puis la Commission a étudié l’allégation du demandeur selon laquelle il craignait d’être persécuté par les TLET qui le soupçonnaient de collaboration avec l’IPKF. Selon la Commission, le demandeur d’asile n’avait pas dit pourquoi les TLET le suspectaient de collaboration avec l’IPKF ou si d’autres qui vivaient dans la dépendance de l’IPKF étaient persécutés par les TLET pour déloyauté. La Commission a ensuite considéré la crainte de persécution alléguée par le demandeur en raison de son appartenance au Conseil de la jeunesse. Elle a jugé invraisemblable que le demandeur, qui n’avait pas eu d’ennuis avec les TLET quand il était un membre actif de cette organisation, ait eu de tels ennuis avec eux dix ans plus tard. Aucune preuve n’a été présentée que les membres du Conseil de la jeunesse étaient dans la ligne de mire des TLET ou que ceux qui avaient fait partie de l’organisation dix ans auparavant étaient maintenant menacés par les TLET.

 

[12]           Puis la Commission a considéré la crainte de persécution que disait avoir le demandeur à l’égard de la PLOTE parce qu’il avait refusé de se joindre à cette organisation au début des années 90. La Commission a jugé invraisemblable que le demandeur fût menacé par la PLOTE parce qu’il avait refusé d’y adhérer dix ans auparavant, décidant plutôt de travailler pour le Conseil de la jeunesse. La Commission a relevé que la PLOTE et le Conseil de la jeunesse étaient deux organisations soutenues par les pouvoirs publics. Elle a estimé que, même si la PLOTE voulait véritablement nuire au demandeur, celui‑ci pouvait compter sur l’État pour le protéger, comme il l’avait fait lorsqu’il avait été enlevé par la PLOTE en 1995.

 

[13]           La Commission a ensuite considéré la crainte que disait avoir le demandeur à l’égard de l’armée et de la police. Elle a relevé que le demandeur n’avait pas été inquiété par l’une ou par l’autre quand il était à Vavuniya, ajoutant que la police l’avait relâché après l’avoir arrêté à Colombo, une fois confirmée sa version des faits. Aucune preuve n’a été déposée établissant que le demandeur risquait vraisemblablement d’être persécuté par l’armée ou par la police dans une région quelconque du Sri Lanka.

 

[14]           La Commission a ensuite passé en revue les craintes suivantes du demandeur : (1) la police allait le détenir et le torturer parce qu’il avait quitté le Sri Lanka grâce à de faux papiers, faisant ainsi de lui un « réfugié sur place »; (2) le gouvernement et les TLET allaient le persécuter parce qu’il était un Tamoul fortuné qui avait vécu à l’étranger; et (3) les TLET allaient le persécuter parce que, durant son séjour à l’étranger, il n’avait pas fait de dons à des associations caritatives tamoules.

 

[15]           La Commission a examiné le témoignage du demandeur d’asile et toutes les autres preuves documentaires, notamment les rapports sur la situation ayant cours dans le pays, les rapports d’organismes de défense des droits de l’homme, des articles de presse, des sources Internet et des affidavits. Elle a reconnu la difficulté d’évaluer la situation qui a cours au Sri Lanka aujourd’hui, en raison de l’existence de rapports contradictoires, ajoutant qu’elle s’en remettait à des sources dignes de foi. La Commission a analysé la preuve et constaté que la situation demeure grave au Sri Lanka, en particulier dans les zones tenues par les TLET. Elle a trouvé que, depuis la signature de l’Accord de cessez‑le‑feu en 2002, la situation au Sri Lanka s’était améliorée. Cependant, elle a fait remarquer que les pourparlers de paix avaient été rompus en 2003.

 

[16]           La Commission a fait observer que les élections récentes tenues au Sri Lanka avaient pour l’essentiel été régulières et que tous les éléments de la société civile étaient représentés au Parlement. Se fondant sur la preuve documentaire, elle a estimé que le risque pour la population d’être persécutée par le gouvernement ou par les TLET (sauf dans les zones tenues par les TLET) avait nettement diminué. Cependant, elle a pris note de l’accroissement des violences à caractère politique, notamment des assassinats d’informateurs par les TLET. Rien ne permettait de croire que la guerre était imminente au Sri Lanka.

 

[17]           La Commission a conclu que, bien que le gouvernement prenne très au sérieux la nécessité de mettre fin aux exactions des forces de sécurité, celles‑ci recourent encore impunément à la torture. Des documents ont été produits selon lesquels les forces de sécurité n’avaient pas commis en 2004 d’assassinats à caractère politique. Cependant, la Commission a relevé que les TLET commettent encore sur leur territoire des violations des droits de la personne. Selon elle, le cessez‑le‑feu avait permis de réduire les violations de cette nature et la persécution exercée par le gouvernement pour cause d’appartenance suspectée aux TLET était peu probable.

