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Date : 20061221

Dossier : T-1967-05

Référence : 2006 CF 1532

Ottawa (Ontario), le 21 décembre 2006

EN PRÉSENCE DE MADAME LA JUGE SNIDER

 

ENTRE :

LE DIRECTEUR DES POURSUITES MILITAIRES

demandeur

et

 

L’ADMINISTRATEUR DE LA COUR MARTIALE

défendeur

 

Dossier : T-1968-05

 

ET ENTRE :

LE DIRECTEUR DES POURSUITES MILITAIRES

demandeur

et

 

LA JUGE MILITAIRE EN CHEF

défenderesse

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

 

1.    Introduction

 

[1]        Le directeur des poursuites militaires (le « DPM » ou le « demandeur ») souhaite traduire devant une cour martiale permanente un membre des forces armées du Canada (l’« accusé ») soupçonné d’avoir commis de graves infractions, soit des voies de faits graves et des mauvais traitements, à l’endroit d’un subalterne. À ce jour, il lui a été impossible de le faire parce que la juge militaire en chef (la « JMC ») refuse de désigner un juge militaire pour présider la cour martiale et parce que l’administrateur de la cour martiale (l’« administrateur » ou l’« ACM ») refuse de convoquer la cour martiale.

 

[2]        Le problème dont la présente Cour est saisie découle du fait que les voies de faits et les mauvais traitements en question auraient été commis à l’époque ou l’accusé était affecté à la Force opérationnelle interarmées 2 (la « FOI 2 »), une unité spéciale des Forces armées du Canada. En vertu d’une politique des Forces armées (analysée ci-après), le nom et d’autres caractéristiques identificatrices de l’accusé ne peuvent être rendus publics. De ce fait, lorsque l’administrateur et la JMC ont reçu l’acte d’accusation, celui-ci portait la cote « SECRET ». La JMC a refusé de désigner un juge militaire à la cour martiale parce que l’acte d’accusation et les documents qui l’accompagnaient étaient classifiés. L’administrateur a refusé d’émettre un ordre de convocation.

 

[3]        Le DPM a présenté deux demandes de contrôle judiciaire, l’une contre l’administrateur (dossier no T-1967-05) et l’autre contre la JMC (dossier no T-1968-05), sollicitant de la Cour la délivrance de brefs de mandamus afin d’obliger l’administrateur à convoquer une cour martiale permanente et la JMC à désigner un juge militaire pour présider la cour martiale permanente de l’accusé.

 

[4]        Je tiens à souligner que la question dont je suis saisie ne consiste pas à savoir s’il faut tenir secrets les renseignements relatifs à la FOI 2, mais plutôt à déterminer qui peut prendre une décision en matière de non-divulgation et à quel stade de l’instance judiciaire militaire cette décision doit être prise.

 

[5]        Voici les motifs pour lesquels je rejette les deux demandes.

 

2.    Questions en litige

 

[6]        La question fondamentale qui se pose dans la présente demande consiste à savoir si le DPM a rempli les conditions de délivrance d’un bref de mandamus. Le bref de mandamus vise à obliger une autorité publique qui refuse de remplir une obligation légale à caractère public, ou omet de le faire, quand cela lui est demandé. Le critère relatif au mandamus que la Cour a avalisé (et il n’est pas contesté par les parties) est exposé dans l’arrêt Apotex Inc. c. Canada (Procureur général), [1994] 1 C.F. 742 (C.A.), 162 N.R. 177, conf. par [1994] 3 R.C.S. 1100. En bref, les conditions à remplir sont les suivantes :

 

(a)    il doit exister une obligation légale d’agir à caractère public;

 

(b)   l’obligation doit exister envers le requérant;

 

(c)    il existe un droit manifeste d’obtenir l’exécution de cette obligation, notamment :

 

a.       le requérant a rempli toutes les conditions préalables donnant naissance à cette obligation;

 

b.      il y a eu : une demande d’exécution de l’obligation, un délai raisonnable a été accordé pour permettre de donner suite à la demande à moins que celle-ci n’ait été rejetée sur le champ, et il y a eu refus ultérieur, exprès ou implicite, par exemple un délai déraisonnable;

 

(d)   le requérant ne dispose d’aucun autre recours;

 

(e)    l’ordonnance sollicitée aura des effets concrets;

 

(f)     en vertu de l’equity, rien n’empêche d’obtenir le recours;

 

(g)    Compte tenu de la « prépondérance des inconvénients », une ordonnance de mandamus doit être rendue.

 

Il incombe au DPM de convaincre la Cour que toutes les conditions de délivrance du bref de mandamus sont remplies.

 

[7]        Dans la présente demande, les éléments (a) et (d) sont, selon moi, déterminants. Il y a donc, à mon avis, deux questions à examiner :

 

  1. En l’absence d’une décision judiciaire portant qu’une accusation doit demeurer confidentielle, la JMC a-t-elle l’obligation légale à caractère public de désigner un juge militaire et, dans l’affirmative, l’administrateur a-t-il lui aussi l’obligation légale à caractère public d’émettre un ordre de convocation?

 

  1. Le DPM s’est-il acquitté du fardeau de prouver qu’il ne dispose pas d’une autre voie de recours indiquée?

 

3.    Norme de contrôle

 

[8]        Les parties conviennent que les décisions de l’administrateur et de la JMC, qui soulèvent des questions de droit, sont susceptibles de contrôle selon la norme de la décision correcte, et je ne suis pas en désaccord avec elles. Cependant, le DPM a sollicité la délivrance d’un bref de mandamus, et non pas une ordonnance annulant les décisions de la JMC et de l’administrateur. À strictement parler, je ne suis pas appelée à contrôler les décisions de refus de désigner un juge militaire ou d’émettre un ordre de convocation. Il n’est donc pas nécessaire d’indiquer une norme de contrôle.

4.    Régime législatif applicable

 

[9]        Au Canada, contrairement au système judiciaire civil, le système judiciaire militaire ne dispose pas d’une cour permanente. Il fonctionne plutôt au moyen de cours martiales ponctuelles qui n’existent que lorsqu’elles sont convoquées pour instruire des accusations précises. Jouent un rôle de premier plan dans la formation et le fonctionnement de la cour martiale le DPM, l’administrateur et le JMC (« la JMC », en l’espèce), dont les fonctions sont étroitement liées aux stades préliminaires. Ces trois postes sont pourvus par des membres des Forces armées du Canada.

 

4.1 Le directeur des poursuites militaires

 

[10]      Commençons par le poste de DPM. Il est avocat, membre en règle du barreau d’une province depuis au moins dix ans et nommé par le ministre de la Défense nationale (article 165.1, Loi sur la défense nationale, L.R.C., ch. N-5 (la « Loi sur la défense nationale » ou la « LDN »). Il est chargé de porter toutes les accusations contre les personnes qui seront jugées par une cour martiale et de diriger toutes les poursuites devant celle-ci (165.11). Le DPM a aussi la responsabilité de déterminer le type de cour martiale qui jugera l’accusé et d’informer l’administrateur de la cour martiale de sa décision (article 165.14).

 

[11]      Aux fins de la présente demande, le DPM commence à agir lorsqu’il met en accusation l’intéressé. Comme l’indique le paragraphe 165 (1) :

 

165. (1) La cour martiale ne peut juger une personne sans une mise en accusation formelle de celle-ci par le directeur des poursuites militaires.

 

(2) Pour l’application de la présente loi, la mise en accusation est prononcée lorsqu’est déposé auprès de l’administrateur de la cour martiale un acte d’accusation signé par le directeur des poursuites militaires ou un officier dûment autorisé par lui à le faire.

 

165. (1) A person may be tried by court martial only if a charge against the person is preferred by the Director of Military Prosecutions.

 

(2) For the purposes of this Act, a charge is preferred when the charge sheet in respect of the charge is signed by the Director of Military Prosecutions, or an officer authorized by the Director of Military Prosecutions to do so, and referred to the Court Martial Administrator.

 

 

4.2 Le juge militaire en chef

 

[12]      Le gouverneur en conseil peut nommer un juge militaire au poste de JMC (article 165.24). Aux termes de l’article 165.25 de la Loi sur la défense nationale, le JMC « désigne un juge militaire pour chaque cour martiale ».

 

4.3 L’administrateur de la cour martiale

 

[13]      L’administrateur, qui est nommé en vertu de l’article 165.18 de la Loi sur la défense nationale, exerce ses fonctions sous la direction générale du JMC (paragraphe 165.19(3)) et remplit « toute autre fonction qui lui est conférée par la présente loi ou que lui confie par règlement le gouverneur en conseil » (paragraphe 165.19(2)). Pour ce qui est de la présente demande, le rôle que joue l’administrateur en rapport avec la convocation d’une cour martiale est exposé au paragraphe 165.19(1) :

 

165.19 (1) L’administrateur de la cour martiale, conformément à la décision du directeur des poursuites militaires prise aux termes de l’article 165.14, convoque la cour martiale sélectionnée...

 

165.19 (1) When a charge is preferred, the Court Martial Administrator shall convene a court martial in accordance with the determination of the Director of Military Prosecutions under section 165.14 . . .

 

 

[14]      D’autres directives sur les fonctions qu’exerce l’administrateur en rapport avec la convocation d’une cour martiale sont exposées dans les Ordonnances et règlements royaux applicables aux Forces canadiennes (version 2005 révisée) (les « ORFC »). Plus précisément, l’article 111.02 exige que l’ordre de convocation :

 

c) mentionne le nom, le numéro matricule et le grade le cas échéant de l’accusé, du juge militaire désigné pour présider la cour martiale et dans le cas d’une cour martiale générale ou d’une cour martiale disciplinaire, des membres et des substituts;

(c) identify by name, service number and rank if applicable, the accused, the military judge assigned to preside at the court martial and, in the case of a General Court Martial or Disciplinary Court Martial, the members and alternate members; and

 

4.4   L’instance devant la cour martiale

 

[15]      Dans ses écritures, la JMC a bien exposé l’instance devant la cour martiale, depuis la préparation de l’acte d’accusation jusqu’à la tenue de l’audience. Le DPM a indiqué que les étapes 5 et 6 pouvaient avoir lieu en même temps; à part cela, il n’a rien trouvé à redire à ce sommaire. La troisième étape comporte implicitement la nomination, par le JMC, du juge militaire qui présidera la cour. Les étapes et les dispositions législatives applicables sont les suivantes :

 

-         l’acte d’accusation est établi [paragraphe 165(2) de la LDN; article 110.06 des ORFC];

 

-         le DPM remet l’acte d’accusation à l’ACM [article 110.07 des ORFC];

 

-         l’ACM prépare l’ordre de convocation [article 165.19 de la LDN];

 

-         l’ACM transmet l’ordre de convocation et l’acte d’accusation [article 111.05 des ORFC];

 

-         l’ACM détermine les besoins administratifs et émet les directives administratives nécessaires, y compris l’exigence relative à la publication d’un avis pour la cour martiale [article 111.13 des ORFC];

 

-         les procédures préliminaires sont ouvertes au public [article 187 de la LDN; article 112.03 des ORFC];

 

-         le public est admis au début de l’instance devant la cour martiale [article 180 de la LDN, alinéa 112.05(2)a) des ORFC];

 

-         le poursuivant et l’avocat de l’accusé prennent place [alinéa 112.05(2)b) des ORFC];

 

-         le juge militaire ouvre l’audience [alinéa 112.05(2)c) des ORFC];

 

-         l’accusé est amené devant la cour [alinéa 112.05(2)d) des ORFC];

 

-         l’ordre de convocation est lu en public [alinéa 112.05(3)a) des ORFC];

 

-         le juge entend toute objection concernant la constitution de la cour martiale [alinéa 112.05(3)b) des ORFC];

 

-         le juge prête serment [alinéa 112.05(4)a)des ORFC];

 

-         le sténographe judiciaire est assermenté [alinéa 112.05(4)b) des ORFC];

 

-         l’interprète est assermenté [alinéa 112.05(4)c) des ORFC];

 

-         le procureur de la poursuite donne lecture de l’acte d’accusation [alinéa 112.05(5)a) des ORFC];

 

-         le juge peut entendre les fins de non-recevoir [alinéa 112.05(5)b) des ORFC];

 

-         l’accusé peut demander des détails [alinéa 112.05(5)c) des ORFC];

 

-         l’accusé peut demander un procès distinct [alinéa 112.05(5)d) des ORFC];

 

-         le juge peut, sur demande de l’une des parties, connaître de toute question de droit ou de toute question mixte de droit et de faits [alinéa 112.05(5)e) des ORFC];

 

[16]      Le législateur a clairement indiqué que l’instance devant la cour martiale doit être tenue en public. Le paragraphe 180(1) de la Loi sur la défense nationale dispose que la cour martiale doit être « publique » sauf dans le cas énoncé au paragraphe 180(2). L’exception applicable est la suivante :

 

180. (2) Lorsqu’elle le juge nécessaire soit dans l’intérêt de la sécurité publique, de la défense ou de la moralité publique, soit dans l’intérêt du maintien de l’ordre ou de la bonne administration de la justice militaire, soit pour éviter toute atteinte aux relations internationales, la cour martiale peut ordonner le huis clos total ou partiel.

 

180. (2) A court martial may order that the public be excluded during the whole or any part of its proceedings if the court martial considers that it is necessary

 

(a) in the interests of public safety, defence or public morals;

 

(b) for the maintenance of order or the proper administration of military justice; or

 

(c) to prevent injury to international relations.

 

4.5   Lacune de la loi

 

[17]      Lorsque la cour martiale a été convoquée (mais pas avant), les questions préliminaires peuvent être examinées par le juge militaire désigné aux termes des articles 180 et 187 de la Loi sur la défense nationale. Le paragraphe 180(2) a été cité plus tôt. Le texte de l’article 187 se lit comme suit :

 

187. À tout moment après la convocation de la cour martiale générale ou la cour martiale disciplinaire et avant que le comité de la cour martiale ne commence à siéger, le juge militaire la présidant peut, sur demande :

 

a) entendre et statuer sur toute question ou objection pour laquelle il a le pouvoir d’entendre seul;

 

 

b) accepter le plaidoyer de culpabilité de l’accusé à l’égard d’une accusation et, lorsque celui-ci n’a pas plaidé non coupable à l’égard d’autres accusations, décider de la sentence.

