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Date : 20070423

Dossier : T‑1561‑06

Référence : 2007 CF 425

Montréal (Québec), le 23 avril 2007

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR MAURICE E. LAGACÉ

 

ENTRE :

ACTELION PHARMACEUTICALS LTD.

demanderesse

et

 

SA MAJESTÉ DU CHEF DU CANADA,

REPRÉSENTÉE PAR

LE PROCUREUR GÉNÉRAL

ET LE COMMISSAIRE AUX BREVETS

défendeurs

 

 

 

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

 

[1]               Actelion Pharmaceuticals Ltd. (la demanderesse) demande le contrôle judiciaire de la décision par laquelle le commissaire aux brevets (le commissaire) aurait refusé, le 1er août 2006, de recevoir le paiement de la taxe de maintien en état et de la taxe de rétablissement se rapportant à la demande de brevet canadien no 2,454,417 (le brevet 417) durant la période de rétablissement d’un an.

[2]               La demanderesse sollicite un bref de certiorari annulant la décision du commissaire et un bref de mandamus enjoignant à l’Office de la propriété intellectuelle du Canada (l’OPIC) de rétablir la demande d’Actelion.

 

CONTEXTE

[3]               Le brevet 417 porte sur l’utilisation d’hétérocycles à fusion benzo comme principe actif dans des compositions pharmaceutiques d’une formule générale particulière qui sont utiles comme antagonistes des récepteurs de l’endothéline. Le brevet 417 provient d’une demande internationale PCT (no PCT/EP02/08523) portant la date de dépôt international du 31 juillet 2002, qui est entrée dans sa phase nationale au Canada le 20 janvier 2004; la date de dépôt du brevet 417 correspond donc à celle de la demande internationale (le 31 juillet 2002).

 

[4]               La première date à laquelle la taxe de maintien en état devait être payée était celle du deuxième anniversaire du dépôt de la demande, soit le 31 juillet 2004; la taxe de maintien en état n’ayant pas été payée, la demande a été considérée comme abandonnée le 2 août 2004. Selon la demanderesse, cette omission est imputable à une erreur d’entrée dans la base de données de ses agents canadiens. Un commis de la firme a inscrit le 31 juillet 2003, au lieu de 2002, comme date de dépôt, et la date d’échéance pour le paiement de la taxe de maintien en état à l’égard du deuxième anniversaire est donc passée de 2004 à 2005 dans ses registres.

 

[5]               L’OPIC avait envoyé un avis d’abandon à la demanderesse le 27 septembre 2004, mais celle‑ci soutient que cet avis n’a jamais été reçu. La demanderesse affirme qu’il n’y avait donc aucune raison de croire que la demande était dans l’état d’abandon.

 

[6]               En temps opportun, soit le 15 juillet 2005, la demanderesse a envoyé au commissaire une lettre [DD, vol. 1, à la p. 0014] indiquant ce qui suit :

[traduction] Le paiement d’aujourd’hui comprend la taxe de maintien en état de 100 $ payable à l’égard du 2e anniversaire dans le présent dossier. La demanderesse a choisi de payer cette taxe en tant qu’entité ordinaire.

 

Le commissaire est par la présente autorisé à porter directement au débit ou au crédit de notre compte de dépôt toute autre taxe ou tout trop-perçu se rapportant à la présente lettre …

 

 

[7]               En réponse, l’OPIC a envoyé, le 7 septembre 2005, une lettre [DD, vol. 1, 5, à la p. 0016] par laquelle il refusait de recevoir le paiement de la taxe de maintien en état ou de déduire une taxe de rétablissement du compte de la demanderesse. La lettre mentionnait notamment ce qui suit :

[traduction] La taxe de maintien en état était exigible le 2 août 2004.

