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Date : 20070514

Dossier : IMM-3513-06

Référence : 2007 CF 510

Ottawa (Ontario), le 14 mai 2007

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE O'KEEFE

 

 

ENTRE :

LIZHEN LIN

demanderesse

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

 

défendeur

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

LE JUGE O’KEEFE

 

[1]               La Cour est saisie d’une demande présentée en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la LIPR) en vue d’obtenir le contrôle judiciaire d’une décision en date du 30 mai 2006 par laquelle la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (Section de la protection des réfugiés) (la Commission) a conclu que la demanderesse n’était ni une réfugiée au sens de la Convention ni une personne à protéger.

 

[2]               La demanderesse souhaite que la décision soit renvoyée à la Commission pour être jugée de nouveau par un tribunal différemment constitué.

 

Genèse de l’instance

 

[3]               La demanderesse, Lizhen Lin, est une citoyenne de la Chine. Elle affirmait craindre d’être persécutée parce qu’elle est catholique romaine. Elle a relaté les faits à l’origine de sa demande d’asile dans l’exposé circonstancié de son formulaire de renseignements personnels (FRP).

 

[4]               La demanderesse explique que sa famille est catholique romaine et qu’elle est chrétienne depuis son enfance. Elle a adhéré à un groupe jeunesse chrétien en 2003. La demanderesse affirme que son père s’est miraculeusement remis d’un accident de voiture grâce à ses prières. Le 15 août 2004, la demanderesse participait à un office du groupe jeunesse au domicile d’un croyant. Quelqu’un qui faisait le guet les a prévenus que des représentants du Bureau de la sécurité publique (BSP) s’approchaient de la maison. Ils ont aidé le prêtre à fuir et la demanderesse s’est perdue dans la foule. Elle a couru jusqu’à la maison de son oncle, où elle s’est cachée. 

 

[5]               Trois jours plus tard, la demanderesse a appris que des responsables du BSP s’étaient rendus chez elle, à sa recherche, et qu’ils avaient informé les membres de sa famille de leur intention de l’arrêter parce qu’elle se livrait à des activités religieuses illégales. Les agents du BSP ont arrêté deux membres du groupe jeunesse. La demanderesse affirme que des agents du BSP ont continué leurs visites chez elle alors qu’elle se cachait et même après son départ de la Chine pour le Canada. Quelques semaines plus tard, la famille de la demanderesse a pris des dispositions avec un passeur pour qu’il l’emmène au Canada.

 

[6]               La demanderesse a présenté le 30 juin 2005 une demande de visa de visiteur canadien et elle a obtenu un visa d’étudiant valide jusqu’en août 2007. Elle est arrivée au Canada le 18 juillet 2005 et a demandé l’asile le 26 juillet 2005. L’audience concernant le statut de réfugié de la demanderesse a eu lieu le 8 mai 2006 et sa demande d’asile a été refusée par décision datée du 30 mai 2006. Il s’agit du contrôle judiciaire de cette décision de la Commission.

 

Motifs de la Commission

 

[7]               La question déterminante était celle de savoir si le BSP recherchait la demanderesse et, par conséquent, s’il existait une possibilité sérieuse qu’elle soit persécutée. La Commission a analysé la crédibilité de l’exposé circonstancié du FRP de la demanderesse quant à la poursuite du BSP et à la nature de sa sortie de la Chine. La Commission a relevé les incohérences suivantes dans le témoignage de la demanderesse :

  • Interrogée par les autorités de l’immigration quant à savoir pourquoi elle demandait l’asile, la demanderesse avait déclaré que des policiers du BSP s’étaient présentés chez elle pour l’arrêter et qu’elle avait pu fuir parce que des personnes l’avaient prévenue de leur arrivée. Dans son FRP et dans son témoignage, elle avait expliqué que lorsqu’elle avait appris que le BSP s’apprêtait à effectuer une descente à l’endroit où l’office religieux avait lieu, elle s’était enfuie avec la foule et s’était cachée chez son oncle. 
  • Dans son entrevue, la demanderesse a déclaré qu’elle était au courant de ces arrestations avant d’aller se cacher. Dans son FRP et son témoignage, elle a mentionné avoir été informée des arrestations après s’être cachée. Invitée à expliquer cette incohérence, la demanderesse a réitéré les faits relatés à ce sujet dans l’exposé circonstancié de son FRP. La Commission a tiré une conclusion défavorable de cette incohérence. 

 

[8]               Les réponses de la demanderesse aux questions concernant les onze mois qu’elle aurait passés à se cacher étaient incohérentes et évasives. La Commission a estimé que le témoignage donné par la demanderesse au sujet des mois qu’elle affirmait avoir passés cachée n’était pas crédible.

  • Lorsqu’on lui a demandé d’indiquer le lieu de la maison de son oncle, elle a répondu qu’elle pouvait s’y rendre à pied en moins d’une heure.
  • Elle ignorait si des agents du BSP avaient interrogé son oncle.
  • Interrogée à savoir comment son oncle avait expliqué aux voisins sa présence chez lui, elle a répondu qu’elle sortait rarement.
  • Elle ne savait pas si les voisins savaient qu’elle était là, mais a affirmé avoir rencontré deux voisins.
  • Lorsqu’on lui a de nouveau demandé comment son oncle avait expliqué sa présence, elle a répondu qu’il avait expliqué qu’elle fréquentait l’école. Questionnée quant aux raisons pour lesquelles ce récit était accepté vu qu’elle sortait si rarement, elle a répondu qu’elle l’ignorait.

