Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

 

 

 

 

Date :  20070126

Dossier :  IMM-3282-06

Référence :  2007 CF 65

Ottawa (Ontario), le 26 janvier 2007

En présence de Monsieur le juge Shore

 

ENTRE :

ABRAHAM BAHATY BAYAVUGE

demandeur

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

INTRODUCTION

[1]               Il est bien établi par la jurisprudence que le contrôle judiciaire d’une décision doit uniquement être fondé sur la preuve dont disposait le décideur. (Gallardo c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CFPI 45, [2003] A.C.F. n o 52 (QL) aux paras. 7 et 8; Asafov c. Canda (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1994] A.C.F. n o 713 (QL); Lemiecha Tuteur d’instance) c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), (1993) 72 F.T.R. 49, [1993] A.C.F. no 1333 (QL)

 

 

L’HISTORIQUE

[2]               La demande d’Examen des risques avant le renvoi (ERAR) d’un demandeur, dont la demande a été rejetée par la Section de la protection des réfugiés (Commission) parce qu’il est exclu en vertu de l’article 1F de la Convention relative au statut de réfugiés (Convention), n’est pas évaluée sur la base de la définition de « réfugié au sens de la Convention : mais plutôt sur la base des motifs énumérés à l’article 97 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (Loi).

 

[3]               Cela oblige donc le demandeur à apporter la preuve qu’il s’expose au risque d’être soumis à la torture ou à une menace à sa vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités s’il devait retourner dans son pays d’origine.

 

[4]               Or, en l’espèce, M. Abraham Bahaty Bayavuge, ne s’est pas déchargé de ce fardeau puisqu’il n’a pas identifié dans sa demande d’ERAR le risque qu’il encourait dans son pays d’origine. Plus encore, il n’a déposé aucune soumission, ni aucun élément de preuve pouvant appuyer sa demande.

 

[5]               M. Bayavuge ne saurait tenter d’imputer quelques fautes qu’il soit à l’agent ERAR alors qu’il ne peut s’en prendre qu’à lui-même si sa demande d’ERAR a été rejetée. C’est lui-même qui a omis de déposer quelque preuve qu’elle soit à l’appui de sa demande d’ERAR.

 

 

 

PROCÉDURE JUDICIAIRE

[6]               Il s’agit d’une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire de la décision de l’agent ERAR, datée du 12 mai 2006, par laquelle il a été décidé que M. Bayavuge ne risque pas d’être torturé ou de subir des traitements ou peines cruels et inusités ou de voir sa vie menacée advenant un renvoi vers son pays de nationalité.

 

FAITS

[7]               Les faits suivants concernant M. Bayavuge sont tirés du dossier soumis à la Cour.

 

[8]               Le demandeur est un citoyen de la République Démocratique du Congo, âgé de 43 ans. Il est arrivé au Canada le 6 décembre 2001 et a fait une demande d’asile.

 

[9]               Le 9 août 2004, la Commission a conclu que M. Bayavuge n’était pas un « réfugié selon la Convention », en raison de son exclusion en vertu de l’article 1F(a) de la Convention à cause de ses années de service dans divers organismes de sécurité au Zaïre au temps de Mobutu et également de la République Démocratique du Congo sous le régime de Kabila. Les états de service de M. Bayavuge au sein de l’Agence Nationale d’Immigration (ANI) du Service National de l’Intelligence et de Protection (SNIP) et de la Direction Générale de Migration (DGM), tous les services de sécurité ont fait de lui, selon la Commission, un complice des actes reprochés à ces organismes de sécurité. Monsieur s’est joint volontairement à l’ANI en utilisant les contacts qu’il avait pour se faire recruter librement, et ce, sans contrainte, puisqu’il voulait œuvrer dans les services de sécurité de son pays. Il se joint également aux rangs des autres services volontairement. Donc, M. Bayavuge a une crainte des représailles pour ses années de services antérieures.