 

[18]           La Commission a estimé que le demandeur ne s’était jamais mêlé de politique en dehors du Conseil de la jeunesse et n’avait été ni un membre des TLET ni un rebelle très en vue. Elle a relevé que le demandeur n’était pas personnellement dans la ligne de mire des TLET ou des forces de sécurité et qu’il avait vécu en dehors du Sri Lanka pendant dix ans. Selon elle, compte tenu de la preuve documentaire, les Tamouls se trouvant dans la même situation que lui n’étaient pas exposés à un risque appréciable de persécution de la part des TLET, de la PLOTE ou des autorités, ni ne seraient exposés à un risque de torture, à une menace pour leur vie ou à un risque de subir des peines cruelles et inusitées à leur retour au Sri Lanka. La Commission a conclu qu’il n’existait aucune information digne de foi attestant que des demandeurs d’asile déboutés risquaient la persécution ou la torture à leur retour au Sri Lanka. La preuve montrait que les demandeurs d’asile déboutés entraient au Sri Lanka sans entrave, après s’être soumis aux formalités d’usage et aux vérifications d’identité. En réponse aux inquiétudes du demandeur causées par le fait qu’il avait voyagé avec un faux passeport, la Commission a dit que le demandeur pouvait solliciter de nouveaux documents de voyage.

 

[19]           Selon la Commission, rien ne prouvait que les gens vivant dans des zones tenues par les forces gouvernementales étaient menacés par les TLET pour ne pas avoir, depuis l’étranger, soutenu financièrement leurs associations caritatives. Deux articles faisaient état de l’existence d’un système de suivi qui permettait de reconnaître les Tamouls qui soutenaient les activités caritatives des TLET, mais rien ne confirmait l’existence de ce système de suivi. La Commission a conclu que le demandeur pouvait se soustraire à la traque des TLET en vivant dans une zone tenue par les forces gouvernementales, et elle a estimé que le demandeur n’avait pas établi sur ce fondement un risque de persécution.

 

[20]           La Commission a jugé que le demandeur n’avait pas établi une crainte fondée de persécution au Sri Lanka et qu’il n’était pas un réfugié au sens de la Convention. Elle a aussi estimé qu’il n’existait aucune preuve digne de foi montrant que le demandeur était une personne à protéger.

 

Points en litige

 

[21]           Le demandeur a soumis les points suivants à l’examen de la Cour :

1.         La décision de la Commission devrait‑elle être annulée, compte tenu du jugement Thamotharem de la Cour fédérale, et comment convient‑il de se préparer à l’éventuelle décision qui sera rendue dans l’appel formé contre ce jugement?

            2.         L’interrogatoire du demandeur par la Commission a‑t‑il suscité une crainte raisonnable de partialité, et l’administration de la Commission a‑t‑elle désavantagé injustement le demandeur parce que son avocat n’a pas eu droit à un enregistrement de l’audience? (Je n’ai pas étudié cette question puisqu’une autorisation a été accordée et qu’il existe une transcription dans le dossier.)

3.         La décision de la Commission était‑elle manifestement déraisonnable, abusive et arbitraire, ou a‑t‑elle été rendue sans tenir compte de la preuve versée dans le dossier?

            4.         La Commission a‑t‑elle agi arbitrairement et sans tenir compte des attentes raisonnables du demandeur quand elle a transféré le dossier du demandeur de Toronto à Montréal et quand elle a refusé au demandeur une entrevue selon le processus accéléré?

 

[22]           Je reformulerais les points soulevés de la manière suivante :

1.         La Commission a‑t‑elle commis une erreur en concluant que le demandeur n’était ni un réfugié au sens de la Convention ni une personne à protéger?

            2.         La Commission a‑t‑elle limité son pouvoir discrétionnaire en se disant liée par les Directives n° 7?

            3.         L’interrogatoire mené par la Commission a‑t‑il suscité une crainte raisonnable de partialité?

            4.         Y a‑t‑il eu violation des attentes légitimes du demandeur, qui comptait sur une entrevue menée dans le cadre d’un processus accéléré?

 

[23]           Je résumerai sous les rubriques suivantes les prétentions des parties :

A. Norme de contrôle

B. Décision au fond

C. Interprétation du jugement Thamotharem

D. Partialité

E. Attentes légitimes

 

Prétentions du demandeur

 

A.        Norme de contrôle

 

[24]           Selon le demandeur, la norme de contrôle applicable aux erreurs de droit est celle de la décision correcte, et les conclusions de fait de la Commission sont réformables si elles ont été tirées d’une manière abusive ou arbitraire ou sans tenir compte de la preuve produite.