187. At any time after a General Court Martial or Disciplinary Court Martial is convened but before the panel of the court martial assembles, the military judge assigned to preside over the court martial may, on application,

 

(a) hear and determine any question, matter or objection for which the presence of the panel of the court martial is not required; and

 

(b) receive the accused person’s plea of guilty in respect of any charge and, if there are no other charges remaining before the court martial to which pleas of not guilty have been recorded, determine the sentence.

 

[18]      Aux termes de la version actuellement en vigueur de la Loi sur la défense nationale, ce n’est qu’après avoir été désigné pour présider l’instance et que la cour martiale a été convoquée que le juge militaire peut instruire et trancher une question préliminaire. Nulle disposition de la Loi sur la défense nationale ne permet de nommer un juge militaire afin de faire examiner des questions préliminaires telles que la mise sous scellés d’une accusation. Les parties conviennent qu’il y a une lacune.

 

[19]      Une proposition concrète qui réglerait le problème a été faite; il s’agit de l’article 50 du Projet de loi C-7, Loi modifiant la Loi sur la défense nationale, 1re session, 39e Législature, 2006, un projet de loi de la présente session du Parlement qui a franchi l’étape de la première lecture le 27 avril 2006. L’article 50 du Projet de loi C-7 prévoit que l’article 187 de la Loi sur la défense nationale sera remplacé par la disposition suivante :

 

187. À tout moment après le prononcé d’une mise en accusation et avant l’ouverture du procès de l’accusé, tout juge militaire ou, si la cour martiale a déjà été convoquée, le juge militaire la présidant peut, sur demande, juger toute question ou objection à l’égard de

l’accusation.

187. At any time after a charge has been preferred but before the commencement of the trial, any question, matter or objection in respect of a charge may, on application, be heard and determined by any military judge or, if the court martial has been convened, the judge assigned to preside at the court martial.

 

[20]      Si l’article 50 du Projet de loi C-7 est adopté, n’importe quel juge militaire sera en mesure d’entendre une demande de la poursuite en vue de la mise sous scellés de l’accusation ou d’autres questions de confidentialité. C’est donc dire que si cette disposition était adoptée, le problème dont je suis saisie serait réglé. Malheureusement, cela n’a pas encore eu lieu et je suis directement saisie de la question des modalités de traitement de l’accusation dite « classifiée ». Vu le silence de la loi quant au traitement des questions préliminaires de confidentialité avant la désignation d’un juge militaire, la JMC est-elle tenue de désigner un juge militaire?

 

5.    Question no 1 : Existe-t-il une obligation légale de nommer un juge militaire et d’émettre l’ordre de convocation?

 

[21]      C’est en gardant ce contexte à l’esprit que j’examine la première question. Au vu des faits de l’espèce, quelle est l’obligation légale à caractère public de la JMC et de l’administrateur?

 

5.1   Rôle de l’administrateur

 

[22]      Comme je l’ai expliqué plus haut, l’administrateur est tenu d’émettre un ordre de convocation lorsqu’on lui présente une mise en accusation (article 187), assortie des renseignements indiqués à l’alinéa 111.02(2)c) des ORFC. Cependant, en l’espèce, l’administrateur n’avait pas le nom du juge militaire parce que la JMC avait refusé d’en nommer un. En outre, le caractère confidentiel de la mise en accusation rendait impossible la mention dans l’ordre de convocation du nom, du numéro matricule et du grade de l’accusé. Bref, l’administrateur n’avait tout simplement pas assez de renseignements pour remplir un ordre de convocation conforme aux ORFC.

 

[23]      Les parties conviennent que c’est en fait la JMC qui définit le rôle que joue l’administrateur dans la présente affaire. Il va de soi qu’un ordre de convocation ne peut être émis sans le nom du juge militaire. Tant que la JMC refuse de désigner un juge militaire pour la cour martiale, l’administrateur est incapable de remplir l’obligation légale d’émettre un ordre de convocation, conformément au paragraphe 111.02(2) des ORFC. C’est donc dire que la demande de délivrance de bref de mandamus visant l’administrateur est liée au fait que la JMC a refusé de nommer un juge militaire.

 

5.2 Observations et proposition du DPM

 

[24]      Le DPM a expliqué pourquoi un acte d’accusation confidentiel avait été présenté pour l’accusé, par le truchement de l’affidavit du major Jean-Bruno Cloutier. Le passage pertinent de son explication est le suivant :

 

[traduction]

La classification et la désignation des renseignements relevant des Forces canadiennes sont régies par l’Instruction de sécurité de la Défense nationale numéro 27 [« ISDN 27 »] [...] Cette instruction fournit des directives aux membres des Forces canadiennes pour ce qui est d’attribuer la cote ou la désignation de sécurité qui convient aux renseignements ministériels [...]

 

Des instructions plus précises au sujet de la politique du ministère concernant la protection des renseignements relatifs à la FOI 2 figurent dans l’instruction du QGDN intitulée « Directive 05/1993 du SCEMD, Politique d’affaires publiques et de sécurité – Force opérationnelle interarmées Deux [la « directive 05/1993 du SCEMD »] [...] Cette instruction précise que l’identité des membres des Forces canadiennes qui – comme l’accusé et le plaignant – sont affectés à un poste faisant partie de la FOI 2 est assortie de la désignation de sécurité « PROTÉGÉ C ». Dans ce contexte, le nom, l’adresse et l’occupation particulière de ces personnes ne sont pas publiquement associés à la FOI 2. La directive 05/1993 du SCEMD précise aussi que les mouvements ou les déploiements du personnel d’une unité en prévision d’une opération particulière doivent porter la cote « SECRET » ou « CONFIDENTIEL ».

 

[25]      Le DPM qualifie la directive 05/1993 du SCEMD de [traduction] « directive », ainsi que d’[traduction] « instruction ». Il reconnaît qu’il ne s’agit pas d’un règlement. Il fait toutefois remarquer que les membres des Forces armées doivent observer et faire respecter toutes les instructions et ordonnances (voir, par exemple, l’article 4.02 des ORFC, qui oblige les officiers à observer et à faire respecter toutes les ordonnances et directives se rapportant à l’exercice de leurs fonctions). Il s’agit là d’un élément important. En tant que membres des Forces armées du Canada, le DPM, la JMC et l’administrateur sont tenus de se conformer à la directive 05/1993 du SCEMD.

 

[26]      Dans ses observations écrites et orales, le DPM a exposé le processus qui, selon lui, permettrait à la cour martiale d’agir :

 

[traduction]

En fait, la solution simple, pratique et légale répondant à la préoccupation légitime que soulève la JMC en ce qui concerne la question de savoir si l’on peut protéger les renseignements confidentiels contenus dans l’acte d’accusation serait que cette dernière désigne un juge militaire pour permettre à l’ACM de convoquer une cour martiale. Ce juge militaire serait alors habilité à statuer sur la demande préliminaire présentée par le DPM en vertu de l’article 180 de la Loi sur la défense nationale afin d’empêcher toute communication publique des renseignements en litige. Il serait ainsi possible de débattre de manière franche et complète de cette question devant le juge militaire, qui suivrait alors l’approche « Dagenais/Mentuck » pour décider s’il convient ou non de faire droit à la demande du ministère public.

 

[27]      Je ne conteste pas que le juge militaire, une fois désigné, est habilité à examiner une demande de non‑divulgation (articles 180 et 187 de la Loi sur la défense nationale). Cependant, la question dont je suis saisie est préalable à la désignation du juge militaire. Il est évident qu’il est impossible aux termes de la Loi sur la défense nationale ou des règlements apparentés, de voir tranchées les questions de non‑divulgation avant que le juge ait été désigné. Tant que cela n’a pas été fait, il n’y a pas de cour. La question n’est pas de savoir si le juge de la cour martiale peut examiner ces questions; il peut le faire. La question pertinente est plutôt la suivante : l’administrateur et la JMC peuvent-ils prendre les mesures nécessaires pour convoquer une cour martiale sans qu’un juge détermine si des renseignements particuliers (le nom, le numéro matricule et le grade de l’accusé) peuvent être retenus à ce stade-là?

 

[28]      En répondant à la demande d’ordre de convocation du DPM, tant l’administrateur que la JMC ont exprimé l’avis qu’il existe une présomption de publicité des débats judiciaires militaires, comme cela a été établi pour les instances civiles (R. c. Mentuck, [2001] 3 R.C.S. 442, aux pages 472-474, et Vancouver Sun (Re), [2004] 2 R.C.S. 332, aux pages 345‑347). En particulier, dans une note de service explicative datée du 29 septembre 2005, la JMC a souligné les passages de ces deux décisions qui indiquent que la présomption de publicité s’applique à n’importe quelle étape de l’instance, y compris avant le procès.

 

[29]      Le DPM ne conteste pas que la jurisprudence reconnaît l’existence du droit constitutionnel à la publicité des débats judiciaires. Il soutient toutefois que la Cour suprême a reconnu qu’il peut y avoir des cas où il est permis de déroger à ce principe. Selon lui, c’est le cas en l’occurrence. En revanche, la JMC fait valoir que, même si une dérogation est autorisée, une telle décision doit être prise par la cour et non par la partie poursuivante.

 

5.3 Analyse

 

[30]      Dans les présentes demandes, nous en sommes à l’étape préliminaire d’instances judiciaires, soit la présentation de l’acte d’accusation. Les instances pénales, en dehors du système judiciaire militaire, sont habituellement introduites par le dépôt d’une dénonciation devant un juge de paix (ou un juge provincial). Une ordonnance de mise sous scellés peut être rendue à la demande du ministère public lorsque la dénonciation est faite sous serment et présentée au juge de paix ou lorsqu’un acte d’accusation est présenté. Ce n’est pas le ministère public qui décide si une dénonciation ou un acte d’accusation doivent être tenus confidentiels. Même si le juge du procès peut examiner par la suite d’autres requêtes en confidentialité, le juge de paix ou le juge provincial examine quand même, à ce stade préliminaire, le besoin d’assurer la confidentialité des renseignements. Le poursuivant présente la requête en non-divulgation et la cour prend en considération toutes les questions pertinentes. Après avoir soupesé tous les facteurs, la cour peut conclure que des raisons d’intérêt public l’emportent sur le besoin de préserver le secret et rejeter la requête. Le ministère public peut également convaincre la cour que la bonne administration de la justice exige le maintien du secret. Grâce au processus décisionnel judiciaire indépendant, la présomption de la publicité des procédures judiciaires est respectée.

 

[31]      Selon la démarche exposée par le DPM, celui-ci ou le ministère public sont seuls à prendre la décision de mettre sous scellés l’acte assimilable à la dénonciation ou à l’acte d’accusation. La question est posée : cette façon de procéder est‑elle légale ou incontournable?

 

[32]      La JMC soutient que les principes que la Cour suprême du Canada a confirmés tout récemment dans l’arrêt Toronto Star Newspapers Ltd. c. Ontario, 2005 CSC 41, [2005] 2 R.C.S. 188, aux pages 191-192, répondent à la question dont je suis saisie :

 

Les demandes concurrentes se rapportant à des procédures judiciaires amènent nécessairement les tribunaux à exercer leur pouvoir discrétionnaire.  La présomption de « publicité » des procédures judiciaires est désormais bien établie au Canada.  L’accès du public ne sera interdit que lorsque le tribunal compétent conclut, dans l’exercice de son pouvoir discrétionnaire, que la divulgation serait préjudiciable aux fins de la justice ou nuirait indûment à la bonne administration de la justice.

 

Ce critère est maintenant appelé le critère de Dagenais/Mentuck, d’après les arrêts dans lesquels notre Cour a formulé et précisé les principes applicables.  Il s’agit en l’espèce de déterminer si ce critère, élaboré relativement à des interdictions de publication au moment du procès, s’applique également à l’étape antérieure au dépôt d’accusations ou à « l’étape de l’enquête » dans une procédure criminelle.  Il faut plus particulièrement décider s’il s’applique aux « ordonnances de mise sous scellés » visant les mandats de perquisition et les dénonciations qui en ont justifié la délivrance.

 

[...]

 

Je suis d’avis de rejeter le pourvoi.  J’estime que le critère de Dagenais/Mentuck s’applique à chaque fois qu’un juge exerce son pouvoir discrétionnaire de restreindre la liberté d’expression et la liberté de la presse relativement à des procédures judiciaires.  Toute autre conclusion romprait, à mon avis, avec la jurisprudence de notre Cour, qui est demeurée constante au cours des vingt dernières années.  Elle porterait également atteinte au principe de la publicité des débats judiciaires qui est inextricablement lié aux valeurs fondamentales consacrées à l’al. 2b) de la Charte. [Non souligné dans l’original.]

 

[33]      L’état du droit sur la question ne laisse place à aucun doute. La présomption de publicité des débats s’applique à n’importe quelle étape de l’instance et c’est au juge qu’il revient de soupeser les raisons d’intérêt public militant en faveur d’une dérogation à la règle. Seul le juge peut interdire l’accès à l’instance judiciaire ou aux documents pertinents.

 

[34]      Cette interprétation de la jurisprudence est incontestable, du moins lorsque le ministère public a accès à une autorité judiciaire pour examiner la question. Telle est, bien sûr, la différence en l’espèce. Toute la jurisprudence par laquelle le principe de la publicité des débats judiciaires a été confirmé avait trait à des situations dans lesquelles une cour permanente était constituée, au stade préliminaire, et pouvait entendre une requête en non-divulgation. L’absence d’une cour permanente en matière militaire permet-elle au ministère public de « porter atteinte au principe de la publicité des débats judiciaires qui est inextricablement lié aux valeurs fondamentales consacrées à l’al. 2b) de la Charte »?

