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Date :  20070531

Dossier :  T-597-06

Référence :  2007 CF 560

Ottawa (Ontario), le 31 mai 2007

En présence de Monsieur le juge Shore 

 

ENTRE :

LES PEINTRES FILMAR INC.

demanderesse

et

 

AGENCE DU REVENU DU CANADA

défenderesse

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

APERÇU

[1]               La vérité est non équivoque! Si elle n’est pas entière, elle ne peut pas être qualifiée comme vérité. Personne possède toute la vérité, mais ce que la personne possède, doit être transmise pour être qualifié comme sa vérité; sans cela, quelle personne ou dans cette même veine quelle entité gouvernementale pourrait avoir confiance dans son contenu.

 

[2]               En dévoilant ou en corrigeant ses explications concernant sa vérité, ou ce qu’elle connaît, une personne, ou une entité corporative, n’est pas blâmée pour ce qu’elle avoue mais plutôt pour ce qui passe sous son silence. Simplement, au niveau de sa divulgation volontaire, ce ne sont pas ses paroles qui la responsabilise mais plutôt ses actes, reliés à la preuve, que par eux-mêmes, l’expose à ce qu’elle a connu et qu’elle n’a pas dévoilé au complet, si cela s’avère. Devant cette Cour, à ce stade, c’est uniquement la raisonnabilité de la décision, refusant de donner suite à la divulgation volontaire, en elle-même, qui est envisagée et non le résultat final pesant les propos de cette divulgation volontaire.

 

[3]               Le ministre du Revenu national est autorisé à annuler ou à renoncer à des pénalités en vertu du paragraphe 220 (3.1) de la Loi de l’impôt sur le revenu, L.R.C. 1985, ch.1, (5e Suppl.) (L.I.R), et l’alinéa 900 (4)b) du Règlement de l’impôt sur le Revenu, C.R.C., c. 945, eu égard aux critères exposés dans le Circulaire IC00-IR (Circulaire) et les Lignes directrices de l’Agence du Revenu du Canada.

 

[4]               Le Programme des divulgations volontaires (PDV) est une initiative en matière d’équité qui permet aux contribuables de corriger les renseignements inexacts ou incomplets ou de fournir des renseignements qui n’ont pas été déclarés, sans encourir une pénalité ou une poursuite en justice.

 

[5]               Le but de ce programme est de promouvoir l’observation volontaire de la déclaration et du paiement des droits et taxes prévus en vertu, entre autres, de la L.I.R. Le PDV encourage les contribuables à prendre l’initiative de corriger toute anomalie afin de respecter leurs obligations légales.

 

INTRODUCTION

[6]               L’objet recherché par la demande de contrôle judiciaire initiée par la Demanderesse le 3 avril 2006 est de « déclarer nulle et illégale » la « décision rendue le 2 mars 2006 (...) par M. Guy Gohier, Chef des Appels, Bureau des services fiscaux de Montréal... » aux termes de laquelle celui-ci refusait de donner suite à la divulgation volontaire proposée par la Demanderesse, au motif que celle-ci n’était pas complète. (Chap. I et II, Demande de contrôle judiciaire, 3 avril 2006; Pièce N, Affidavit de Eugene Cirillo, 3 mai 2006.)

 

[7]               La question est donc uniquement de savoir si, ce faisant, le Chef des Appels, a exercé de manière raisonnable la discrétion qui lui est conférée par les articles 200 (3.1) de la L.I.R., et l’alinéa 900 (4)b) du Règlement de l’impôt sur le revenu, eu égard aux critères exposés dans la Circulaire ICOO-IR et les Lignes directrices. (Pièces O et P, Affidavit de Eugene Cirillo; Litmar Ltd. c. Canada (Agence des douanes et du revenue), 2006 CF 635, [2006] A.C.F. no 814 (QL).)