 

B.         Décision au fond

 

[25]           Le demandeur soutient que la Commission a analysé la preuve d’une manière manifestement déraisonnable. Selon lui, la conclusion selon laquelle la situation ayant cours au Sri Lanka s’améliorait en décembre 2005 ne correspondait pas à la preuve au dossier. Le demandeur soutient que, au vu des sources documentaires admises par la Commission (par exemple les rapports d’organisations de défense des droits de l’homme), sa décision était manifestement indéfendable. La preuve documentaire montrait que, depuis le cessez‑le‑feu, les TLET se livrent à des exactions, des assassinats et des enlèvements partout au Sri Lanka et que les forces de sécurité torturent systématiquement les Tamouls. Mention a été faite de l’assassinat d’un Tamoul en visite à Colombo, qui avait refusé de faire des dons aux TLET durant son séjour à l’étranger. Selon le demandeur, la ville de Colombo ne constituait donc pas une possibilité de refuge intérieur pour une personne victime d’exactions de la part des TLET.

 

[26]           Selon le demandeur, l’ancien chef des sentinelles internationales de la paix pour le Sri Lanka a déclaré en octobre 2005 que le pays était en état de guerre subversive. Le demandeur soutient que, en novembre 2005, la situation au Sri Lanka s’est aggravée et que des actes de guerre ont été commis. Cependant, la Commission ne s’est référée qu’aux rapports sur le pays datant de 2004, laissant de côté la preuve sur la situation en 2005. D’après le demandeur, la Commission n’a pas apprécié et considéré la preuve si elle laisse de côté celle qui contredit expressément ses suppositions. Le demandeur soutient que la conclusion de la Commission selon laquelle une guerre n’était pas imminente au Sri Lanka était manifestement déraisonnable, puisque la preuve documentaire récente montrait que le Sri Lanka se trouvait dans un état de guerre non déclarée.

 

[27]           Selon le demandeur, la conclusion de la Commission selon laquelle il n’était pas probable que les TLET se livreraient à des violences en dehors des zones tenues par eux était manifestement déraisonnable. Le demandeur dit que les TLET tiennent uniquement Vanni, au Nord du Sri Lanka, et que, si la Commission croyait que les zones en dehors de Vanni sont dangereuses, alors elle reconnaissait que les TLET assassinent des gens dans les zones tenues par les forces gouvernementales. La Commission écrivait que seuls les Tamouls vivant au nord et à l’est du Sri Lanka couraient le risque d’être victimes d’extorsion de la part des TLET pour avoir négligé de les soutenir financièrement durant leur séjour à l’étranger. Le demandeur soutient que cette conclusion était déraisonnable parce que la plus grande partie du nord et de l’est du pays est maintenant administrée par le gouvernement et que, d’après la preuve, les TLET se livrent à des exactions sur les Tamouls à Colombo et se sont infiltrés dans des zones tenues par les forces gouvernementales pour assassiner des Tamouls.

 

[28]           Le demandeur soutient que la conclusion de la Commission selon laquelle il n’était pas établi que les TLET le considéraient comme un informateur contredisait sur ce point son témoignage non contesté. Le demandeur avait témoigné que les TLET étaient à sa recherche parce qu’il avait coopéré avec l’IPKF, et c’est pourquoi il avait fui. Selon le demandeur, la conclusion de la Commission selon laquelle il n’était pas établi que les TLET traquaient ceux qu’elle considérait comme des informateurs était déraisonnable, car, d’après la preuve documentaire, les TLET éliminent les traîtres dont ils découvrent la présence parmi eux. La Commission a conclu que les assassinats courants de membres du Conseil de la jeunesse devaient être établis, mais, d’après le demandeur, cette conclusion laissait de côté son témoignage non contredit selon lequel tous les membres du Conseil de la jeunesse originaires de Vavuniya avaient quitté le Sri Lanka.

 

[29]           Selon le demandeur, l’opinion de la Commission selon laquelle il avait obtenu de l’État une protection lorsque la PLOTE l’avait enlevé, et selon laquelle il pouvait donc bénéficier de cette protection aujourd’hui, est de nature abusive. Le demandeur n’est plus membre du Conseil de la jeunesse, et, selon la preuve, les TLET assassinent les collaborateurs du gouvernement, lesquels ne reçoivent de l’État aucune protection. Finalement, selon le demandeur, l’avis de la Commission selon lequel il n’était pas établi que les autorités sri‑lankaises persécutent les Tamouls était une exagération, puisqu’il était prouvé que l’armée et la police harcelaient et assassinaient sans formalités les Tamouls.