 

[35]      Le DPM soutient que la jurisprudence reconnaît qu’il existe des exceptions à la présomption de la publicité des débats judiciaires et que le critère dit de Dagenais/Mentuck doit être appliqué avec souplesse et selon le contexte (Toronto Star, précité, à la page 192). Je suis tout à fait d’accord. Il y a toutefois un problème : si l’on procède comme le DPM le propose, la cour n’a pas la possibilité d’agir avec souplesse au stade préliminaire; l’affaire est traitée de manière unilatérale par le DPM et, en fait la JMC et l’administrateur se contentent d’[traduction] « approuver machinalement » sa démarche.

[36]      Le système judiciaire militaire est censé constituer un code encadrant l’administration de la justice pour les Forces armées canadiennes. À l’évidence, poursuivre un membre des Forces armées comporte des aspects distinctifs. Cependant, ni la législation fédérale ni les politiques internes n’interdisent aux Forces armées de respecter la présomption de la publicité des débats judiciaires. Par exemple, voici ce qu’on peut lire au premier paragraphe de la Politique concernant la publication d’information relative aux cours martiales, datée du 17 septembre 2004 :

 

L’une des principales caractéristiques du système de justice militaire canadien, que ce dernier a d’ailleurs en commun avec l’appareil de justice pénale canadien, est sa transparence et son accessibilité au public. Il est essentiel que les procédures en justice soient caractérisées par la transparence et l’accessibilité, car cela accroît la confiance du public dans l’administration de la justice et la compréhension qu’il en a.

 

[37]      Il suffit aussi de jeter un coup d’œil aux modifications que l’on propose d’apporter à l’article 187 de la Loi sur la défense nationale pour constater que le gouvernement actuel reconnaît également que les requêtes préliminaires en non‑divulgation doivent relever du ressort du juge militaire.

 

[38]      Si la JMC émet l’ordre de convocation comme l’exige le DPM, la cour martiale procédera à l’instruction de l’affaire sans examen préliminaire du caractère légal de la mise sous scellés de l’accusation, et il y aura vraisemblablement une requête du ministère public, présentée au début de l’instruction, au sujet de la confidentialité de l’affaire et de la tenue de séances à huis clos. Peut-être, comme l’a laissé entendre le DPM, que les questions de confidentialité seront les mêmes lors du procès devant la cour martiale comme dans le cadre d’une requête préliminaire. J’ignore si cela est exact. Cependant, le juge Fish, auteur de l’opinion unanime de la Cour suprême dans l’arrêt Toronto Star, précité, à la page 192, indique qu’il se peut qu’une étape préliminaire mette en cause des questions de confidentialité différentes de celles qui seront en jeu au stade du procès :

 

Par exemple, un risque important pour la bonne administration de la justice à l’étape de l’enquête ira souvent de pair avec des considérations qui auront perdu toute leur pertinence au moment du procès. Par contre, il peut être beaucoup plus difficile à cette étape préliminaire de démontrer concrètement le risque perçu. Le fait qu’une ordonnance de mise sous scellés soit demandée à cette étape pour une courte période seulement peut à lui seul inciter le tribunal à faire preuve de prudence avant d’ordonner une divulgation complète et immédiate.

 

 

C’est peut-être le cas en l’espèce; nous ne le savons tout simplement pas.

 

[39]      Ce qui est évident, c’est que, à cette étape préliminaire, toutes les parties en cause sont soumises à la directive 05/1993 du SCEMD, c’est-à-dire que le DPM, l’administrateur et la JMC sont tenus de préserver la confidentialité de certains renseignements contenus dans la mise en accusation; ils doivent obéir aux ordres militaires. On peut donc réellement craindre qu’à cette étape préliminaire aucun des trois décisionnaires ne dispose d’un pouvoir discrétionnaire absolu quant à la mise sous scellés (soit dit en passant, je présume que le juge militaire désigné pour siéger à la cour martiale n’est pas tenu d’obéir à de tels ordres s’ils sont en conflit avec ses fonctions judiciaires). Sans un examen indépendant et distinct de la question de la confidentialité à ce stade, comment peut-on être convaincu que le besoin de préserver la confidentialité l’emporte sur celui d’une divulgation complète et immédiate?

 

[40]      Vu la nature des accusations et leur effet possible sur l’accusé et d’autres personnes susceptibles d’avoir un intérêt dans l’instance, je ne vois pas pourquoi les protections constitutionnelles que l’on accorde aux stades préliminaires d’une instance criminelle ne s’appliqueraient pas à tous les stades de l’instance mettant en cause l’accusé. À mon avis, il est contraire aux principes fondamentaux pertinents que le DPM mette unilatéralement sous scellés l’accusation ou que la JMC accepte cette décision.

 

5.4 Conclusion

 

[41]      J’hésite à conclure que l’obligation de la JMC comporte la possibilité que l’on puisse faire abstraction, à ce stade des procédures, de la présomption de publicité des débats judiciaires que la Cour suprême a consacrée.

 

[42]      En résumé, il est contraire à la présomption de publicité des débats judiciaires de permettre à la cour martiale de procéder sans un examen approfondi de l’émission d’un ordre de convocation confidentiel. Il n’est pas indiqué ou conforme aux principes établis en droit canadien que la JMC, le DPM ou la présente Cour (dans le cadre de la présente demande) comble une lacune. Comme l’a indiqué le juge Fish, de telles mesures porteraient « atteinte au principe de la publicité des débats judiciaires qui est inextricablement lié aux valeurs fondamentales consacrées à l’al. 2b) de la Charte » (arrêt Toronto Star, précité, à la page 192).

 

[43]      Pour ces motifs, je conclus que la JMC n’était pas tenue de désigner un juge militaire pour présider la cour martiale. En fait, elle ne pouvait pas le faire.

 

6.  Question no 2 : Existe-t-il d’autres voies de recours indiquées?

 

[44]      Examinons maintenant la deuxième question qui pose problème, soit celle de savoir si le DPM m’a convaincue qu’il n’existe aucune autre voie de recours indiquée. Même si j’ai tort et si la JMC était bel et bien tenue de désigner un juge militaire, le demandeur doit me convaincre qu’il n’existe pas d’autres voies de recours indiquées.

 

[45]      La délivrance d’un bref de mandamus est, selon moi, une mesure draconienne. En délivrant le bref demandé, la Cour interviendrait dans l’administration de la justice militaire. Je dois être convaincue que tous les autres moyens de régler le problème ont été – ou seraient – vains. À mon avis, le DPM pourrait peut-être prétendre à deux autres mesures. La première serait d’essayer d’obtenir un accommodement administratif avant le prononcé de la mise en accusation. La deuxième serait de solliciter des ordonnances de non‑divulgation au titre des articles 37 ou 38 de la Loi sur la preuve au Canada, L.R.C. 1985, ch. C-5. Examinons chacune de ces possibilités.

 

6.1 Mesures d’ordre administratif

 

[46]      Que ceci soit bien clair : il n’est pas question ici de savoir s’il est opportun que les militaires du Canada cherchent à classifier certains renseignements. Plus précisément, je ne mets pas en doute la valeur de la politique énoncée dans la directive 05/1993 du SCEMD. Par ailleurs, je reconnais qu’il est nécessaire, pour qu’une force militaire soit efficace, que tous ses membres soient liés par des instructions et des ordres. Nul ne conteste non plus que le DPM souhaite porter des accusations contre l’accusé afin de faire en sorte que [traduction] « celui‑ci réponde des accusations graves qui ont été portées conter lui ».

 

[47]      Le DPM soutient que, en raison des démarches de l’administrateur et de la JMC, [traduction] « il sera impossible de jamais convoquer une cour martiale lorsque l’intéressé est un membre actif de la FOI 2, même si – comme c’est le cas en l’espèce – des accusations sérieuses pèsent contre lui ». Selon moi, cet argument fait reposer entièrement sur le système judiciaire militaire le fardeau de composer avec des instructions et des ordres qui peuvent être incompatibles avec l’exercice de ses fonctions judiciaires.

 

[48]      La question n’a pas été pleinement débattue devant moi, mais je me demande si le DPM a fait tout ce qui était possible pour résoudre ce problème avant de présenter l’accusation confidentielle. Il y a peut-être des étapes administratives qui permettraient d’éviter le problème que pose un acte d’accusation « classifié », ce qui constituerait donc une mesure satisfaisante. Le DPM n’a présenté aucune preuve que d’autres mesures avaient été envisagées. Il a été demandé au major Jean‑Bruno Cloutier, lors d’un contre-interrogatoire portant sur son affidavit, quelles mesures avaient été étudiées. L’avocat du DPM l’a empêché de répondre aux questions.

 

[49]      À titre d’exemple, dans ces circonstances inusitées, serait-il possible d’obtenir un accommodement quelconque quant à l’application de la directive 05/1993 du SCEMD? Il me semble que les instructions et les ordres peuvent - et doivent - changer au gré des circonstances. En fait, même dans le cadre de cette directive, il y a des dispositions qui donnent des « conseils » sur la manière de disposer des demandes de communication de renseignements.

[50]      Dans ses écritures, l’administrateur a prétendu que l’accusé, en attendant la tenue du procès, pourrait être retiré de la FOI 2 ou affecté à une autre unité. De cette façon, le nouvel acte d’accusation ne mentionnerait pas la FOI 2, ce qui éviterait ainsi l’application de la directive 05/1993 du SCEMD.

 

[51]      Je ne dispose certainement d’aucune preuve qui me permettrait d’évaluer si l’une ou l’autre de ces mesures d’ordre administratif serait satisfaisante. Cependant, compte tenu du fardeau dont doit s’acquitter le DPM dans ces demandes, je dois être convaincue que l’on a envisagé des mesures de ce genre et que celles‑ci n’ont pas réglé le problème ou ne pouvaient pas le faire.

 

6.2 Recours à certaines dispositions de la Loi sur la preuve au Canada

 

[52]      La JMC a fait valoir que le DPM pourrait invoquer soit l’article 37 soit l’article 38 de la Loi sur la preuve au Canada. Ces dispositions sont reproduites à l’Annexe A jointe aux présents motifs. Selon l’une ou l’autre de ces deux dispositions, soutient la JMC, un juge de la Cour fédérale peut se pencher sur la question de savoir si les renseignements que contient l’acte d’accusation doivent être divulgués ou non.

 

[53]      Le DPM est d’avis que ni l’article 37 ni l’article 38 n’offrent une solution satisfaisante car, à première vue, les régimes qu’ils établissent ne s’appliquent pas : l’article 37 ne s’applique pas aux questions relatives à la défense nationale et l’article 38 ne peut être invoqué que suite à la convocation de la cour martiale. Après avoir lu et entendu les arguments du DPM, je ne suis pas convaincue que ces dispositions de la Loi sur la preuve au Canada ne présentent pas un moyen de combler la lacune de la loi.

 

[54]      J’entamerai mon analyse en donnant un aperçu des articles 37 et 38. Je verrai ensuite s’il est possible de soutenir que l’un ou l’autre de ces deux articles, ou les deux, peuvent servir à faire trancher la question de la confidentialité de l’accusation. Dans le cadre de cette analyse, je me pencherai sur les conclusions des parties.

 

6.2.1 Protection des renseignements aux termes de la Loi sur la preuve au Canada

 

[55]      Quel est l’objet des articles 37 et 38 de la Loi sur la preuve au Canada? De façon générale, les commentaires de la juge en chef MacLachlin, dans l’arrêt Babcock c. Canada (Procureur général), 2002 C.S.C. 57, [2002] 3 R.C.S. 3, à la page 15, répondent à cette question :

Les articles 37, 38 et 39 de la Loi sur la preuve au Canada régissent les oppositions à la divulgation de renseignements protégés détenus par le gouvernement fédéral. L’article 37 vise tous les cas où la Couronne fait valoir son immunité, sauf en ce qui a trait aux renseignements confidentiels du Cabinet ou du Conseil privé de la Reine pour le Canada; l’art. 38 traite des oppositions relatives aux relations internationales ou à la défense nationale; enfin, l’art. 39 s’applique aux renseignements confidentiels du Cabinet. Sous le régime des art. 37 et 38, un juge détermine si l’intérêt public commande davantage la divulgation des renseignements ou, au contraire, leur protection.

 

[56]      L’article 38, en particulier, a pour objet de protéger les renseignements dont la divulgation est susceptible de porter préjudice à la défense nationale ou aux relations internationales. Il prévoit que les prétentions gouvernementales concernant la confidentialité de ces renseignements sont soumises à la surveillance des tribunaux.

 

[57]      Il ressort de ce bref aperçu que les articles 37 et 38 ont été conçus pour résoudre le problème même dont je suis saisie. Les renseignements protégés (l’acte d’accusation classifié) sont détenus par le gouvernement fédéral (en l’occurrence, des membres des Forces armées). Un juge de la Cour fédérale peut décider si l’intérêt public milite davantage en faveur de la divulgation des renseignements ou, au contraire, de leur protection. De cette façon, le problème que j’ai relevé ci‑dessus est réglé. Soupeser les facteurs en jeu n’est plus du ressort des trois personnes (le DPM, l’administrateur et la JMC) qui sont incapables de le faire.

 

[58]      En ce qui concerne la pertinence des articles 37 ou 38 et la mission de la Cour, le DPM a déclaré ce qui suit :

 

[traduction]

[...] vous devez conclure qu’il s’agit d’une solution de rechange satisfaisante; et pour cela, vous devez examiner l’article 37 et dire : « Eh bien, à première vue, peut‑on obtenir la mesure réparatrice voulue aux termes de cette disposition? »

 

Et vous devez faire la même analyse avec l’article 38 : « À première vue, peut‑on obtenir aux termes de cette disposition la mesure réparatrice indiquée? »

 

[...]

 

En tout état de cause, vous devez agir maintenant, parce que le fait de renvoyer cette mission à quelqu’un d’autre ou à un autre de vos [confrères] de la Cour fédérale au sujet de l’article 38 ou d’un autre —

 

[...]