 

Par conséquent, veuillez prendre note que si la taxe pour le maintien en état d’une demande de brevet n’est pas payée en entier avant le début de la période prévue, les pratiques canadiennes accordent un délai de grâce de 12 mois à l’intérieur duquel le paiement de la taxe de maintien en état nécessaire et d’une taxe de rétablissement de 200 $ peut être effectué. D’après nos dossiers, ce délai a pris fin le 1er août 2005. Nous avons donc le regret de vous informer que la présente demande est maintenant sans effet.

 

Conformément au paragraphe 4(1) des Règles sur les brevets, un remboursement de 100 $ sera émis sur demande. ….

 

 

[8]               Le délai de grâce de 12 mois dont il est fait mention dans la lettre de l’OPIC a expiré le 2 août 2005. S’est ensuivi, du 22 septembre 2005 à août 2006, un échange de lettres entre la demanderesse et l’OPIC. Une lettre de l’OPIC datée du 24 octobre 2005 indiquait que, puisque l’OPIC n’avait pas reçu de requête de rétablissement fondée sur le paragraphe 73(3) de la Loi sur les brevets à l’intérieur de la période réglementaire, la demande était considérée comme abandonnée. Dans une lettre de réponse datée du 13 février 2006, la demanderesse a postulé que sa lettre du 15 juillet 2005 constituait une autorisation générale et comportait une requête de rétablissement.

 

[9]               Dans une lettre subséquente datée du 21 avril 2006 [DD, vol. 1, à la p. 0034], l’OPIC a dit juger ne plus avoir le pouvoir légal de rétablir la demande. L’OPIC a en outre affirmé que les avis d’abandon étaient envoyés par simple courtoisie, et qu’il ne fallait pas présumer qu’un avis était envoyé à chaque fois. L’OPIC a de plus soutenu que, pour que l’on puisse donner suite à une autorisation générale, la requête devait, à première vue, être [traduction] « …claire et évidente… ». Et que puisque rien dans la lettre du 15 juillet 2005 ne donnait à entendre qu’un rétablissement était demandé, le représentant du commissaire n’avait pas commis d’erreur en ne déduisant aucune autre taxe puisque [traduction] « … l’Office n’a[vait] plus le pouvoir légal de rétablir la demande… ».

 

[10]           Dans sa dernière lettre, datée du 1er août 2006, l’OPIC ne faisait que réitérer sa position initiale.

 

QUESTIONS EN LITIGE

[11]           La demanderesse formule ainsi la question en litige :

a.       Quelle est la norme de contrôle applicable à la décision du commissaire?

 

b.      Le commissaire a‑t‑il commis une erreur de droit en refusant de reconnaître que la lettre du 15 juillet 2005 de la demanderesse constituait une directive de payer toutes les taxes se rapportant à la taxe de maintien en état payable à l’égard du deuxième anniversaire, y compris toute taxe de rétablissement nécessaire?

 

c.       Le commissaire a‑t‑il commis une erreur de droit en refusant de considérer la lettre du 15 juillet 2005 de la demanderesse comme une requête clairement implicite visant à faire rétablir la demande?

 

d.      Les motifs que le commissaire a invoqués à l’appui de la décision contestée sont‑ils manifestement déraisonnables?

 

[12]           Les défendeurs ont défini la question en litige de la façon suivante : la preuve établit‑elle que la demanderesse a effectivement pris les mesures que la loi exige pour éviter l’abandon de la demande ou pour rétablir la demande abandonnée?

 

[13]           Le régime prévoyant le paiement de taxes à l’égard des demandes de brevet est solidement établi par la Loi sur les brevets [L.R.C. 1985, ch. P‑4, modifiée] et les Règles sur les brevets [DORS/96‑423, modifiées]. Ensemble, les différentes dispositions législatives tracent un code exhaustif régissant l’obligation de payer certaines taxes, les conséquences d’une omission de payer et les mesures pouvant être prises pour éviter ces conséquences.