[10]           Le 18 avril 2006, M. Bayavuge a reçu l’avis de présenter une demande d’ERAR prévu à l’article 160 du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 (Règlement). Conformément à l’article 162 du Règlement, M. Bayavuge avait jusqu’au 3 mai 2006 pour présenter sa demande de protection s’il voulait que sa demande de protection ne soit pas tranchée avant l’expiration d’un délai de 30 jours suivant la délivrance de l’avis visé à l’article 160.

 

[11]           Le 8 mai 2006, soit après le délai de 15 jours de la délivrance de l’avis visé à l’article 160, M. Bayavuge a déposé uniquement son formulaire d’ERAR complété mais non signé. Il n’a déposé aucun élément de preuve documentaire ou autre document à l’appui de sa demande d’ERAR. Dans sa demande d’ERAR, M. Bayavuge a indiqué que les éléments de preuve seraient transmis ultérieurement.

 

[12]           Le 9 mai 2006, le bureau de Citoyenneté et Immigration Canada a communiqué avec M. Bayavuge, par télécopieur, afin de lui demander que son formulaire d’ERAR soit signé.

 

[13]           Le 11 mai 2006, Mr. Bayavuge a envoyé une télécopie de la page de signature signée et datée du 11 mai 2006.

 

[14]           Suivant l’article 163 du Règlement, M. Bayavuge, ayant présenté sa demande après l’expiration du délai de 15 jours suivant la réception de l’avis pour présenter sa demande, devait joindre ses observations écrites avec sa demande. Cette disposition ne contient aucune restriction quant au délai que doit prendre l’agent ERAR avant de rendre sa décision.

 

[15]           Le 12 mai 2006, l’agent ERAR a donc examiné la demande d’ERAR de M. Bayavuge qui ne contenant aucune soumission, ni aucun élément de preuve et a conclu, que M. Bayavuge ne s’était pas déchargé de son fardeau d’établir l’existence de motifs sérieux de croire que son renvoi vers son pays l’exposerait au risque d’être torturé ou à une menace à sa vie ou à un risque de traitements ou peines cruels et inusités.

 

DÉCISION DE L’AGENT ERAR

[16]           L’agent ERAR a examiné la demande uniquement aux termes de l’article 97 de la Loi, en raison de l’application de l’alinéa 112(3)c) :

      (3) L’asile ne peut être conféré au demandeur dans les cas suivants :

[...]

c) il a été débouté de sa demande d’asile au titre de la section F de l’article premier de la Convention sur les réfugiés;

      (3) Refugee protection may not result from an application for protection if the person

...

(c) made a claim to refugee protection that was rejected on the basis of section F of Article 1 of the Refugee Convention

 

[17]           L’agent ERAR a conclu que M. Bayavuge ne s’est pas déchargé de son fardeau d’établir qu’il serait exposé dans son pays au risque d’être torturé ou à une menace à sa vie ou à un risque de traitements ou peines cruels et inusités.

 

[18]           L’agent ERAR est parvenu à cette conclusion puisque M. Bayavuge n’a pas précisé dans son formulaire d’ERAR le risque encouru dans son pays. M. Bayavuge n’a pas précisé comment ou pourquoi il s’expose à un risque dans son pays et n’a pas fourni de preuve pouvant indiquer qu’il s’expose à un risque.

QUESTION EN LITIGE

[19]           Les questions en litige peuvent être formulées de la façon suivante :

(1)        L’agent ERAR devait-il fournir à M. Bayavuge, avant de prendre sa décision, une évaluation écrite aux termes du paragraphe 172(2) du Règlement?

(2)        L’agent ERAR pouvait-il raisonnablement rejeter la demande d’ERAR de M. Bayavuge malgré la décision rendue par la Commission dans son dossier?

ANALYSE

[20]           Il est bien établi par la jurisprudence que le contrôle judiciaire d’une décision doit uniquement être fondé sur la preuve dont disposait le décideur. (Gallardo, ci-dessus, aux paras. 7 et 8; Asafov, ci-dessus ; Lemiecha, ci-dessus .