 

[59]      Le problème que présente cet argument est que le DPM ne reconnaît pas que c’est à lui qu’il incombe de montrer que l’article 37 ou l’article 38 n’est pas une voie de recours satisfaisante. Il ne suffit pas de soulever un doute et de me contraindre alors à garantir qu’une disposition particulière offrira la mesure réparatrice indiquée.

6.2.2 Application de l’article 38

 

[60]      Étant donné que l’article 38 est la disposition qui, à l’évidence, est la plus pertinente, c’est par là que je commencerai. L’article 38 de la Loi sur la preuve au Canada protège les renseignements dont la divulgation porterait préjudice aux relations internationales ou à la défense ou à la sécurité nationales. Il est applicable lorsque des renseignements susceptibles d’être divulgués sont des « renseignements sensibles » ou des « renseignements potentiellement préjudiciables », au sens accordé à ces expressions dans cette disposition. À l’évidence, je ne dispose d’aucune preuve qui me permettrait de trancher de manière définitive cette question. Par conséquent, aux fins de la présente demande, je tiens pour acquis que le nom, le numéro matricule et le grade de l’accusé constituent des « renseignements sensibles » ou des « renseignements potentiellement préjudiciables ».

 

[61]      La question est de savoir si le DPM peut recourir à l’article 38. Autrement dit, aux termes de cette voie de recours, peut‑il demander à un juge de la Cour fédérale de décider s’il convient de divulguer le contenu de l’accusation ou non?

 

[62]      L’argument principal soulevé par le DPM contre l’utilisation de l’article 38 est le suivant : selon lui, cette disposition ne peut s’appliquer que s’il y a une instance; tant que la cour martiale n’est pas convoquée, il n’y a pas d’« instance ». L’examen du libellé de l’article 38 n’étaye pas, selon moi, cette interprétation restrictive.

 

[63]      Le mot « instance » est défini à l’article 38; il s’agit d’une « procédure devant un tribunal, un organisme ou une personne ayant le pouvoir de contraindre la production de renseignements ». Selon cette définition, une cour martiale n’est une instance qu’après l’émission d’un ordre de convocation. Je suis d’accord avec le DPM que [traduction] « pour faire jouer l’application de l’article 38, il faut qu’il y ait une instance ».

 

[64]      L’article 38.01 met en branle les procédures exposées dans le reste de l’article 38. Il dispose que le processus est enclenché lorsqu’un « participant qui, dans le cadre d’une instance, est tenu de divulguer ou prévoit de divulguer ou de faire divulguer des renseignements dont il croit qu’il s’agit de renseignements sensibles ou de renseignements potentiellement préjudiciables [...] » [Passage non souligné dans l’original]. N’est-ce pas là exactement ce à quoi est confronté le DPM? En présentant l’accusation contre l’accusé, le DPM pose le premier geste dans un processus qui mène à une cour martiale. Autrement dit, il prend une mesure « dans le cadre d’une instance », c’est-à-dire une instance devant la cour martiale. À ce stade préliminaire, le DPM est tenu de divulguer ou prévoit de divulguer ou de faire divulguer des renseignements militaires classifiés. Logiquement, aux fins du régime établi par l’article 38, une mesure qui fait à ce point partie intégrante de la cour martiale se situe forcément « dans le cadre » de cette instance.

 

[65]      À l’appui d’une interprétation restrictive de l’article 38, l’avocat du DPM a également fait état, en se fiant à son expérience personnelle, d’un problème d’ordre pratique que pose l’utilisation de l’article 38. Il a indiqué que le processus comporte trois étapes. Selon l’article 38.01, un avis doit être remis au procureur général. Deuxièmement, selon l’article 38.03, le procureur général doit décider s’il autorise ou refuse la divulgation. Troisièmement, une fois que le procureur général a pris sa décision, la Cour peut alors procéder à un nouvel examen de la question et rendre sa propre décision.

 

[66]      Se fondant sur son expérience, l’avocat du DPM a fait valoir que :

 

[traduction]

[...] ceux qui, au ministère de la Justice, exercent ce pouvoir délégué en vertu de l’article 38.03 de décider s’il convient d’accorder une autorisation, ou non, ont une [...] interprétation très restrictive et stricte de l’article 38, et ils n’instruiront pas un avis relatif à une affaire qui ne fait l’objet d’aucune instance au sens de l’article 38.

 

[67]      Il m’est très difficile de conclure, sur le fondement de cette expérience, que l’article 38 ne constitue pas une voie de recours satisfaisante. Premièrement, je n’ai aucune idée de la nature des demandes qui ont été présentées au procureur général. Une chose est claire : les questions visées par ces dispositions de la Loi sur la preuve au Canada doivent être établies au cas par cas. Les cas invoqués par l’avocat du DPM concernaient peut-être des situations fort différentes. Deuxièmement, j’ai des doutes quant à la valeur de précédent d’une décision émanant d’un avocat travaillant au cabinet du procureur général.

 

[68]      En résumé, après avoir examiné le libellé de l’article 38 et les conclusions des parties, je suis convaincue que si le DPM présentait une demande de non-divulgation au titre de l’article 38, il pourrait éventuellement remplir les conditions qui y sont énoncées. Le DPM doit étudier plus sérieusement cette voie de recours.

 

6.2.3 Application de l’article 37

 

[69]      La JMC soutient que, si l’article 38 ne peut être invoqué, il est possible de présenter une demande au titre de l’article 37 de la Loi sur la preuve au Canada pour protéger les renseignements en invoquant « des raisons d’intérêt public déterminées ». Le DPM n’est pas d’accord et soutient que la présence de l’expression « sous réserve des articles 38 à 38.16 » au début de l’article 37 écarte les demandes mettant en jeu, comme c’est le cas en l’espèce, une question de défense et de sécurité nationale ou de relations internationales. Je ne souscris pas à cet argument précis contestant l’application de l’article 37, mais je conclus, vu les faits en l’espèce, que cette voie de recours pourrait poser problème.

 

[70]      L’expression « sous réserve de » ne signifie pas, à mon sens, qu’il est impossible d’invoquer l’article 37. Manifestement, si l’article 38 est la voie de recours indiquée en l’espèce, cela exclut le recours à l’article 37. Cependant, si les conditions de l’article 38 ne sont pas remplies, je ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas invoquer les raisons d’intérêt public plus générales dont il est question à l’article 37 (sous réserve du problème soulevé ci‑après) en ce qui concerne la divulgation de renseignements liés à la défense et à la sécurité nationales et aux relations internationales.

 

[71]      Malgré cette interprétation de l’expression « sous réserve de », l’article 37 peut être une voie de recours incommode dans les circonstances particulières de l’espèce. Le paragraphe 37(1) dispose que « tout ministre fédéral ou tout fonctionnaire peut s’opposer à la divulgation de renseignements auprès d’un tribunal, d’un organisme ou d’une personne ayant le pouvoir de contraindre à la production de renseignements ». Je ne suis pas tout à fait sûre que ce texte vise la divulgation éventuelle de l’acte d’accusation dans le cadre d’une instance qui n’a pas encore été précisée. Ce texte se démarque de l’expression « dans le cadre d’une instance » que l’on retrouve à l’article 38. Cela soulève un doute sérieux et, pour les besoins du critère à observer en matière de mandamus, je conclus que l’article 37 ne constitue pas une voie de recours satisfaisante.

 

6.3 Conclusion

 

[72]      Il incombe au demandeur de me convaincre que le bref de mandamus est la seule voie de recours possible. Les arguments du DPM n’ont pas emporté ma conviction. En l’espèce, il y a au moins deux autres voies de recours qui n’ont pas été suffisamment étudiées. Bien sûr, cela sans compter la possibilité, manifestement inacceptable, de ne pas donner suite aux accusations portées contre l’accusé. En fin de compte, il est possible que ni un assouplissement de la directive 05/1993 du SCEMD ni la présentation d’une demande au titre de la Loi sur la preuve au Canada ne seront fructueuses. Cependant, à mon avis, le DPM doit emprunter ces voies ou bien fournir des motifs plus convaincants de rejet des autres voies de recours avant de demander la Cour de délivrer un bref de mandamus, qui est un recours extraordinaire. Par conséquent, le DPM n’a pas droit à la voie de recours en equity qu’offre le mandamus.


7.  Résumé

 

[73]      Après avoir pris en compte l’ensemble des faits et des conclusions qui se rapportent aux présentes demandes, j’ai décidé de rejeter la demande de délivrance d’un bref de mandamus. Les motifs succincts pour lesquels je rejette la demande sont les suivants :

 

  • La présomption, bien établie, de publicité des débats judiciaires oblige le tribunal à soupeser les intérêts publics opposés que sont la non-divulgation ou la mise sous scellés de l’accusation classifiée avant que l’on convoque une cour martiale. Étant donné qu’une cour martiale n’existe que si elle a été convoquée, aucun texte ne prévoit la nomination d’un juge militaire chargé d’examiner la question préliminaire de la mise sous scellés de l’accusation. Avant de convoquer la cour martiale, tant la JMC que le DPM sont soumis aux ordres militaires et, de ce fait, incapables d’évaluer de manière indépendante la question de la non-divulgation. Compte tenu de cette lacune de la loi, et à défaut d’un contrôle judiciaire de la nécessité de la non-divulgation, il n’est pas indiqué ni conforme aux principes établis en droit canadien que la JMC nomme un juge militaire à la cour martiale. À ce stade, la JMC n’a pas l’obligation légale à caractère public de désigner un juge militaire chargé de présider la cour martiale permanente de l’accusé. Aucun bref de mandamus ne doit être délivré contre l’administrateur.

 

  • Sans la désignation d’un juge militaire, l’administrateur n’a pas la compétence ni l’obligation légale à caractère public d’émettre un ordre de convocation. Nul bref de mandamus ne doit être délivré contre l’administrateur.

 

  • Même si je fais erreur au sujet de l’obligation légale à caractère public de la JMC, le DPM ne m’a pas convaincue qu’il n’existe pas d’autres voies de recours satisfaisantes. Il n’a pas fait la preuve que d’autres mesures (comme la réaffectation de l’accusé à une autre unité militaire ou une révision des instructions contenues dans la directive 05/1993 du SCEMD) ont été envisagées ni expliqué pourquoi ces mesures ne sont pas envisageables. En outre, il semble à première vue que l’article 38 de la Loi sur la preuve au Canada constitue une voie de recours quant à la question préliminaire de la non‑divulgation.

 

[74]      Ni l’un ni l’autre des défendeurs n’ont demandé des dépens, et aucuns ne seront accordés.

 

[75]      Une copie des présents motifs et de l’ordonnance sera versée dans chacun des dossiers applicables de la Cour.


ORDONNANCE

 

LA COUR ORDONNE :

 

1.      La demande de délivrance d’un bref de mandamus obligeant l’administrateur de la cour martiale à convoquer une cour martiale permanente est rejetée.

 

2.      La demande de délivrance d’un bref de mandamus obligeant la juge militaire en chef à désigner un juge militaire pour une cour martiale permanente est rejetée.

 

3.      Chacune des parties supportera ses dépens.

 

« Judith A. Snider »

_____________________________

                                    Juge

 

Traduction certifiée conforme

François Brunet, LL.B., B.C.L.

 


 

ANNEXE « A »

jointe aux

motifs de l’ordonnance et ordonnance datés du 21 décembre 2006

dans l’affaire :

 

LE DIRECTEUR DES POURSUITES MILITAIRES

 

et

 

L’ADMINISTRATEUR DE LA COUR MARTIALE

 

T-1967-05

 

ET :

 

LE DIRECTEUR DES POURSUITES MILITAIRES

 

et

 

LA JUGE MILITAIRE EN CHEF

 

T-1968-05 

 

Loi sur la preuve au Canada,

 

    37. (1) Sous réserve des articles 38 à 38.16, tout ministre fédéral ou tout fonctionnaire peut s’opposer à la divulgation de renseignements auprès d’un tribunal, d’un organisme ou d’une personne ayant le pouvoir de contraindre à la production de renseignements, en attestant verbalement ou par écrit devant eux que, pour des raisons d’intérêt public déterminées, ces renseignements ne devraient pas être divulgués.

 

    (1.1) En cas d’opposition, le tribunal, l’organisme ou la personne veille à ce que les renseignements ne soient pas divulgués, sauf en conformité avec la présente loi.

 

 

    (2) Si l’opposition est portée devant une cour supérieure, celle-ci peut décider la question.

 

 

    (3) Si l’opposition est portée devant un tribunal, un organisme ou une personne qui ne constituent pas une cour supérieure, la question peut être décidée, sur demande, par :

 

a) la Cour fédérale, dans les cas où l'organisme ou la personne investis du pouvoir de contraindre à la production de renseignements sous le régime d'une loi fédérale ne constituent pas un tribunal régi par le droit d'une province;

 

b) la division ou le tribunal de première instance de la cour supérieure de la province dans le ressort de laquelle le tribunal, l’organisme ou la personne ont compétence, dans les autres cas.

 

    (4) Le délai dans lequel la demande visée au paragraphe (3) peut être faite est de dix jours suivant l’opposition, mais le tribunal saisi peut modifier ce délai s’il l’estime indiqué dans les circonstances.

 

 

 

    (4.1) Le tribunal saisi peut rendre une ordonnance autorisant la divulgation des renseignements qui ont fait l’objet d’une opposition au titre du paragraphe (1), sauf s’il conclut que leur divulgation est préjudiciable au regard des raisons d’intérêt public déterminées.

 

 

    (5) Si le tribunal saisi conclut que la divulgation des renseignements qui ont fait l’objet d’une opposition au titre du paragraphe (1) est préjudiciable au regard des raisons d’intérêt public déterminées, mais que les raisons d’intérêt public qui justifient la divulgation l’emportent sur les raisons d’intérêt public déterminées, il peut par ordonnance, compte tenu des raisons d’intérêt public qui justifient la divulgation ainsi que de la forme et des conditions de divulgation les plus susceptibles de limiter le préjudice au regard des raisons d’intérêt public déterminées, autoriser, sous réserve des conditions qu’il estime indiquées, la divulgation de tout ou partie des renseignements, d’un résumé de ceux-ci ou d’un aveu écrit des faits qui y sont liés.