[9]               Dans son entrevue et dans son FRP, la demanderesse avait affirmé que son passeport était authentique. À l’audience, elle avait toutefois expliqué qu’un passeur avait obtenu le passeport illégalement et que ni elle ni ses parents n’étaient intervenus de quelque manière que ce soit. La Commission a signalé que les citoyens chinois qui souhaitent obtenir un passeport doivent se présenter au bureau de la sécurité publique local et qu’ils doivent remplir un formulaire et soumettre d’autres documents. La Commission a estimé que le témoignage de la demanderesse au sujet du rôle du passeur dans l’obtention de son passeport n’était pas vraisemblable, en plus de contredire son témoignage antérieur au cours de son entrevue et son FRP. La Commission a conclu que le passeport était authentique. 

 

[10]           La Commission a également conclu que la description que la demanderesse avait faite de son passage à l’aéroport de Beijing n’était pas crédible. Elle avait affirmé qu’elle n’avait rien eu à faire lorsqu’elle avait franchi les postes de contrôle munie de son passeport, parce que le passeur s’occupait de tout. La Commission a fait observer que les documents sur le pays indiquaient que les citoyens chinois voyageant à l’étranger doivent présenter un passeport et un visa valides et faire vérifier leur identité par un agent de l’immigration. Il était invraisemblable qu’une personne poursuivie par le BSP puisse sortir de la Chine en utilisant son propre passeport. La Commission a conclu que le BSP ne poursuivait pas la demanderesse et que celle-ci n’était pas membre d’une collectivité chrétienne clandestine en Chine qui avait fait l’objet d’une descente de la part du BSP. La demanderesse n’avait donc ni la qualité de réfugiée au sens de la Convention ni celle de personne à protéger.

 

Questions en litige

 

[11]           La demanderesse soumet les questions suivantes à l’examen de la Cour :

            1.         La Commission a-t-elle commis une erreur en tirant une inférence négative des incohérences relevées entre, d’une part, les renseignements fournis par la demanderesse lors de son entrevue devant les autorités de l’immigration et, d’autre part, son FRP et son témoignage?

            2.         La Commission a-t-elle commis une erreur en tirant des conclusions défavorables au sujet de la période où la demanderesse s’était cachée?

            3.         La Commission a-t-elle commis une erreur en tirant une inférence négative du témoignage donné par la demanderesse au sujet de son passeport?

            4.         La Commission a-t-elle commis une erreur en concluant que les explications données par la demanderesse au sujet de son passage à l’aéroport de Beijing manquaient de crédibilité?

            5.         La Commission a-t-elle commis une erreur en ne tenant pas compte de l’identité de la demanderesse comme chrétienne et en en tirant pas de conclusion à ce sujet?

 

Prétentions et moyens de la demanderesse

 

[12]           Dans le jugement Jamil c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (2006), 55 Imm. L.R. (3d) 37, 2006 CF 792, la Cour a expliqué que, lorsqu’il existe des contradictions entre les notes prises lors de l’entrevue et le témoignage du demandeur ou le FRP du demandeur, le tribunal risque de mal interpréter la preuve s’il s'attache à des détails. Ainsi, seules les graves contradictions pourraient entacher la crédibilité de la demanderesse. La demanderesse fait valoir que ce n’est pas dans les notes d’entrevue que l’on retrouve l’essentiel de sa demande. Elle affirme que la chronologie des faits différente de l’exposé circonstancié de son FRP ne constitue pas une raison suffisante pour attaquer sa crédibilité. La demanderesse souligne qu’eu égard au contexte dans lequel l’entrevue s’est déroulée, il n’y avait pas lieu de relater les faits de façon logique ou chronologique et elle soutient qu’on n’aurait pas dû invoquer ce fait pour miner sa crédibilité.

 

[13]           La demanderesse soutient que la Commission n’était pas justifiée de conclure qu’il était invraisemblable que la demanderesse ignore comment son oncle avait expliqué sa présence aux voisins. La demanderesse affirme que les réponses qu’elle a données étaient plausibles, car elle ne savait pas ce que son oncle avait dit aux voisins, qu’elle voyait d’ailleurs rarement. Elle ajoute que la Commission n’était pas justifiée de conclure qu’il était invraisemblable que le comité du quartier n’aurait pas eu connaissance de sa présence. La demanderesse affirme que les voisins n’étaient pas nécessairement au courant de sa situation et la Commission n’a cité aucun document au sujet du mode de fonctionnement des comités de quartier en Chine.

 

[14]           La demanderesse reconnaît que la Commission peut tirer des conclusions d’invraisemblance qui reposent rationnellement sur la preuve (voir le jugement Zhou c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (2006), 146 A.C.W.S. (3d) 140, 2006 CF 70). Elle ajoute toutefois qu’en l’espèce, les conclusions d’invraisemblance de la Commission étaient manifestement déraisonnables.