 

(1)        L’agent ERAR devait-il fournir à M. Bayavuge, avant de prendre sa décision, une évaluation écrite aux termes du paragraphe 172(2) du Règlement?

 

 

[21]           M. Bayavuge fait complètement abstraction du paragraphe 172(4) du Règlement, lorsqu’il prétend que l’agent ERAR aurai dû, avant de prendre sa décision, lui fournir une évaluation écrite aux termes du paragraphe 172(2) du Règlement.

 

[22]           Il est juste que M. Bayavuge est visé par l’alinéa 112(3)c) de la Loi, ayant été exclu par la Commission en vertu de l’article 1Fa) de la Convention. Il est aussi juste que les demandes d’ERAR des personnes visées par l’un des alinéas du paragraphe 112(3) sont soumises à une évaluation particulière, qui est décrite à l’alinéa 113d) de la Loi.

 

[23]           Le paragraphe 172(2) du Règlement prévoit en effet qu’une évaluation écrite au regard des éléments mentionnés à l’article 97 de la Loi et une évaluation écrite au regard des éléments mentionnés aux sous-alinéas 113d)(i) ou (ii) de la Loi, soient fournies à M. Bayavuge visé au paragraphe 112(3) de la Loi.

 

[24]           Cependant, le paragraphe 172(4) du Règlement, qui s’applique à M. Bayavuge visé au paragraphe 112(3) de la Loi, prévoit que si une personne n’est pas visée par l’article 97 de la Loi, comme c’est le cas de M. Bayavuge, sa demande doit être rejetée.

 

[25]           Le paragraphe 172(4) du Règlement se lit comme suit :

Demandeur non visé à l’article 97 de la Loi

      (4) Malgré les paragraphes (1) à (3), si le ministre conclut, sur la base des éléments mentionnés à l’article 97 de la Loi, que le demandeur n’est pas visé par cet article :

a) il n’est pas nécessaire de faire d’évaluation au regard des éléments mentionnés aux sous-alinéas 113d)(i) ou (ii) de la Loi;

 

b) la demande de protection est rejetée.

Applicant not described in s. 97 of the Act

      (4) Despite subsections (1) to (3), if the Minister decides on the basis of the factors set out in section 97 of the Act that the applicant is not described in that section,

(a) no written assessment on the basis of the factors set out in subparagraph 113(d)(i) or (ii) of the Act need be made; and

 

(b) the application is rejected.

 

[26]           Aux termes de cette disposition, il est clair que la condition préalable pour que les paragraphes (1) à (3) de l’article 172 du Règlement s’applique à un demandeur, est que celui-ci soit visé par l’article 97 de la Loi.

[27]           Ainsi, donc, lorsque l’évaluation des risques est négative, comme c’est le cas dans le présent dossier, les paragraphes (1) à (3) de l’article 172 du Règlement relative à une évaluation écrite n’est pas applicable.

 

[28]           La section 14 du chapitre PP3 du Guide des personnes protégées, confirme que ce n’est que lorsque l’agent ERAR conclut que l’évaluation des risques est positive, qu’il devra faire une évaluation des éléments mentionnés au paragraphe 113d) de la Loi et qu’il devra fournir une évaluation écrite au demandeur :

L’agent d’ERAR doit suivre la procédure suivante :

 

·   Si l’évaluation des risques est négative, l’agent d’ERAR doit prendre la décision finale de rejeter la demande de protection.

 

·     Si l’évaluation des risques est positive, en raison de l’existence d’un danger de torture ou de mort ou d’un risque de subir un traitement ou châtiment cruel et inusité, le service de règlement des cas prépare un avis indiquant si la personne représente un danger pour le public du Canada ou, dans les cas de sécurité, si le demandeur doit être renvoyé en raison de la nature et de la gravité des actes qu’il a commis ou du danger qu’il représente pour la sécurité du Canada. Lorsque l’avis de danger est conclu, les avis de risque et de danger sont transmis au demandeur afin qu’il soumettre ses observations. La décision finale d’accepter ou de rejeter la demande de protection est rendue en fonction d’un équilibre entre les intérêts opposés, soit les risques courus par la personne contre les risques qu’il représente pour la société.

