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Date : 20070606

Dossier : T-1015-05

Référence : 2007 CF 597

Ottawa (Ontario), le 6 juin 2007

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE BLAIS

 

 

ENTRE :

 

TIMOTHY C. HAMM

demandeur

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE

défenderesse

 

 

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

[1]               Il s’agit de deux requêtes distinctes pour obtenir un jugement sommaire, présentées par le demandeur dans l’action, Timothy C. Hamm (le demandeur), en vertu de la règle 213(1) des Règles de la Cour fédérale, DORS/98-106, et par la défenderesse dans l’action, Sa Majesté la Reine du chef du Canada (la défenderesse), en vertu de la règle 213(2) des Règles de la Cour fédérale. Subsidiairement, chaque partie demande la radiation de parties des actes de procédure de l’autre partie, en vertu de la règle 221 des Règles de la Cour fédérale.

 

LE CONTEXTE

[2]               Le demandeur a été membre de la Police militaire des Forces canadiennes de 1990 jusqu’à sa libération officielle le 18 mai 2005. Toutefois, pendant les trois années précédant cette date, le demandeur a été en congé continu pour cause de stress.

 

[3]               La présente action intentée par le demandeur découle du préjudice qu’il allègue avoir subi par suite de son arrestation et de sa détention le 12 décembre 2000, alors qu’il était en congé de maladie pour des motifs reliés au stress. En particulier, le demandeur allègue qu’il a subi un préjudice sur le plan de ses perspectives de carrière, de même que des effets préjudiciables sur sa santé mentale.

 

[4]               Le 12 décembre 2000, vers 10 h, le demandeur a reçu un appel téléphonique de son supérieur immédiat, le sergent Rice, l’informant qu’il devait se préparer à être déployé à Inuvik le 26 décembre 2000. Le ton et la teneur exacts de cette conversation sont controversés. Le demandeur allègue qu’il a dit au sergent Rice qu’il était en congé de maladie, que le ton s’est durci, et que le sergent Rice l’a alors informé que s’il recevait l’ordre de partir en déploiement, il devrait obéir ou il serait emprisonné. Le demandeur allègue ensuite que le sergent Rice a employé des blasphèmes et que le demandeur a raccroché le combiné en guise de réponse. Pour sa part, la défenderesse allègue qu’au cours de cette conversation, le demandeur a été irrespectueux et grossier envers le sergent Rice et qu’en fin de compte il a refusé de partir, ou subsidiairement, qu’il a refusé de reconnaître son obligation d’effectuer ce déploiement et qu’il a raccroché au nez de son officier supérieur. La défenderesse soutient que le sergent était au courant que le demandeur était en congé de maladie, mais qu’il ne connaissait pas la raison de ce congé, et qu’à aucun moment au cours de la conversation le demandeur n’a révélé la nature de la maladie ni évoqué quelque motif médical que ce soit qui pourrait empêcher son déploiement à Inuvik.

 

[5]               Peu de temps après, deux policiers militaires collègues du demandeur ont été envoyés à sa maison avec comme instructions de transmettre au demandeur un ordre de se rapporter au sergent Rice pour des mesures administratives ou disciplinaires, et de l’arrêter s’il refusait. Le demandeur leur a dit qu’il était en congé de maladie et n’avait pas à aller au travail; son médecin, à qui il a téléphoné, a dit la même chose. Le demandeur a alors été mis en état d’arrestation et a été conduit au poste de garde. Le demandeur soutient qu’on ne l’a jamais informé du motif de son arrestation. Une fois rendu là, il a été conduit au bureau du sergent Rice, où la défenderesse allègue qu’il a continué à faire preuve d’insubordination et est allé jusqu’à refuser d’obéir à un ordre direct de rester au garde-à-vous, commettant ainsi d’autres infractions militaires. Il a été gardé là jusqu’à 13 h : il a alors été informé que l’adjudant-chef Gauvin le « désarrêtait ». Lorsque le sergent Rice a appris que le congé de maladie du demandeur était relié au stress, il a prié le demandeur de l’excuser pour ses actes lors d’une rencontre dans le bureau de l’adjudant‑chef Gauvin.

 

[6]               À la suite d’une plainte déposée par l’adjudant Hamm, le frère du demandeur, auprès du grand prévôt adjoint (Normes professionnelles) (GPA NP), le Service national des enquêtes des Forces canadiennes (SNEFC) a ouvert une enquête le 19 décembre 2000, pour déterminer si les circonstances décrites dans la plainte révélaient la perpétration d’infractions criminelles ou militaires par des membres de la Police militaire. L’enquête du GPA NP a été tenue en suspens en attendant la conclusion de l’enquête du SNEFC.

 

[7]               Le 8 juillet 2001, le SNEFC a conclu qu’il n’y avait aucun élément de preuve étayant les allégations de subornation de témoins visant l’adjudant-chef Gauvin et les deux policiers militaires qui avaient arrêté le demandeur. Cependant, le SNEFC a conclu que le sergent Rice devrait être accusé d’un chef de négligence préjudiciable au bon ordre et à la discipline, en contravention de l’alinéa 129(2)b) de la Loi sur la défense nationale, L.R.C. 1985, c. N-5, pour avoir contrevenu aux règlements en omettant de s’assurer que le commandant du demandeur avait ordonné le rappel au service de ce dernier le 12 décembre 2000. Le sergent Rice a par la suite été accusé et a vu ses attestations suspendues pendant 10 mois.

 

[8]               Le 21 février 2002, le rapport d’enquête du GPA NP a conclu que les éléments de preuve n’étayaient aucune des allégations formulées contre les militaires nommés (le sergent Rice, l’adjudant-chef Gauvin, le caporal-chef Paul et le caporal Murray), mais il s’est montré critique à l’égard de l’adjudant Hamm, et très critique à l’endroit du demandeur. Le GPA NP a conclu que le demandeur avait contrevenu aux alinéas 4h) et 4l) du Code de déontologie de la police militaire, en communiquant à son frère des renseignements trompeurs sur lesquels ce dernier s’était fondé pour porter les plaintes.

 

[9]               Le 15 avril 2002, le GPA NP a ordonné la suspension des attestations de policier militaire du demandeur.

 

[10]           Le 30 avril 2002, l’adjudant Hamm a demandé à la Commission d’examen des plaintes concernant la police militaire (CEPPM) d’examiner l’enquête du GPA NP et l’enquête du SNEFC. Le 15 mai 2002, le demandeur a aussi déposé une plainte auprès de la CEPPM concernant son arrestation le 12 décembre 2000, l’enquête du GPA NP et les mesures subséquentes que le GPA NP avait prises contre lui. Le 30 décembre 2002, la présidente de la CEPPM a choisi de procéder par voie d’enquête dans l’intérêt public et d’établir un rapport sans tenir une audience formelle.

 

[11]           Le 1er octobre 2002, le ministère des Anciens combattants a accordé une pension d’invalidité militaire au demandeur en vertu du paragraphe 39(1) de la Loi sur les pensions, L.R.C., c. P-6, en fonction d’une invalidité évaluée à 40 pour cent. L’octroi de cette pension se fondait sur le syndrome de stress post-traumatique (SSPT) allégué par le demandeur, relié en partie, selon ses dires, à du harcèlement et à de mauvais traitements qu’il aurait subis dans son milieu de travail. La pension a été octroyée rétroactivement au 12 juillet 2002.

 

[12]           Le 27 novembre 2002, la Direction des carrières militaires du Quartier général de la Défense nationale a autorisé la promotion du demandeur au rang de caporal-chef, mais il a été décidé qu’il serait sursis à la promotion jusqu’à ce que la suspension des attestations de policier militaire du demandeur soit réglée. Le demandeur n’a pas été informé de la promotion et ne l’a apprise que le 27 janvier 2005, ou vers cette date, alors qu’il examinait des documents communiqués à la suite d’une demande faite en vertu de la Loi sur l’accès à l’information, L.R.C. 1985, c. A-1.

 

[13]           Le 16 septembre 2003, un juge-arbitre, Pensions, du ministère des Anciens combattants a confirmé l’octroi de la pension. Par la suite, le demandeur a présenté des éléments de preuve additionnels en vue d’obtenir une augmentation de la pension d’invalidité au motif que le degré de son invalidité était plus élevé que ce qui avait été indiqué à l’origine. Le 29 janvier 2004, la demande du demandeur a été accueillie, et le degré d’invalidité aux fins de sa pension a été réévalué à 70 pour cent, avec effet rétroactif au mois de juillet 2002. En outre, le demandeur a par la suite obtenu une attribution spéciale (c.-à-d. une allocation pour soins) s’ajoutant à sa pension d’invalidité globale.

 

[14]           Le 20 octobre 2003, la CEPPM a publié son rapport provisoire, dans lequel elle concluait que l’arrestation du demandeur n’était pas nécessaire et n’était ni raisonnable ni proportionnelle aux infractions reprochées au demandeur. La CEPPM concluait aussi que les éléments de preuve n’étayaient pas la conclusion selon laquelle le demandeur aurait induit en erreur l’adjudant Hamm ou aurait enfreint le Code de déontologie de la police militaire.

 

[15]           Le rapport provisoire de la CEPPM a été présenté au grand prévôt, le colonel D.A. Cooper, qui a rejeté la majorité des recommandations, en exposant ses motifs. Dans sa notification datée du 13 février 2004, le grand prévôt a insisté pour dire que l’affaire ne relevait pas de la compétence de la CEPPM, parce que l’arrestation du demandeur s’inscrivait dans le cadre d’une procédure administrative reliée à la discipline au sein de l’unité militaire et que les policiers militaires en cause n’accomplissaient pas des devoirs ou des fonctions de maintien de l’ordre.