 

[15]           La demanderesse affirme que les éléments de preuve relatifs à son passeport ne renferment aucune incohérence. Les notes d’entrevue indiquent que son passeport a été délivré par un bureau de passeport local, mais ne précisent pas si la demanderesse s’est elle-même procurée le document. La Commission aurait, selon la demanderesse, négligé de tenir compte du fait qu’un passeport peut à la fois être authentique et avoir été obtenu par des moyens irréguliers. La demanderesse affirme que, compte tenu de l’ampleur de la corruption en Chine, la conclusion de la Commission suivant laquelle le passeport doit être obtenu par la demanderesse en personne n’était pas appuyée par la preuve documentaire. Suivant la demanderesse, la Commission a mal interprété la preuve en concluant que la preuve de la demanderesse renfermait des incohérences au sujet de la nature de son passeport. La demanderesse avait modifié son FRP par écrit pour indiquer que son passeport avait été obtenu irrégulièrement. 

 

[16]           La demanderesse affirme que la Commission a mal interprété la preuve en concluant qu’il était invraisemblable qu’une personne poursuivie par le BSP puisse sortir de la Chine munie de son propre passeport. Suivant la demanderesse, la Commission n’a pas tenu compte des éléments de preuve documentaire au sujet des méthodes perfectionnées qui sont utilisées pour faire passer des clandestins. La demanderesse affirme que la Commission ne devrait conclure à l’invraisemblance que si les faits articulés débordent le cadre de ce à quoi on peut logiquement s'attendre ou si la preuve documentaire démontre que les événements ne pouvaient pas se produire comme elle le prétend (voir le jugement Valtchev c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (2001), 208 F.T.R. 267, 2001 CFPI 776).

 

[17]           La demanderesse soutient que la Commission a commis une erreur en n’évaluant pas les éléments de preuve qu’elle lui avait soumis pour établir son identité chrétienne. Elle soutient que la Commission devait tirer une conclusion claire au sujet de son identité religieuse (voir le jugement Chen c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (2002), 20 Imm. L.R. (3d) 238, 2002 CFPI 480).

 

Prétentions et moyens du défendeur

 

[18]           Le défendeur affirme que la norme de la décision manifestement déraisonnable s’applique aux conclusions tirées par la Commission au sujet de la crédibilité (voir l’arrêt Aguebor c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), (1993), 160 N.R. 315, 42 A.C.W.S. (3d) 886 (C.A.F.)). La demanderesse devait donc signaler une conclusion de la Commission qui n'était aucunement étayée par la preuve (voir le jugement Sinan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (2004), 128 A.C.W.S. (3d) 1173, 2004 CF 87).

 

[19]           Le défendeur affirme que la demanderesse a donné des versions différentes de son histoire. Suivant ses notes d’entrevue, elle se trouvait à l’église lorsqu’elle a entendu dire que l’on arrêtait des gens. Elle avait expliqué que des policiers s’étaient présentés chez elle pour l’arrêter, mais qu’elle avait été prévenue et qu’elle avait réussi à s’enfuir. Suivant son FRP et son témoignage, une descente a été effectuée lors d’un office religieux tenu en soirée « chez un croyant » et une personne qui faisait le guet avait prévenu les personnes présentes de l’arrivée des agents du BSP. Les participants ont aidé le prêtre à s’enfuir et la demanderesse a couru se cacher chez son oncle. Elle a été informée des arrestations après s’être cachée.

 

[20]           Le défendeur soutient que la Commission avait le droit de conclure que la demanderesse manquait de crédibilité du fait des graves contradictions et incohérences de son récit. Le défendeur signale que la demanderesse n’a pu que réitérer les faits relatés dans l’exposé circonstancié de son FRP lorsqu’on lui a demandé d’expliquer ces incohérences. Le défendeur rappelle qu’un témoignage contradictoire est susceptible de jeter des doutes sur l’ensemble du témoignage du demandeur d’asile (voir l’arrêt Dan-Ash c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) (1988), 93 N.R. 33, 5 Imm. L.R. (2d) 78 (C.A.F.)). Le défendeur souligne qu’une demande d’asile peut être rejetée pour manque de crédibilité lorsque le témoignage du demandeur d’asile n’a pas le degré de précision dont on s’attendrait de la part d’une personne se trouvant dans sa situation (voir le jugement He c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (2001), 110 A.C.W.S. (3d) 353, 2001 CFPI 1256). Suivant le défendeur, la Commission n’est pas tenue d’accepter un témoignage parce qu’il n’a pas été contredit à l’audience. 

 

[21]           Le défendeur affirme que la Commission avait le droit de tirer des conclusions fondées sur l’invraisemblance et qu’elle pouvait écarter les éléments de preuve incompatibles avec les probabilités générales de l’affaire (voir  le jugement Gonzalez c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (1999), 88 A.C.W.S. (3d) 1062 (C.F. 1re inst.)). Il fait valoir qu’il ne suffisait pas que la demanderesse avance d’autres explications au sujet des conclusions de la Commission. Le défendeur affirme que les conclusions de la Commission étaient raisonnables et qu’aucune erreur justifiant l’intervention de la Cour n’a été commise (voir le jugement Sommariva c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), (1996) 110 F.T.R. 319, 33 Imm. L.R. (2d) 25 (C.F. 1re inst.)).