 

[8]               Cette Cour est sans compétence, aux termes des pouvoirs qui lui sont conférés par l’article 18.1 de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.1985, ch. F-7, pour réviser judiciairement toute autre décision que les préposés du ministre ont pu prendre dans l’exercice de leurs fonctions, notamment et sans en limiter la généralité : celle de « procéder à la Division des enquêtes spéciales » ou celle de « poursuivre son enquête criminelle ». (Chap. III, Demande de contrôle judiciaire, 3 avril 2006.)

PROCÉDURE JUDICIAIRE

 

[9]               Il s’agit d’une requête demandant à la Cour de rendre une ordonnance provisoire en vertu de l’article 18.2 de la Loi sur les Cours fédérales, visant à empêcher la Défenderesse de cotiser des pénalités en vertu du paragraphe 163(2) de la L.I.R., de poursuivre son enquête criminelle ou de déposer des plaintes jusqu’à ce qu’une décision définitive soit rendue dans cette affaire.

 

[10]           En outre, il s’agit d’une requête demandant à la Cour de rendre une ordonnance pour qui lui soit transmise la totalité des documents en la possession de la Défenderesse et qui ne lui ont pas été envoyés en réponse à la demande transmise par la Demanderesse conformément à la Règle 317 des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106. De ce fait, la Demanderesse demande une prorogation du délai prévu à la Règle 309 des Règles des Cours fédérales pour la signification du dossier de la Demanderesse de 30 jours de la date où cette dernière aura reçu la transmission des documents.

 

[11]           De surcroît, la Demanderesse demande à la Cour de lui accorder les dépens relativement à cette requête.

 

FAITS

[12]           Le 18 février 2003, la Demanderesse, les Peintres Filmar Inc., communique avec la Division des appels du Bureau des services fiscaux de Montréal de l’Agence du Revenu du Canada dans le but de se prévaloir du PDV, le tout de façon anonyme.

[13]           Alentour du 18 mars 2003, la Division de la Vérification des petites et moyennes entreprises du Bureau des services fiscaux communique avec la Demanderesse l’informant de son intention de procéder à une vérification. La Demanderesse l’avise qu’une divulgation volontaire est déjà en cours. La Défenderesse décide de procéder à une vérification nonobstant la divulgation volontaire en cours.

 

[14]           Le 14 avril 2003, la Demanderesse transmet, dans le cadre du PDV, un sommaire de factures totalisant 166 953, 46 $ et couvrant les années civiles 1999 à 2001. Le 26 janvier 2004, la Demanderesse envoie, dans le cadre du PDV, une copie des factures listées au sommaire. Elle ne fut pas informée au préalable que la Défenderesse refuse la divulgation volontaire au motif que la Demanderesse s’est déjà prévalue du PDV.

 

[15]           Le 22 mars 2004, la Division de la vérification des petites et moyennes entreprises transfère le dossier de la Demanderesse, à son insu, à la Division des enquêtes spéciales au motif que la divulgation volontaire est incomplète puisqu’un montant de 35 865 $ (taxes incluses) est omis dans la divulgation volontaire.

 

[16]           Au cours d’une rencontre tenue le 25 mars 2004, l’agent responsable du dossier de la Demanderesse l’informe qu’il ne peut retenir son dossier comme divulgation volontaire parce qu’elle est incomplète.

 

[17]           La Demanderesse allègue qu’elle n’a jamais eu l’opportunité d’expliquer les écarts qui lui sont reprochés. Plutôt, au terme d’une rencontre tenue avant le 22 mars 2004 entre la Division de la vérification des petites et moyennes entreprises et la Division des appels de la Défenderesse, la décision fut prise de transférer le dossier à la Division des enquêtes spéciales à l’issue de la vérification.

 

[18]           Le 5 juillet 2004, la Demanderesse reçoit une lettre de la Défenderesse l’informant, d’une part, que son dossier est refusé dans le cadre du PDV et d’autre part, qu’elle peut demander un deuxième examen auprès de la Directrice du Bureau des services fiscaux.

 

[19]           Le 20 septembre 2005, la Défenderesse procède à l’exécution de cinq mandats de perquisition aux termes des renseignements obtenus.