 

[16]           Le rapport final de la CEPPM a été publié le 14 juillet 2004, et il comportait 45 conclusions et 10 recommandations, qui exonéraient essentiellement le demandeur.

 

[17]           Le 18 octobre 2004, le Conseil de révision des attestations de police militaire (CRAPM) s’est réuni et a statué qu’il n’y avait pas suffisamment d’éléments de preuve pour établir, selon la prépondérance des probabilités, que le demandeur avait sciemment supprimé, représenté faussement ou falsifié l'information contenue dans un rapport ou une déclaration, ou adopté une conduite susceptible de jeter le discrédit sur la police militaire ou de mettre en doute sa propre capacité de s'acquitter de ses fonctions avec loyauté et impartialité. Par conséquent, les membres ont recommandé que les attestations de policier militaire du demandeur soient rétablies, et le grand prévôt a accepté cette recommandation dans une lettre datée du 21 octobre 2004.

 

[18]           Le demandeur souligne qu’il n’a toujours pas été promu officiellement et qu’il ne touche toujours pas le salaire et ne bénéficie toujours pas des avantages liés à la promotion tenue en suspens. Cependant, comme nous l’avons déjà mentionné, le demandeur a été officiellement libéré des Forces canadiennes le 18 mai 2005.

 

[19]           En plus des plaintes déposées auprès de la CEPPM et du CRAPM, le demandeur a aussi déposé cinq griefs distincts en vertu de l’article 29 de la Loi sur la défense nationale entre décembre 2000 et le 16 février 2005. Les quatre premiers griefs découlaient directement de l’incident du 12 décembre 2000, tandis que le dernier grief, qui n’a toujours pas été tranché et a été suspendu en attendant le sort de la présente action, concerne l’abandon de sa promotion.

 

[20]           Le demandeur a déposé une déclaration en Cour fédérale le 10 juin 2005 dans laquelle il réclame de la défenderesse un montant de 725 000 $ en dommages-intérêts, en invoquant les moyens suivants :

§         article 3 de la Loi sur la responsabilité civile de l’État et le contentieux administratif, L.R.C. 1985, c. C-50 – à cause de la négligence des employés, préposés et mandataires de la défenderesse dans leur exercice de pouvoirs d’arrestation et de détention à l’endroit du demandeur;

§         atteinte au droit du demandeur à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne garanti par l’article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés, partie I de la Loi constitutionnelle de 1982 (R.-U.), constituant l'annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada (R.-U.), 1982, c. 11 (la Charte);

§         atteinte au droit du demandeur à la protection contre la détention ou l’emprisonnement arbitraires, garanti par l’article 9 de la Charte;

§         atteinte au droit du demandeur, en cas d’arrestation ou de détention, d’être informé dans les plus brefs délais des motifs de son arrestation ou de sa détention, garanti par l’alinéa 10a) de la Charte;

§         droit à des dommages-intérêts généraux, punitifs et exemplaires; notamment, mais sans restreindre la portée générale de ce qui précède, des dommages-intérêts en vertu du paragraphe 24(1) de la Charte;

§         droit à des intérêts avant jugement et à des intérêts sur le jugement en conformité avec les articles 36 et 37 de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. 1985, c. F-7;

§         les dépens dans la présente action.

 

[21]           Le 4 avril 2007, la défenderesse a déposé un avis de requête en vue d’obtenir une ordonnance en vertu des règles 213, 216 et 221 des Règles de la Cour fédérale.

 

[22]           Le 5 avril 2007, le demandeur a aussi déposé un avis de requête en vue d’obtenir une ordonnance en vertu des règles 213, 216 et 221 des Règles de la Cour fédérale.

 

QUESTIONS À EXAMINER

[23]           La première question que la Cour doit examiner est celle de savoir si la requête de la défenderesse devrait être accueillie. Pour ce faire, la Cour répondra aux questions suivantes :

1)      La Cour devrait-elle exercer son pouvoir discrétionnaire de radier tout ou partie de la déclaration du demandeur parce que la Cour n’a pas compétence sur l’objet de la réclamation ou parce qu’il serait par ailleurs inopportun qu’elle exerce cette compétence?

2)      La Cour devrait-elle radier la réclamation du demandeur fondée sur la négligence au motif que cette réclamation est irrecevable en vertu de l’article 9 de la Loi sur la responsabilité civile de l’État et le contentieux administratif?

3)      La Cour devrait-elle radier la réclamation du défendeur fondée sur la Charte au motif qu’elle est prescrite en vertu de l’article 269 de la Loi sur la défense nationale?

 

[24]           Ensuite, la Cour déterminera si la requête du demandeur devrait être accueillie, en répondant à la question suivante :

4)   La défenderesse est-elle empêchée par préclusion de nier les conclusions de fait de la CEPPM et du CRAPM, et la Cour devrait-elle, par conséquent, faire droit à la requête pour jugement sommaire du demandeur? Subsidiairement, la Cour devrait-elle radier les paragraphes 5, 6, 8 et 9 de la défense modifiée au motif qu’ils constituent une tentative de remettre en cause ces conclusions de fait, lesquelles ont force de chose jugée?

 

LE CRITÈRE RELATIF AUX JUGEMENTS SOMMAIRES

[25]           Les procédures relatives aux jugements sommaires sont prévues aux articles 213 à 219 des Règles de la Cour fédérale. Le critère applicable pour déterminer si toutes les conditions sont réunies pour qu’un jugement sommaire puisse être accordé a été établi dans Granville Shipping Co. c. Pegasus Lines Ltd., [1996] 2 C.F. 853 (1re inst.), au paragraphe 8. Les sept principes généraux sont les suivants :

 

1. ces dispositions ont pour but d'autoriser la Cour à se prononcer par voie sommaire sur les affaires qu'elle n'estime pas nécessaire d'instruire parce qu'elles ne soulèvent aucune question sérieuse à instruire (Old Fish Market Restaurants Ltd. c. 1000357 Ontario Inc. et al.2);

2. il n'existe pas de critère absolu (Feoso Oil Ltd. c. Sarla (Le)3), mais le juge Stone, J.C.A. semble avoir fait siens les motifs prononcés par le juge Henry dans le jugement Pizza Pizza Ltd. v. Gillespie4. Il ne s'agit pas de savoir si une partie a des chances d'obtenir gain de cause au procès, mais plutôt de déterminer si le succès de la demande est tellement douteux que celle-ci ne mérite pas d'être examinée par le juge des faits dans le cadre d'un éventuel procès;

3. chaque affaire devrait être interprétée dans le contexte qui est le sien (Blyth5 et Feoso6);

4. les règles de pratique provinciales (spécialement la Règle 20 des Règles de procédure civile de l'Ontario [R.R.O. 1990, Règl. 194]) peuvent faciliter l'interprétation (Feoso7 et Collie8);

5. saisie d'une requête en jugement sommaire, notre Cour peut trancher des questions de fait et des questions de droit si les éléments portés à sa connaissance lui permettent de le faire (ce principe est plus large que celui qui est posé à la Règle 20 des Règles de procédure civile de l'Ontario) (Patrick9);

6. le tribunal ne peut pas rendre le jugement sommaire demandé si l'ensemble de la preuve ne comporte pas les faits nécessaires pour lui permettre de trancher les questions de fait ou s'il estime injuste de trancher ces questions dans le cadre de la requête en jugement sommaire (Pallman10 et Sears11);

7. lorsqu'une question sérieuse est soulevée au sujet de la crédibilité, le tribunal devrait instruire l'affaire, parce que les parties devraient être contre-interrogées devant le juge du procès (Forde12 et Sears13). L'existence d'une apparente contradiction de preuves n'empêche pas en soi le tribunal de prononcer un jugement sommaire; le tribunal doit « se pencher de près » sur le fond de l'affaire et décider s'il y a des questions de crédibilité à trancher (Stokes14).

 

 

[Notes de bas de page omises]

 

 

[26]           En outre, dans Paszkowski c. Canada (Procureur général), 2006 CF 198, au paragraphe 38, le juge Richard Mosley a statué :

Les parties qui sont visées par une requête en jugement sommaire ne sont pas tenues de prouver tous les faits de leur cause. Elles doivent plutôt démontrer qu’il existe une véritable question litigieuse. Le fardeau de la preuve incombe à la partie qui dépose la requête, mais toutes les parties doivent présenter leur cause sous son meilleur jour : Succession MacNeil c. Canada (Ministère des Affaires indiennes et du Nord canadien), [2004] 3 C.F. 3 (C.A.).

 

[27]           Cependant, il n’en demeure pas moins qu’il ne suffit pas de nier les allégations formulées dans l’acte de procédure du requérant, comme l’indique l’article 215 des Règles de la Cour fédérale, qui énonce :

215. La réponse à une requête en jugement sommaire ne peut être fondée uniquement sur les allégations ou les dénégations contenues dans les actes de procédure déposés par le requérant. Elle doit plutôt énoncer les faits précis démontrant l’existence d’une véritable question litigieuse.

215. A response to a motion for summary judgment shall not rest merely on allegations or denials of the pleadings of the moving party, but must set out specific facts showing that there is a genuine issue for trial.

 

 

 

ANALYSE

1) La Cour devrait-elle exercer son pouvoir discrétionnaire de radier tout ou partie de la déclaration du demandeur parce que la Cour n’a pas compétence sur l’objet de la réclamation ou parce qu’il serait par ailleurs inopportun qu’elle exerce cette compétence?