 

[22]           Le défendeur avance qu’il était raisonnable de la part de la Commission de s’interroger sur la facilité avec laquelle la demanderesse prétendait avoir passé les postes de contrôle de l’aéroport avec son passeport. Il fait observer que le document cité par la demanderesse indiquait que ce n’était que dans des cas exceptionnels que des erreurs étaient commises au cours des formalités de contrôle de l’identité et que les individus recherchés ne pourraient normalement sortir de Chine.

 

[23]           La formule de déclaration au point d’entrée exigeait des renseignements détaillés au sujet du recours à des passeurs. La demanderesse s’est cependant contentée d’indiquer qu’elle avait obtenu un passeport d’un bureau local en Chine. Suivant le défendeur, il était raisonnable d’inférer qu’un passeur n’était pas intervenu pour faciliter l’obtention d’un passeport, ce qui contredit la déclaration de la demanderesse suivant laquelle un passeur avait obtenu le document. Dans l’arrêt Adu c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), (1995), 53 A.C.W.S. (3d) 158 (C.A.F.)), la Cour a jugé que le témoignage donné sous serment par le demandeur d’asile pouvait être réfuté lorsque la preuve documentaire ne mentionne pas ce à quoi on devrait normalement s’attendre. Le défendeur soutient que la Commission avait le droit de préférer les éléments de preuve documentaire au sujet de la procédure à suivre pour obtenir un passeport en Chine au témoignage de la demanderesse (voir l’arrêt Zhou c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) (1994), 49 A.C.W.S. (3d) 558 (C.A.F.)).

 

[24]           Le défendeur affirme que la Commission a donné une explication raisonnable pour justifier pourquoi elle croyait que la demanderesse avait obtenu elle-même un passeport authentique. De plus, la Commission ne disposait d’aucun élément de preuve tendant à démontrer que la corruption des fonctionnaires était un facteur qui avait joué en l’espèce.

 

[25]           La Commission a conclu, sur le fondement de ses conclusions défavorables cumulatives sur la crédibilité, que la demanderesse n’était pas une chrétienne qui était poursuivie par le BSP. Dans le jugement Djouadou c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (1999), 94 A.C.W.S. (3d) 1183 (C.F. 1re inst.), la Cour a déclaré que la Commission n’était pas tenue d’examiner la preuve documentaire sur la situation au pays lorsque le témoignage du demandeur d’asile manquait de crédibilité. Le défendeur soutient que, si la Commission a commis une erreur à cet égard, l’effet cumulatif des lacunes relevées dans le témoignage de la demanderesse justifiait la conclusion défavorable tirée au sujet de sa crédibilité. Le défendeur ajoute que, lorsqu’une demande d’asile est tranchée en fonction de l’absence de crédibilité, et que les conclusions tirées à ce sujet ne sont pas manifestement déraisonnables, la conclusion tirée au sujet de la crédibilité est déterminante quant à l’issue de la demande de contrôle judiciaire (voir le jugement Dezsone c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (2005), 143 A.C.W.S. (3d) 1081, 2005 CF 1549).

 

Analyse et décision

Norme de contrôle

[26]           Les conclusions tirées par la Commission au sujet de la crédibilité commandent un degré élevé de retenue judiciaire et sont susceptibles d’être contrôlées selon la norme de la décision manifestement déraisonnable (voir l’arrêt Aguebor, précité).

 

[27]           Première question

            La Commission a-t-elle commis une erreur en tirant une inférence négative des incohérences relevées entre, d’une part, les renseignements fournis par la demanderesse lors de son entrevue devant les autorités de l’immigration et, d’autre part, son FRP et son témoignage?

            La conclusion défavorable tirée par la Commission au sujet de la crédibilité reposait sur les incohérences relevées entre les notes prises au point d’entrée, le FRP de la demanderesse et son témoignage au sujet de : (1) sa poursuite par le BSP; (2) la durée de sa clandestinité; (3) la nature de son passeport; (4) son passage à l’aéroport de Beijing. Dans le jugement Jamil, précité, le juge Lemieux déclare ce qui suit, au paragraphe 25, au sujet de l’examen que la Commission fait de la preuve pour tirer des conclusions au sujet de la crédibilité :

Ces décisions, qui ont été appliquées tant par la Cour d'appel fédérale que par notre Cour, interdisent par exemple de tirer des conclusions comme celles qui suivent en ce qui concerne la crédibilité :

▪      Les conclusions qui ne reposent sur aucun élément de preuve;

▪      Les conclusions du tribunal qui ne sont fondées que sur des conjectures et qui donnent lieu à des inférences injustifiées et infondées au sujet des faits à l'origine de la demande d'asile;

▪      Les contradictions relevées entre les notes prises au point d'entrée et le témoignage du demandeur ou le FRP du demandeur, lorsque le tribunal s'attache à des détails au lieu de s'en tenir à l'essentiel de la demande, ce qui l'amène à mal interpréter la preuve. Cette contradiction doit toutefois tirer à conséquence et doit suffire à elle seule à ébranler la crédibilité du demandeur (Mushtaq c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), (2003) CF 1066);

▪      Le tribunal doit être raisonnable lorsqu'il écarte les explications fournies par le demandeur lorsqu'il est confronté à une contradiction et le tribunal ne devrait pas appliquer trop rapidement une logique et un raisonnement nord-américains au comportement du demandeur (R.K.L, précité, au paragraphe 12);

▪      Le tribunal doit apprécier la demande d'asile du demandeur en tenant compte de l'ensemble de la preuve.