 

[20]           Le 28 novembre 2005, la Demanderesse demande à la Directrice du Bureau des services fiscaux de procéder à un deuxième examen impartial de son dossier. Le 2 mars 2006, le Chef des Appels rend une décision aux termes de laquelle il refuse d’accepter la demande d’annulation ou de renonciation de pénalités faite par la Demanderesse dans le cadre du PDV. La Demanderesse reçoit cette lettre le 8 mars 2006.

 

[21]           Le 3 avril 2006, la Demanderesse présente une demande de contrôle judiciaire de la décision rendue le 2 mars 2006. Premièrement, la demande vise à déclarer nulle et illégale la décision et de renvoyer le dossier à la Défenderesse. Deuxièmement, la demande vise une déclaration que la Défenderesse a agi sans compétence, ou outrepassé celle-ci en refusant la demande de la Demanderesse en vertu du PDV. Finalement, la demande vise à rendre une ordonnance aux termes du paragraphe 24 (1) de la Charte canadienne des droits et libertés, Partie I, Annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada, 1982, ch. 11 (R.-U) (Charte), déclarant que la décision viole les droits de la Demanderesse qui lui sont garantis par la Charte.

Le 7 juillet 2006, la Demanderesse présente une requête en vertu de l’article 18.2 de la Loi sur les Cours fédérales qui fait l’objet du présent litige.

 

DÉCISION CONTESTÉE

[22]           Ayant conclu que la condition à l’effet que la demande de divulgation volontaire de la Demanderesse, Les Peintres Filmar Inc., est incomplète, le Bureau des services fiscaux de Montréal rejette la demande de deuxième examen impartial du dossier de divulgation volontaire de la Demanderesse.

 

QUESTION EN LITIGE

[23]           La requête de la Demanderesse vise essentiellement trois choses :

(1) La prolongation du délai prévu à la règle 309 des Règles des Cours fédérales prévoyant la signification et le dépôt du dossier de la Demanderesse;

(2) L’obtention d’une ordonnance provisoire en vertu de l’article 18.2 de la Loi sur les Cours fédérales afin d’empêcher la Défenderesse de cotiser des pénalités, poursuivre son enquête criminelle ou de déposer des plaintes jusqu’à ce qu’une décision définitive soit rendue dans cette affaire;

(3) L’obtention d’une ordonnance visant à ce que la totalité des documents en la possession de la Défenderesse et qui ne lui ont pas été transmis le soient, en l’occurrence :

·        une copie des écrans informatiques identifiant les motifs de sélection pour vérification et se trouvant au dossier de vérification;

·        autres documents pour lesquels la Défenderesse s’oppose à leur transmission, à savoir, la copie complète du dossier des enquêtes spéciales et la copie complète des nombreux échanges entre les divisions des appels, de la vérification et le bureau de la directrice dans le cadre du deuxième examen impartial de la Demanderesse.

PDV

[24]           Le ministre du Revenu national est autorisé à annuler ou à renoncer à des pénalités en vertu du paragraphe 220 (3.1) de la L.I.R et l’alinéa 900 (4)b) du Règlement de l’impôt sur le Revenu, eu égard aux critères exposés dans le Circulaire et les Lignes directrices de l’Agence du Revenu du Canada.

 

[25]           Le PDV est une initiative en matière d’équité qui permet aux contribuables de corriger les renseignements inexacts ou incomplets ou de fournir des renseignements qui n’ont pas été déclarés, sans encourir une pénalité ou une poursuite en justice.

 

[26]           Le but de ce programme est de promouvoir l’observation volontaire de la déclaration et du paiement des droits et taxes prévus en vertu, entre autres, de la L.I.R. Le PDV encourage les contribuables à prendre l’initiative de corriger toute anomalie afin de respecter leurs obligations légales.

 

[27]           L’Agence du revenu permet aux contribuables d’éviter des pénalités lorsque les conditions énoncées au Circulaire sont réunies. Afin qu’une divulgation volontaire soit valide, elle doit remplir quatre conditions, à savoir, être volontaire, être complète, comprendre une pénalité et contenir des renseignements dont la production est en retard d’au moins un an.