 

[14]           Les dispositions du paragraphe 27.1 de la Loi sur les brevets imposent au demandeur de brevet l’obligation de payer des taxes réglementaires :

27.1 (1) Le demandeur est tenu de payer au commissaire, afin de maintenir sa demande en état, les taxes réglementaires pour chaque période réglementaire.

27.1 (1) An applicant for a patent shall, to maintain the application in effect, pay to the Commissioner such fees, in respect of such periods, as may be prescribed.

 

[15]           Les taxes et les dates réglementaires sont énoncées dans les Règles sur les brevets et à l’annexe II des Règles. Plus particulièrement, selon l’article 30 de l’annexe II, le demandeur doit en général payer une taxe de maintien en état d’un montant spécifique chaque année à la date anniversaire de la demande. Le montant n’est pas en cause en l’espèce.

 

[16]           À la suite d’une erreur d’écriture, la taxe de maintien en état payable en l’espèce n’a pas été payée à la date anniversaire, de sorte que le brevet 417 en litige a été considéré comme abandonné en vertu des dispositions de l’article 73 de la Loi sur les brevets lui‑même, qui précise ce qui suit :

73. (1) La demande de brevet est considérée comme abandonnée si le demandeur omet, selon le cas :

c) de payer, dans le délai réglementaire, les taxes visées à l’article 27.1;

73. (1) An application for a patent in Canada shall be deemed to be abandoned if the applicant does not

(c) pay the fees payable under section 27.1, within the time provided by the regulations;

 

[17]           La demanderesse admet que le brevet 417 était, sans qu’elle le sache, considéré comme abandonné lorsqu’elle a envoyé la lettre du 15 juillet 2005 au commissaire avec comme directive de payer la taxe de maintien en état payable au 2e anniversaire dudit brevet.

 

[18]           Mais la demanderesse insiste sur le fait que, lorsqu’elle a offert de payer la taxe de maintien en état, elle agissait à l’intérieur de la période réglementaire de douze mois prévue à l’article 152 des Règles sur les brevets pour obtenir un rétablissement du brevet conformément à l’ensemble des conditions énoncées au paragraphe 73(3) de la Loi sur les brevets, ainsi rédigé :

73.(3) Elle peut être rétablie si le demandeur :

a) présente au commissaire, dans le délai réglementaire, une requête à cet effet;

 

73. (3) An application deemed to be abandoned under this section shall be reinstated if the applicant:

(a) makes a request for reinstatement to the Commissioner within the prescribed period;

 

b) prend les mesures qui s’imposaient pour éviter l’abandon;

(b) takes the action that should have been taken in order to avoid the abandonment; and

 

c) paie les taxes réglementaires avant l’expiration de la période réglementaire.

(c) pays the prescribed fee before the expiration of the prescribed period.

 

 

[19]           Les taxes réglementaires et la période réglementaire dont il est question au paragraphe 73(3) de la Loi sur les brevets sont pour leur part précisées à l’article 152 des Règles des brevets :

152. Pour que la demande considérée comme abandonnée en application de l’article 73 de la Loi soit rétablie, le demandeur, à l’égard de chaque omission mentionnée au paragraphe 73(1) de la Loi ou visée à l’article 151, présente au commissaire une requête à cet effet, prend les mesures qui s’imposaient pour éviter la présomption d’abandon et paie la taxe prévue à l’article 7 de l’annexe II, dans les douze mois suivant la date de prise d’effet de la présomption d’abandon.

152. In order for an application deemed to be abandoned under section 73 of the Act to be reinstated, the applicant must, in respect of each failure to take an action referred to in subsection 73(1) of the Act or section 151, make a request for reinstatement to the Commissioner, take the action that should have been taken in order to avoid the deemed abandonment and pay the fee set out in item 7 of Schedule II before the expiry of the twelve-month period after the date on which the application is deemed to be abandoned as a result of that failure.