 

Poursuite par le BSP

[28]           Voici ce qu’on trouve dans les notes prises au point d’entrée au sujet de la poursuite de la demanderesse par le BSP :

[TRADUCTION]

 

Je participais aux activités de l’église et j’ai entendu dire que des gens étaient arrêtés. La police veut m’arrêter. Des policiers sont venus chez moi pour m’arrêter. Ils sont venus la nuit. Des gens m’ont prévenue et j’ai pu m’enfuir.

 

[29]           Voici ce que la demanderesse déclare dans son FRP au sujet de sa poursuite par le BSP :

[TRADUCTION]

 

Le 15 août 2004, je participais à un office chez un croyant […] Alors que l’activité se déroulait depuis une heure environ, la personne qui faisait le guet est entrée en courant dans la maison pour nous prévenir de l’arrivée d’agents du BSP. Nous avons sans tarder aidé le prêtre à s’échapper et je me suis perdue dans la foule. Je me suis rendue chez mon oncle maternel pour m’y cacher.

 

Trois jours plus tard, mon oncle maternel est allé chez moi et a appris des autres membres de ma famille que des responsables du BSP s’étaient rendus chez moi, à ma recherche et qu’ils leur avaient dit que je me livrais à des activités religieuses illégales dans une maison privée et que je dirigeais les activités de cette église clandestine. Ma famille m’a appris que le BSP avait arrêté deux membres de mon groupe jeunesse.

 

[30]           Voici comment la demanderesse a relaté cet incident à l’audience :

[TRADUCTION]

 

APR :  D’accord. Venons-en à ce qui s’est passé. Quand le BSP a‑t‑il découvert le groupe jeunesse?

 

                                […]

 

LA DEMANDEURE D’ASILE : Oh, c’était le 15 août.

 

[…]

 

APR :  À quelle heure l’office a-t-il commencé ce jour-là?

 

LA DEMANDEURE D’ASILE : À 20 h.

 

APR :  Bon. Je reviens à ma première question au sujet de cet événement. Je voudrais que vous racontiez en détail ce qui s’est passé, de votre point de vue personnel, à commencer par les instants qui ont précédé l’interruption du déroulement de l’office religieux. Que faisiez-vous lorsque l’office a été interrompu?

 

LA DEMANDEURE D’ASILE : Je récitais le Notre Père. C’est alors que la personne chargée de faire le guet a fait irruption dans la pièce pour nous dire que la police arrivait. Nous avons aidé le père à s’enfuir par la porte arrière. Et après cela nous nous sommes aussi enfuis.

 

[…]

 

APR :  Ai-je raison de dire qu’à compter de ce moment-là vous vous cachiez en Chine?

 

LA DEMANDEURE D’ASILE : Oui.

 

APR :  Êtes-vous rentrée chez vous?

 

LA DEMANDEURE D’ASILE :  Non.

 

[31]           À l’audience, la demanderesse a été invitée à expliquer les divergences relevées dans son témoignage au sujet de la journée où elle était poursuivie par le BSP :

[TRADUCTION]

 

APR :  D’accord, nous avons en main une copie du compte rendu de l’interrogatoire. À la question de savoir pourquoi vous demandez l’asile, vous avez répondu ce qui suit :

 

Vous avez dit qu’alors que vous participiez aux activités de l’église, vous avez entendu dire que des gens étaient arrêtés : « La police veut m’arrêter. Des policiers sont venus chez moi pour m’arrêter. Ils sont venus la nuit. Des gens m’ont prévenue et j’ai pu m’enfuir. »

 

[…]

 

Vous souvenez-vous avoir fait ces déclarations?

 

LA DEMANDEURE D’ASILE : On dirait que c’est différent de ce que j’ai déjà dit.

 

APR :  En tout cas, c’est certainement différent de ce qui est dit dans votre Formulaire de renseignements personnels. Je ne suis pas certain de ce que vous voulez dire lorsque vous dites que c’est différent de ce que vous avez déjà dit…

 

LA DEMANDEURE D’ASILE : Au début, oui, j’avais dit que je participais aux activités et que la police était venue pour arrêter des gens et que j’avais quitté les lieux parce que la personne qui faisait le guet nous avait prévenus. C’est donc le soir de notre activité que les policiers sont venus m’arrêter.

