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Date : 20070403

Dossier : T‑117‑05

Référence : 2007 CF 360

Toronto (Ontario), le 3 avril 2007

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE HUGHES

 

ENTRE :

PHARMASCIENCE INC.

demanderesse

et

 

GLAXOSMITHKLINE INC., GLAXOSMITHKLINE PLC, SMITHKLINE BEECHAM CORPORATION, THE WELLCOME FOUNDATION LIMITED,

DOE CO. et toutes autres entités inconnues de la demanderesse qui font partie du groupe GLAXOSMITHKLINE

défenderesses

 

 

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

[1]               Il s'agit d'un appel de la décision en date du 29 août 2006 par laquelle la protonotaire Milczynski a accepté de prononcer une ordonnance portant confidentialité de certains documents et renseignements, mais a refusé d'y inclure une catégorie plus restrictive de documents et de renseignements « communicables aux seuls avocats ». Elle a expliqué ce refus dans les termes suivants :

[TRADUCTION] Cependant, vu la preuve produite, j'estime que les défenderesses ne se sont pas acquittées de la charge d'établir l'existence de circonstances inhabituelles qui justifieraient une ordonnance extraordinaire autorisant les seuls avocats à prendre connaissance de documents et renseignements pertinents. On ne doit envisager d'intervenir dans les [sic] normales entre avocat et client que dans les cas qui le justifient indubitablement. Il n'y a lieu d'accorder une ordonnance interdisant à un avocat de communiquer des éléments de preuve pertinents à son client pour en obtenir des instructions que lorsque le requérant s'est acquitté de la charge susdite et non pas simplement au motif qu'il craint des abus. Il faut plus que l'hypothèse d'un tel risque; voir Merck & Co. c. Apotex Inc. (2004), 32 C.P.R. (4th) 203 (C.F.); et Merck & Co. c. Brantford Chemicals Inc. (2005), 43 C.P.R. 233 (C.F.). Dans la présente espèce, la preuve ne suffit pas à me convaincre qu'une telle limitation devrait être appliquée à la capacité de la demanderesse à monter son dossier et à donner les instructions nécessaires à son avocat.

 

 

[2]               Le droit est clair concernant les recours exercés contre les décisions de protonotaire telles que celle qui nous occupe : le juge saisi d'un appel contre une ordonnance de protonotaire qui ne porte pas sur des questions ayant une influence déterminante sur l'issue du principal ne doit pas intervenir, sauf si cette ordonnance est entachée d'erreur flagrante, au sens où elle serait fondée sur un mauvais principe ou une mauvaise appréciation des faits : Apotex Inc. c. Canada (2005), 41 C.P.R. (4th) 97 (C.A.F.), aux paragraphes 11 à 13.

 

[3]               Dans la présente espèce, les appelantes GlaxoSmithKline et al. soutiennent que la protonotaire s'est fondée sur un mauvais principe, à savoir qu'elle n'a pas pris en considération l'exposé des motifs du juge MacKay dans Apotex Inc. c. Wellcome Foundation Ltd. (1993), 51 CPR (3d) 305 (CF), qui, affirment-elles, établit les critères applicables à l'examen des requêtes en confidentialité. Deuxièmement, l'avocat des appelantes fait valoir que la protonotaire n'a pas tenu compte d'éléments de preuve non contredits suivant lesquels certains renseignements relatifs à la ventilation des coûts du groupe devaient être classés dans une catégorie plus restrictive, désignée [TRADUCTION] « renseignements très confidentiels, communicables aux seuls avocats ».

 

[4]               Dans le cadre d'un appel tel que le présent, il n'y a pas lieu de lire au microscope l'exposé des motifs de la décision du protonotaire : Apotex c. Canada, 2005 C.F. 1401, au paragraphe 26. On ne peut exiger du protonotaire, ni d'ailleurs du juge, qu'il reproduise et analyse explicitement dans l'exposé de ses motifs chacun des arguments et des éléments de jurisprudence ou de doctrine invoqués par l'avocat dans ses conclusions orales et écrites. Lorsque, comme c'est le cas en l'occurrence, le protonotaire a rendu une décision qui, manifestement, ne tranche ni ne concerne une question ayant une influence déterminante sur l'issue du principal, un exposé de motifs du type donné ici par la protonotaire Milczynski est suffisant.