 

[20]           Les dispositions susmentionnées, de par leur effet obligatoire et déclaratif, tranchent avec plusieurs dispositions de la Loi sur les brevets qui imposent expressément au commissaire une obligation d’exercice de pouvoir et par lesquelles on lui demande de faire quelque chose. Dans les dispositions relatives à l’abandon et au rétablissement, par contre, le résultat se produit par le seul effet de la loi, et non pas, affirment les défendeurs, en vertu d’une décision prise par le commissaire.

 

ARGUMENTS

[21]           Bien qu’elle admette que le brevet en litige était effectivement dans l’état de présomption d’abandon, sans possibilité d’exercice d’un pouvoir discrétionnaire par le commissaire, lorsqu’elle a offert de payer la taxe de maintien en état, la demanderesse soutient cependant que le commissaire n’en a pas moins commis une erreur susceptible de révision lorsqu’il a refusé, sans raison valable, de recevoir le paiement de la taxe réglementaire pour le rétablissement de la demande.

 

[22]           La demanderesse fait valoir que, la demande étant dans l’état d’abandon, le rétablissement était nécessaire pour que le paiement de la taxe de maintien en état payable à l’égard du deuxième anniversaire puisse être effectué. Il était donc évident, selon la demanderesse, que le paiement d’une taxe de rétablissement était nécessaire, et que la demande visant à payer la taxe de maintien en état impliquait clairement une requête en vue de payer la taxe de rétablissement.

 

[23]           La demanderesse soutient également que les trois conditions énoncées au paragraphe 73(3) ont toutes été remplies vu l’existence d’une requête de rétablissement implicite et de directives concernant le paiement de la taxe de maintien en état payable à l’égard du deuxième anniversaire et de la taxe de rétablissement à partir du compte de dépôt de son agent. Une requête de rétablissement explicite n’était donc pas nécessaire. La demanderesse invoque la décision non publiée United States v. Commissioner of Patents, T-1995-04, [United States] à l’appui de sa position.

 

[24]           Les défendeurs ne souscrivent pas à ces arguments. Selon eux, la demande de la demanderesse a été considérée comme abandonnée par suite de l’application de la Loi sur les brevets et de ses mesures législatives subordonnées, sans que le commissaire ait eu à intervenir ou à exercer un pouvoir discrétionnaire. Cela vaut également pour le non-rétablissement de la demande.

 

[25]           Selon les défendeurs, même si l’alinéa 73(3)a) n’exige qu’une requête, la requête doit être explicite pour que l’on puisse procéder au rétablissement, et une telle requête faisait défaut en l’espèce. Le commissaire n’avait donc ni l’obligation ni le pouvoir d’inférer l’existence d’une telle requête. Et puisqu’aucune mesure visant à rétablir la demande n’a été prise en temps utile, celle‑ci ne peut, en droit, être rétablie.

 

[26]           Les défendeurs soutiennent en outre que la demanderesse ne peut s’appuyer sur la décision rendue dans l’affaire United States puisque les faits de cette affaire ne sont pas analogues à ceux de l’espèce en ce que, dans cette affaire, le demandeur demandait seulement au commissaire d’inférer l’existence d’une directive de paiement particulière au sein d’une autre, plus générale, et ne cherchait pas à lui faire inférer l’existence d’une condition préalable prévue par la loi comme en l’espèce.

 

ANALYSE

[27]           La question est donc de savoir si le commissaire, par l’entremise de son directeur intérimaire, a eu raison de refuser le paiement de la taxe de maintien en état payable à l’égard du 2e anniversaire puisque la demanderesse n’avait pas présenté de requête de rétablissement précise comme l’exige l’alinéa 73(3)a) de la Loi sur les brevets.

 

[28]           Le régime législatif de paiement de taxes de maintien en état, les règles établissant les dates auxquelles les demandes sont considérées comme abandonnées et le rétablissement des demandes de brevet sont régis par la Loi sur les brevets, L.R.C. 1985, ch. P‑4, modifiée, et par les Règles sur les brevets, DORS/96‑423, modifiées.

