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Date : 20070517

Dossier : T-1140-02

Référence : 2007 CF 528

Ottawa (Ontario), le 17 mai 2007

EN PRÉSENCE DE Madame la juge Snider

 

ACTION IN REM EN MATIÈRE D’AMIRAUTÉ

 

ENTRE :

 

INTERTECH MARINE LIMITED, personne morale

 

demanderesse

et

 

 

RICARDO MENÉNDEZ, MARIA MENÉNDEZ,

LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES

AYANT UN DROIT SUR LE YACHT « NAUTICA » et le yacht « NAUTICA »

 

défendeurs

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

[1]        Dans les motifs du jugement et jugement (Intertech Marine Ltd. c. Menéndez et al., 2006 CF 1445, 134 A.C.W.S. (3d) 1001, [2006] A.C.F. n1811 (C.F.) (QL)), rendus à la suite de l’instruction des questions en litige, la Cour a conclu que la demanderesse avait droit à une certaine réparation à l’encontre des défendeurs. Comme nous le verrons plus loin, la demanderesse n’a obtenu qu’une infime partie seulement du montant réclamé et la demande reconventionnelle des défendeurs a été rejetée.

 

[2]        Les parties ont été informées que, si elles ne parvenaient pas à s’entendre sur la question des dépens, elles pourraient présenter des observations additionnelles à la Cour. C’est ce qu’elles ont fait. Les présents motifs portent sur la question des dépens à adjuger compte tenu des circonstances exceptionnelles de l’affaire.

 

[3]        L’adjudication des dépens relève du pouvoir discrétionnaire de la Cour qui est tenue d’exercer ce pouvoir de manière judiciaire, conformément aux principes et aux facteurs énoncés au paragraphe 400(3) des Règles des Cours fédérales, DORS/98‑106. En règle générale, les dépens suivent l’issue de la cause (Merck & Co. c. Novopharm Ltd. (1998), 82 C.P.R. (3d) 457, à la page 464 (C.F. 1re inst.), 152 F.T.R. 74). Lorsque la décision favorise également les deux parties, aucune ordonnance portant adjudication des dépens ne devrait normalement être rendue (Lubrizol Corp. c. Imperial Oil Ltd. (1996), 67 C.P.R. (3d) 1, à la page 25 (C.A.F.), [1996] 3 C.F. 40, 197 N.R. 241). Cependant, le défendeur n’a pas besoin d’avoir gain de cause à la fois dans sa défense et dans sa demande reconventionnelle pour avoir droit à ses dépens; s’il a gain de cause dans l’action principale, il a droit aux dépens (Illinois Tool Works Inc. c. Cobra Anchors Co., 2003 CAF 358, au paragraphe 11, 312 N.R. 184, 29 C.P.R. (4th) 417).

 

[4]        Dans la présente espèce, les défendeurs ont obtenu gain de cause contre la demanderesse sur presque toutes les questions. La Cour a accordé une somme de 13 273,71 $ qui correspond à moins de 6 p. 100 de la somme de 247 773,77 $ que réclamait initialement la demanderesse. Elle a conclu qu’en raison de l’adjudication de la somme de 13 273,71 $, la saisie du navire était légitime. Les défendeurs n’ont donc pas eu gain de cause dans leur demande reconventionnelle qui se fondait sur la légitimité de la saisie. Cependant, si on examine l’ensemble de la décision de la Cour, on constate qu’elle ne favorise pas également les parties; en fin de compte, la demanderesse a perdu sur presque toutes les questions en litige. Par conséquent, les dépens devraient être adjugés aux défendeurs.

 

[5]        La demanderesse invoque la décision CCH Canadienne Ltée. c. Le Barreau du Haut‑Canada (2000), 184 D.L.R. (4th) 186, 4 C.P.R. (4th) 129 (C.F. 1re inst.), pour faire valoir que chaque partie devrait assumer ses propres dépens. J’estime qu’il est facile de faire une distinction entre cette décision et la présente espèce. En tirant sa conclusion dans la décision CCH, précitée, le juge Gibson a dit au paragraphe 13 « je mets un accent particulier sur les facteurs suivants : le fait que le résultat de l’instance soit partagé, la complexité de certaines des questions juridiques et l’absence d’orientation jurisprudentielle canadienne en ce qui a trait à certaines de ces questions et, enfin, l’intérêt public lié au fait que ces actions fassent l’objet d’un débat judiciaire ». Cependant, les questions dont j’ai été saisi en l’espèce n’étaient pas complexes; la Cour était plutôt saisie d’un différend contractuel relativement simple entre deux parties, lequel ne soulevait aucune question d’intérêt public.