The PRRA officer must follow the following process:

 

·   Should the risk assessment be negative, the PRRA officer will make the final decision to reject the application for protection.

 

·  Should the risk assessment be positive on the basis of the existence of danger of torture, risk to life or risk of cruel and unusual treatment or punishment, an opinion will be prepared by Case Management on whether the person is a danger to the public in Canada or, in security cases, whether the applicant should be removed because of the nature and severity of the acts committed or danger the applicant constitutes to the security of Canada. Once the danger opinion is completed, both risk and danger opinions are disclosed to the applicant for submissions. The final decision, to allow or reject the application for protection, is based on a balancing of the conflicting interests: the risk to the individual against the risk to society.

 

[29]           La raison d’être de cette évaluation écrite est de permettre au demandeur, susceptible d’être expulsé vers un pays où il risque la torture, de faire ses commentaires en regard de l’évaluation effectuée par le décideur sur les éléments à l’article 97 et aux alinéas 113d)(i) ou (ii) de la Loi.

 

[30]           En l’espèce, comme l’agent ERAR a conclu que M. Bayavuge n’avait établi aucun danger de torture ou du risque de subir un traitement ou un châtiment cruel ou inusité, il n’avait pas à fournir une évaluation écrite à M. Bayavuge ni à faire une évaluation des éléments mentionnés à l’alinéa 113d) de la Loi et il devait, dès lors, rejeter sa demande d’ERAR.

 

[31]           L’agent ERAR n’a donc commis aucune erreur en ne fournissant pas à M. Bayavuge l’évaluation écrite prévue au paragraphe 172(2) du Règlement. Cette Cour ne saurait donc intervenir sur ce point.

 

 

 

 

2.         L’agent ERAR pouvait-il raisonnablement rejeter la demande d’ERAR de M. Bayavuge malgré la décision rendue par la Commission dans son dossier?

 

[32]           M. Bayavuge soutient que l’agent ERAR aurait ignoré la décision rendue par la Commission qui, selon lui, aurait reconnu comme véridiques les faits allégués au soutien de sa demande d’asile.

 

[33]           De l’avis de M. Bayavuge, l’agent ERAR ne pouvait raisonnablement conclure qu’il « n’explique pas pourquoi il est recherché ou pourquoi il s’expose à un mauvais traitement à la RDC » , à la lumière des prétentions qu’il a produites au soutien de sa demande d’asile.

 

[34]           Autrement dit, la prétention de M. Bayavuge est que même s’il n’a pas identifié dans sa demande d’ERAR le risque qu’il encourrait dans son pays et qu’il n’a produit aucun élément de preuve à son appui, ni aucune soumission, ni la décision de la Commission le concernant, l’agent ERAR aurait dû tenir compte, dans son évaluation de sa demande d’ERAR, des prétentions qu’il a produites au soutien de sa demande d’asile presque deux ans plus tôt.

 

La Commission ne s’est jamais prononcée sur les risques de retour de M. Bayavuge

[35]           Il est important, dans la présente affaire, de bien comprendre la décision rendue par la Commission dans le cas de M. Bayavuge et de sa famille.

 

[36]           Contrairement à ce que soutien M. Bayavuge, la Commission na jamais conclu que les faits allégués par M. Bayavuge étaient véridiques. Elle a tout au plus conclu que les faits « pourraient » être véridiques. Elle semble avoir accordé le bénéfice du doute aux membres de la famille de M. Bayavuge et les a, par le même fait, reconnus des « réfugiés selon la Convention ». (Motifs de la décision de la Commission, p. 10, par 2-3 : Dossier du demandeur, p. 57)

 

[37]           La Commission, ayant reconnu la famille de M. Bayavuge comme des réfugiés au sens de la Convention selon l’article 96 de la Loi, n’a tiré aucune conclusion à l’égard des exigences de l’article 97 de la Loi pour se voir reconnaître le statut de « personne à protéger ».