 

[…]

 

APR : Je ne comprends pas que vous ayez dit quelque chose de différent lorsqu’on vous a demandé des explications. Pourquoi dire : « J’assistais à un office religieux; il y a eu une descente (inaudible)?

 

LA DEMANDEURE D’ASILE : Parce qu’à ce moment-là, c’est ce que j’ai dit, mais je ne sais pas pourquoi. Il me semble que ce qui est écrit est tordu ou à l’envers.

 

APR : Ouais, c’est différent et je vais vous donner la possibilité d’expliquer pourquoi c’est différent.

 

LA DEMANDEURE D’ASILE : Parce que ce que j’ai dit, j’ai répondu en racontant que le soir de notre activité, la police était venue nous arrêter et que les personnes qui faisaient le guet nous ont prévenus de leur arrivée.

 

[…]

 

APR : Si je comprends votre explication, vous dites que ces explications que je viens de vous lire sont des explications de ce qui s’est passé lorsque le BSP a fait une descente à l’endroit où l’office religieux avait lieu?

 

LA DEMANDEURE D’ASILE : Oui. Nous nous sommes enfuis ce soir-là, mais j’ai appris plus tard que la police était venue chez nous.

 

[…]

 

APR : Ce que je veux savoir, c’est si vous pouvez m’expliquer pourquoi, lorsqu’on vous a demandé au cours du présent interrogatoire pourquoi vous ne pouviez aller chez vous, pourquoi vous n’avez pas répondu dans le même ordre?

 

LA DEMANDEURE D’ASILE : J’ai répondu dans cet ordre, mais je ne sais pas pourquoi c’est différent dans le document.

 

[32]           Plus tard au cours de l’audience, l’avocat a tenté de clarifier le témoignage de la demanderesse :

[TRADUCTION]

 

L’AVOCAT : « Je participais aux activités de l’église et j’ai entendu dire que des gens étaient arrêtés. La police veut m’arrêter. » Que voulez-vous dire précisément par là?

 

LA DEMANDEURE D’ASILE : Je fais allusion au jour où l’activité a eu lieu, où l’incident s’est produit. Des policiers se sont présentés pour nous arrêter et la personne qui faisait le guet nous a prévenus. Nous avons aidé le père à s’enfuir et nous nous sommes enfuis ensuite.

 

L’AVOCAT : À quoi faisiez-vous allusion lorsque vous avez dit, un peu plus tôt : « Ils sont venus la nuit. Des gens m’ont prévenue […] »? Plus précisément, de qui parlez-vous lorsque vous dites : « Des gens m’ont prévenue »?

 

LA DEMANDEURE D’ASILE : C’est la personne qui faisait le guet qui est entrée en courant et qui m’a prévenue. 

 

[33]           Voici les circonstances entourant l’incident au cours duquel la demanderesse aurait été poursuivie par le BSP :

(1)    la demanderesse participait à un office religieux organisé par un groupe de jeunes;

(2)    la personne qui faisait le guet l’a prévenue de l’arrivée imminente d’agents du BSP;

(3)    la demanderesse a échappé au BSP;

(4)    la demanderesse s’est cachée chez son oncle;

(5)    des agents du BSP se sont rendus au domicile de la demanderesse pour l’arrêter ce soir-là.

 

[34]           Ces éléments de l’histoire de la demanderesse sont présents dans la version des faits contenue dans les notes prises au point d’entrée ainsi que dans l’exposé circonstancié du FRP, bien que dans un ordre différent. Il semble que la demanderesse participait à un office religieux en soirée lorsque la personne qui faisait le guet a prévenu les participants de l’arrivée d’agents du BSP. Le groupe a aidé le prêtre à s’enfuir et la demanderesse s’est perdue dans la foule. La demanderesse a trouvé refuge chez son oncle. Pendant ce temps, les agents du BSP se sont rendus au domicile familial de la demanderesse pour l’arrêter ce soir-là. 

 

[35]           À mon avis, la Commission a mal interprété le témoignage de la demanderesse. À l’audience, la demanderesse a expliqué le contenu des notes prises au point d’entrée et a précisé que le soir où elle avait échappé au BSP après avoir été prévenue était celui où le BSP avait fait une descente à l’endroit où l’office avait lieu. Bien que les événements soient relatés dans un ordre chronologique différent dans l’exposé circonstancié du FRP et dans les notes prises au point d’entrée, je ne crois pas que cette divergence soit suffisante pour justifier de tirer une conclusion défavorable au sujet de la crédibilité. Je trouve compréhensible que l’ordre de la première version du récit de la demanderesse, qui contenait les éléments de la narration des faits exposés dans son FRP, soit différent de celui dans lequel elle a relatés les mêmes faits dans son témoignage.

 

[36]           Je passe maintenant à la cinquième question.

 

[37]           Cinquième question

            La Commission a-t-elle commis une erreur en ne tenant pas compte de l’identité de la demanderesse comme chrétienne et en en tirant pas de conclusion à ce sujet?

            J’en suis arrivé à la conclusion que la Commission a commis une erreur en estimant non crédible le récit de la demanderesse au sujet des faits survenus à l’occasion du service religieux du 15 août 2004, récit qui aurait contenu des éléments de preuve tendant à démontrer que la demanderesse était une chrétienne.