 

[28]           La défenderesse soutient que cette Cour n’a pas compétence sur l’objet de la déclaration, qu’elle devrait s’abstenir d’exercer pareille compétence, et que, par conséquent, la déclaration devrait être radiée en vertu de l’article 221 des Règles de la Cour fédérale.

 

[29]           Dans l’arrêt Sokolowska c. Canada, 2005 CAF 29, la Cour d’appel fédérale a affirmé ce qui suit au sujet de la règle 221 :

[14]      L'article 221 des Règles de la Cour fédérale (1998) prévoit qu'une déclaration peut être radiée au motif qu'elle ne révèle aucune cause d'action valable. La Cour suprême du Canada a indiqué à plusieurs reprises que, pour savoir si un acte de procédure devrait ou non être radié, il fallait se demander s'il était évident et manifeste que la réclamation ne révélait aucune cause d'action valable. Dans l'arrêt Hunt c. Carey Canada Inc., 1990 CanLII 90 (C.S.C.), [1990), 2 R.C.S. 959, à la page 980, la juge Wilson réaffirmait ce critère dans les termes suivants :

 

Plus récemment, dans l'arrêt Dumont c. Canada (Procureur général), 1990 CanLII 131 (C.S.C.), [1990] 1 R.C.S. 279, j'ai expliqué clairement, à la page 280, que j'estimais que le critère formulé dans l'arrêt Inuit Tapirisat était le bon critère. Le critère est toujours de savoir si l'issue de l'affaire est                  « évidente et manifeste » ou « au-delà de tout doute raisonnable ».

 

 

[15]      Il ne fait aucun doute non plus que, lorsque la Cour n'a pas compétence sur l'objet de l'action, la déclaration peut elle aussi être radiée. Dans la décision Hodgson c. Bande indienne d'Ermineskin, [2000] A.C.F. no 313 (C.F. 1re inst.) (Q.L.), au paragraphe 10, la juge Reed, de la Cour fédérale, exprime cette proposition dans les termes suivants :

 

10. [...] Le critère de savoir si la chose est claire et évidente s'applique à la radiation d'actes de procédure pour absence de compétence de la même façon qu'il s'applique à la radiation de tout acte de procédure au motif qu'il ne fait état d'aucune cause raisonnable d'action. L'absence de compétence doit être « claire et évidente » pour justifier la radiation d'actes de procédure à ce stade préliminaire.

 

[30]           La défenderesse soutient tout d’abord que cette Cour a déjà jugé qu’elle n’avait pas compétence pour trancher les litiges relatifs au rang ou au service des membres des Forces canadiennes, étant donné la nature de ce service (Gallant c. The Queen in Right of Canada (1978), 91 D.L.R. (3d) 695). En réponse, le demandeur soutient que la décision dans l’affaire Gallant doit céder le pas devant la décision de cette Cour dans Olmstead c. Canada, [1990] 2 C.F. 484 (1re inst.), où la Cour a statué qu’elle ne refusera pas et ne doit pas refuser d’exercer sa compétence à l’égard des demandes fondées sur la Charte et formulées par des membres des Forces canadiennes, et que Gallant, précité, n’a pas pour effet de rendre de telles demandes irrecevables. Dans Olmstead, précité, le juge Collier a affirmé ce qui suit :

La défenderesse a fait valoir devant cette Cour le caractère particulier de la relation qui existe entre le personnel des Forces armées et la Couronne, qui suppose l'abandon du statut de civil et la renonciation à bon nombre de droits civils dont jouit une personne ordinaire. Arguant de cette particularité, elle a demandé à cette Cour de conclure que le demandeur ne peut recourir à l'article 15 de la Charte parce qu'il a volontairement accepté cet ensemble de droits et d'obligations rattachés aux « Forces armées ».

 

 Il m'est impossible de partager cet avis, car j'estime qu'une telle conclusion porterait atteinte au fondement même de la Charte et irait à l'encontre de l'interprétation libérale que ce document commande. La défenderesse ne peut s'abriter derrière une exception ou une règle d'immunité dérivée de la common law pour contourner la Charte. Je suis loin d'être convaincu que celui qui adhère volontairement à une profession accepte implicitement d'être assujetti sans mot dire à la totalité des règles que l'organe directeur de cette profession pourrait décider d'adopter. Quiconque choisit volontairement une profession ou un travail ne renonce pas automatiquement aux droits que lui confère la Charte. Au Canada, tous ont le droit de bénéficier des dispositions de l'article 15 relatives à l'égalité, et la défenderesse n'a pas réussi à me fournir les éléments de preuve qui me feraient conclure le contraire.

 

[31]           Je suis d’accord avec le demandeur sur ce point : lorsque cette Cour est saisie d’une demande fondée sur la Charte et dirigée contre la Couronne, elle ne perd pas sa compétence du simple fait que la demande en question est formulée par un membre des Forces canadiennes.

 

[32]           Deuxièmement, la défenderesse soutient que la réclamation du demandeur découle essentiellement d’un différend en milieu de travail ou d’un différend militaire interne. Il existe une jurisprudence abondante et persuasive selon laquelle les différends découlant des conditions de service des membres des Forces canadiennes, à l’instar des employés de la fonction publique du Canada, devraient être traités en recourant aux régimes de recours complets qui s’y appliquent, et non en s’adressant aux tribunaux (Vaughan c. Canada, [2005] 1 R.C.S. 146). Même si cette Cour n’est pas convaincue que la loi emploie des termes assez forts pour exclure la compétence des tribunaux, la défenderesse soutient que la Cour devrait conclure que le régime se veut un mécanisme important et complet de règlement interne des affaires qui découlent directement d’actes internes et de l’administration au sein des Forces canadiennes. Sur la question de savoir si les tribunaux devraient faire preuve de retenue à l’égard du processus de règlement des griefs prévu par la Loi sur les relations de travail dans la fonction publique (LRTFP), la Cour suprême du Canada a écrit ce qui suit dans l’arrêt Vaughan, précité :

[34]      Premièrement, les termes utilisés dans la LRTFP envoient le message très clair que, dans les affaires courantes concernant des avantages accordés par un règlement en marge de la convention collective, la décision du sous‑ministre ou de la personne qu’il désigne devrait être finale.

 

[35]      Deuxièmement, le différend en l’espèce découle de la relation employeur‑employé et relève du régime prévu par la LRTFP pour le règlement des différends.

 

[36]      Troisièmement, l’appelant aurait pu obtenir par la procédure de grief prévue à l’art. 91 une réparation à l’égard de sa demande de PRA. Comme la Cour d’appel du Manitoba l’a affirmé dans Phillips c. Harrison 2000 MBCA 150 (CanLII), (2000), 196 D.L.R. (4th) 69, 2000 MBCA 150 : [traduction] « L’important, c’est que le régime prévoie une solution au problème » (par. 80).

 

[37]      Quatrièmement, le refus de l’appelant de soumettre la question des PRA à la procédure de grief ne devrait pas améliorer sa situation juridique. Le mécanisme de règlement des différends de l’art. 91 devait être utilisé. Les tribunaux nuisent à l’efficacité des relations de travail lorsqu’ils se placent en concurrence avec le mécanisme prévu par la loi (St. Anne Nackawic, p. 718; Weber, par. 41; Regina Police, par. 26). [...]

 

[38]      Cinquièmement, j’ai déjà indiqué pourquoi je n’accepte pas l’hypothèse au cœur de l’argument de l’appelant, soit que les régimes législatifs complets qui ne prévoient pas l’arbitrage par un tiers ne méritent pas, pour cette raison, que l’on s’en remette à eux. Il s’agit d’un facteur à prendre en compte, mais dans le cas de la LRTFP, d’autres indices plus convaincants de l’intention du législateur l’emportent sur ce facteur.

 

[39]      Sixièmement, lorsque le législateur a clairement établi un régime complet pour le règlement des différends en matière de relations de travail, comme c’est le cas en l’espèce, les tribunaux ne devraient pas mettre en péril le mécanisme exhaustif de règlement des différends que contient la loi en permettant l’accès systématique aux tribunaux. [...]

 

[40]      Septièmement, le fait que nous soyons saisis d’un différend en matière de relations de travail qui dure depuis presque dix ans démontre (s’il est encore nécessaire de le faire) que les procédures de règlement des différends plus informelles sont généralement plus rapides et moins coûteuses en plus d’être efficaces.

 

[41]      Enfin, le différend en cause est tout ce qu’il y a de plus simple. [...]

 

[33]           En s’appuyant sur les considérations exposées dans l’arrêt Vaughan, ci-dessus, la défenderesse expose les arguments suivants :

i)           Le libellé du régime de griefs, combiné aux réserves relatives à d’autres mécanismes de règlement obligatoires prévus par la loi, indique clairement que le chef d’état-major de la défense (CEMD) est censé être l’instance de dernier ressort (voir, par exemple, les articles 29.11 et 29.15 de la Loi sur la défense nationale);

ii)         le différend découle à l’évidence d’aspects particuliers de la relation professionnelle entre le demandeur et Sa Majesté au fil des ans;

iii)        les réclamations auraient pu être réglées – et d’ailleurs, certaines l’ont été – en recourant au régime;

iv)       il y a des procédures de règlement des griefs qui sont accessibles et qui ne peuvent pas, à défaut d’éléments de preuve spécifiques, être considérées comme soulevant un conflit d’intérêts;

v)         le régime comporte à toutes les étapes des aspects prévoyant un examen et des recommandations indépendants, en particulier relativement aux principales réclamations du demandeur;

vi)       le Parlement a créé un régime exhaustif, comprenant divers mécanismes qui se chevauchent, pour traiter les affaires de discipline, de promotion / de rang, d’attestations, les griefs d’ordre général et les préjudices comme ceux allégués par le demandeur; l’on ferait injure à ce régime si l’on permettait aux affaires ordinaires censées y être soumises d’être portées devant les tribunaux au lieu d’exiger le recours au mécanisme interne moins formaliste et généralement plus rapide et moins coûteux.