 

[29]           Dans l’arrêt Barton No-till Disk Inc. c. Dutch Industries Ltd., 2003 CAF 121, [2003] 4 C.F. 67 (C.A.), 201 N.R. 152 [Dutch Industries], la Cour a affirmé que la méthode à adopter pour interpréter ces deux textes législatifs réside dans le principe énoncé dans Driedger, Elmer A., Construction of Statutes, (2e éd., Toronto : Butterworth’s, 1983), à la page 87 :

[traduction] Aujourd’hui, il n’y a qu’un seul principe ou solution en matière d’interprétation législative : il faut lire les termes de la loi dans leur contexte global en suivant le sens ordinaire et grammatical qui s’harmonise avec l’esprit de la loi, l’objet de la loi et l’intention du législateur.

 

Et au paragraphe 30, la Cour a énoncé en ces termes l’objectif visé par les taxes exigibles :

L’objet de la loi ne fait aucun doute en l’espèce. Les taxes exigibles en vertu de la Loi sur les brevets et des Règles sur les brevets visent à défrayer le Bureau des brevets de la totalité ou d’une partie de ses coûts. Les taxes sont calculées en fonction d’un barème moins élevé dans le cas des « petites entités » pour accorder un certain allègement aux inventeurs, qui sont présumés ne disposer que de moyens limités. Le régime de paiement de taxes périodiques annuelles a été instauré en vue de décourager la prolifération de brevets et de demandes de brevets inutiles en obligeant les titulaires et les demandeurs de brevets, au moins une fois par année, à entreprendre des démarches pour les conserver en état.

 

 

[30]           Il ressort clairement du paragraphe 73(3) que trois conditions doivent être remplies pour qu’une demande de brevet abandonnée soit rétablie comme l’indique l’arrêt Pfizer Inc. c. Canada (Commissaire des brevets), [2000] A.C.F. no 1801 (C.A.) (QL). Si ces trois conditions ne sont pas remplies, la demande de brevet devient caduque sans l’intervention du commissaire. Le délai pour satisfaire à ces trois exigences a été fixé par l’article 152 à 12 mois suivant la date d’abandon. En l’espèce, la requête de rétablissement devait être présentée avant le 2 août 2005.

 

[31]           L’article 152 des Règles exige que la requête visant le rétablissement d’une demande de brevet soit présentée dans les 12 mois suivant la date de prise d’effet de la présomption d’abandon. En l’espèce, la date limite pour présenter une requête de rétablissement était le 1er août 2005. À cette date, le seul document reçu par le commissaire était la lettre du 15 juillet provenant de l’agent de la demanderesse qui contenait une directive de payer la taxe de maintien en état exigible.

 

[32]           La demanderesse prétend que cette lettre contient une requête de rétablissement implicite. Les défendeurs affirment pour leur part qu’une requête de rétablissement explicite doit être présentée selon la Loi sur les brevets et les Règles sur les brevets.

 

[33]           Étant donné que les défendeurs ne nient pas qu’on ait offert de payer la taxe de maintien en état avant l’expiration de la période de douze mois suivant la date à laquelle la demande de brevet a été considérée comme abandonnée à la suite de ladite omission, il semble que la seule question que la Cour a encore à trancher soit celle de savoir si la requête de rétablissement peut être implicite ou si elle doit être explicite.

 

[34]           Les parties n’ont pas trouvé de décisions traitant précisément de cette question.

 

[35]           Les arguments de la demanderesse sur cette question ne peuvent être retenus pour les raisons suivantes :

a.       Premièrement, la lettre du 15 juillet 2005 ne parlait que du paiement de la taxe de maintien en état et de [traduction] « toute autre taxe ». Elle n’indique pas expressément une volonté d’obtenir un rétablissement ou de faire porter une taxe de rétablissement au débit de son compte.