 

[38]           Dans le jugement Chong c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1998] A.C.F. no 999 (QL), le juge Rothstein déclare :

1.             Dans le présent contrôle judiciaire, il s'agit de déterminer si la SSR a abordé la question fondamentale, celle de savoir si le demandeur était un catholique en Chine et, en conséquence, aurait raison de craindre d'être persécuté. Les motifs de la SSR portaient sur cette partie du témoignage du demandeur que, selon la SSR, celui-ci a fabriquée pour [TRADUCTION] « embellir sa revendication ». Le tribunal n'a pas cru ces embellissements. Toutefois, elle n'a pas expressément abordé la question de savoir si le demandeur était un catholique en Chine et, en conséquence, souffrait de persécution.

2.             Le tribunal a reconnu que les autorités [TRADUCTION] « poursuivent des gens en poste dans l'église catholique romaine tels que des prêtes et des religieuses dans leur mesure de répression contre la religion ». Dans sa mention de la documentation, il existe des extraits à cet égard, mais aussi des extraits concernant des [TRADUCTION] « paysans » qui ont été condamnés à purger leur peine dans un camp de travaux forcés en 1992.

3.          Le défendeur s'appuie sur la décision Chang c. Canada (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (24 juillet 1997), Toronto, IMM-2031-96 (C.F.1re inst.). Toutefois, dans cette affaire, le tribunal a conclu que le demandeur n'avait pas eu de difficulté à pratiquer sa religion. En l'espèce, le tribunal ne dit pas expressément si elle croyait que le demandeur était un catholique pratiquant, ni si elle croyait que le demandeur avait de la difficulté en conséquence. C'était la principale question dont était saisi le tribunal. Le tribunal semble avoir rejeté la revendication du demandeur uniquement pour le motif qu'elle ne croyait pas les embellissements que, selon elle, le demandeur avait fabriqués. Il était loisible au tribunal de le faire mais, en l'espèce, on ne sait pas si le tribunal a estimé que le récit tout entier du demandeur était faux ou s'il n'a simplement pas abordé la principale question.

4.          Certes, je répugne à toucher à une décision fondée sur une conclusion de crédibilité; mais je ne suis pas convaincu qu'en l'espèce, le tribunal se soit penché sur la principale question dont il était saisi. Voir Wang c. Canada (ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (22 décembre 1997), Toronto, IMM-250-97 (C.F.1re inst.). Par mesure d'extrême prudence, j'estime que la présente demande de contrôle judiciaire devrait être accueillie et que l'affaire est renvoyée à un différant tribunal pour qu'il procède à un réexamen. Le nouveau tribunal devrait inclure dans sa détermination la question de savoir s'il croit que le demandeur était un catholique pratiquant en Chine et, dans l'affirmative, si cela lui créait des difficultés équivalant à de la persécution et s'il a, en conséquence, raison de craindre d'être persécuté.

 

[39]           Dans le jugement Chen c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (2002), 20 Imm. L.R. (3d) 238, 2002 CFPI 480, j’ai dit ce qui suit, au paragraphe 19 :

J'ai examiné la décision de la Commission, et j'en viens à la conclusion qu'elle n'a pas déterminé si la demanderesse était membre du Falun Gong. Elle n'a pas cru la demanderesse relativement à la persécution dont elle aurait été victime en Chine, mais elle ne s'est pas prononcée sur son appartenance au groupe. Or, il était nécessaire qu'elle statue sur cette question pour déterminer si la demanderesse était un réfugié au sens de la Convention. La décision n'aborde pas la question des activités du Falun Gong à Toronto. Cet élément de preuve aurait dû être pris en considération (voir Jian Jiang c. M.C.I. 2002 CFPI 64; [2002] A.C.F. no 84 (QL)). En ne tranchant pas cette question, la Commission a commis une erreur susceptible de révision.

 

[40]           En l’espèce, la Commission a conclu que la demanderesse n’était pas une chrétienne, dans le passage suivant de sa décision :

[…] C’est en me fondant sur ces conclusions cumulatives que je conclus aussi que les agents du BSP ne poursuivent pas la demandeure d’asile et qu’elle n’était pas membre d’une collectivité chrétienne clandestine en Chine qui a fait l’objet d’un raid de la part du BSP.

 

[41]           Il appert toutefois que le témoignage de la demanderesse au sujet de son appartenance à un groupe de jeunes chrétiens était crédible. Le dossier renferme par ailleurs d’autres éléments de preuve tendant à démontrer que la demanderesse était au fait des croyances chrétiennes. De plus, l’APR a déclaré ce qui suit à l’audience :

[TRADUCTION]

 

En ce qui concerne ses connaissances actuelles de la foi chrétienne et de sa fréquentation d’une église chrétienne, je n’ai pas vraiment de réserves à formuler. Elle a effectivement produit une lettre d’une église canadienne. Il semble qu’on ait eu un peu de difficulté à lui transmettre des connaissances au sujet de la foi chrétienne. J’ai constaté certains problèmes de la part de l’interprète, qui avait du mal à traduire fidèlement les interventions. Mais, dans l’ensemble, je n’ai pas de doute au sujet des connaissances qu’elle possède présentement au sujet de la foi chrétienne. Ce sont là mes observations.