 

[34]           La défenderesse soutient aussi que le demandeur peut réclamer et obtenir une indemnité en argent, dépendant de la recommandation du CEMD, soit du sous-ministre du ministère de la Défense nationale ou de son délégué, dépendant du montant.

 

[35]           Le demandeur, quant à lui, soutient qu’il n’a pas accès à un régime complet et exhaustif de règlement des différends dans le cadre duquel il pourra faire valoir tous les aspects de sa réclamation, y compris ses réclamations fondées sur la Charte, ou obtenir les mesures de redressement demandées, notamment des réparations en vertu du paragraphe 24(1) de la Charte. En tout cas, le demandeur a complètement épuisé la procédure de règlement des griefs sans obtenir aucune réparation véritable. Les plaintes ont fait l’objet d’une enquête et d’un examen complets par la CEPPM, mais les conclusions et les recommandations de la CEPPM n’ont pas été entendues. En bref, bien qu’on ait donné raison au demandeur, celui-ci n’a obtenu en fin de compte aucune réparation. En outre, le demandeur affirme qu’il demeure incontesté qu’aucune des autorités décisionnelles auxquelles il s’est adressé pour faire valoir sa réclamation n’est un « tribunal compétent » au sens du paragraphe 24(1) de la Charte. De plus, si l’on applique les critères énoncés dans Vaughan, précité, le défendeur soutient que l’on ne saurait raisonnablement considérer son arrestation et sa détention, la suspension subséquente de ses attestations de policier militaire et la suspension de sa promotion comme une affaire courante ou comme rien de plus qu’un différend découlant d’une relation employeur-employé.

 

[36]           Je conviens avec la défenderesse que les événements du 12 décembre 2000, et les événements subséquents qui ont découlé de ces événements, ont tous été traités d’une manière ou d’une autre dans le cadre des différents recours internes ouverts au demandeur. Les circonstances entourant son arrestation et la légalité de cette arrestation ont fait l’objet d’enquêtes menées par le GPA NP, le SNEFC et la CEPPM, et cette dernière a publié un rapport très détaillé qui soutenait essentiellement la position du demandeur. En outre, le SNEFC a mené une enquête au sujet du sergent Rice, au terme de laquelle le sergent Rice a été accusé d’un chef de négligence préjudiciable au bon ordre et à la discipline, en contravention de l’alinéa 129(2)b) de la Loi sur la défense nationale, L.R.C. 1985, c. N-5, et a vu ses attestations suspendues pendant 10 mois. Pour ce qui est de la suspension des attestations de policier militaire du demandeur, une enquête complète a également été menée, et le CRAPM a rétabli ses attestations, avec l’approbation du grand prévôt.

 

[37]           Cela dit, la question est celle de savoir si les mécanismes internes auxquels le demandeur a eu recours l’empêchent maintenant d’intenter devant cette Cour la présente action fondée sur la négligence et sur la violation de ses droits garantis par la Charte. Bien que la CEPPM ait conclu dans son rapport final que le droit du demandeur en vertu de l’alinéa 10a) de la Charte avait été violé, elle ne s’est pas prononcée sur les droits du demandeur en vertu de l’article 7 et de l’article 9. En outre, le demandeur soutient que ni la CEPPM ni le CRAPM n’ont compétence pour ordonner des réparations en vertu de la Charte, de sorte que ces tribunaux ne pourraient pas statuer sur une demande fondée sur l’article 24 et découlant de violations des articles 7, 9 et 10. Il en va de même de la procédure de traitement des griefs prévue à l’article 29 de la Loi sur la défense nationale, présidée par le CEMD. Comme l’a affirmé la Cour dans l’arrêt Vaughan, précité, « les tribunaux conserveront leur compétence si le régime prévu par la loi n’offre pas la réparation demandée ».

 

[38]           Le paragraphe 24(1) de la Charte dispose :

24. (1) Toute personne, victime de violation ou de négation des droits ou libertés qui lui sont garantis par la présente charte, peut s'adresser à un tribunal compétent pour obtenir la réparation que le tribunal estime convenable et juste eu égard aux circonstances.

24. (1) Anyone whose rights or freedoms, as guaranteed by this Charter, have been infringed or denied may apply to a court of competent jurisdiction to obtain such remedy as the court considers appropriate and just in the circumstances.

 

 

[39]           Dans l’arrêt R. c. 974649 Ontario Inc., [2001] R.C.S. 575, la Cour suprême du Canada a élaboré un critère aux fins de déterminer si un tribunal donné pouvait être considéré comme un « tribunal compétent ». Puisque je ne crois pas qu’il soit nécessaire, dans le contexte des présentes requêtes, d’appliquer ce long critère, je me contenterai de citer une décision récente de la Cour fédérale dans Bernath c. Canada, 2007 CF 104, où le juge Simon Noël a conclu que les mécanismes de règlement des griefs prévus pour les Forces canadiennes en vertu de la Loi sur la défense nationale ne constituaient pas un tribunal compétent pour l’application de l’article 24 de la Charte. Bien que cette décision ne traitât pas spécifiquement de la CEPPM ou du CRAPM, je crois que l’analyse peut tout de même être appliquée en l’espèce, étant donné surtout que la CEPPM a procédé par voie d’enquête dans l’intérêt public et n’a pas tenu d’audience publique au sujet de l’affaire. Dans la décision Bernath, précitée, le juge Noël s’est aussi interrogé quant à savoir si le fait que le demandeur ait introduit une action devant la Cour en vue d’obtenir une réparation pécuniaire en vertu de la Charte pouvait être considéré comme un abus de procédure, étant donné qu’il avait aussi déposé un grief relativement aux mêmes événements. Le juge Noël a conclu qu’il ne pouvait pas y avoir abus de procédure, puisque le décideur sous le régime de la Loi sur la défense nationale n’était pas un tribunal compétent au sens du paragraphe 24(1) de la Charte. Le juge Noël a écrit, aux paragraphes 98 et 99 :

[98]      Décider d'une question de droit découlant de la Charte m'apparaît être une question d'une toute autre nature que celle qui est foncièrement factuelle et qui nécessite une analyse des faits à la lumière de la documentation pertinente. Il serait faux de prétendre que, dans le cas des deux demandes, soit celle que constitue le grief déposé en vertu de l'article 29 de la Loi sur la défense nationale et celle que constitue l'action introduite par requête devant cette Cour, la trame factuelle et la réparation monétaire demandée ne s'apparente aucunement. Faut-il le préciser, le fondement juridique donnant naissance aux deux recours n'est de toute évidence pas le même. Dans le cas des griefs, le fondement juridique qui sous-tend sa résolution n'apparaît pas de lui-même. Certes qu'il y ait des renvois à certaines ORFC et à quelques lois, la décision du CEMD est en très grande partie une décision factuelle qui n'est précédée par aucune enquête. Dans le cas de questions d'ordre constitutionnel découlant de l'application de la Charte, le décideur compétent doit appliquer la loi suprême du pays à des faits donnés, propres aux circonstances d'une affaire. Il n'est pas nécessaire d'élaborer davantage sur cet aspect de la question sachant que le grief devant le CEMD et la documentation à l'appui ne référaient pas à une question de droit découlant de l'application de la Charte.

 

[99]      Comment peut-il y avoir abus de procédure alors que le décideur n'avait pas compétence pour trancher une question de droit en application de la Charte et d'y octroyer une réparation en conséquence? Il apparaît clairement qu'il serait impensable de conclure à un abus de procédure compte tenu de la conclusion à laquelle que j'en arrive en regard de la Charte.

 

[40]           Par conséquent, je ne suis pas convaincu que cette Cour devrait refuser d’exercer sa compétence pour connaître de la présente action au motif que les réclamations du demandeur devraient être traitées exclusivement dans le cadre du régime de recours interne exhaustif dont peuvent se prévaloir les membres des Forces canadiennes, puisqu’il semble que le régime en question ne soit peut-être pas suffisant pour disposer de toutes les réclamations du demandeur, en particulier sa réclamation fondée sur le paragraphe 24(1) de la Charte. Par conséquent, j’examinerai maintenant séparément les arguments de la défenderesse quant à savoir si je devrais radier la réclamation du demandeur fondée sur la négligence ou sa réclamation fondée sur la Charte ou les deux.

 

 

2) La Cour devrait-elle radier la réclamation du demandeur fondée sur la négligence au motif qu’elle est irrecevable en vertu de l’article 9 de la Loi sur la responsabilité civile de l’État et le contentieux administratif?

 

[41]           Pour ce qui est de l’objet précis de sa réclamation fondée sur la négligence au titre de l’article 3 de la Loi sur la responsabilité civile de l’État et le contentieux administratif, le demandeur cherche à être indemnisé du préjudice à ses perspectives d’emploi ainsi que des effets préjudiciables sur sa santé mentale découlant de son arrestation en décembre 2000. L’article 3 de la Loi sur la responsabilité civile de l’État et le contentieux administratif dispose :

3. En matière de responsabilité, l’État est assimilé à une personne pour :

a) dans la province de Québec :

(i) le dommage causé par la faute de ses préposés,

(ii) le dommage causé par le fait des biens qu’il a sous sa garde ou dont il est propriétaire ou par sa faute à l’un ou l’autre de ces titres;

b) dans les autres provinces :

(i) les délits civils commis par ses préposés,

(ii) les manquements aux obligations liées à la propriété, à l’occupation, à la possession ou à la garde de biens.