 

[38]           M. Bayavuge ne peut donc valablement prétendre que la Commission a conclu qu’il existe un risque de torture pour lui et sa famille au sens de l’article 97 de la Loi surtout que la Commission ne s’est jamais penchée sur la question de l’inclusion de M. Bayavuge.

 

[39]           En effet, ayant conclu à l’exclusion de M. Bayavuge, la Commission n’a pas examiné si celui-ci rencontrait les critères de la définition de « réfugié au sens de la Convention » ou ceux de « personne à protéger ».

 

[40]           Même si comme le dit l’agent ERAR dans ses notes au dossier, qu’ « Il est implicite dans cette conclusion que le tribunal pense que le demandeur s’expose également à une persécution pour cette raison », il reste que sous le régime de l’article 97 de la Loi, l’unique question considérée est celle de savoir s’il existe un risque de torture ou un risque de menace à sa vie ou de traitements ou peines cruels et inusités, et non s’il existe un risque de persécution. (Notes au dossier de l’agent ERAR, p. 2, avant-dernier para.; Dossier du demandeur, p. 7)

 

[41]           La Commission n’ayant pas tranché la question de l’inclusion de M. Bayavuge, l’agent ERAR se devait donc d’évaluer si M. Bayavuge rencontrait les exigences de l’article 97 de la Loi.

 

L’agent ERAR ne disposait d’aucune soumission ni d’aucune preuve devant lui

[42]           Pour démontrer à l’agent ERAR qu’il s’exposait à un risque dans son pays au sens de l’article 97, il incombait à M. Bayavuge de préciser dans sa demande les risques auxquels il fait face dans son pays d’origine et d’appuyer ses allégations par de la preuve.

 

[43]           Il est bien reconnu que dans le cadre d’une demande d’ERAR, le fardeau de la preuve repose sur la personne qui souhaite se voir conférer l’asile en vertu du paragraphe 114(1) de la Loi. C’est à cette personne qu’il appartient de faire la démonstration que l’asile devrait lui être accordé. (Traoré c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 1647, [2005] A.C.F. no 2019 (QL) au para. 14)

 

[44]           Or, dans le présent dossier, M. Bayavuge n’a déposé aucune soumission, ni aucun élément de preuve documentaire ou autre document à l’appui de sa demande d’ERAR.

 

[45]           M. Bayavuge n’a pas précisé dans sa demande, le risque auquel il serait exposé personnellement s’il retournait dans son pays. (Notes au dossier de l’agent ERAR, p. 2, para. 1; Dossier du demandeur, p. 7)

 

[46]           Dès lors, l’agent ERAR devait rejeter la demande de protection de M. Bayavuge puisque celui-ci ne s’est manifestement pas déchargé de son fardeau de preuve.

L’agent ERAR n’avait pas à tenir compte de la preuve qui n’a pas été soumise par M. Bayavuge à l’appui de sa demande d’ERAR

 

 

[47]           Contrairement à ce qu’allègue M. Bayavuge, l’agent ERAR n’avait pas à se référer aux faits qu’il avait soumis devant la Commission dans le cadre de sa demande d’asile pour trancher sa demande d’ERAR.

 

[48]           C’est à M. Bayavuge qu’il incombait d’apporter en preuve ces faits devant l’agent ERAR. Or, comme l’indique l’agent dans ses notes au dossier : « Le demandeur dans sa requête ERAR n’a pas précisé comment ou pourquoi il s’expose à un risque à la RDC et il n’a pas fait référence à la décision de la CISR. » (Notes au dossier de l’agent ERAR, p. 2; Dossier du demandeur, p. 7)

 

[49]           M. Bayavuge ne pouvait s’attendre à ce que l’agent ERAR tienne compte de la preuve qu’il a produite au soutien de sa demande d’asile, compte tenu qu’il n’a pas soumis cette preuve à l’appui de sa demande ERAR. Rien ne démontre que cette preuve se retrouvait dans le dossier que possède Citoyenneté et Immigration Canada au sujet de M. Bayavuge.