 

    (6) Dans les cas où le tribunal n’autorise pas la divulgation au titre des paragraphes (4.1) ou (5), il rend une ordonnance interdisant la divulgation.

 

    (6.1) Le tribunal peut recevoir et admettre en preuve tout élément qu’il estime digne de foi et approprié — même si le droit canadien ne prévoit pas par ailleurs son admissibilité — et peut fonder sa décision sur cet élément.

 

    (7) L’ordonnance de divulgation prend effet après l’expiration du délai prévu ou accordé pour en appeler ou, en cas d’appel, après sa confirmation et l’épuisement des recours en appel.

 

 

 

    (8) La personne qui veut faire admettre en preuve ce qui a fait l’objet d’une autorisation de divulgation prévue au paragraphe (5), mais qui ne pourrait peut‑être pas le faire à cause des règles d’admissibilité applicables devant le tribunal, l’organisme ou la personne ayant le pouvoir de contraindre à la production de renseignements, peut demander au tribunal saisi au titre des paragraphes (2) ou (3) de rendre une ordonnance autorisant la production en preuve des renseignements, du résumé ou de l’aveu dans la forme ou aux conditions que celui-ci détermine, pourvu que telle forme ou telles conditions soient conformes à l’ordonnance rendue au titre du paragraphe (5).

 

    (9) Pour l’application du paragraphe (8), le tribunal saisi au titre des paragraphes (2) ou (3) prend en compte tous les facteurs qui seraient pertinents pour statuer sur l’admissibilité en preuve devant le tribunal, l’organisme ou la personne.

 

    37.1 (1) L’appel d’une décision rendue en vertu des paragraphes 37(4.1) à (6) se fait:

 

a) devant la Cour d’appel fédérale, s’agissant d’une décision de la Cour fédérale;

 

b) devant la cour d’appel d’une province, s’agissant d’une décision de la division ou du tribunal de première instance d’une cour supérieure d’une province.

 

    (2) Le délai dans lequel l’appel prévu au paragraphe (1) peut être interjeté est de dix jours suivant la date de la décision frappée d’appel, mais le tribunal d’appel peut le proroger s’il l’estime indiqué dans les circonstances.

 

 

    37.2 Nonobstant toute autre loi fédérale :

 

a) le délai de demande d’autorisation d’en appeler à la Cour suprême du Canada du jugement rendu au titre du paragraphe 37.1(1) est de dix jours suivant ce jugement, mais le tribunal compétent pour autoriser l’appel peut proroger ce délai s’il l’estime indiqué dans les circonstances;

 

 

b) dans le cas où l’autorisation est accordée, l’appel est interjeté conformément au paragraphe 60(1) de la Loi sur la Cour suprême, mais le délai qui s’applique est celui que fixe le tribunal ayant autorisé l’appel.

 

    37.21 [Abrogé, 2004, ch. 12, art. 18]

 

    37.3 (1) Le juge qui préside un procès criminel ou une autre instance criminelle peut rendre l’ordonnance qu’elle estime indiquée dans les circonstances en vue de protéger le droit de l’accusé à un procès équitable, pourvu que telle ordonnance soit conforme à une ordonnance rendue au titre de l’un des paragraphes 37(4.1) à (6) relativement à ce procès ou à cette instance ou à la décision en appel portant sur une ordonnance rendue au titre de l’un ou l’autre de ces paragraphes.

 

    (2) L’ordonnance rendue au titre du paragraphe (1) peut notamment :

 

 

a) annuler un chef d’accusation d’un acte d’accusation ou d’une dénonciation, ou autoriser l’instruction d’un chef d’accusation ou d’une dénonciation pour une infraction moins grave ou une infraction incluse;

 

b) ordonner l’arrêt des procédures;

 

 

c) être rendue à l’encontre de toute partie sur toute question liée aux renseignements dont la divulgation est interdite.

 

    38. Les définitions qui suivent s’appliquent au présent article et aux articles 38.01 à 38.15.

 

« instance » Procédure devant un tribunal, un organisme ou une personne ayant le pouvoir de contraindre la production de renseignements.

 

« juge » Le juge en chef de la Cour fédérale ou le juge de ce tribunal désigné par le juge en chef pour statuer sur les questions dont est saisi le tribunal en application de l'article 38.04.

 

« participant » Personne qui, dans le cadre d’une instance, est tenue de divulguer ou prévoit de divulguer ou de faire divulguer des renseignements.

 

« poursuivant » Représentant du procureur général du Canada ou du procureur général d’une province, particulier qui agit à titre de poursuivant dans le cadre d’une instance ou le directeur des poursuites militaires, au sens de la Loi sur la défense nationale.

 

« renseignements potentiellement préjudiciables » Les renseignements qui, s’ils sont divulgués, sont susceptibles de porter préjudice aux relations internationales ou à la défense ou à la sécurité nationales.

 

« renseignements sensibles » Les renseignements, en provenance du Canada ou de l’étranger, qui concernent les affaires internationales ou la défense ou la sécurité nationales, qui se trouvent en la possession du gouvernement du Canada et qui sont du type des renseignements à l’égard desquels celui‑ci prend des mesures de protection.

 

    38.01 (1) Tout participant qui, dans le cadre d’une instance, est tenu de divulguer ou prévoit de divulguer ou de faire divulguer des renseignements dont il croit qu’il s’agit de renseignements sensibles ou de renseignements potentiellement préjudiciables est tenu d’aviser par écrit, dès que possible, le procureur général du Canada de la possibilité de divulgation et de préciser dans l’avis la nature, la date et le lieu de l’instance.

 

    (2) Tout participant qui croit que des renseignements sensibles ou des renseignements potentiellement préjudiciables sont sur le point d’être divulgués par lui ou par une autre personne au cours d’une instance est tenu de soulever la question devant la personne qui préside l’instance et d’aviser par écrit le procureur général du Canada de la question dès que possible, que ces renseignements aient fait ou non l’objet de l’avis prévu au paragraphe (1). Le cas échéant, la personne qui préside l’instance veille à ce que les renseignements ne soient pas divulgués, sauf en conformité avec la présente loi.

 

    (3) Le fonctionnaire — à l’exclusion d’un participant — qui croit que peuvent être divulgués dans le cadre d’une instance des renseignements sensibles ou des renseignements potentiellement préjudiciables peut aviser par écrit le procureur général du Canada de la possibilité de divulgation; le cas échéant, l’avis précise la nature, la date et le lieu de l’instance.

 

    (4) Le fonctionnaire — à l’exclusion d’un participant — qui croit que des renseignements sensibles ou des renseignements potentiellement préjudiciables sont sur le point d’être divulgués au cours d’une instance peut soulever la question devant la personne qui préside l’instance; le cas échéant, il est tenu d’aviser par écrit le procureur général du Canada de la question dès que possible, que ces renseignements aient fait ou non l’objet de l’avis prévu au paragraphe (3) et la personne qui préside l’instance veille à ce que les renseignements ne soient pas divulgués, sauf en conformité avec la présente loi.

 

    (5) Dans le cas d’une instance engagée sous le régime de la partie III de la Loi sur la défense nationale, les avis prévus à l’un des paragraphes (1) à (4) sont donnés à la fois au procureur général du Canada et au ministre de la Défense nationale.

 

    (6) Le présent article ne s’applique pas:

 

a) à la communication de renseignements par une personne à son avocat dans le cadre d’une instance, si ceux-ci concernent l’instance;

 

b) aux renseignements communiqués dans le cadre de l’exercice des attributions du procureur général du Canada, du ministre de la Défense nationale, du juge ou d’un tribunal d’appel ou d’examen au titre de l’article 38, du présent article, des articles 38.02 à 38.13 ou des articles 38.15 ou 38.16;

 

c) aux renseignements dont la divulgation est autorisée par l’institution fédérale qui les a produits ou pour laquelle ils ont été produits ou, dans le cas où ils n’ont pas été produits par ou pour une institution fédérale, par la première institution fédérale à les avoir reçus;

d) aux renseignements divulgués auprès de toute entité mentionnée à l’annexe et, le cas échéant, à une application figurant en regard d’une telle entité.

 

    (7) Les paragraphes (1) et (2) ne s’appliquent pas au participant si une institution gouvernementale visée à l’alinéa (6)c) l’informe qu’il n’est pas nécessaire, afin d’éviter la divulgation des renseignements visés à cet alinéa, de donner un avis au procureur général du Canada au titre du paragraphe (1) ou de soulever la question devant la personne présidant une instance au titre du paragraphe (2).

 

    (8) Le gouverneur en conseil peut, par décret, ajouter, modifier ou supprimer la mention, à l’annexe, d’une entité ou d’une application figurant en regard d’une telle entité.

 

    38.02 (1) Sous réserve du paragraphe 38.01(6), nul ne peut divulguer, dans le cadre d’une instance :

 

a) les renseignements qui font l’objet d’un avis donné au titre de l’un des paragraphes 38.01(1) à (4);

 

b) le fait qu’un avis est donné au procureur général du Canada au titre de l’un des paragraphes 38.01(1) à (4), ou à ce dernier et au ministre de la Défense nationale au titre du paragraphe 38.01(5);

 

c) le fait qu'une demande a été présentée à la Cour fédérale au titre de l'article 38.04, qu'il a été interjeté appel d'une ordonnance rendue au titre de l'un des paragraphes 38.06(1) à (3) relativement à une telle demande ou qu'une telle ordonnance a été renvoyée pour examen;

 

d) le fait qu’un accord a été conclu au titre de l’article 38.031 ou du paragraphe 38.04(6).

 

    (1.1) Dans le cas où une entité mentionnée à l’annexe rend, dans le cadre d’une application qui y est mentionnée en regard de celle-ci, une décision ou une ordonnance qui entraînerait la divulgation de renseignements sensibles ou de renseignements potentiellement préjudiciables, elle ne peut les divulguer ou les faire divulguer avant que le procureur général du Canada ait été avisé de ce fait et qu’il se soit écoulé un délai de dix jours postérieur à l’avis.

 

    (2) La divulgation des renseignements ou des faits visés au paragraphe (1) n’est pas interdite :

 

a) si le procureur général du Canada l’autorise par écrit au titre de l’article 38.03 ou par un accord conclu en application de l’article 38.031 ou du paragraphe 38.04(6);

 

b) si le juge l’autorise au titre de l’un des paragraphes 38.06(1) ou (2) et que le délai prévu ou accordé pour en appeler a expiré ou, en cas d’appel ou de renvoi pour examen, sa décision est confirmée et les recours en appel sont épuisés.

 

 

    38.03 (1) Le procureur général du Canada peut, à tout moment, autoriser la divulgation de tout ou partie des renseignements ou des faits dont la divulgation est interdite par le paragraphe 38.02(1) et assortir son autorisation des conditions qu’il estime indiquées.

 

    (2) Dans le cas d’une instance engagée sous le régime de la partie III de la Loi sur la défense nationale, le procureur général du Canada ne peut autoriser la divulgation qu’avec l’assentiment du ministre de la Défense nationale.

 

    (3) Dans les dix jours suivant la réception du premier avis donné au titre de l’un des paragraphes 38.01(1) à (4) relativement à des renseignements donnés, le procureur général du Canada notifie par écrit sa décision relative à la divulgation de ces renseignements à toutes les personnes qui ont donné un tel avis.

 

    38.031 (1) Le procureur général du Canada et la personne ayant donné l'avis prévu aux paragraphes 38.01(1) ou (2) qui n'a pas l'obligation de divulguer des renseignements dans le cadre d'une instance, mais veut divulguer ou faire divulguer les renseignements qui ont fait l'objet de l'avis ou les faits visés aux alinéas 38.02(1)b) à d), peuvent, avant que cette personne présente une demande à la Cour fédérale au titre de l'alinéa 38.04(2)c), conclure un accord prévoyant la divulgation d'une partie des renseignements ou des faits ou leur divulgation assortie de conditions.

 

    (2) Si un accord est conclu, la personne ne peut présenter de demande à la Cour fédérale au titre de l'alinéa 38.04(2)c) relativement aux renseignements ayant fait l'objet de l'avis qu'elle a donné au procureur général du Canada au titre des paragraphes 38.01(1) ou (2).

 

    38.04 (1) Le procureur général du Canada peut, à tout moment et en toutes circonstances, demander à la Cour fédérale de rendre une ordonnance portant sur la divulgation de renseignements à l'égard desquels il a reçu un avis au titre de l'un des paragraphes 38.01(1) à (4).

 

    (2) Si, en ce qui concerne des renseignements à l'égard desquels il a reçu un avis au titre de l'un des paragraphes 38.01(1) à (4), le procureur général du Canada n'a pas notifié sa décision à l'auteur de l'avis en conformité avec le paragraphe 38.03(3) ou, sauf par un accord conclu au titre de l'article 38.031, il a autorisé la divulgation d'une partie des renseignements ou a assorti de conditions son autorisation de divulgation :

 

a) il est tenu de demander à la Cour fédérale de rendre une ordonnance concernant la divulgation des renseignements si la personne qui l'a avisé au titre des paragraphes 38.01(1) ou (2) est un témoin;

 

b) la personne — à l'exclusion d'un témoin — qui a l'obligation de divulguer des renseignements dans le cadre d'une instance est tenue de demander à la Cour fédérale de rendre une ordonnance concernant la divulgation des renseignements;

 

c) la personne qui n'a pas l'obligation de divulguer des renseignements dans le cadre d'une instance, mais qui veut en divulguer ou en faire divulguer, peut demander à la Cour fédérale de rendre une ordonnance concernant la divulgation des renseignements.

 

    (3) La personne qui présente une demande à la Cour fédérale au titre des alinéas (2)b) ou c) en notifie le procureur général du Canada.

 

    (4) Toute demande présentée en application du présent article est confidentielle. Sous réserve de l'article 38.12, l'administrateur en chef du Service administratif des tribunaux peut prendre les mesures qu'il estime indiquées en vue d'assurer la confidentialité de la demande et des renseignements sur lesquels elle porte.