 

[28]           Selon le paragraphe 6b) du Circulaire, même si les renseignements fournis dans une divulgation doivent être essentiellement complets, une divulgation ne sera pas disqualifiée simplement parce qu’elle contient des erreurs ou des omissions mineures. Aux termes du paragraphe 8.4 des Lignes directrices, la détermination à savoir si une divulgation est complète ou non doit prendre en considération les efforts qu’a fait un contribuable pour donner les informations les plus justes et complètes. Si la divulgation est essentiellement complète, elle sera considérée complète. Selon les Lignes directrices du PDV, pour déterminer si une omission est matérielle pour une année donnée, la Défenderesse doit prendre en compte la totalité des omissions et le montant original divulguée par la Demanderesse.

 

[29]           En outre, les Lignes directrices stipulent, pour ce qui est de la détermination du caractère complet ou incomplet d’une divulgation volontaire, ce qui suit :

·        Dans de nombreux cas, l’agent du PDV sera en mesure de déterminer si la divulgation est complète ou non. Cependant, en cas de doute à ce sujet, la divulgation devrait être acheminée à la V et E pour que celle-ci procède à une validation ultérieure ou à une vérification et recommande une position concernant l’acceptation de la divulgation comme complète. Dans certaines situations, l’agent du PDV et le vérificateur peuvent juger utile de discuter d’un cas. Dans tous les cas, la V et E doit informer l’agent du PDV des résultats et lui fournir le rapport de vérification. Même si la recommandation de la V et E doit être prise en considération, c’est aux Appels que revient la décision définitive de décider si une divulgation est complète.

 

[30]           Aux termes du paragraphe 10.3 des Directives du PDV, si un contribuable est en désaccord avec une décision et croit que la Défenderesse n’a pas exercé son pouvoir discrétionnaire de façon juste et raisonnable, le contribuable doit s’adresser, par écrit, au Directeur du bureau des services fiscaux approprié pour un second examen impartial.

 

CADRE LÉGISLATIF

[31]           L’article 18. 2 de la Loi sur les Cours fédérales se lit comme suit :

18.2      La Cour fédérale peut, lorsqu'elle est saisie d'une demande de contrôle judiciaire, prendre les mesures provisoires qu'elle estime indiquées avant de rendre sa décision définitive.

18.2      On an application for judicial review, the Federal Court may make any interim orders that it considers appropriate pending the final disposition of the application.

 

 

[32]           Les trois conditions pour l’octroi d’une ordonnance provisoire aux termes de l’article 18.2 de la Loi sur les Cours fédérales sont les suivants : i) l’existence d’une question sérieuse à juger; ii) un préjudice irréparable de la part de la Demanderesse si l’ordonnance provisoire n’est pas rendue; iii) la prépondérance des inconvénients. (R.J.R. - MacDonald Inc. c. Canada (Procureur général), [1994] 1 R.C.S. 311, [1994] A.C.S. no 17 (QL).)

 

[33]           En outre, une ordonnance provisoire de la nature d’une suspension d’instance ou d’un sursis sera accordée dans la mesure où, si elle n’est pas rendue, une demande de contrôle judiciaire deviendrait inefficace ou théorique. (Capital Vision Inc. c. Canada (Ministre du Revenu national – M.R.N.), [2000] A.C.F. no 954 (QL).)

 

Octroi d’une ordonnance provisoire

i)    Question sérieuse à juger

[34]           La Demanderesse a le fardeau d’établir l’existence d’une question sérieuse à juger. Selon les tribunaux, pour qu’une procédure soulève une question sérieuse à juger, celle-ci ne doit pas être frivole ou vexatoire. Ces exigences minimales ne sont pas élevées. (R.J.R. - MacDonald, ci-dessus.)