 

[5]               L'exposé des motifs de la décision Apotex Inc. c. Wellcome Foundation Ltd., précitée, qu'invoque l'avocat des appelantes, explique pourquoi a été prononcée dans cette affaire une ordonnance de confidentialité prévoyant une catégorie de renseignements communicables aux seuls avocats. Le juge ne prétendait pas y formuler une série de critères à examiner et appliquer dans tous les cas. On peut lire à ce sujet dans la décision Merck & Co. c. Brantford Chemicals Inc. (2005), 43 CPR (4th) 233 (CF), que notre pratique comporte une règle implicite de confidentialité des documents et renseignements livrés dans le cadre de la communication préalable, qu'il est permis de demander une ordonnance de confidentialité restrictive quand la situation le justifie et que la Cour ne définit une catégorie de renseignements « très confidentiels » que dans des cas extraordinaires.

 

[6]               Pour ce qui concerne l'appréciation de la preuve, la Cour d'appel fédérale fait observer dans Apotex Inc. c. Bristol-Myers Squibb Co. (2003), 23 CPR (4th) 465, que la décision d'un protonotaire sur le point de savoir s'il y a lieu de définir une catégorie de renseignements « très confidentiels » dans une ordonnance de confidentialité n'exerce pas d'influence déterminante sur l'issue du principal et n'exige donc pas du juge saisi en révision qu'il exerce son pouvoir discrétionnaire à la place du protonotaire. Dans la présente espèce, les éléments relatifs au point de savoir s'il convenait de faire entrer la ventilation des coûts du groupe dans une catégorie de renseignements définis comme « très confidentiels » plutôt que simplement confidentiels faisaient partie du dossier, et la protonotaire les a examinés avec le reste de la preuve dont elle disposait. Il n'appartient pas à la Cour d'apprécier de nouveau la preuve et d'exercer son pouvoir discrétionnaire en reprenant la question depuis le début.

 

[7]               Il convient de laisser les protonotaires remplir leurs fonctions sans exercer de recours outrepassant les limites fixées dans des décisions telles qu'Apotex, précitée. Le bon fonctionnement de notre Cour dépend de la possibilité pour les protonotaires de décider de manière ordonnée les questions qui leur sont soumises sans que soient exercés contre eux des recours mal fondés.

 

[8]               L'appel est rejeté avec dépens. Ceux‑ci sont fixés à 1 500 $ et sont à payer à la demanderesse quelle que soit l'issue de la cause, mais pas sur‑le‑champ.

 


 

ORDONNANCE

 

Pour les motifs exposés ci‑dessus,

 

LA COUR ORDONNE :

 

1.                  L'appel est rejeté.

2.                  Des dépens de 1 500 $ sont adjugés à la demanderesse et devront lui être payés quelle que soit l'issue de la cause, mais pas sur‑le‑champ.

 

« Roger T. Hughes »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Christiane Bélanger, LL.L.



 

COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                    T-117‑05

 

INTITULÉ :                                                   PHARMASCIENCE INC.

                                                                        c.

                                                                        GLAXOSMITHKLINE INC.,

                                                                        GLAXOSMITHKLINE PLC.,

                                                                        SMITHKLINE BEECHAM

                                                                        CORPORATION, THE WELLCOME

                                                                        FOUNDATION, DOE CO. et toutes autres entités inconnues de la demanderesse qui font partie du groupe GLAXOSMITHKLINE

 

LIEU DE L'AUDIENCE :                             TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L'AUDIENCE :                           LE 3 AVRIL 2007

 

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                                   LE JUGE HUGHES

 

DATE DES MOTIFS :                                  LE 3 AVRIL 2007

 

 

COMPARUTIONS :

 

Warren Sprigings

 

POUR LA DEMANDERESSE

Patrick Kierans

Kristen Wall

 

POUR LES DÉFENDERESSES

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Hitchman & Sprigings

Toronto (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

Ogilvy Renault

Toronto (Ontario)

 

POUR LES DÉFENDERESSES

 

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