 

C.        Interprétation du jugement Thamotharem

 

[30]           Le demandeur dit que la Cour fédérale a jugé que les Directives n° 7 sont invalides parce qu’elles restreignent indûment le pouvoir discrétionnaire de la Commission (voir Thamotharem c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2006] 3 R.C.F. 168 (C.F.), un jugement où des questions furent certifiées). Selon le demandeur, la Commission a restreint son pouvoir discrétionnaire quand elle a rejeté une requête visant à écarter l’application du principe de l’ordre inverse des interrogatoires, au motif que, sans une évaluation psychologique du demandeur, il n’y avait pas de raisons suffisantes justifiant une modification de l’ordre des interrogatoires. D’après le demandeur, la décision de la Commission devrait donc être annulée (voir Jin c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 57).

 

[31]           Selon le demandeur, le raisonnement qu’a suivi la Commission était arbitraire. La Commission écrivait que le cas particulier du demandeur d’asile est toujours pris en compte lorsqu’elle rend une décision sur l’ordre inverse des interrogatoires, mais elle est arrivée à la conclusion qu’une évaluation psychologique était requise en application de la norme établie par les Directives n° 7. La Commission avait conscience de l’état de stress qu’avait connu le demandeur quand il avait dû se soumettre en Angleterre à l’ordre inverse des interrogatoires. Le demandeur reconnaissait que les Directives n° 7 ne contreviennent pas de façon générale aux règles de la justice naturelle (voir la décision Thamotharem, précitée). Cependant, il a fait valoir que l’attitude accusatoire de la Commission dans cette affaire, s’ajoutant au recours à l’ordre inverse des interrogatoires, a eu pour résultat de nier le droit du demandeur à la justice naturelle.

 

D.        Partialité

 

[32]           Le demandeur soutient que la Commission l’a contre‑interrogé d’une manière agressive durant des heures, en faisant des commentaires sarcastiques. La Commission a toute latitude d’interroger les demandeurs d’asile, mais, selon le demandeur, elle ne devrait pas paraître agir comme si elle leur était hostile. Le demandeur soutient que, lorsque son avocat a pu obtenir de lui des renseignements utiles à sa cause, la Commission a repris l’interrogatoire de manière à ébranler ses réponses. D’après le demandeur, la Commission a fait des références sarcastiques à un témoignage produit plus tôt ce jour‑là au cours d’une audience relative à un réfugié tamoul.

 

[33]           Selon le demandeur, la Commission a montré son manque d’objectivité en étant la première à interroger le demandeur, et cela d’une manière inquisitoriale, pour ensuite lui poser des questions en guise de réfutations. D’après le demandeur, l’interrogatoire de la Commission lui a donné l’impression qu’il était un criminel tentant de se défendre contre les accusations d’un procureur. Le demandeur soutient que les commissaires devraient se conduire en montrant de la patience, du respect et de la retenue (voir le jugement Toth c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (2001), 202 F.T.R. 13, paragraphe 22). Le demandeur soutient que l’allégation de partialité faite par son avocat n’a pas été prise au sérieux, car la Commission y a réagi en récitant une déclaration toute faite.

 

E.         Attentes légitimes

 

[34]           On avait promis au demandeur une entrevue à Toronto dans le cadre de la procédure accélérée. Cependant, son dossier a été transféré à Montréal pour audience en bonne et due forme. D’après le demandeur, les conditions ayant cours dans le pays sont réputées claires dans une entrevue menée selon la procédure accélérée, et, puisque son témoignage n’a pas été jugé manquer de crédibilité, il était prévisible que sa demande d’asile aurait été approuvée si l’entrevue en question avait eu lieu. Il a fait valoir que le refus de mener cette entrevue n’était pas justifié par une quelconque évolution de la situation qui avait cours dans le pays, et que la rupture de la promesse qui lui avait été faite constituait une violation de ses attentes légitimes (voir l’arrêt Bendahmane c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1989] 3 C.F. 16 (C.A.F.)). Il a dit aussi que les commodités administratives ne devraient pas éclipser les attentes raisonnables ou l’équité procédurale.