 

[35]           La Demanderesse allègue qu’il existe une question sérieuse à juger, à savoir si :

a)   La Défenderesse a agi sans compétence, ou outrepassé celle-ci, en refusant de considérer complète la divulgation volontaire de la Demanderesse;

b)   La décision de la Défenderesse viole les droits de la Demanderesse qui lui sont garantis par la Charte;

c)   La Défenderesse n’a pas exercé les règles de justice naturelle ou d’équité procédurale;

d)   La décision de la Défenderesse est manifestement déraisonnable dans les circonstances.

 

ii)   Préjudice irréparable

[36]           La Demanderesse prétend qu’elle subira un préjudice irréparable si l’ordonnance provisoire n’est pas accordée puisque la demande de contrôle judiciaire devant cette Cour deviendrait théorique et inefficace. Avant que cette Cour n’ait eu l’opportunité de se prononcer sur le bien-fondé de la demande, la Demanderesse pourrait se voir imposer des pénalités civiles et des amendes criminelles prévues aux articles 163(2) et 239 de la L.I.R. Si des plaintes sont déposées contre la Demanderesse, sans qu’elle soit trouvée coupable, elle perdrait également le droit à la protection de la confidentialité des informations et à la vie privée promis dans le cadre du PDV. (Capital Vision, ci-dessus.)

 

 

iii)   Prépondérance des inconvénients

[37]           La Demanderesse allègue que la balance des inconvénients favorise l’octroi de l’ordonnance provisoire puisque la Défenderesse ne subirait aucun préjudice si l’ordonnance est accordée. D’une part, il n’existe aucun délai à l’intérieur duquel de ministre du Revenu national doit cotiser lorsqu’une pénalité en vertu du paragraphe 163(2) de la L.I.R. s’applique. D’autre part, la Cour a amplement le temps de se prononcer sur la demande avant que le dépôt des plaintes ne devienne prescrit. Par conséquent, seule la Demanderesse subirait un préjudice si l’ordonnance n’est pas accordée.

 

Documents (Selon la Demanderesse)

[38]           La Demanderesse allègue que les documents en possession de la Défenderesse et qui ne lui ont pas été envoyés en réponse à sa demande de transmission conformément à la Règle 317 des Règles des Cours fédérales sont nécessaires à la préparation du dossier de la Demanderesse.

 

[39]           En outre, la Demanderesse soumet qu’en ce qui a trait aux autres documents demandés dans l’Avis de demande et pour lesquels la Défenderesse s’oppose à leur transmission alléguant comme motif que les documents et informations demandés sont des informations protégées en vertu du privilège de l’enquête en cours, ces documents ne sont assujettis à aucun privilège empêchant la Demanderesse de les obtenir dans le cadre de sa Demande devant la Cour.

 

[40]           À ce titre, la Demanderesse prétend qu’une partie des documents transmis confirme qu’il y a eu de nombreux échanges entre les divisions des appels, de la vérification et le bureau de la directrice dans le cadre du deuxième examen impartial de la Demanderesse et donc, que la Défenderesse ne peut alléguer un privilège alors que certains des intervenants ne font pas partie d’un organisme d’enquête.

 

Prorogation du délai (Selon la Demanderesse)

[41]           La Demanderesse allègue qu’une prorogation du délai pour déposer son dossier auprès de cette Cour est nécessaire dans la mesure où d’autres documents devaient lui être fournis par la Défenderesse.

 

Prorogation du délai (Selon la Défenderesse)

[42]           La Défenderesse ne s’oppose pas à cette demande.

 

Documents (Selon la Défenderesse)

[43]           La Défenderesse allègue que tous les copies des écrans informatiques identifiant les motifs de sélection pour vérification et se trouvant au dossier de vérification ont été transmises à la Demanderesse sauf une copie qui est joint à l’Annexe A des prétentions de la Défenderesse.

 

[44]           En ce qui a trait aux autres documents (voir propos, ici-bas)

 

CONCLUSION

Octroi d’une ordonnance provisoire

i)    Question sérieuse à juger

[45]           La Cour est d’accord avec les deux parties qu’il existe une question sérieuse à juger.