 

(Dossier du Tribunal, à la page 382)

 

[42]           Il est acquis aux débats que les chrétiens sont persécutés en Chine. Comme la Commission a tiré sa conclusion que la demanderesse ne faisait pas partie de la communauté chrétienne clandestine qui avait fait l’objet d’une descente de la part du BSP sur le fondement de ses conclusions cumulatives au sujet de la crédibilité et comme une de ces conclusions − celle relative à la poursuite de la demanderesse par le BSP à l’église − a été annulée, il se peut fort bien que la Commission en vienne à une conclusion différente sur la question de savoir si la demanderesse est une chrétienne. La Commission a commis une erreur justifiant le contrôle judiciaire en écartant les autres éléments de preuve se rapportant à l’affirmation de la demanderesse suivant laquelle elle était une chrétienne.

 

[43]           Je ne vais pas aborder les autres conclusions tirées au sujet de la crédibilité.

 

[44]           La demande de contrôle judiciaire est par conséquent accueillie et l’affaire est renvoyée à la Commission pour être examinée de nouveau par un tribunal différemment constitué.

 

[45]           Aucune des parties ne souhaitait me soumettre de question grave de portée générale à certifier.


 

JUGEMENT

 

[46]           LA COUR ACCUEILLE la demande de contrôle judiciaire et RENVOIE l’affaire à un tribunal différemment constitué de la Commission pour réexamen.

 

 

 

« John A. O’Keefe »

Juge

 

Traduction certifiée conforme

Linda Brisebois, LL.B.

 


 

ANNEXE

Dispositions législatives pertinentes

 

Les dispositions législatives pertinentes sont reproduites dans la présente section.

 

Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27. :

 

96. A qualité de réfugié au sens de la Convention — le réfugié — la personne qui, craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques :

 

a) soit se trouve hors de tout pays dont elle a la nationalité et ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de chacun de ces pays;

 

b) soit, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle, ne peut ni, du fait de cette crainte, ne veut y retourner.

 

97.(1) A qualité de personne à protéger la personne qui se trouve au Canada et serait personnellement, par son renvoi vers tout pays dont elle a la nationalité ou, si elle n’a pas de nationalité, dans lequel elle avait sa résidence habituelle, exposée :

a) soit au risque, s’il y a des motifs sérieux de le croire, d’être soumise à la torture au sens de l’article premier de la Convention contre la torture;

 

b) soit à une menace à sa vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités dans le cas suivant :

 

(i) elle ne peut ou, de ce fait, ne veut se réclamer de la protection de ce pays,

 

 

(ii) elle y est exposée en tout lieu de ce pays alors que d’autres personnes originaires de ce pays ou qui s’y trouvent ne le sont généralement pas,

 

(iii) la menace ou le risque ne résulte pas de sanctions légitimes — sauf celles infligées au mépris des normes internationales — et inhérents à celles-ci ou occasionnés par elles,

 

(iv) la menace ou le risque ne résulte pas de l’incapacité du pays de fournir des soins médicaux ou de santé adéquats.

 

(2) A également qualité de personne à protéger la personne qui se trouve au Canada et fait partie d’une catégorie de personnes auxquelles est reconnu par règlement le besoin de protection.

 

96. A Convention refugee is a person who, by reason of a well-founded fear of persecution for reasons of race, religion, nationality, membership in a particular social group or political opinion,

 

 

 

(a) is outside each of their countries of nationality and is unable or, by reason of that fear, unwilling to avail themself of the protection of each of those countries; or

 

(b) not having a country of nationality, is outside the country of their former habitual residence and is unable or, by reason of that fear, unwilling to return to that country.

 

97.(1) A person in need of protection is a person in Canada whose removal to their country or countries of nationality or, if they do not have a country of nationality, their country of former habitual residence, would subject them personally

(a) to a danger, believed on substantial grounds to exist, of torture within the meaning of Article 1 of the Convention Against Torture; or

 

(b) to a risk to their life or to a risk of cruel and unusual treatment or punishment if

 

 

(i) the person is unable or, because of that risk, unwilling to avail themself of the protection of that country,

 

(ii) the risk would be faced by the person in every part of that country and is not faced generally by other individuals in or from that country,

 

(iii) the risk is not inherent or incidental to lawful sanctions, unless imposed in disregard of accepted international standards, and

 

 

 

(iv) the risk is not caused by the inability of that country to provide adequate health or medical care.

 

(2) A person in Canada who is a member of a class of persons prescribed by the regulations as being in need of protection is also a person in need of protection.

 

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM-3513-06

 

INTITULÉ :                                       LIZHEN LIN

 

                                                            et

 

                                                            MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                                            ET DE L’IMMIGRATION

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               3 mai 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              LE JUGE O’KEEFE

 

DATE DES MOTIFS :                      14 mai 2007

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Leonard Borenstein

 

POUR LA DEMANDERESSE

Anshumala Juyal

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Lewis & Associates

Toronto (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

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