 

Prétentions du défendeur

 

B.         La décision au fond

 

[35]           Selon le défendeur, la Commission a procédé à un examen équitable de la preuve documentaire portant sur les conditions ayant cours dans le pays, qu’elle fût favorable ou défavorable à la demande d’asile. Le défendeur soutient que, après examen desdites conditions, ainsi que des circonstances personnelles, des antécédents et du profil du demandeur, la Commission n’a pas été persuadée qu’il était exposé à une réelle possibilité de persécution, à Colombo ou à Vavuniya.

 

[36]           Le défendeur soutient qu’un désaccord sur l’importance que la Commission a attribuée à la preuve documentaire relative aux conditions ayant cours dans le pays ne saurait autoriser l’intervention de la Cour de (voir le jugement Hussain c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 1186). Le défendeur soutient que la Commission est présumée avoir apprécié et étudié l’ensemble de la preuve, à moins que le contraire ne soit clairement établi. Il soutient que la Commission peut s’en rapporter à certains documents et non à d’autres lorsque la preuve documentaire est contradictoire. Selon lui, une preuve amplement suffisante appuyait la conclusion de la Commission selon laquelle la crainte du demandeur n’était pas fondée objectivement.

 

C.        Interprétation du jugement Thamotharem

 

[37]           Selon le défendeur, la Commission n’a pas restreint son pouvoir discrétionnaire, mais a donné une réelle importance aux circonstances du demandeur pour savoir s’il y avait de bonnes raisons pour elle de ne pas appliquer les Directives n° 7. L’absence d’un rapport psychologique ne fut que l’un des facteurs pris en compte par la Commission lorsqu’elle a conclu qu’une modification de l’ordre des interrogatoires n’était pas justifiée. Le défendeur a cité plusieurs précédents où l’on arrive à la conclusion que le principe en question est flexible et de nature non impérative (voir le jugement Zaki c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 1066, paragraphe 16).

 

[38]           Comme des questions ont été certifiées dans le jugement Thamotharem en vue de leur examen par la Cour d’appel fédérale, le défendeur soutient que l’ordre inverse des interrogatoires ne porte pas atteinte aux principes de l’équité et de la justice naturelle. Selon lui, une décision portant sur l’équité procédurale doit être fondée sur les circonstances particulières de l’affaire considérée (voir le jugement Martinez c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 1121). Le défendeur soutient qu’il appartenait au demandeur d’asile de prouver qu’il était nécessaire pour lui d’être interrogé d’abord par son avocat pour être en mesure de présenter pleinement son cas (voir la décision Cruz c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (1999), 174 F.T.R. 191). Le défendeur soutient que la Commission est maîtresse de sa propre procédure et que les Directives n° 7 répondent à la fois aux intérêts de l’efficacité procédurale et à ceux de la justice naturelle (voir le jugement Pillai c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2002] 3 C.F. 481 (C.F.)).

D.        Partialité

 

[39]           Selon le défendeur, aucun des extraits de l’audience auxquels se réfère le demandeur ne montre que la Commission a manqué d’impartialité. Il a cité le jugement Bankole c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 1581, paragraphe 23, où l’on peut lire qu’un interrogatoire approfondi et énergique ne saurait susciter à lui seul une crainte raisonnable de partialité dans l’examen d’une demande d’asile. Selon le défendeur, le fait que la Commission ait été la première à interroger le demandeur ne suscite pas automatiquement une crainte raisonnable de partialité (voir le jugement Ithibu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2001 CFPI 288).

 

[40]           Le demandeur soutient que le critère de la crainte raisonnable de partialité est la question de savoir si une personne bien renseignée qui étudierait la question en profondeur, de façon réaliste et pratique, croirait que selon toute vraisemblance le décideur, consciemment ou non, ne rendra pas une décision juste (voir l’arrêt Committee for Justice and Liberty c. Canada (Office national de l’énergie), [1978] 1 R.C.S. 369, page 395). Selon le défendeur, le demandeur n’a pas satisfait à ce critère, et la preuve montre qu’il a eu une occasion raisonnable de présenter ses arguments.

 

E.         Attentes légitimes

 

[41]           De l’avis du défendeur, si le demandeur s’est vu consentir au départ une entrevue selon le processus accéléré, cela ne signifie nullement que la Commission lui a promis que sa demande d’asile allait être réglée par une entrevue. Il soutient que la Commission doit déterminer la manière la mieux à même de régler un dossier, et qu’il n’existait aucune pratique officielle d’après laquelle les demandes d’asile de tous les Tamouls de sexe masculin seraient traitées à la faveur d’une entrevue selon le processus accéléré. Le défendeur soutient que, même si la Cour devait conclure que la Commission a commis un manquement à la justice naturelle, la décision de la Commission devrait être maintenue parce que d’autres éléments de la demande d’asile militent en faveur de la conclusion initiale et qu’un nouvel examen de la demande conduirait au même résultat (voir l’arrêt Cartier c. Canada (Procureur général), [2003] 2 C.F. 317 (C.A.F.), paragraphe 31).