 

3. The Crown is liable for the damages for which, if it were a person, it would be liable

(a) in the Province of Quebec, in respect of

(i) the damage caused by the fault of a servant of the Crown, or

(ii) the damage resulting from the act of a thing in the custody of or owned by the Crown or by the fault of the Crown as custodian or owner; and

(b) in any other province, in respect of

(i) a tort committed by a servant of the Crown, or

(ii) a breach of duty attaching to the ownership, occupation, possession or control of property.

 

[42]           En ce qui a trait aux dommages à la santé mentale du demandeur, la défenderesse signale que le demandeur a déjà obtenu une indemnité sous forme de pension pour un SSPT relié à ses fonctions militaires comme agent de police notamment aux événements mêmes qu’il invoque au soutien de la présente réclamation. Or, suivant l’article 9 de la Loi sur la responsabilité civile de l’État et le contentieux administratif, le demandeur ne peut pas être indemnisé deux fois du même préjudice :

9. Ni l’État ni ses préposés ne sont susceptibles de poursuites pour toute perte — notamment décès, blessure ou dommage — ouvrant droit au paiement d’une pension ou indemnité sur le Trésor ou sur des fonds gérés par un organisme mandataire de l’État.

 

9. No proceedings lie against the Crown or a servant of the Crown in respect of a claim if a pension or compensation has been paid or is payable out of the Consolidated Revenue Fund or out of any funds administered by an agency of the Crown in respect of the death, injury, damage or loss in respect of which the claim is made.

 

[43]           La défenderesse invoque aussi l’arrêt de la Cour suprême du Canada dans Sarvanis c. Canada, [2002] 1 R.C.S. 921, qui expliquait que le principe sous-jacent à l’article 9 était de tenter d’empêcher la double réparation. Le juge Iacobucci a affirmé, aux paragraphes 28 et 29 :

[28]      À mon avis, bien que libellé en termes larges, l’art. 9 de la Loi sur la responsabilité civile de l’État et le contentieux administratif n’en exige pas moins que, pour qu’elle fasse obstacle à une action contre l’État, la pension ou l’indemnité payée ou payable ait le même fondement factuel que l’action. En d’autres termes, l’article 9 traduit le désir rationnel du législateur d’empêcher la double indemnisation d’une même réclamation dans les cas où le gouvernement est responsable d’un acte fautif mais où il a déjà effectué un paiement à cet égard. Autrement dit, cette disposition n’exige pas que la pension ou le paiement soit versé en dédommagement de l’événement pertinent, mais uniquement que le fondement précis de leur versement soit l’existence de cet événement.

 

[29]      Cette large portée est nécessaire pour éviter que l’État ne soit tenu responsable, sous des chefs accessoires de dommages-intérêts, de l’événement pour lequel une indemnité a déjà été versée. Autrement dit, en cas de versement d’une pension tombant dans le champ d’application de l’art. 9, un tribunal ne saurait connaître d’une action dans laquelle on ne réclame des dommages‑intérêts que pour douleurs et souffrances ou encore pour perte de jouissance de la vie, du seul fait que ce chef de dommage ne correspond pas à celui qui a apparemment été indemnisé par la pension. Tous les dommages découlant du fait ouvrant droit à pension sont visés par l’art. 9, dans la mesure où la pension ou l’indemnité est versée « in respect of » la même perte — notamment décès, blessure ou dommage — ou sur le même fondement.

 

[44]           Aussi, dans Begg c. Canada (Ministre de l’Agriculture), 2004 CF 659, le juge Douglas Campbell a affirmé ce qui suit au sujet de l’article 9 de la Loi sur la responsabilité civile de l’État et le contentieux administratif :

[24]      La jurisprudence reconnaît que l'objet de l'article 9 de la LRCECA est d'empêcher une double réparation ou l'attribution de dommages-intérêts accrus ou différents se rapportant au même incident, aux mêmes blessures ou à la même perte, lorsque la pension ou indemnité a été payée au titre d'un régime sans égard à la responsabilité, comme c'est le cas pour les accidents du travail. (Voir les décisions Langille c. Canada (Ministre de l'Agriculture), 44 F.T.R. 60 (1re inst.); [1992] 2 C.F. 208 (C.A.); Sarvanis c. Canada,2002 CSC 28 (CanLII), [2002] 1 R.C.S. 921 et Marsot c. Canada (Ministère de la Défense nationale), 2002 CFPI 226 (CanLII), [2002] 3 C.F. 579 (1re inst.).

 

 

[45]           La défenderesse soutient que les éléments de preuve démontrent clairement que le demandeur tente d’obtenir une indemnité sur le fondement des mêmes événements qui ont justifié l’octroi de sa pension actuelle, ce qui suffirait en soi à rendre l’action irrecevable. Chose plus importante, les éléments de preuve étayent la conclusion selon laquelle le demandeur a tenté d’obtenir et a obtenu une indemnisation des mêmes dommages, en particulier les effets affectifs et psychologiques qu’il allègue avoir subis comme conséquence de son traitement à la suite de l’arrestation de décembre 2000.

 

[46]           Je conviens avec la défenderesse que l’article 9 de la Loi sur la responsabilité civile de l’État et le contentieux administratif fait obstacle à l’action en dommages-intérêts du demandeur en vertu de l’article 3 de la même loi fondée sur le dommage à sa santé mentale, puisque sa pension d’invalidité l’indemnise déjà à cet égard. Pour ce qui est du préjudice allégué à sa carrière, qui revient essentiellement à la perte de sa promotion et de tous les avantages qui en auraient découlé, je crois qu’il serait plus opportun de soumettre cette réclamation à la procédure de règlement des griefs prévue à l’article 29 de la Loi sur la défense nationale, une procédure que le demandeur a déjà instituée, mais qui a été suspendue en attendant le sort de son recours au civil. Par ce grief, le demandeur cherche à supprimer tous les obstacles à cette promotion et à obtenir que celle-ci entre en vigueur à la date prévue initialement, de sorte qu’il puisse bénéficier de tous les droits accumulés se rattachant à cette promotion, notamment en matière de paye, d’allocations, de pension et d’ancienneté. Au fond, si ce grief du demandeur est accueilli, tout préjudice subi relativement à son cheminement de carrière sera en réalité réparé, et ne pourra plus servir de fondement à une action pour négligence.

 

[47]           Dans la décision récente Sandiford c. Canada, 2007 CF 225, Madame la juge Carolyn Layden-Stevenson a examiné un appel interjeté par un membre des Forces canadiennes à l’encontre d’une décision d’un protonotaire radiant sa déclaration au motif qu’il n’avait pas épuisé toutes les procédures de règlement des griefs prévues par la loi. Aux paragraphes 26 et 28 de cette décision, la juge Layden-Stevenson a noté :

[26]      As a basic proposition, when Parliament creates statutory remedies and institutions designed specifically to provide redress to persons aggrieved, the court should not lightly intervene before those statutory remedies have been exhausted. Failure to pursue the available procedures does not render the remedy inadequate: Lazar v. Canada (Attorney General) (1999), 168 F.T.R. 11 (T.D.) aff’d. (2001), 271 N.R. 10 (F.C.A.).

 

[...]

 

[28]      The jurisprudence holds that the resolution mechanism existing through the grievance procedure in the National Defence Act constitutes an adequate alternative remedy that must be exhausted before an individual can turn to the court for redress: Anderson v. Canada (Canadien Armed Forces), [1997] 1 F.C. 273 (F.C.A.); Gallant v. Canada (1978), 91 D.L.R. (3d) 695 (F.C.T.D.); Jones v. Canada (1994), 87 F.T.R. 190 (T.D.); Pilon v. Canada (1996), 119 F.T.R. 269 (T.D.); Villeneuve v. Canada (1997), 130 F.T.R. 134 (T.D.); Haswell v. Canada (Attorney General) (1998), 56 O.T.C. 143 (Gen. Div.), aff’d. (1998), 116 O.A.C. 395 (C.«A.).

 

[48]           La juge Layden-Stevenson a ensuite appliqué le droit aux faits de l’espèce, et elle a formulé la conclusion suivante :

 

 

 31      The genesis of Mr. Sandiford’s complaint is the failure of his superiors to place him where he wished to be placed. That is a matter that clearly falls within the ambit of the grievance procedure. Mr. Sandiford’s recourse is to pursue his grievance. He has an adequate alternative remedy. That remedy must be exhausted before he turns to the court.

 

[...]

 

 34      To summarize, Mr. Sandiford must exhaust the adequate alternative remedy available to him. If, at the completion of that process, he is dissatisfied with the decision, he may seek judicial review. It is not open to him to circumvent the process mandated by Parliament through initiating an action at this time. Consequently, his action has no chance of success and Prothonotary Lafrenière was quite right to strike it without leave to amend.

 

 

[49]           Je crois que l’on peut dire la même chose dans la présente affaire. La procédure qui conviendrait le mieux pour statuer sur la question du préjudice dont se plaint le demandeur relativement à sa carrière est la procédure interne de règlement des griefs, et le demandeur doit d’abord épuiser cette procédure. S’il est insatisfait du résultat de cette procédure, il pourra alors demander à cette Cour de procéder à un contrôle judiciaire.