 

    (5) Dès que la Cour fédérale est saisie d'une demande présentée au titre du présent article, le juge :

 

a) entend les observations du procureur général du Canada — et du ministre de la Défense nationale dans le cas d'une instance engagée sous le régime de la partie III de la Loi sur la défense nationale — sur l'identité des parties ou des témoins dont les intérêts sont touchés par l'interdiction de divulgation ou les conditions dont l'autorisation de divulgation est assortie et sur les personnes qui devraient être avisées de la tenue d'une audience;

 

b) décide s'il est nécessaire de tenir une audience;

 

c) s'il estime qu'une audience est nécessaire :

 

(i) spécifie les personnes qui devraient en être avisées,

 

(ii) ordonne au procureur général du Canada de les aviser,

 

(iii) détermine le contenu et les modalités de l'avis;

 

d) s'il l'estime indiqué en l'espèce, peut donner à quiconque la possibilité de présenter des observations.

    (6) Après la saisine de la Cour fédérale d'une demande présentée au titre de l'alinéa (2)c) ou l'institution d'un appel ou le renvoi pour examen d'une ordonnance du juge rendue en vertu de l'un des paragraphes 38.06(1) à (3) relativement à cette demande, et avant qu'il soit disposé de l'appel ou de l'examen :

 

a) le procureur général du Canada peut conclure avec l'auteur de la demande un accord prévoyant la divulgation d'une partie des renseignements ou des faits visés aux alinéas 38.02(1)b) à d) ou leur divulgation assortie de conditions;

 

b) si un accord est conclu, le tribunal n'est plus saisi de la demande et il est mis fin à l'audience, à l'appel ou à l'examen.

 

    (7) Sous réserve du paragraphe (6), si le procureur général du Canada autorise la divulgation de tout ou partie des renseignements ou supprime les conditions dont la divulgation est assortie après la saisine de la Cour fédérale aux termes du présent article et, en cas d'appel ou d'examen d'une ordonnance du juge rendue en vertu de l'un des paragraphes 38.06(1) à (3), avant qu'il en soit disposé, le tribunal n'est plus saisi de la demande et il est mis fin à l'audience, à l'appel ou à l'examen à l'égard de tels des renseignements dont la divulgation est autorisée ou n'est plus assortie de conditions.

 

    38.05 Si la personne qui préside ou est désignée pour présider l’instance à laquelle est liée l’affaire ou, à défaut de désignation, la personne qui est habilitée à effectuer la désignation reçoit l’avis visé à l’alinéa 38.04(5)c), elle peut, dans les dix jours, fournir au juge un rapport sur toute question relative à l’instance qu’elle estime utile à celui-ci.

 

 

 

 

 

    38.06 (1) Le juge peut rendre une ordonnance autorisant la divulgation des renseignements, sauf s’il conclut qu’elle porterait préjudice aux relations internationales ou à la défense ou à la sécurité nationales.

 

 

    (2) Si le juge conclut que la divulgation des renseignements porterait préjudice aux relations internationales ou à la défense ou à la sécurité nationales, mais que les raisons d’intérêt public qui justifient la divulgation l’emportent sur les raisons d’intérêt public qui justifient la non-divulgation, il peut par ordonnance, compte tenu des raisons d’intérêt public qui justifient la divulgation ainsi que de la forme et des conditions de divulgation les plus susceptibles de limiter le préjudice porté aux relations internationales ou à la défense ou à la sécurité nationales, autoriser, sous réserve des conditions qu’il estime indiquées, la divulgation de tout ou partie des renseignements, d’un résumé de ceux-ci ou d’un aveu écrit des faits qui y sont liés.

 

    (3) Dans le cas où le juge n’autorise pas la divulgation au titre des paragraphes (1) ou (2), il rend une ordonnance confirmant l’interdiction de divulgation.

 

    (3.1) Le juge peut recevoir et admettre en preuve tout élément qu’il estime digne de foi et approprié — même si le droit canadien ne prévoit pas par ailleurs son admissibilité — et peut fonder sa décision sur cet élément.

 

    (4) La personne qui veut faire admettre en preuve ce qui a fait l’objet d’une autorisation de divulgation prévue au paragraphe (2), mais qui ne pourra peut‑être pas le faire à cause des règles d’admissibilité applicables à l’instance, peut demander à un juge de rendre une ordonnance autorisant la production en preuve des renseignements, du résumé ou de l’aveu dans la forme ou aux conditions que celui-ci détermine, dans la mesure où telle forme ou telles conditions sont conformes à l’ordonnance rendue au titre du paragraphe (2).

 

    (5) Pour l’application du paragraphe (4), le juge prend en compte tous les facteurs qui seraient pertinents pour statuer sur l’admissibilité en preuve au cours de l’instance.

 

    38.07 Le juge peut ordonner au procureur général du Canada d’aviser de l’ordonnance rendue en application de l’un des paragraphes 38.06(1) à (3) toute personne qui, de l’avis du juge, devrait être avisée.

 

    38.08 Si le juge conclut qu’une partie à l’instance dont les intérêts sont lésés par une ordonnance rendue en application de l’un des paragraphes 38.06(1) à (3) n’a pas eu la possibilité de présenter ses observations au titre de l’alinéa 38.04(5)d), il renvoie l’ordonnance à la Cour d’appel fédérale pour examen.

 

    38.09 (1) Il peut être interjeté appel d’une ordonnance rendue en application de l’un des paragraphes 38.06(1) à (3) devant la Cour d’appel fédérale.

 

    (2) Le délai dans lequel l’appel peut être interjeté est de dix jours suivant la date de l’ordonnance frappée d’appel, mais la Cour d’appel fédérale peut le proroger si elle l’estime indiqué en l’espèce.

 

    38.1 Malgré toute autre loi fédérale :

 

 

a) le délai de demande d’autorisation d’en appeler à la Cour suprême du Canada est de dix jours suivant le jugement frappé d’appel, mais ce tribunal peut proroger le délai s’il l’estime indiqué en l’espèce;

 

 

 

b) dans les cas où l’autorisation est accordée, l’appel est interjeté conformément au paragraphe 60(1) de la Loi sur la Cour suprême, mais le délai qui s’applique est celui qu’a fixé la Cour suprême du Canada.

 

    38.11 (1) Les audiences prévues au paragraphe 38.04(5) et l’audition de l’appel ou de l’examen d’une ordonnance rendue en application de l’un des paragraphes 38.06(1) à (3) sont tenues à huis clos et, à la demande soit du procureur général du Canada, soit du ministre de la Défense nationale dans le cas des instances engagées sous le régime de la partie III de la Loi sur la défense nationale, elles ont lieu dans la région de la capitale nationale définie à l’annexe de la Loi sur la capitale nationale.

 

    (2) Le juge saisi d’une affaire au titre du paragraphe 38.04(5) ou le tribunal saisi de l’appel ou de l’examen d’une ordonnance rendue en application de l’un des paragraphes 38.06(1) à (3) donne au procureur général du Canada — et au ministre de la Défense nationale dans le cas d’une instance engagée sous le régime de la partie III de la Loi sur la défense nationale — la possibilité de présenter ses observations en l’absence d’autres parties. Il peut en faire de même pour les personnes qu’il entend en application de l’alinéa 38.04(5)d).

 

    38.12 (1) Le juge saisi d’une affaire au titre du paragraphe 38.04(5) ou le tribunal saisi de l’appel ou de l’examen d’une ordonnance rendue en application de l’un des paragraphes 38.06(1) à (3) peut rendre toute ordonnance qu’il estime indiquée en l’espèce en vue de protéger la confidentialité des renseignements sur lesquels porte l’audience, l’appel ou l’examen.

 

    (2) Le dossier ayant trait à l’audience, à l’appel ou à l’examen est confidentiel. Le juge ou le tribunal saisi peut ordonner qu’il soit placé sous scellé et gardé dans un lieu interdit au public.

 

 

    38.13 (1) Le procureur général du Canada peut délivrer personnellement un certificat interdisant la divulgation de renseignements dans le cadre d’une instance dans le but de protéger soit des renseignements obtenus à titre confidentiel d’une entité étrangère — au sens du paragraphe 2(1) de la Loi sur la protection de l’information — ou qui concernent une telle entité, soit la défense ou la sécurité nationales. La délivrance ne peut être effectuée qu’après la prise, au titre de la présente loi ou de toute autre loi fédérale, d’une ordonnance ou d’une décision qui entraînerait la divulgation des renseignements devant faire l’objet du certificat.

 

    (2) Dans le cas d’une instance engagée sous le régime de la partie III de la Loi sur la défense nationale, le procureur général du Canada ne peut délivrer de certificat qu’avec l’assentiment du ministre de la Défense nationale donné personnellement par celui-ci.

 

    (3) Le procureur général du Canada fait signifier une copie du certificat :

 

 

a) à la personne qui préside ou est désignée pour présider l’instance à laquelle sont liés les renseignements ou, à défaut de désignation, à la personne qui est habilitée à effectuer la désignation;

 

b) à toute partie à l’instance;

 

c) à toute personne qui donne l’avis prévu à l’article 38.01 dans le cadre de l’instance;

 

d) à toute personne qui, dans le cadre de l’instance, a l’obligation de divulguer ou pourrait divulguer ou faire divulguer les renseignements à l’égard desquels le procureur général du Canada a été avisé en application de l’article 38.01;

 

e) à toute partie aux procédures engagées en application du paragraphe 38.04(5) ou à l’appel d’une ordonnance rendue en application de l’un des paragraphes 38.06(1) à (3) en ce qui concerne les renseignements;

 

f) au juge qui tient une audience en application du paragraphe 38.04(5) et à tout tribunal saisi de l’appel ou de l’examen d’une ordonnance rendue en application de l’un des paragraphes 38.06(1) à (3) en ce qui concerne les renseignements;

g) à toute autre personne à laquelle, de l’avis du procureur général du Canada, une copie du certificat devrait être signifiée.

 

    (4) Le procureur général du Canada fait déposer une copie du certificat :

 

 

a) auprès de la personne responsable des dossiers relatifs à l’instance;

 

 

b) au greffe de la Cour fédérale et à celui de tout tribunal saisi de l’appel ou de l’examen d’une ordonnance rendue en application de l’un des paragraphes 38.06(1) à (3).

 

    (5) Une fois délivré, le certificat a pour effet, malgré toute autre disposition de la présente loi, d’interdire, selon ses termes, la divulgation des renseignements.

 

 

 

    (6) La Loi sur les textes réglementaires ne s’applique pas aux certificats délivrés au titre du paragraphe (1).

 

    (7) Dès que le certificat est délivré, le procureur général du Canada le fait publier dans la Gazette du Canada.

 

 

    (8) Le certificat ou toute question qui en découle n’est susceptible de révision, de restriction, d’interdiction, d’annulation, de rejet ou de toute autre forme d’intervention que sous le régime de l’article 38.131.

 

    (9) Le certificat expire à la fin d’une période de quinze ans à compter de la date de sa délivrance et peut être délivré de nouveau.

 

    38.131 (1) Toute partie à l’instance visée à l’article 38.13 peut demander à la Cour d’appel fédérale de rendre une ordonnance modifiant ou annulant un certificat délivré au titre de cet article pour les motifs mentionnés aux paragraphes (8) ou (9), selon le cas.

 

    (2) Le demandeur en avise le procureur général du Canada.

 

 

    (3) Dans le cas d’une instance engagée sous le régime de la partie III de la Loi sur la défense nationale, l’avis prévu au paragraphe (2) est donné à la fois au procureur général du Canada et au ministre de la Défense nationale.

 

    (4) Par dérogation à l’article 16 de la Loi sur la Cour fédérale, la Cour d’appel fédérale est constituée d’un seul juge de ce tribunal pour l’étude de la demande.

 

    (5) Pour l’étude de la demande, le juge peut recevoir et admettre en preuve tout élément qu’il estime digne de foi et approprié — même si le droit canadien ne prévoit pas par ailleurs son admissibilité — et peut se fonder sur cet élément pour rendre sa décision au titre de l’un des paragraphes (8) à (10).

 

    (6) Les articles 38.11 et 38.12 s’appliquent, avec les adaptations nécessaires, à la demande présentée au titre du paragraphe (1).

 

    (7) Le juge étudie la demande le plus tôt possible, mais au plus tard dans les dix jours suivant la présentation de la demande au titre du paragraphe (1).

 

 

   

(8) Si le juge estime qu’une partie des renseignements visés par le certificat ne porte pas sur des renseignements obtenus à titre confidentiel d’une entité étrangère — au sens du paragraphe 2(1) de la Loi sur la protection de l’information — ou qui concernent une telle entité ni sur la défense ou la sécurité nationales, il modifie celui-ci en conséquence par ordonnance.

 

    (9) Si le juge estime qu’aucun renseignement visé par le certificat ne porte sur des renseignements obtenus à titre confidentiel d’une entité étrangère — au sens du paragraphe 2(1) de la Loi sur la protection de l’information — ou qui concernent une telle entité, ni sur la défense ou la sécurité nationales, il révoque celui-ci par ordonnance.

 

    (10) Si le juge estime que tous les renseignements visés par le certificat portent sur des renseignements obtenus à titre confidentiel d’une entité étrangère — au sens du paragraphe 2(1) de la Loi sur la protection de l’information — ou qui concernent une telle entité, ou sur la défense ou la sécurité nationales, il confirme celui-ci par ordonnance.

 

    (11) La décision du juge rendue au titre de l’un des paragraphes (8) à (10) est définitive et, par dérogation à toute autre loi fédérale, non susceptible d’appel ni de révision judiciaire.

 

    (12) Dès que possible après la décision du juge, le procureur général du Canada fait publier dans la Gazette du Canada, avec mention du certificat publié antérieurement :

 

 

 

 

a) le certificat modifié au titre du paragraphe (8);

 

b) un avis de la révocation d’un certificat au titre du paragraphe (9).