 

Analyse et décision

Norme de contrôle

 

[42]           Les questions qui concernent l’équité procédurale sont sujettes à un contrôle judiciaire d’après la norme de la décision correcte, et donc un manquement à l’équité procédurale aurait pour effet automatique de vicier la décision de la Commission (voir le jugement Begum c. Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile) (2005), 279 F.T.R. 157, paragraphe 9).

 

[43]           J’adopterais l’analyse faite par la juge Tremblay‑Lamer dans la décision Singh c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (1999), 173 F.T.R 280, au paragraphe 15 (1re inst.). Après une analyse pragmatique et fonctionnelle, elle avait conclu que c’était la norme de la décision manifestement déraisonnable qu’il fallait appliquer aux conclusions de fait de la Commission, notamment à la question de savoir si le demandeur risquerait plus qu’une simple possibilité de persécution en cas de retour dans son pays d’origine.

 

[44]           Point n° 1

            La Commission a‑t‑elle commis une erreur en concluant que le demandeur n’était ni un réfugié au sens de la Convention ni une personne à protéger?

            La Commission a rejeté la demande d’asile au motif que le demandeur d’asile n’avait pas établi une crainte fondée de persécution au Sri Lanka, et au motif qu’il n’y avait aucune preuve digne de foi montrant qu’il était une personne à protéger. La Commission s’est exprimée ainsi dans ses motifs :

Il ressort de mon analyse globale de la preuve documentaire que, pour la population en général et pour les tamouls en particulier, le risque de persécution de la part du gouvernement et des TLET a considérablement diminué (sauf dans les secteurs sous le contrôle des TLET). Toutefois, il y aurait une recrudescence des violences liées à des motifs politiques. Des assassinats sont signalés dans divers secteurs du Sri Lanka, notamment à Colombo : les victimes sont des politiciens, des policiers et d’autres activistes politiques connus ainsi que des rivaux politiques des TLET et des personnes considérées comme des informateurs par les Tigres.

 

 

En me fondant sur la preuve documentaire, j’estime que, dans la situation actuelle, les personnes qui présentent le même profil que le demandeur d’asile ne sont pas exposées à un risque raisonnable de persécution par les TLET, l’armée srilankaise, les groupes contrôlés par le gouvernement comme la PLOTE ou la police à cause de leur nationalité tamoule. Selon moi, il n’est pas plus que probable que les personnes dont le profil est le même que celui de l’appelant soient exposées à un risque de torture, à une menace à leur vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités s’ils retournent dans leur pays.

(Non souligné dans l’original)

 

[45]           La Commission avait entendu le témoignage du demandeur lorsqu’elle est arrivée à sa décision portant sur cette partie du dossier. Puisque la Commission n’a tiré aucune conclusion sur la crédibilité du demandeur, elle est présumée avoir accepté le témoignage du demandeur comme un témoignage digne de foi. Le demandeur s’est exprimé ainsi durant son témoignage (dossier du Tribunal, pages 674 et 675) :

[traduction]

LE PRÉSIDENT DE L’AUDIENCE (s’adressant à l’intéressé)

 

Q :       Êtes‑vous en train de me dire que vous serez persécuté au Sri Lanka parce que, au cours des dix années que vous avez passées en Angleterre, vous n’avez rien donné aux TLET?

 

R :        Oui, c’est l’une des raisons pour lesquelles je serais persécuté par les TLET. Et il y a aussi d’autres raisons.

 

Q :       Quelles sont les autres raisons?

 

. . .

 

L’INTERPRÈTE (s’adressant au président de l’audience)

 

. . .

 

(Parce que, lorsque j’étais au Sri Lanka, on me soupçonnait d’aider l’armée indienne qui était à l’époque présente au Sri Lanka.)

 

LE PRÉSIDENT DE L’AUDIENCE (s’adressant à l’intéressé)

 

Q :       Pourquoi vous soupçonnait‑on de cela?

 

R :        Parce que ma maison se trouvait près du camp indien. Nous avions donc l’habitude de parler aux soldats indiens parce que nous voulions éviter d’éveiller leurs soupçons.

 

            Oui.

 

R :        C’est la raison pour laquelle on me soupçonnait, et, à cause de cela, j’ai quitté le pays.