 

[50]           En d’autres mots, si le demandeur avait exercé le recours interne, il se pourrait bien qu’il ait aussi été « indemnisé » du préjudice allégué à sa carrière, de sorte que l’article 9 de la Loi sur la responsabilité civile de l’État et le contentieux administratif l’empêcherait clairement d’intenter une action pour négligence.

 

[51]           Bien qu’il soit vrai que le demandeur n’a pas encore obtenu de réparation dans le cadre de la procédure de règlement des griefs, puisque celle-ci est automatiquement suspendue lorsqu’une action est instituée devant les tribunaux, je suis d’accord avec le commentaire de la juge Layden-Stevenson dans la décision Sandiford, précitée, selon lequel le demandeur est l’artisan de son propre malheur, car le fait qu’il n’ait obtenu aucune réparation dans les circonstances est la conséquence directe de sa décision d’intenter des recours en justice plutôt que de poursuivre la procédure de règlement des griefs jusqu’à son terme. Par conséquent, je ne vois pas pourquoi le demandeur devrait être autorisé à intenter une action pour négligence en l’espèce, alors qu’il n’aurait pas eu le droit de le faire s’il était allé, comme il se devait, jusqu’au bout de la procédure interne de règlement des griefs.

 

[52]           Par conséquent, je conviens avec la défenderesse que la réclamation pour négligence du demandeur en vertu de l’article 3 de la Loi sur la responsabilité civile de l’État et le contentieux administratif est vouée à l’échec et devrait être radiée, puisqu’elle mènerait à une double réparation, ce qui est interdit en vertu de l’article 9 de la même loi.

 

 

3) La Cour devrait-elle radier la réclamation du défendeur fondée sur la Charte au motif qu’elle est prescrite en vertu de l’article 269 de la Loi sur la défense nationale?

 

 

 

[53]           Comme il en a été question plus haut, la défenderesse a soutenu que cette Cour devrait refuser d’exercer sa compétence sur la présente action parce que le demandeur avait accès à un régime de règlement des différends complet et exhaustif permettant d’entendre tous les aspects de sa réclamation. Cependant, la décision récente du juge Noël dans Bernath, précitée, a jeté un certain doute quant à savoir s’il existait bel et bien un tel régime, étant donné sa conclusion selon laquelle le CEMD n’était pas un tribunal compétent pour accorder des dommages en vertu du paragraphe 24(1) de la Charte. Pour ce motif, j’ai choisi d’exercer ma compétence sur la présente action, et d’examiner séparément la réclamation pour négligence et la réclamation fondée sur la Charte. Ayant rejeté la réclamation pour négligence, j’aborderai maintenant les réclamations fondées sur la Charte.

 

[54]           La défenderesse soutient que les différentes réclamations fondées sur la Charte formulées par le demandeur dans la présente action sont prescrites en vertu de l’article 269 de la Loi sur la défense nationale, qui dispose :

269. (1) Les actions pour un acte accompli en exécution — ou en vue de l’application — de la présente loi, de ses règlements, ou de toute fonction ou autorité militaire ou ministérielle, ou pour une prétendue négligence ou faute à cet égard, se prescrivent par six mois à compter de l’acte, la négligence ou la faute en question ou, dans le cas d’un préjudice ou dommage, par six mois à compter de sa cessation.

 

 

 

 

(2) Le paragraphe (1) n’a pas pour effet d’empêcher l’exercice des poursuites prévues par le code de discipline militaire.

269. (1) No action, prosecution or other proceeding lies against any person for an act done in pursuance or execution or intended execution of this Act or any regulations or military or departmental duty or authority, or in respect of any alleged neglect or default in the execution of this Act, regulations or any such duty or authority, unless it is commenced within six months after the act, neglect or default complained of or, in the case of continuance of injury or damage, within six months after the ceasing thereof.

 

(2) Nothing in subsection (1) is in bar of proceedings against any person under the Code of Service Discipline.

 

[55]           Comme le fait remarquer la défenderesse, le Parlement n’a pas compétence pour empêcher complètement par voie législative les recours fondés sur la Charte, mais il peut imposer des délais pour l’exercice de ces recours (Kingstreet Investments Ltd. c. Nouveau-Brunswick (Finances), 2007 CSC 1).

 

[56]           Bien que j’aie accepté d’exercer ma compétence pour examiner la validité de la réclamation du demandeur en vertu du paragraphe 24(1) de la Charte, la première chose qu’il faut garder à l’esprit est que l’article 24 n’est pas une disposition autonome. Il s’agit plutôt d’une disposition « réparatrice » dont l’application n’est enclenchée que si elle est liée à la violation d’une autre disposition de la Charte. En l’espèce, le demandeur soutient que l’on a porté atteinte à ses droits garantis par les articles 7 et 9 et l’alinéa 10a) de la Charte et qu’en conséquence de ces violations, il devrait avoir droit à des dommages-intérêts en vertu du paragraphe 24(1). Plus précisément, le demandeur allègue que son arrestation et sa détention subséquente ont porté atteinte à son droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne (garanti par l’article 7 de la Charte), à son droit de ne pas être détenu ou emprisonné arbitrairement (garanti par l’article 9 de la Charte) et à son droit, en cas d’arrestation ou de détention, d’être informé dans les plus brefs délais des motifs de son arrestation ou de sa détention (garanti par l’alinéa 10a) de la Charte).

 

[57]           L’action du demandeur pose problème parce que toutes ces violations alléguées de ses droits garantis par la Charte sont, à l’évidence, directement liées à son arrestation et à sa détention le 12 décembre 2000, soit environ quatre ans et demi avant que le demandeur introduise son action. De ce fait, la défenderesse soutient que l’action du demandeur est prescrite en vertu de l’article 269 de la Loi sur la défense nationale, qui impose un délai de prescription de six mois pour intenter des poursuites.

 

[58]           Le demandeur affirme cependant qu’il y a eu préjudice ou dommage contenu faisant en sorte que le délai de prescription de six mois n’a commencé à courir qu’à compter de la date de la découverte du dernier préjudice ou dommage connu, soit à compter du 27 janvier 2005, ou vers cette date, ce qui est à l’intérieur du délai de prescription de six mois. En effet, tel que le demandeur présente les faits, la décision du 15 avril 2002 de suspendre ses attestations de policier militaire était un acte distinct clairement fondé sur l’arrestation du 12 décembre 2000; il s’agissait, en réalité, d’une continuation de l’arrestation. En outre, tel que le demandeur présente les faits, la décision du 27 novembre 2002 de tenir en suspens sa promotion au rang de caporal-chef, en attendant que soit réglée la question de la suspension de ses attestations de policier militaire, était aussi un acte distinct clairement fondé sur la décision du 15 avril 2002 de suspendre ses attestations de policier militaire. Tout comme la décision de suspendre les attestations sur laquelle elle se fondait, la tenue en suspens de la promotion était, en réalité, une continuation de l’arrestation. Par conséquent, la suspension des attestations de policier militaire du demandeur par la défenderesse, et la tenue en suspens de la promotion du demandeur par la défenderesse, toutes deux directement attribuables à l’arrestation du 12 décembre 2000, constituaient chacune une continuation du préjudice ou du dommage au sens de l’article 269 de la Loi sur la défense nationale.

 

[59]           En outre, bien que la tenue en suspens de la promotion du demandeur soit survenue en novembre 2002, le demandeur soutient que la règle générale de la possibilité de découvrir le dommage s’applique, de sorte que la cause d'action prend naissance, aux fins de la prescription, lorsque les faits importants sur lesquels repose cette cause d'action sont découverts par le demandeur ou auraient dû l'être (Central Trust Co. c. Rafuse, [1986] 2 R.C.S. 147). En l’espèce, le demandeur a déposé une demande d’accès à l’information le 8 mars 2004, mais il a seulement reçu l’information le 27 janvier 2005, ou vers cette date.

 

[60]           Bien que la défenderesse ne remette pas en question la règle de la possibilité de découvrir le dommage, elle conteste l’interprétation que fait le demandeur de la notion de continuation des dommages. La défenderesse soutient qu’il est un principe bien établi en droit selon lequel les dommages surviennent à la date du préjudice; le fait que les dommages soient persistants en ce sens qu’ils découlent d’un incident particulier ne signifie pas que la cause d’action continue. Il faut que la cause d’action elle-même continue et qu’elle donne lieu à des dommages continus avant qu’un demandeur puisse affirmer que le délai de prescription continue de courir. En outre, lorsque, comme c’est le cas en l’espèce, les événements en cause sont distincts, comme une réclamation fondée sur une arrestation illégale, ou d’autres activités reliées à des promotions au travail, et ne se sont pas renouvelés continuellement de manière à causer de nouveaux dommages, et donc des dommages continus (c.-à-d. il n’y a pas de délit continu), l’action ne peut pas être poursuivie (Smith c. Baltzer, [2001] J.N.-B. no 488 (B.R.)).

 

[61]           À la lumière des faits de cette espèce, je suis plus enclin à interpréter la notion de continuation des dommages comme le fait la défenderesse. Bien qu’il y ait clairement un lien entre les événements tel que le demandeur les a décrits, je ne crois pas que ce lien soit assez fort pour que la découverte de la perte d’une promotion en janvier 2005 puisse servir d’assise à une réclamation fondée sur les articles 7 et 9 et sur l’alinéa 10b) de la Charte, concernant un préjudice ou des dommages résultant d’une arrestation qui a eu lieu en décembre 2000.