 

    38.14 (1) La personne qui préside une instance criminelle peut rendre l’ordonnance qu’elle estime indiquée en l’espèce en vue de protéger le droit de l’accusé à un procès équitable, pourvu que telle ordonnance soit conforme à une ordonnance rendue en application de l’un des paragraphes 38.06(1) à (3) relativement à cette instance, a une décision en appel ou découlant de l’examen ou au certificat délivré au titre de l’article 38.13.

 

     (2) L’ordonnance rendue au titre du paragraphe (1) peut notamment :

 

 

a) annuler un chef d’accusation d’un acte d’accusation ou d’une dénonciation, ou autoriser l’instruction d’un chef d’accusation ou d’une dénonciation pour une infraction moins grave ou une infraction incluse;

 

b) ordonner l’arrêt des procédures;

 

 

c) être rendue à l’encontre de toute partie sur toute question liée aux renseignements dont la divulgation est interdite.

 

    38.15 (1) Dans le cas où des renseignements sensibles ou des renseignements potentiellement préjudiciables peuvent être divulgués dans le cadre d’une poursuite qui n’est pas engagée par le procureur général du Canada ou pour son compte, il peut délivrer un fiat et le faire signifier au poursuivant.

 

    (2) Le fiat établit la compétence exclusive du procureur général du Canada à l’égard de la poursuite qui y est mentionnée et des procédures qui y sont liées.

 

 

    (3) L’original ou un double du fiat est déposé devant le tribunal saisi de la poursuite — ou d’une autre procédure liée à celle-ci — engagée par le procureur général du Canada ou pour son compte.

 

 

    (4) Le fiat ou le double de celui-ci :

 

a) est une preuve concluante que le procureur général du Canada ou son délégué a compétence pour mener la poursuite qui y est mentionnée ou les procédures qui y sont liées;

 

b) est admissible en preuve sans qu’il soit nécessaire de prouver la signature ou la qualité officielle du procureur général du Canada.

 

    (5) Le présent article ne s’applique pas aux instances engagées sous le régime de la partie III de la Loi sur la défense nationale.

 

    38.16 Le gouverneur en conseil peut, par règlement, prendre les mesures qu’il estime nécessaires à l’application des articles 38 à 38.15, notamment régir les avis, certificats et fiat.

Canada Evidence Act,

 

    37. (1) Subject to sections 38 to 38.16, a Minister of the Crown in right of Canada or other official may object to the disclosure of information before a court, person or body with jurisdiction to compel the production of information by certifying orally or in writing to the court, person or body that the information should not be disclosed on the grounds of a specified public interest.

 

 

(1.1) If an objection is made under subsection (1), the court, person or body shall ensure that the information is not disclosed other than in accordance with this Act.

 

 

    (2) If an objection to the disclosure of information is made before a superior court, that court may determine the objection.

 

    (3) If an objection to the disclosure of information is made before a court, person or body other than a superior court, the objection may be determined, on application, by

 

(a) the Federal Court, in the case of a person or body vested with power to compel production by or under an Act of Parliament if the person or body is not a court established under a law of a province; or

 

 

(b) the trial division or trial court of the superior court of the province within which the court, person or body exercises its jurisdiction, in any other case.

 

 

 

    (4) An application under subsection (3) shall be made within 10 days after the objection is made or within any further or lesser time that the court having jurisdiction to hear the application considers appropriate in the circumstances.

 

    (4.1) Unless the court having jurisdiction to hear the application concludes that the disclosure of the information to which the objection was made under subsection (1) would encroach upon a specified public interest, the court may authorize by order the disclosure of the information.

 

    (5) If the court having jurisdiction to hear the application concludes that the disclosure of the information to which the objection was made under subsection (1) would encroach upon a specified public interest, but that the public interest in disclosure outweighs in importance the specified public interest, the court may, by order, after considering both the public interest in disclosure and the form of and conditions to disclosure that are most likely to limit any encroachment upon the specified public interest resulting from disclosure, authorize the disclosure, subject to any conditions that the court considers appropriate, of all of the information, a part or summary of the information, or a written admission of facts relating to the information.

 

 

    (6) If the court does not authorize disclosure under subsection (4.1) or (5), the court shall, by order, prohibit disclosure of the information.

 

    (6.1) The court may receive into evidence anything that, in the opinion of the court, is reliable and appropriate, even if it would not otherwise be admissible under Canadian law, and may base its decision on that evidence.

 

    (7) An order of the court that authorizes disclosure does not take effect until the time provided or granted to appeal the order, or a judgment of an appeal court that confirms the order, has expired, or no further appeal from a judgment that confirms the order is available.

 

    (8) A person who wishes to introduce into evidence material the disclosure of which is authorized under subsection (5), but who may not be able to do so by reason of the rules of admissibility that apply before the court, person or body with jurisdiction to compel the production of information, may request from the court having jurisdiction under subsection (2) or (3) an order permitting the introduction into evidence of the material in a form or subject to any conditions fixed by that court, as long as that form and those conditions comply with the order made under subsection (5).

 

 

 

    (9) For the purpose of subsection (8), the court having jurisdiction under subsection (2) or (3) shall consider all the factors that would be relevant for a determination of admissibility before the court, person or body.

 

 

    37.1 (1) An appeal lies from a determination under any of subsections 37(4.1) to (6)

 

(a) to the Federal Court of Appeal from a determination of the Federal Court; or

 

 

(b) to the court of appeal of a province from a determination of a trial division or trial court of a superior court of the province.

 

 

    (2) An appeal under subsection (1) shall be brought within 10 days after the date of the determination appealed from or within any further time that the court having jurisdiction to hear the appeal considers appropriate in the circumstances.

 

    37.2 Notwithstanding any other Act of Parliament,

 

(a) an application for leave to appeal to the Supreme Court of Canada from a judgment made under subsection 37.1(1) shall be made within 10 days after the date of the judgment appealed from or within any further time that the court having jurisdiction to grant leave to appeal considers appropriate in the circumstances; and

 

(b) if leave to appeal is granted, the appeal shall be brought in the manner set out in subsection 60(1) of the Supreme Court Act but within the time specified by the court that grants leave.

 

 

    37.21 [Repealed, 2004, c. 12, s. 18]

 

    37.3 (1) A judge presiding at a criminal trial or other criminal proceeding may make any order that he or she considers appropriate in the circumstances to protect the right of the accused to a fair trial, as long as that order complies with the terms of any order made under any of subsections 37(4.1) to (6) in relation to that trial or proceeding or any judgment made on appeal of an order made under any of those subsections.

 

 

    (2) The orders that may be made under subsection (1) include, but are not limited to, the following orders:

 

(a) an order dismissing specified counts of the indictment or information, or permitting the indictment or information to proceed only in respect of a lesser or included offence;

 

 

(b) an order effecting a stay of the proceedings; and

 

(c) an order finding against any party on any issue relating to information the disclosure of which is prohibited.

 

 

    38. The following definitions apply in this section and in sections 38.01 to 38.15.

 

“judge” means the Chief Justice of the Federal Court or a judge of that Court designated by the Chief Justice to conduct hearings under section 38.04.

 

“participant” means a person who, in connection with a proceeding, is required to disclose, or expects to disclose or cause the disclosure of, information.

 

 “potentially injurious information” means information of a type that, if it were disclosed to the public, could injure international relations or national defence or national security.

 

“proceeding” means a proceeding before a court, person or body with jurisdiction to compel the production of information.

 

“prosecutor” means an agent of the Attorney General of Canada or of the Attorney General of a province, the Director of Military Prosecutions under the National Defence Act or an individual who acts as a prosecutor in a proceeding.

 

“sensitive information” means information relating to international relations or national defence or national security that is in the possession of the Government of Canada, whether originating from inside or outside Canada, and is of a type that the Government of Canada is taking measures to safeguard.

 

 

 

 

 

    38.01 (1) Every participant who, in connection with a proceeding, is required to disclose, or expects to disclose or cause the disclosure of, information that the participant believes is sensitive information or potentially injurious information shall, as soon as possible, notify the Attorney General of Canada in writing of the possibility of the disclosure, and of the nature, date and place of the proceeding.

 

 

    (2) Every participant who believes that sensitive information or potentially injurious information is about to be disclosed, whether by the participant or another person, in the course of a proceeding shall raise the matter with the person presiding at the proceeding and notify the Attorney General of Canada in writing of the matter as soon as possible, whether or not notice has been given under subsection (1). In such circumstances, the person presiding at the proceeding shall ensure that the information is not disclosed other than in accordance with this Act.

 

 

    (3) An official, other than a participant, who believes that sensitive information or potentially injurious information may be disclosed in connection with a proceeding may notify the Attorney General of Canada in writing of the possibility of the disclosure, and of the nature, date and place of the proceeding.

 

 

 

    (4) An official, other than a participant, who believes that sensitive information or potentially injurious information is about to be disclosed in the course of a proceeding may raise the matter with the person presiding at the proceeding. If the official raises the matter, he or she shall notify the Attorney General of Canada in writing of the matter as soon as possible, whether or not notice has been given under subsection (3), and the person presiding at the proceeding shall ensure that the information is not disclosed other than in accordance with this Act.

 

 

 

    (5) In the case of a proceeding under Part III of the National Defence Act, notice under any of subsections (1) to (4) shall be given to both the Attorney General of Canada and the Minister of National Defence.

 

    (6) This section does not apply when

 

(a) the information is disclosed by a person to their solicitor in connection with a proceeding, if the information is relevant to that proceeding;

 

(b) the information is disclosed to enable the Attorney General of Canada, the Minister of National Defence, a judge or a court hearing an appeal from, or a review of, an order of the judge to discharge their responsibilities under section 38, this section and sections 38.02 to 38.13, 38.15 and 38.16;

 

 

(c) disclosure of the information is authorized by the government institution in which or for which the information was produced or, if the information was not produced in or for a government institution, the government institution in which it was first received; or

 

(d) the information is disclosed to an entity and, where applicable, for a purpose listed in the schedule.

 

 

 

    (7) Subsections (1) and (2) do not apply to a participant if a government institution referred to in paragraph (6)(c) advises the participant that it is not necessary, in order to prevent disclosure of the information referred to in that paragraph, to give notice to the Attorney General of Canada under subsection (1) or to raise the matter with the person presiding under subsection (2).

 

 

    (8) The Governor in Council may, by order, add to or delete from the schedule a reference to any entity or purpose, or amend such a reference.

 

 

    38.02 (1) Subject to subsection 38.01(6), no person shall disclose in connection with a proceeding

 

(a) information about which notice is given under any of subsections 38.01(1) to (4);

 

(b) the fact that notice is given to the Attorney General of Canada under any of subsections 38.01(1) to (4), or to the Attorney General of Canada and the Minister of National Defence under subsection 38.01(5);

 

(c) the fact that an application is made to the Federal Court under section 38.04 or that an appeal or review of an order made under any of subsections 38.06(1) to (3) in connection with the application is instituted; or

 

 

 

(d) the fact that an agreement is entered into under section 38.031 or subsection 38.04(6).

 

    (1.1) When an entity listed in the schedule, for any purpose listed there in relation to that entity, makes a decision or order that would result in the disclosure of sensitive information or potentially injurious information, the entity shall not disclose the information or cause it to be disclosed until notice of intention to disclose the information has been given to the Attorney General of Canada and a period of 10 days has elapsed after notice was given.

 

    (2) Disclosure of the information or the facts referred to in subsection (1) is not prohibited if

 

(a) the Attorney General of Canada authorizes the disclosure in writing under section 38.03 or by agreement under section 38.031 or subsection 38.04(6); or

 

(b) a judge authorizes the disclosure under subsection 38.06(1) or (2) or a court hearing an appeal from, or a review of, the order of the judge authorizes the disclosure, and either the time provided to appeal the order or judgment has expired or no further appeal is available.

 

 

 

    38.03 (1) The Attorney General of Canada may, at any time and subject to any conditions that he or she considers appropriate, authorize the disclosure of all or part of the information and facts the disclosure of which is prohibited under subsection 38.02(1).

 

    (2) In the case of a proceeding under Part III of the National Defence Act, the Attorney General of Canada may authorize disclosure only with the agreement of the Minister of National Defence.

 

    (3) The Attorney General of Canada shall, within 10 days after the day on which he or she first receives a notice about information under any of subsections 38.01(1) to (4), notify in writing every person who provided notice under section 38.01 about that information of his or her decision with respect to disclosure of the information.

 

    38.031 (1) The Attorney General of Canada and a person who has given notice under subsection 38.01(1) or (2) and is not required to disclose information but wishes, in connection with a proceeding, to disclose any facts referred to in paragraphs 38.02(1)(b) to (d) or information about which he or she gave the notice, or to cause that disclosure, may, before the person applies to the Federal Court under paragraph 38.04(2)(c), enter into an agreement that permits the disclosure of part of the facts or information or disclosure of the facts or information subject to conditions.

 

    (2) If an agreement is entered into under subsection (1), the person may not apply to the Federal Court under paragraph 38.04(2)(c) with respect to the information about which he or she gave notice to the Attorney General of Canada under subsection 38.01(1) or (2).

 

    38.04 (1) The Attorney General of Canada may, at any time and in any circumstances, apply to the Federal Court for an order with respect to the disclosure of information about which notice was given under any of subsections 38.01(1) to (4).

 

 

    (2) If, with respect to information about which notice was given under any of subsections 38.01(1) to (4), the Attorney General of Canada does not provide notice of a decision in accordance with subsection 38.03(3) or, other than by an agreement under section 38.031, authorizes the disclosure of only part of the information or disclosure subject to any conditions,

 

 

 

(a) the Attorney General of Canada shall apply to the Federal Court for an order with respect to disclosure of the information if a person who gave notice under subsection 38.01(1) or (2) is a witness;

 

(b) a person, other than a witness, who is required to disclose information in connection with a proceeding shall apply to the Federal Court for an order with respect to disclosure of the information; and

 

 

(c) a person who is not required to disclose information in connection with a proceeding but who wishes to disclose it or to cause its disclosure may apply to the Federal Court for an order with respect to disclosure of the information.

 

 

    (3) A person who applies to the Federal Court under paragraph (2)(b) or (c) shall provide notice of the application to the Attorney General of Canada.