 

 

[46]           La Commission s’est exprimée ainsi dans sa décision (dossier du Tribunal, pages 6 et 7) :

... Pas le moindre élément de preuve n’a été présenté au tribunal pour étayer les motifs qui porteraient les TLET à soupçonner que le demandeur d’asile a collaboré avec l’IPKF à cette époque. De plus, le tribunal ne dispose d’aucun élément de preuve montrant que les personnes qui, comme le demandeur d’asile, vivaient dans les secteurs contrôlés par l’IPKF dans les années 1980, feraient figure de traîtres et seraient persécutées par les TLET.

 

 

[47]           À mon avis, eu égard à la propre déclaration de la Commission, au témoignage produit sous serment par le demandeur, ainsi qu’à son FRP, le raisonnement de la Commission portant sur le risque de persécution auquel était exposé le demandeur pose un problème. Le demandeur a dit qu’il craint d’être persécuté par les TLET parce qu’il a coopéré avec l’IPKF et que, pour cette raison, il passe, aux yeux des TLET, pour un informateur de l’armée. Contrairement à ce que dit la Commission, il y a des éléments de preuve selon lesquels le demandeur serait soupçonné de collaborer avec l’IPKF. Comme je l’ai mentionné plus haut, la Commission elle‑même a dit que des assassinats étaient signalés, dans diverses régions du Sri Lanka, y compris Colombo, et que les victimes comptent des personnes considérées par les Tigres comme des informateurs. La preuve montre que le demandeur était soupçonné d’être un informateur.

 

[48]           Je suis d’avis que la Commission a commis une erreur manifestement déraisonnable en ne tenant pas compte du témoignage du demandeur et en concluant qu’aucune preuve ne permettait de croire que le demandeur risquait d’être persécuté par les TLET en cas de retour au Sri Lanka.

 

[49]           La demande de contrôle judiciaire est donc accueillie, et l’affaire est renvoyée à une autre formation de la Commission pour nouvelle décision.

 

[50]           Aucune des parties n’a soumis à mon examen une question grave de portée générale susceptible d’être certifiée.

 


 

JUGEMENT

 

[51]           LA COUR ORDONNE : la demande de contrôle judiciaire est accueillie et l’affaire renvoyée à une autre formation de la Commission, pour nouvelle décision.

 

 

« John A. O’Keefe »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Alphonse Morissette, LL.L.


ANNEXE

 

 

Dispositions légales applicables

 

            Les dispositions applicables de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27, sont les suivantes :

96. A qualité de réfugié au sens de la Convention — le réfugié — la personne qui, craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques :

 

96. A Convention refugee is a person who, by reason of a well‑founded fear of persecution for reasons of race, religion, nationality, membership in a particular social group or political opinion,

 

a) soit se trouve hors de tout pays dont elle a la nationalité et ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de chacun de ces pays;

 

(a) is outside each of their countries of nationality and is unable or, by reason of that fear, unwilling to avail themself of the protection of each of those countries; or

 

b) soit, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle, ne peut ni, du fait de cette crainte, ne veut y retourner.

 

(b) not having a country of nationality, is outside the country of their former habitual residence and is unable or, by reason of that fear, unwilling to return to that country.

 

97. (1) A qualité de personne à protéger la personne qui se trouve au Canada et serait personnellement, par son renvoi vers tout pays dont elle a la nationalité ou, si elle n’a pas de nationalité, dans lequel elle avait sa résidence habituelle, exposée :

 

97. (1) A person in need of protection is a person in Canada whose removal to their country or countries of nationality or, if they do not have a country of nationality, their country of former habitual residence, would subject them personally

 

a) soit au risque, s’il y a des motifs sérieux de le croire, d’être soumise à la torture au sens de l’article premier de la Convention contre la torture;

 

(a) to a danger, believed on substantial grounds to exist, of torture within the meaning of Article 1 of the Convention Against Torture; or

 

b) soit à une menace à sa vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités dans le cas suivant :

 

(b) to a risk to their life or to a risk of cruel and unusual treatment or punishment if

 

(i) elle ne peut ou, de ce fait, ne veut se réclamer de la protection de ce pays,

 

(i) the person is unable or, because of that risk, unwilling to avail themself of the protection of that country,

 

(ii) elle y est exposée en tout lieu de ce pays alors que d’autres personnes originaires de ce pays ou qui s’y trouvent ne le sont généralement pas,

 

(ii) the risk would be faced by the person in every part of that country and is not faced generally by other individuals in or from that country,

 

(iii) la menace ou le risque ne résulte pas de sanctions légitimes — sauf celles infligées au mépris des normes internationales — et inhérents à celles‑ci ou occasionnés par elles,

 

(iii) the risk is not inherent or incidental to lawful sanctions, unless imposed in disregard of accepted international standards, and

 

(iv) la menace ou le risque ne résulte pas de l’incapacité du pays de fournir des soins médicaux ou de santé adéquats.