 

[62]           En outre, j’ai déjà affirmé que cette Cour n’était pas le lieu indiqué pour que le demandeur obtienne réparation pour sa perte de promotion, puisqu’il s’agit clairement d’une situation qui devrait être redressée en faisant appel à la procédure interne de règlement des griefs. À ce titre, il serait difficile pour moi de refuser d’une part d’examiner une réclamation pour négligence entraînant une perte de promotion au motif que ce dommage devrait être indemnisé au moyen de la procédure interne de règlement des griefs, puis d’autre part, d’accepter de considérer cette perte de promotion comme la continuation d’un préjudice qui sert de fondement à une demande de dommages-intérêts en vertu du paragraphe 24(1) de la Charte. Après tout, si le demandeur se prévaut de la procédure interne de règlement des griefs relativement à cette perte de promotion, comme il aurait dû le faire en premier lieu, et qu’il obtient un redressement, il n’y aura plus de « préjudice ou dommage » découlant de la perte de promotion, d’où il n’y aura plus de « continuation » ayant pour effet de situer la réclamation du demandeur à l’intérieur du délai de prescription.

 

[63]           À ce titre, je conviens avec la défenderesse que les différentes réclamations du demandeur fondées sur la Charte sont prescrites, et ces parties de la déclaration devraient donc elles aussi être radiées.

 

[64]           Par conséquent, la requête de la défenderesse en vue d’obtenir un jugement sommaire sera accueillie, puisque je ne suis pas convaincu que l’action du demandeur révèle une véritable question litigieuse.

 

4) La défenderesse est-elle empêchée par préclusion de nier les conclusions de fait de la CEPPM et du CRAPM, et la Cour devrait-elle, par conséquent, faire droit à la requête pour jugement sommaire du demandeur? Subsidiairement, la Cour devrait-elle radier les paragraphes 5, 6, 8 et 9 de la défense modifiée au motif qu’ils constituent une tentative de remettre en cause ces conclusions de fait, lesquelles ont force de chose jugée?

 

 

[65]           Le demandeur sollicite aussi un jugement sommaire, total ou partiel, contre la défenderesse, sauf pour ce qui concerne la détermination des dommages-intérêts à payer, en vertu des règles 213, 216 ou 218 des Règles de la Cour fédérale, au motif que les actes de procédure de la défenderesse allèguent certains faits à l’égard desquels la CEPPM et le CRAPM ont déjà tiré des conclusions de fait, et que la défenderesse tente donc de remettre en cause ces conclusions de fait, lesquelles ont force de chose jugée. Subsidiairement, le demandeur a demandé à la Cour de radier les paragraphes 5, 6, 8 et 9 de la défense modifiée, en vertu de la règle 221.

 

[66]           Étant donné les conclusions que j’ai tirées plus haut, il ne sera pas nécessaire d’examiner en profondeur les arguments des parties. Qu’il suffise de dire que le demandeur n’a pas réussi à établir les éléments nécessaires pour obtenir un jugement sommaire. En somme, le demandeur soutient qu’il n’y a aucune question à trancher au procès à part le montant des dommages-intérêts à payer. Pourtant, dans sa réponse à la requête pour jugement sommaire de la défenderesse, le demandeur insiste pour dire que la défenderesse s’appuie sur des faits vigoureusement contestés, ce qui soulève des questions dont la résolution exigera l’instruction d’un procès, puisque les intérêts de la justice ne seraient pas aussi bien servis si les questions de fait importantes soulevées par la défenderesse étaient tranchées selon le mode accéléré que suppose une requête pour jugement sommaire. Malheureusement, le demandeur ne peut pas gagner sur les deux tableaux.

 

[67]           Le demandeur n’a pas réussi non plus à convaincre cette Cour qu’elle devrait faire droit à la requête en radiation des paragraphes attaqués de la défense modifiée au motif qu’ils ne dévoileraient aucune défense, puisqu’il ne s’est pas acquitté du fardeau qui lui incombait de prouver que les paragraphes qu’il voulait faire radier sont si clairement dénués de pertinence, frivoles, embarrassants ou abusifs que l’affaire est évidemment désespérée et futile. En outre, je conviens avec la défenderesse que cette requête en radiation de parties de la défense modifiée pour de tels motifs aurait du être présentée beaucoup plus tôt dans l’instance (Première nation Dene Tsaa c. Canada, 2001 CFPI 820).

 

[68]           Au surplus, étant donné la décision de la Cour de faire droit à la requête en jugement sommaire de la défenderesse, il est clair que la requête du demandeur ne peut pas être accueillie. Par conséquent, la requête du demandeur en vertu des règles 213, 216 et 221 des Règles de la Cour fédérale sera rejetée.

 

ORDONNANCE

 

LA COUR ORDONNE :

1.                  La requête de la défenderesse en jugement sommaire et en radiation de la réclamation est accueillie;

2.                  La requête du demandeur en jugement sommaire et en radiation des paragraphes 5, 6, 8 et 9 de la défense modifiée est rejetée;

3.                  La présente action est donc rejetée;

4.                  Un seul mémoire de dépens en faveur de la défenderesse.

 

« Pierre Blais »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Alphonse Morissette, trad. a., LL.L.
                                                                      ANNEXE

DISPOSITIONS LÉGISLATIVES PERTINENTES

Règles de la Cour fédérale, DORS/98-106

3. Les présentes règles sont interprétées et appliquées de façon à permettre d’apporter une solution au litige qui soit juste et la plus expéditive et économique possible.

 

53. (1) La Cour peut assortir toute ordonnance qu’elle rend en vertu des présentes règles des conditions et des directives qu’elle juge équitables.

 

 (2) La Cour peut, dans les cas où les présentes règles lui permettent de rendre une ordonnance particulière, rendre toute autre ordonnance qu’elle juge équitable.

 

213. (1) Le demandeur peut, après le dépôt de la défense du défendeur — ou avant si la Cour l’autorise — et avant que l’heure, la date et le lieu de l’instruction soient fixés, présenter une requête pour obtenir un jugement sommaire sur tout ou partie de la réclamation contenue dans la déclaration.

 

 (2) Le défendeur peut, après avoir signifié et déposé sa défense et avant que l’heure, la date et le lieu de l’instruction soient fixés, présenter une requête pour obtenir un jugement sommaire rejetant tout ou partie de la réclamation contenue dans la déclaration.

 

215. La réponse à une requête en jugement sommaire ne peut être fondée uniquement sur les allégations ou les dénégations contenues dans les actes de procédure déposés par le requérant. Elle doit plutôt énoncer les faits précis démontrant l’existence d’une véritable question litigieuse.

 

216. (1) Lorsque, par suite d’une requête en jugement sommaire, la Cour est convaincue qu’il n’existe pas de véritable question litigieuse quant à une déclaration ou à une défense, elle rend un jugement sommaire en conséquence.

 

(2) Lorsque, par suite d’une requête en jugement sommaire, la Cour est convaincue que la seule véritable question litigieuse est :

a) le montant auquel le requérant a droit, elle peut ordonner l’instruction de la question ou rendre un jugement sommaire assorti d’un renvoi pour détermination du montant conformément à la règle 153;

b) un point de droit, elle peut statuer sur celui-ci et rendre un jugement sommaire en conséquence.

 

(3) Lorsque, par suite d’une requête en jugement sommaire, la Cour conclut qu’il existe une véritable question litigieuse à l’égard d’une déclaration ou d’une défense, elle peut néanmoins rendre un jugement sommaire en faveur d’une partie, soit sur une question particulière, soit de façon générale, si elle parvient à partir de l’ensemble de la preuve à dégager les faits nécessaires pour trancher les questions de fait et de droit.

 

 (4) Lorsque la requête en jugement sommaire est rejetée en tout ou en partie, la Cour peut ordonner que l’action ou les questions litigieuses qui ne sont pas tranchées par le jugement sommaire soient instruites de la manière habituelle ou elle peut ordonner la tenue d’une instance à gestion spéciale.

 

218. Lorsqu’un jugement sommaire est refusé ou n’est accordé qu’en partie, la Cour peut, par ordonnance, préciser les faits substantiels qui ne sont pas en litige et déterminer les questions qui doivent être instruites, ainsi que :

a) ordonner la consignation à la Cour d’une somme d’argent représentant la totalité ou une partie de la réclamation;

b) ordonner la remise d’un cautionnement pour dépens;

c) limiter la nature et l’étendue de l’interrogatoire préalable aux questions non visées par les affidavits déposés à l’appui de la requête en jugement sommaire, ou limiter la nature et l’étendue de tout contre-interrogatoire s’y rapportant, et permettre l’utilisation de ces affidavits lors de l’interrogatoire à l’instruction de la même manière qu’à l’interrogatoire préalable.

 

221. (1) À tout moment, la Cour peut, sur requête, ordonner la radiation de tout ou partie d’un acte de procédure, avec ou sans autorisation de le modifier, au motif, selon le cas :

a) qu’il ne révèle aucune cause d’action ou de défense valable;

b) qu’il n’est pas pertinent ou qu’il est redondant;

c) qu’il est scandaleux, frivole ou vexatoire;

d) qu’il risque de nuire à l’instruction équitable de l’action ou de la retarder;

e) qu’il diverge d’un acte de procédure antérieur;

f) qu’il constitue autrement un abus de procédure.

Elle peut aussi ordonner que l’action soit rejetée ou qu’un jugement soit enregistré en conséquence.

 

 (2) Aucune preuve n’est admissible dans le cadre d’une requête invoquant le motif visé à l’alinéa (1)a).