 

    (4) An application under this section is confidential. Subject to section 38.12, the Chief Administrator of the Courts Administration Service may take any measure that he or she considers appropriate to protect the confidentiality of the application and the information to which it relates.

 

 

    (5) As soon as the Federal Court is seized of an application under this section, the judge

 

(a) shall hear the representations of the Attorney General of Canada and, in the case of a proceeding under Part III of the National Defence Act, the Minister of National Defence, concerning the identity of all parties or witnesses whose interests may be affected by either the prohibition of disclosure or the conditions to which disclosure is subject, and concerning the persons who should be given notice of any hearing of the matter;

 

 

 

(b) shall decide whether it is necessary to hold any hearing of the matter;

 

(c) if he or she decides that a hearing should be held, shall

 

(i) determine who should be given notice of the hearing,

 

(ii) order the Attorney General of Canada to notify those persons, and

 

(iii) determine the content and form of the notice; and

 

(d) if he or she considers it appropriate in the circumstances, may give any person the opportunity to make representations.

    (6) After the Federal Court is seized of an application made under paragraph (2)(c) or, in the case of an appeal from, or a review of, an order of the judge made under any of subsections 38.06(1) to (3) in connection with that application, before the appeal or review is disposed of,

 

(a) the Attorney General of Canada and the person who made the application may enter into an agreement that permits the disclosure of part of the facts referred to in paragraphs 38.02(1)(b) to (d) or part of the information or disclosure of the facts or information subject to conditions; and

 

(b) if an agreement is entered into, the Court's consideration of the application or any hearing, review or appeal shall be terminated.

 

    (7) Subject to subsection (6), after the Federal Court is seized of an application made under this section or, in the case of an appeal from, or a review of, an order of the judge made under any of subsections 38.06(1) to (3), before the appeal or review is disposed of, if the Attorney General of Canada authorizes the disclosure of all or part of the information or withdraws conditions to which the disclosure is subject, the Court's consideration of the application or any hearing, appeal or review shall be terminated in relation to that information, to the extent of the authorization or the withdrawal.

 

    38.05 If he or she receives notice of a hearing under paragraph 38.04(5)(c), a person presiding or designated to preside at the proceeding to which the information relates or, if no person is designated, the person who has the authority to designate a person to preside may, within 10 days after the day on which he or she receives the notice, provide the judge with a report concerning any matter relating to the proceeding that the person considers may be of assistance to the judge.

 

    38.06 (1) Unless the judge concludes that the disclosure of the information would be injurious to international relations or national defence or national security, the judge may, by order, authorize the disclosure of the information.

 

    (2) If the judge concludes that the disclosure of the information would be injurious to international relations or national defence or national security but that the public interest in disclosure outweighs in importance the public interest in non-disclosure, the judge may by order, after considering both the public interest in disclosure and the form of and conditions to disclosure that are most likely to limit any injury to international relations or national defence or national security resulting from disclosure, authorize the disclosure, subject to any conditions that the judge considers appropriate, of all of the information, a part or summary of the information, or a written admission of facts relating to the information.

 

 

    (3) If the judge does not authorize disclosure under subsection (1) or (2), the judge shall, by order, confirm the prohibition of disclosure.

 

   

(3.1) The judge may receive into evidence anything that, in the opinion of the judge, is reliable and appropriate, even if it would not otherwise be admissible under Canadian law, and may base his or her decision on that evidence.

 

    (4) A person who wishes to introduce into evidence material the disclosure of which is authorized under subsection (2) but who may not be able to do so in a proceeding by reason of the rules of admissibility that apply in the proceeding may request from a judge an order permitting the introduction into evidence of the material in a form or subject to any conditions fixed by that judge, as long as that form and those conditions comply with the order made under subsection (2).

 

 

 

    (5) For the purpose of subsection (4), the judge shall consider all the factors that would be relevant for a determination of admissibility in the proceeding.

 

 

    38.07 The judge may order the Attorney General of Canada to give notice of an order made under any of subsections 38.06(1) to (3) to any person who, in the opinion of the judge, should be notified.

 

    38.08 If the judge determines that a party to the proceeding whose interests are adversely affected by an order made under any of subsections 38.06(1) to (3) was not given the opportunity to make representations under paragraph 38.04(5)(d), the judge shall refer the order to the Federal Court of Appeal for review.

 

    38.09 (1) An order made under any of subsections 38.06(1) to (3) may be appealed to the Federal Court of Appeal.

 

 

    (2) An appeal shall be brought within 10 days after the day on which the order is made or within any further time that the Court considers appropriate in the circumstances.

 

 

    38.1 Notwithstanding any other Act of Parliament,

 

(a) an application for leave to appeal to the Supreme Court of Canada from a judgment made on appeal shall be made within 10 days after the day on which the judgment appealed from is made or within any further time that the Supreme Court of Canada considers appropriate in the circumstances; and

 

(b) if leave to appeal is granted, the appeal shall be brought in the manner set out in subsection 60(1) of the Supreme Court Act but within the time specified by the Supreme Court of Canada.

 

 

    38.11 (1) A hearing under subsection 38.04(5) or an appeal or review of an order made under any of subsections 38.06(1) to (3) shall be heard in private and, at the request of either the Attorney General of Canada or, in the case of a proceeding under Part III of the National Defence Act, the Minister of National Defence, shall be heard in the National Capital Region, as described in the schedule to the National Capital Act.

 

 

 

    (2) The judge conducting a hearing under subsection 38.04(5) or the court hearing an appeal or review of an order made under any of subsections 38.06(1) to (3) may give any person who makes representations under paragraph 38.04(5)(d), and shall give the Attorney General of Canada and, in the case of a proceeding under Part III of the National Defence Act, the Minister of National Defence, the opportunity to make representations ex parte.

 

 

 

    38.12 (1) The judge conducting a hearing under subsection 38.04(5) or the court hearing an appeal or review of an order made under any of subsections 38.06(1) to (3) may make any order that the judge or the court considers appropriate in the circumstances to protect the confidentiality of the information to which the hearing, appeal or review relates.

 

    (2) The court records relating to the hearing, appeal or review are confidential. The judge or the court may order that the records be sealed and kept in a location to which the public has no access.

 

    38.13 (1) The Attorney General of Canada may personally issue a certificate that prohibits the disclosure of information in connection with a proceeding for the purpose of protecting information obtained in confidence from, or in relation to, a foreign entity as defined in subsection 2(1) of the Security of Information Act or for the purpose of protecting national defence or national security. The certificate may only be issued after an order or decision that would result in the disclosure of the information to be subject to the certificate has been made under this or any other Act of Parliament.

 

 

    (2) In the case of a proceeding under Part III of the National Defence Act, the Attorney General of Canada may issue the certificate only with the agreement, given personally, of the Minister of National Defence.

 

 

    (3) The Attorney General of Canada shall cause a copy of the certificate to be served on

 

(a) the person presiding or designated to preside at the proceeding to which the information relates or, if no person is designated, the person who has the authority to designate a person to preside;

 

 

(b) every party to the proceeding;

 

(c) every person who gives notice under section 38.01 in connection with the proceeding;

 

(d) every person who, in connection with the proceeding, may disclose, is required to disclose or may cause the disclosure of the information about which the Attorney General of Canada has received notice under section 38.01;

 

 

(e) every party to a hearing under subsection 38.04(5) or to an appeal of an order made under any of subsections 38.06(1) to (3) in relation to the information;

 

 

(f) the judge who conducts a hearing under subsection 38.04(5) and any court that hears an appeal from, or review of, an order made under any of subsections 38.06(1) to (3) in relation to the information; and

 

(g) any other person who, in the opinion of the Attorney General of Canada, should be served.

 

 

    (4) The Attorney General of Canada shall cause a copy of the certificate to be filed

 

(a) with the person responsible for the records of the proceeding to which the information relates; and

 

(b) in the Registry of the Federal Court and the registry of any court that hears an appeal from, or review of, an order made under any of subsections 38.06(1) to (3).

 

 

    (5) If the Attorney General of Canada issues a certificate, then, notwithstanding any other provision of this Act, disclosure of the information shall be prohibited in accordance with the terms of the certificate.

 

    (6) The Statutory Instruments Act does not apply to a certificate issued under subsection (1).

 

    (7) The Attorney General of Canada shall, without delay after a certificate is issued, cause the certificate to be published in the Canada Gazette.

 

    (8) The certificate and any matters arising out of it are not subject to review or to be restrained, prohibited, removed, set aside or otherwise dealt with, except in accordance with section 38.131.

 

 

    (9) The certificate expires 15 years after the day on which it is issued and may be reissued.

 

 

    38.131 (1) A party to the proceeding referred to in section 38.13 may apply to the Federal Court of Appeal for an order varying or cancelling a certificate issued under that section on the grounds referred to in subsection (8) or (9), as the case may be.

 

    (2) The applicant shall give notice of the application to the Attorney General of Canada.

 

    (3) In the case of proceedings under Part III of the National Defence Act, notice under subsection (2) shall be given to both the Attorney General of Canada and the Minister of National Defence.

 

 

    (4) Notwithstanding section 16 of the Federal Court Act, for the purposes of the application, the Federal Court of Appeal consists of a single judge of that Court.

 

    (5) In considering the application, the judge may receive into evidence anything that, in the opinion of the judge, is reliable and appropriate, even if it would not otherwise be admissible under Canadian law, and may base a determination made under any of subsections (8) to (10) on that evidence.

 

    (6) Sections 38.11 and 38.12 apply, with any necessary modifications, to an application made under subsection (1).

 

 

    (7) The judge shall consider the application as soon as reasonably possible, but not later than 10 days after the application is made under subsection (1).

 

   

(8) If the judge determines that some of the information subject to the certificate does not relate either to information obtained in confidence from, or in relation to, a foreign entity as defined in subsection 2(1) of the Security of Information Act, or to national defence or national security, the judge shall make an order varying the certificate accordingly.

 

 

    (9) If the judge determines that none of the information subject to the certificate relates to information obtained in confidence from, or in relation to, a foreign entity as defined in subsection 2(1) of the Security of Information Act, or to national defence or national security, the judge shall make an order cancelling the certificate.

 

    (10) If the judge determines that all of the information subject to the certificate relates to information obtained in confidence from, or in relation to, a foreign entity as defined in subsection 2(1) of the Security of Information Act, or to national defence or national security, the judge shall make an order confirming the certificate.

 

    (11) Notwithstanding any other Act of Parliament, a determination of a judge under any of subsections (8) to (10) is final and is not subject to review or appeal by any court.

 

    (12) If a certificate is varied or cancelled under this section, the Attorney General of Canada shall, as soon as possible after the decision of the judge and in a manner that mentions the original publication of the certificate, cause to be published in the Canada Gazette

 

(a) the certificate as varied under subsection (8); or

 

(b) a notice of the cancellation of the certificate under subsection (9).

 

    38.14 (1) The person presiding at a criminal proceeding may make any order that he or she considers appropriate in the circumstances to protect the right of the accused to a fair trial, as long as that order complies with the terms of any order made under any of subsections 38.06(1) to (3) in relation to that proceeding, any judgment made on appeal from, or review of, the order, or any certificate issued under section 38.13.

 

 

    (2) The orders that may be made under subsection (1) include, but are not limited to, the following orders:

 

(a) an order dismissing specified counts of the indictment or information, or permitting the indictment or information to proceed only in respect of a lesser or included offence;

 

 

(b) an order effecting a stay of the proceedings; and

 

(c) an order finding against any party on any issue relating to information the disclosure of which is prohibited.

 

  

     38.15 (1) If sensitive information or potentially injurious information may be disclosed in connection with a prosecution that is not instituted by the Attorney General of Canada or on his or her behalf, the Attorney General of Canada may issue a fiat and serve the fiat on the prosecutor.

 

 

    (2) When a fiat is served on a prosecutor, the fiat establishes the exclusive authority of the Attorney General of Canada with respect to the conduct of the prosecution described in the fiat or any related process.

 

    (3) If a prosecution described in the fiat or any related process is conducted by or on behalf of the Attorney General of Canada, the fiat or a copy of the fiat shall be filed with the court in which the prosecution or process is conducted.

 

    (4) The fiat or a copy of the fiat

 

(a) is conclusive proof that the prosecution described in the fiat or any related process may be conducted by or on behalf of the Attorney General of Canada; and

 

(b) is admissible in evidence without proof of the signature or official character of the Attorney General of Canada.

 

 

    (5) This section does not apply to a proceeding under Part III of the National Defence Act.

 

 

    38.16 The Governor in Council may make any regulations that the Governor in Council considers necessary to carry into effect the purposes and provisions of sections 38 to 38.15, including regulations respecting the notices, certificates and the fiat.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        T-1967-05

 

INTITULÉ :                                       LE DIRECTEUR DES POURSUITES MILITAIRES c. L’ADMINISTRATEUR DE LA COUR MARTIALE

 

DOSSIER :                                        T-1968-05

 

INTITULÉ :                                       LE DIRECTEUR DES POURSUITES MILITAIRES c. LA JUGE MILITAIRE EN CHEF

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 OTTAWA (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               LE 15 NOVEMBRE 2006

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                       LA JUGE SNIDER

 

DATE DES MOTIFS :                      LE 21 DÉCEMBRE 2006

 

COMPARUTIONS :

 

Alain Préfontaine

 

Ronald Lunau

POUR LE DEMANDEUR

 

POUR LE DÉFENDEUR,

L’ADMINISTRATEUR DE LA COUR MARTIALE

 

Guy Cournoyer

Nicolas Cournoyer

POUR LA DÉFENDERESSE,

LA JUGE MILITAIRE EN CHEF

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

 

POUR LE DEMANDEUR

Gowling Lafleur Henderson s.r.l.

Ottawa (Ontario)

 

 

Shadley Battista, s.e.n.c.

Montréal (Québec)

POUR LE DÉFENDEUR,

L’ADMINISTRATEUR DE LA COUR MARTIALE

 

POUR LA DÉFENDERESSE,

LA JUGE MILITAIRE EN CHEF

 

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