 

[50]           Si M. Bayavuge voulait que l’agent ERAR considère la preuve qu’il avait déposée devant la Commission, c’était son fardeau de présenter cette preuve à l’appui de sa demande ERAR, ce qu’il n’a pas fait.

 

[51]           L’agent ERAR n’avait certainement pas à fouiller tout le dossier d’immigration de M. Bayavuge afin de tenter de trouver s’il n’avait pas des éléments qui pouvaient, d’une quelconque façon, établir l’existence d’un risque pour M. Bayavuge dans son pays d’origine.

[52]           Il faut noter que l’agent ERAR était bien au fait de la décision rendue par la Commission. Cependant, il a noté que la Commission n’avait pas commenté ni tiré aucune conclusion sur la probabilité d’une menace à sa vie, d’une torture ou d’un traitement ou peine cruel et inusité, ce qui est tout à fait exact. (Notes au dossier de l’agent ERAR, p. 2, avant-dernier para.; Dossier du demandeur, p. 7)

 

[53]           Ainsi, puisqu’aucun examen de l’inclusion n’a été effectué par la Commission et que celle-ci n’a jamais déterminé que les faits allégués par M. Bayavuge étaient véridiques et établissaient l’existence d’un risque personnalisé pour lui au sens de l’article 97 de la Loi, l’agent ERAR devait tirer ses propres conclusions à la lumière de la preuve qui se trouvait devant lui.

 

[54]           Or, l’agent ERAR n’avait devant lui aucune soumission, ni aucun élément de preuve documentaire ou autre document pour établir l’existence d’un risque personnalisé pour M. Bayavuge dans son pays d’origine. M. Bayavuge n’avait ni même précisé dans sa demande, le risque auquel il serait exposé personnellement s’il retournait dans son pays. (Notes au dossier de l’agent ERAR, p. 2; Dossier du demandeur, p. 7)

 

[55]           Ce n’était pas à l’agent ERAR de présumer du risque que M. Bayavuge pourrait personnellement encourir maintenant s’il devait retourner dans son pays.

 

[56]           L’agent ERAR ne pouvait faire ni plus, ni moins que ce qui lui incombe en vertu de la compétence qui lui est attribuée. Si aucun élément de preuve ne lui a été présenté, ni aucune soumission, ni aucune précision sur le risque encouru, il n’avait d’autres choix que de rejeter la demande de protection de M. Bayavuge.

 

[57]           En l’espèce, l’agent ERAR a examiné comme il se doit, la demande d’ERAR présentée par M. Bayavuge. Aucune faute ne peut lui être imputée. Si cette demande a été rejetée, c’est que M. Bayavuge a omis de déposer de la preuve au soutien de sa demande d’ERAR.

 

CONCLUSION

[58]           Pour toutes ces raisons, M. Bayavuge n’a pas établi que la Cour serait justifiée d’intervenir eu égard à la décision par l’agent ERAR dans son dossier. La demande de contrôle judiciaire est donc rejetée.


 

JUGEMENT

 

LA COUR ORDONNE que

1.         La demande de contrôle judiciaire soit rejetée;

2.         Aucune question grave de portée générale soit certifiée.

 

 

« Michel M.J. Shore »

Juge


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM-3282-06

 

INTITULÉ :                                       ABRAHAM BAHATY BAYAVUGE

                                                            c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                                            ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               le 18 janvier 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT:                               LE JUGE SHORE

 

DATE DES MOTIFS :                      le 26 janvier 2007

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Me Sébastien Dubois

 

POUR LE DEMANDEUR

Me Evan Liosis

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

SAINT-PIERRE, GRENIER S.E.N.C.

Montréal (Québec)

 

POUR LEDEMANDEUR

JOHN H. SIMS, c.r.

Sous-procureur général du Canada

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.