3. These Rules shall be interpreted and applied so as to secure the just, most expeditious and least expensive determination of every proceeding on its merits.

 

53. (1) In making an order under these Rules, the Court may impose such conditions and give such directions as it considers just.

 

 (2) Where these Rules provide that the Court may make an order of a specified nature, the Court may make any other order that it considers just.

 

213. (1) A plaintiff may, after the defendant has filed a defence, or earlier with leave of the Court, and at any time before the time and place for trial are fixed, bring a motion for summary judgment on all or part of the claim set out in the statement of claim.

 

 

 

 (2) A defendant may, after serving and filing a defence and at any time before the time and place for trial are fixed, bring a motion for summary judgment dismissing all or part of the claim set out in the statement of claim.

 

 

 

215. A response to a motion for summary judgment shall not rest merely on allegations or denials of the pleadings of the moving party, but must set out specific facts showing that there is a genuine issue for trial.

 

 

 

216. (1) Where on a motion for summary judgment the Court is satisfied that there is no genuine issue for trial with respect to a claim or defence, the Court shall grant summary judgment accordingly.

 

 

 

(2) Where on a motion for summary judgment the Court is satisfied that the only genuine issue is

(a) the amount to which the moving party is entitled, the Court may order a trial of that issue or grant summary judgment with a reference under rule 153 to determine the amount; or

(b) a question of law, the Court may determine the question and grant summary judgment accordingly.

 

 

 

 

 

(3) Where on a motion for summary judgment the Court decides that there is a genuine issue with respect to a claim or defence, the Court may nevertheless grant summary judgment in favour of any party, either on an issue or generally, if the Court is able on the whole of the evidence to find the facts necessary to decide the questions of fact and law.

 

 

 

 (4) Where a motion for summary judgment is dismissed in whole or in part, the Court may order the action, or the issues in the action not disposed of by summary judgment, to proceed to trial in the usual way or order that the action be conducted as a specially managed proceeding.

 

 

218. Where summary judgment is refused or is granted only in part, the Court may make an order specifying which material facts are not in dispute and defining the issues to be tried, including an order

(a) for payment into court of all or part of the claim;

(b) for security for costs; or

(c) limiting the nature and scope of the examination for discovery to matters not covered by the affidavits filed on the motion for summary judgment or by any cross-examination on them and providing for their use at trial in the same manner as an examination for discovery.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

221. (1) On motion, the Court may, at any time, order that a pleading, or anything contained therein, be struck out, with or without leave to amend, on the ground that it

(a) discloses no reasonable cause of action or defence, as the case may be,

(b) is immaterial or redundant,

(c) is scandalous, frivolous or vexatious,

(d) may prejudice or delay the fair trial of the action,

(e) constitutes a departure from a previous pleading, or

(f) is otherwise an abuse of the process of the Court,

and may order the action be dismissed or judgment entered accordingly.

 

 

 

 

(2) No evidence shall be heard on a motion for an order under paragraph (1)(a).

 

Loi sur la défense nationale, L.R.C. 1985, c. N-5

29. (1) Tout officier ou militaire du rang qui s’estime lésé par une décision, un acte ou une omission dans les affaires des Forces canadiennes a le droit de déposer un grief dans le cas où aucun autre recours de réparation ne lui est ouvert sous le régime de la présente loi.

 

(2) Ne peuvent toutefois faire l’objet d’un grief :

a) les décisions d’une cour martiale ou de la Cour d’appel de la cour martiale;

b) les décisions d’un tribunal, office ou organisme créé en vertu d’une autre loi;

c) les questions ou les cas exclus par règlement du gouverneur en conseil.

 

(3) Les griefs sont déposés selon les modalités et conditions fixées par règlement du gouverneur en conseil.

 

(4) Le dépôt d’un grief ne doit entraîner aucune sanction contre le plaignant.

 

 

(5) Par dérogation au paragraphe (4), toute erreur qui est découverte à la suite d’une enquête sur un grief peut être corrigée, même si la mesure corrective peut avoir un effet défavorable sur le plaignant.

 

 

 

250.38 (1) S’il l’estime préférable dans l’intérêt public, le président peut, à tout moment en cours d’examen d’une plainte pour inconduite ou d’une plainte pour ingérence, faire tenir une enquête par la Commission et, si les circonstances le justifient, convoquer une audience pour enquêter sur cette plainte.

 

269. (1) Les actions pour un acte accompli en exécution — ou en vue de l’application — de la présente loi, de ses règlements, ou de toute fonction ou autorité militaire ou ministérielle, ou pour une prétendue négligence ou faute à cet égard, se prescrivent par six mois à compter de l’acte, la négligence ou la faute en question ou, dans le cas d’un préjudice ou dommage, par six mois à compter de sa cessation.

 

29. (1) An officer or non-commissioned member who has been aggrieved by any decision, act or omission in the administration of the affairs of the Canadian Forces for which no other process for redress is provided under this Act is entitled to submit a grievance.

 

 

 

(2) There is no right to grieve in respect of

(a) a decision of a court martial or the Court Martial Appeal Court;

(b) a decision of a board, commission, court or tribunal established other than under this Act; or

(c) a matter or case prescribed by the Governor in Council in regulations.

 

(3) A grievance must be submitted in the manner and in accordance with the conditions prescribed in regulations made by the Governor in Council.

 

(4) An officer or non-commissioned member may not be penalized for exercising the right to submit a grievance.

 

(5) Notwithstanding subsection (4), any error discovered as a result of an investigation of a grievance may be corrected, even if correction of the error would have an adverse effect on the officer or non-commissioned member.

 

250.38 (1) If at any time the Chairperson considers it advisable in the public interest, the Chairperson may cause the Complaints Commission to conduct an investigation and, if warranted, to hold a hearing into a conduct complaint or an interference complaint.

 

 

 

 

269. (1) No action, prosecution or other proceeding lies against any person for an act done in pursuance or execution or intended execution of this Act or any regulations or military or departmental duty or authority, or in respect of any alleged neglect or default in the execution of this Act, regulations or any such duty or authority, unless it is commenced within six months after the act, neglect or default complained of or, in the case of continuance of injury or damage, within six months after the ceasing thereof.

 

Loi sur la responsabilité civile de l’État et le contentieux administratif, L.R.C. 1985, c. C-50

3. En matière de responsabilité, l’État est assimilé à une personne pour :

a) dans la province de Québec :

(i) le dommage causé par la faute de ses préposés,

(ii) le dommage causé par le fait des biens qu’il a sous sa garde ou dont il est propriétaire ou par sa faute à l’un ou l’autre de ces titres;

b) dans les autres provinces :

(i) les délits civils commis par ses préposés,

(ii) les manquements aux obligations liées à la propriété, à l’occupation, à la possession ou à la garde de biens.

 

 

9. Ni l’État ni ses préposés ne sont susceptibles de poursuites pour toute perte — notamment décès, blessure ou dommage — ouvrant droit au paiement d’une pension ou indemnité sur le Trésor ou sur des fonds gérés par un organisme mandataire de l’État.

 

 

 

 

10. L’État ne peut être poursuivi, sur le fondement des sous-alinéas 3a)(i) ou b)(i), pour les actes ou omissions de ses préposés que lorsqu’il y a lieu en l’occurrence, compte non tenu de la présente loi, à une action en responsabilité contre leur auteur, ses représentants personnels ou sa succession.

 

 

24. Dans des poursuites exercées contre lui, l’État peut faire valoir tout moyen de défense qui pourrait être invoqué :

a) devant un tribunal compétent dans une instance entre personnes;

b) devant la Cour fédérale dans le cadre d’une demande introductive.

 

3. The Crown is liable for the damages for which, if it were a person, it would be liable

(a) in the Province of Quebec, in respect of

(i) the damage caused by the fault of a servant of the Crown, or

(ii) the damage resulting from the act of a thing in the custody of or owned by the Crown or by the fault of the Crown as custodian or owner; and

(b) in any other province, in respect of

(i) a tort committed by a servant of the Crown, or

(ii) a breach of duty attaching to the ownership, occupation, possession or control of property.

 

9. No proceedings lie against the Crown or a servant of the Crown in respect of a claim if a pension or compensation has been paid or is payable out of the Consolidated Revenue Fund or out of any funds administered by an agency of the Crown in respect of the death, injury, damage or loss in respect of which the claim is made.

 

10. No proceedings lie against the Crown by virtue of subparagraph 3(a)(i) or (b)(i) in respect of any act or omission of a servant of the Crown unless the act or omission would, apart from the provisions of this Act, have given rise to a cause of action for liability against that servant or the servant’s personal representative or succession.

 

24. In any proceedings against the Crown, the Crown may raise

(a) any defence that would be available if the proceedings were a suit or an action between persons in a competent court; and

(b) any defence that would be available if the proceedings were by way of statement of claim in the Federal Court.

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        T-1015-05

 

INTITULÉ :                                       TIMOTHY C. HAMM et

SA MAJESTÉ LA REINE

                                                           

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Ottawa (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Les 8 et 9 mai 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              Monsieur le juge Blais

 

DATE DU JUGEMENT :                 Le 6 juin 2007

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Laura C. Snowball                                                                    POUR LE DEMANDEUR

                                                                                               

 

R. Jeff Anderson                                                                       POUR LA DÉFENDERESSE

                                                                                               

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Burnet, Duckworth & Palmer, LLP                                           POUR LE DEMANDEUR

Calgary (Alberta)

 

John Sims, c.r.                                                                         POUR LA DÉFENDERESSE

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

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