 

[6]        Le comportement des parties tout au long du litige constitue également un facteur pertinent. Il ressort de l’examen du dossier de la Cour que la demanderesse n’a pas poursuivi le litige avec la vigueur et l’intérêt auxquels on se serait attendu. Même si les délais ne constituent peut-être pas un abus de procédure, le fait est que le litige a été inutilement prolongé à cause des actes et des omissions de la demanderesse, provoquant ainsi l’augmentation des dépens des défendeurs. Ce facteur joue en faveur des défendeurs.

 

[7]        Vu les circonstances exceptionnelles de la présente espèce, je suis disposé à accorder une somme globale au lieu des dépens taxés ainsi que le permet le paragraphe 400(4) des Règles des Cours fédérales et à ordonner que les dépens adjugés soient soustraits des sommes dues à la demanderesse par suite de mon jugement. En ce qui concerne l’aspect pratique de la présente espèce, il est important de souligner que la demanderesse est une société dissolue. Il est donc peu probable que les défendeurs seront en mesure de recouvrer les dépens qui leur auront été adjugés ou les dépens supplémentaires liés à une taxation des dépens. L’intérêt de la justice sera mieux servi par l’adjudication d’une somme globale et cela permettra aux parties d’accélérer la résolution de l’affaire.

 

[8]        Je n’ai pas à ma disposition le mémoire de dépens des défendeurs avec les montants exacts et les pièces justificatives. Je souligne cependant que, dans sa réponse aux observations des défendeurs sur les dépens, la demanderesse n’a pas contesté leur affirmation selon laquelle [traduction] « les dépens réels des défendeurs, s’ils étaient taxés, dépasseraient largement la somme de 27 000 $ ». Je suis d’accord avec cette affirmation; compte tenu des faits de l’espèce, la somme de 27 000 $ constituerait une somme globale raisonnable et prudente et je vais exercer mon pouvoir discrétionnaire et l’accorder.

 

[9]        Ainsi que je l’ai déjà indiqué, après l’instruction du présent litige, j’ai statué que la demanderesse avait droit de :

 

  • recouvrer la somme de 13 273,71 $;

 

  • recouvrer les dépenses qu’elle avait raisonnablement engagées pour l’entreposage, les assurances, le déplacement et les autres dépenses relativement à la saisie du yacht Nautica;

 

  • recouvrer l’intérêt couru entre le 1er octobre 2001 et la date du jugement.

 

[10]      Le montant de 27 000 $ adjugé aux défendeurs au titre des dépens devra être déduit de tout autre montant auquel la demanderesse a droit en vertu du jugement. La demanderesse soutient que les dépenses qu’elle a engagées pour l’entreposage, les assurances, le déplacement et les autres dépenses s’élèvent à 20 810,94 $. Bien que je n’aie aucune raison de penser que ces montants ne sont pas raisonnables, je constate également que les défendeurs n’ont pas fait d’observations au sujet de ces calculs. Je suis certain que les parties seront en mesure, sans l’intervention de la Cour, de parvenir à un accord sur ce chiffre et sur l’intérêt exigible. Si cela n’est pas le cas, je resterai saisi de l’affaire.


 

ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE :

 

  1. Les dépens, établis à 27 000 $, sont adjugés aux défendeurs.

 

  1. Les dépens de 27 000 $ devront être déduits des montants adjugés à la demanderesse lors de l’action, à savoir :

 

    1. la somme de 13 273,71 $;

 

    1. le montant des dépenses qu’elle a raisonnablement engagées pour l’entreposage, les assurances, le déplacement et les autres dépenses relativement à la saisie du yacht Nautica, lequel montant ne doit pas dépasser 20 810,94 $;

 

    1. l’intérêt couru entre le 1er octobre 2001 et la date du jugement.

 

 

 


 

  1. Si les parties ne parviennent pas à un accord au sujet du montant net ayant été adjugé, elles peuvent présenter des observations additionnelles à la Cour, pourvu que lesdites observations soient présentées au plus tard le 30 juin 2007.

 

          « Judith A. Snider »

_______________________

                    Juge

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Suzanne Bolduc, LL.B.

 

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

Dossier :                                                             T-1140-02

 

INTITULÉ :                                                           INTERTECH MARINE LIMITED

c.

RICARDO MENÉNDEZ et al.

 

AFFAIRE JUGÉE SUR DOSSIER :                    Ottawa (Ontario)

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                                           La JUGE SNIDER

 

DATE DES MOTIFS :                                          Le 17 mai 2007

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Boyne Clarke

Dartmouth (Nouvelle‑Écosse)                                   POUR LA DEMANDERESSE

 

Wheeler Serbu

Dartmouth (Nouvelle‑Écosse)                                   POUR LES DÉFENDEURS

 

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