 

ii)   Préjudice irréparable

[46]           La Demanderesse ne saurait en l’espèce subir un préjudice irréparable du fait qu’elle puisse faire l’objet d’une enquête criminelle, d’autant plus que cette enquête porte de toute évidence sur des faits qui n’ont aucune pertinence pour résoudre la question de savoir si le Chef des Appels a raisonnablement exercé la discrétion qui lui est conférée par la L.I.R. D’autant plus, la Demanderesse conserve le droit d’exercer tous les droits qui lui sont conférés par le Code criminel, L.R.C. 1985, c. C-46, s’il advenait que des accusations criminelles soient éventuellement déposées contre elle, y compris celui de soutenir que la preuve recueillie dans le cadre de l’enquête l’a été de manière non conforme aux garanties incluses dans la Charte, si telle est le cas.

 

[47]           Par ailleurs, la Demanderesse ne subit aucun préjudice irréparable du fait que les pénalités prévues à la L.I.R. pourraient lui être imposées sur des sommes qu’elle a omis de divulguer ou sur des éléments que l’enquête pourrait éventuellement révéler, d’autant plus, qu’elle conserve le droit d’exercer les droits qui lui sont conférés par les dispositions pertinentes de la L.I.R. à l’égard des cotisations qui pourraient lui être émises dans l’application régulière de la L.I.R.

iii)   Prépondérance des inconvénients

[48]           La balance des inconvénients penche du côté de la Défenderesse s’il advient qu’une ordonnance soit prononcée par la Cour lui enjoignant de transmettre à la Demanderesse la « copie complète du dossier des enquêtes spéciales » et la « copie complète du dossier de Mme Carole (Gouin) incluant toute communication entre cette dernière, ou une adjointe se rapportant à celle-ci et la division des enquêtes spéciales ». Un justiciable faisant l’objet d’une enquête criminelle n’a pas en soi le droit de participer activement à la recherche de la preuve avec l’enquêteur en vue de déterminer s’il a commis une infraction criminelle. La Demanderesse n’a conséquemment aucunement le droit, hors le processus prévu au Code criminel, d’obtenir, à l’avance, la communication de la preuve recueillie à un moment donné, et encore moins obtenir de la Cour une telle ordonnance, avant même que l’enquête ne soit complétée et que des accusations ne soient déposées. (R. c. Stinchcombe, [1991] 3 R.C.S. 326, [1991] A.C.S. no 83 (QL); Canada (Procureur général) c. O’Neill, [2005] O.J. no 2130.)

 

[49]           Il en serait de même d’interrompre l’enquête criminelle de la Défenderesse ou de déposer des plaintes jusqu’à ce qu’une décision définitive soit rendue dans cette affaire puisque ceci aurait pour effet d’empêcher le Ministre d’exercer les droits et devoirs qui lui sont conférés par la L.I.R. alors qu’il n’existe aucun lien entre l’action entreprise et le caractère raisonnable ou non pour le Chef des Appels d’avoir pris sa décision des seuls éléments au dossier.

 

[50]           La Cour rejette la requête de la Demanderesse et rejette également les « réparations » recherchées dans l’avis de requête.

 


JUGEMENT

 

LA COUR ORDONNE que

1)         La requête de la Demanderesse soit rejetée et également que les réparations recherchées dans l’avis de requête soient rejetées;

2)         Le tout avec dépens.

 

« Michel M.J. Shore »

Juge


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        T-597-06

 

INTITULÉ :                                       LES PEINTRES FILMAR INC.

                                                            c. AGENCE DU REVENU DU CANADA

 

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               le 20 mars 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              LE JUGE SHORE

 

DATE DES MOTIFS :                      le 31 mai 2007

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Me Josée Vigeant

 

POUR LA DEMANDERESSE

Me Jean Lavigne

 

POUR LA DÉFENDERESSE)

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

HEENAN BLAIKIE

Montréal (Québec)

POUR LA DEMANDERESSE

 

JOHN H. SIMS, c.r.

Procureur général du Canada

 

 

POUR LA DÉFENDERESSE

 

 

 

 

 

 

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