 

(iv) the risk is not caused by the inability of that country to provide adequate health or medical care.

 

(2) A également qualité de personne à protéger la personne qui se trouve au Canada et fait partie d’une catégorie de personnes auxquelles est reconnu par règlement le besoin de protection.

 

(2) A person in Canada who is a member of a class of persons prescribed by the regulations as being in need of protection is also a person in need of protection.

 

159. (1) Le président est le premier dirigeant de la Commission ainsi que membre d’office des quatre sections; à ce titre :

 

159. (1) The Chairperson is, by virtue of holding that office, a member of each Division of the Board and is the chief executive officer of the Board. In that capacity, the Chairperson

 

. . .

 

. . .

 

h) après consultation des vice‑présidents et du directeur général de la Section de l’immigration et en vue d’aider les commissaires dans l’exécution de leurs fonctions, il donne des directives écrites aux commissaires et précise les décisions de la Commission qui serviront de guide jurisprudentiel;

 

(h) may issue guidelines in writing to members of the Board and identify decisions of the Board as jurisprudential guides, after consulting with the Deputy Chairpersons and the Director General of the Immigration Division, to assist members in carrying out their duties; and

 

. . .

 

. . .

 

162. (1) Chacune des sections a compétence exclusive pour connaître des questions de droit et de fait — y compris en matière de compétence — dans le cadre des affaires dont elle est saisie.

 

162. (1) Each Division of the Board has, in respect of proceedings brought before it under this Act, sole and exclusive jurisdiction to hear and determine all questions of law and fact, including questions of jurisdiction.

 

(2) Chacune des sections fonctionne, dans la mesure où les circonstances et les considérations d’équité et de justice naturelle le permettent, sans formalisme et avec célérité.

 

(2) Each Division shall deal with all proceedings before it as informally and quickly as the circumstances and the considerations of fairness and natural justice permit.

 

 

 

Les Directives n° 7 du président (qui concernent la préparation et la tenue des audiences de la Section de la protection des réfugiés) exposent le cadre de l’ordre inverse des interrogatoires :

19.  Dans toute demande d’asile, c’est généralement l’APR qui commence à interroger le demandeur d’asile. En l’absence d’un APR à l’audience, le commissaire commence l’interrogatoire et est suivi par le conseil du demandeur d’asile. Cette façon de procéder permet ainsi au demandeur d’asile de connaître rapidement les éléments de preuve qu’il doit présenter au commissaire pour établir le bien‑fondé de son cas.

 

19.  In a claim for refugee protection, the standard practice will be for the RPO to start questioning the claimant. If there is no RPO participating in the hearing, the member will begin, followed by counsel for the claimant. Beginning the hearing in this way allows the claimant to quickly understand what evidence the member needs from the claimant in order for the claimant to prove his or her case.

 

23.  Le commissaire peut changer l’ordre des interrogatoires dans des circonstances exceptionnelles. Par exemple, la présence d’un examinateur inconnu peut intimider un demandeur d’asile très perturbé ou un très jeune enfant au point qu’il n’est pas en mesure de comprendre les questions ni d’y répondre convenablement. Dans de telles circonstances, le commissaire peut décider de permettre au conseil du demandeur de commencer l’interrogatoire. La partie qui estime que de telles circonstances exceptionnelles existent doit soumettre une demande en vue de changer l’ordre des interrogatoires avant l’audience. La demande est faite conformément aux Règles de la SPR.

23.  The member may vary the order of questioning in exceptional circumstances. For example, a severely disturbed claimant or a very young child might feel too intimidated by an unfamiliar examiner to be able to understand and properly answer questions. In such circumstances, the member could decide that it would be better for counsel for the claimant to start the questioning. A party who believes that exceptional circumstances exist must make an application to change the order of questioning before the hearing. The application has to be made according to the RPD Rules.

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM‑7765‑05

 

INTITULÉ :                                       SUNDARARAJAN SRIKRISHNARAJAH

 

                                                            ‑ et ‑

 

                                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               LE 31 OCTOBRE 2006

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              LE JUGE O’KEEFE

 

DATE DES MOTIFS :                      LE 24 NOVEMBRE 2006

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Raoul Boulakia

 

                              POUR LE DEMANDEUR

Robert Bafaro

 

                              POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Raoul Boulakia

Toronto (Ontario)

 

                              POUR LE DEMANDEUR

John H. Sims, c.r.

Sous‑procureur général du Canada

                              POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

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