 

b.      Deuxièmement, ni la Loi sur les brevets ni les Règles sur les brevets n’habilitent le commissaire à accepter une autorisation générale à la place d’une lettre précise indiquant une requête de rétablissement. L’alinéa 73(3)a) exige expressément que le demandeur « présente […] une requête à cet effet ». Cela n’a pas été fait, nonobstant l’argument de la demanderesse voulant que la requête ait été « implicite ».

 

c.       Troisièmement, la demanderesse a omis de prendre les mesures « qui s’imposaient pour éviter l’abandon » comme le prévoit l’alinéa 73(3)b). Plus particulièrement, aucune requête n’a été présentée et aucun paiement n’a été déposé en vue du rétablissement avant l’expiration de la période réglementaire.

 

d.      Quatrièmement, la demanderesse ne savait pas, au moment où elle a envoyé la lettre du 15 juillet au commissaire, que le brevet en litige était considéré comme abandonné. Pourquoi donc le commissaire aurait‑il dû voir dans cette lettre une requête implicite quand la demanderesse n’avait alors en tête que le paiement de la taxe de maintien en état, et certainement pas une requête de rétablissement?

 

e.       Cinquièmement, s’il fallait suivre le raisonnement de la demanderesse, la conséquence pour l’avenir serait que, chaque fois que le paiement d’une taxe de maintien en état serait offert durant la période de douze mois suivant la date à laquelle une demande a été considérée comme abandonnée, le commissaire devrait interpréter le paiement comme une requête de rétablissement implicite. Mais qu’adviendrait‑il alors des autres conditions énoncées aux alinéas 73(3)a) et b) de la Loi sur les brevets?

 

[36]           La Cour ne peut ignorer le fait que l’article 4 de la Loi sur les brevets prévoit que le commissaire doit agir conformément aux dispositions de la Loi sur les brevets. La Loi ne lui laisse aucun pouvoir discrétionnaire à exercer en l’espèce. Les dispositions législatives doivent recevoir une interprétation stricte, et c’est à la demanderesse qu’il incombe de maintenir la demande de brevet en état. Aucune omission de se plier à la rigidité de la loi ne saurait autoriser le commissaire ni la demanderesse à déroger au libellé précis de celle‑ci.

 

[37]           Le commissaire n’a rendu aucune décision statuant sur les droits de l’appelante en l’espèce. Les droits de l’appelante ont été modifiés par l’application de la Loi. Le commissaire n’a fait qu’informer la demanderesse que les conditions de rétablissement énoncées au paragraphe 73(3) n’avaient pas été remplies à l’intérieur de la période réglementaire de 12 mois et que, par conséquent, il ne pouvait rien faire pour rétablir la demande.

 

[38]           La Cour ne voit aucune raison d’intervenir. Au contraire, le commissaire a eu raison de refuser de rétablir la demande, et il n’existe aucun motif autorisant la Cour à intervenir.

 

JUGEMENT

 

LA COUR ORDONNE que la présente demande visant à obtenir un contrôle judiciaire, un bref de certiorari annulant la décision du commissaire et un bref de mandamus enjoignant à l’Office de la propriété intellectuelle du Canada (l’OPIC) de rétablir la demande soit rejetée. Les dépens sont adjugés aux défendeurs.

 

 

 

 

« Maurice E. Lagacé »

Juge suppléant

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Diane Provencher, LL.B.

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        T‑1561‑06

 

INTITULÉ :                                       ACTELION PHARMACEUTICALS LTD. c.

                                                            SA MAJESTÉ DU CHEF DU CANADA

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 OTTAWA (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               LE 12 AVRIL 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              LE JUGE SUPPLÉANT MAURICE E. LAGACÉ

 

DATE :                                               LE 23 AVRIL 2007

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Bruce E. Morgan

 

POUR LA DEMANDERESSE

Sharon Johnston

 

POUR LES DÉFENDEURS

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Gowling Lafleur Henderson

Ottawa (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

John H. Sims, c.r.

Sous‑procureur général du Canada

 

POUR LES DÉFENDEURS

 

 

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