Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

 

 

 

Date : 20070905

Dossier : IMM-4906-06

Référence : 2007 CF 886

Ottawa (Ontario), le 5 septembre 2007

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE MOSLEY

 

ENTRE :

MOHAMMAD REZA ASHOFTEH YAZDI

MARYAM ASHOFTEH YAZDI

KIMIA ASHOFTEH YAZDI

demandeurs

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Les demandeurs, Mohammad Reza Ashofteh Yazdi, son épouse Mary Ashofteh Yazdi et leur fille Kimia, sont des citoyens de l’Iran. Ils demandent le contrôle judiciaire d’une décision de la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié datée du 9 août 2006, dans laquelle la commissaire a conclu qu’ils n’avaient ni qualité de réfugiés au sens de la Convention, ni qualité de personnes à protéger. Pour les motifs ci-dessous, je conclus qu’il n’y a pas de raison de modifier cette décision et la présente demande est rejetée.

 

[2]               Comme la commissaire l’a énoncé dans ses motifs, les demandeurs prétendaient craindre d’être persécutés par les autorités iraniennes « en raison de leur prétendu comportement immoral en tant que locateurs de chambres à des étudiants qui se sont mal conduits en l’absence des locateurs », dont ils ont été tenus responsables. Les demandeurs habitaient une grande maison dont le propriétaire, un parent éloigné, résidait en Allemagne. Pour se faire des revenus, ils louaient des chambres à des étudiants, uniquement des filles au départ, mais également aux hommes à partir de 2002.

 

[3]               Alors que les demandeurs étaient partis pour une semaine en 2004, les jeunes, comme de coutume, ont organisé une fête. Les voisins ont appelé la police, laquelle aurait trouvé des éléments compromettants qui semblaient indiquer qu’il y avait eu des activités de nature sexuelle sur les lieux. Les demandeurs ont été accusés d’exploiter un bordel et un avocat leur a conseillé de quitter l’Iran. Ils se sont rendus à un port où ils sont montés à bord d’un cargo à destination du Canada. Ils prétendent avoir ignoré le nom du cargo, les endroits où il s’est arrêté pendant les quarante‑deux jours qu’a durés le voyage ou sa destination jusqu’à leur débarquement secret la nuit à Vancouver le 15 mars 2005.

 

DÉCISION :

 

[4]               La commissaire a conclu qu’il n’y avait pas assez d’éléments de preuve crédibles à l’appui des revendications. En particulier, elle a conclu qu’aucune preuve documentaire ne démontrait que les demandeurs se trouvaient en Iran en 2004 et qu’il n’existait pas assez d’éléments pour prouver que le prétendu incident entre les étudiants et la police avait eu lieu. Aucune preuve documentaire ne confirmait le moment où les demandeurs avaient quitté l’Iran. La commissaire a estimé que le voyage des demandeurs au Canada ne s’était pas déroulé tel qu’ils l’ont décrit. Elle a conclu qu’il était invraisemblable que les demandeurs n’aient pas été en mesure de fournir les renseignements que peut raisonnablement connaître une personne au sujet du voyage en bateau s’ils donnaient un compte rendu d’une expérience vécue et non d’une expérience inventée.

 

QUESTION EN LITIGE :

[5]               L’unique question est de savoir si le tribunal a commis une erreur dans son appréciation de la crédibilité des demandeurs.

 

ANALYSE :

 

[6]               La conclusion relative à la crédibilité est « essentiellement de nature factuelle » : voir Dr Q c. College of Physicians and Surgeons of British Columbia, [2003] 1 R.C.S. 226, au paragraphe 38. La norme de contrôle est par conséquent celle de la décision manifestement déraisonnable : Chowdhury c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 139, au par. 12.

 

[7]               Les demandeurs ont fait valoir que les conclusions quant à la crédibilité fondées sur leur incapacité de produire les documents de l’Iran sont manifestement déraisonnables. La commissaire devait tenir compte de l’ensemble de la preuve. Elle n’a pas tenu compte, comme il le fallait, des explications des demandeurs relativement à leur incapacité de fournir la documentation iranienne et s’est concentrée sur des questions secondaires comme la présence des parents de Mme Yazdi aux États-Unis et l’invraisemblance de la description du voyage sur le navire.

 

[8]               Il ressort clairement des motifs de la commissaire qu’elle n’a pas cru que l’incident impliquant les étudiants avait eu lieu et que cela était la cause de leur départ de l’Iran. Si la Commission ne croit pas qu’un incident principal est survenu et que cette conclusion n’est pas manifestement déraisonnable, les autres erreurs reprochées à la Commission n’ont guère de pertinence : Yang c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1995] A.C.F. nº 121 (QL).

 

[9]               Selon moi, compte tenu de la preuve, la commissaire pouvait tirer cette conclusion. Les demandeurs n’ont pas été à mesure de fournir une preuve documentaire suffisante étayant l’allégation selon laquelle ils étaient en Iran pendant la période pertinente. Le demandeur principal n’avait aucune pièce d’identité datant d’après 2001. Une lettre de l’établissement où il travaillait auparavant, datée du 7 octobre 2004, indique qu’il [traduction] « travaillait » dans cette entreprise. Au mieux, une ambiguïté subsiste quant au moment où l’emploi a pris fin.

 

[10]           À la demande du tribunal, une lettre a été obtenue du propriétaire de la maison qui réside en Allemagne. Ce dernier a confirmé avoir donné aux demandeurs l’autorisation de louer ses chambres en 2000, mais il ne dit pas qu’il a payé une amende aux autorités iraniennes en raison de l’inconduite des étudiants pour reprendre possession de sa maison, comme l’ont allégué les demandeurs. On lui avait demandé de produire des factures relatives à la maison, mais rien n’a été fait dans ce sens et aucune explication relative à cette omission n’a été fournie. Les demandeurs ont soutenu que toutes les factures pour les services publics et les taxes étaient établies au nom du propriétaire et qu’ils les avaient payées en son nom, mais ils n’avaient aucun document pour le prouver. Ils ne possédaient aucune photographie d’eux prise dans la maison.

 

[11]           La commissaire a souligné que la lettre du propriétaire de la maison n’était pas appuyée d’un serment et que ce dernier n’a pas pu être contre-interrogé. Les demandeurs soutiennent que ce facteur n’autorise pas le tribunal à écarter la preuve : Fajardo c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), 1993 A.C.F. 915. Or ce n’est pas ce qu’a fait la commissaire. Elle a examiné la lettre et a apprécié son contenu. L’importance qu’il convenait d’accorder à cette preuve se situait tout à fait dans le cadre de l’exercice du pouvoir décisionnel discrétionnaire du tribunal et la Cour ne doit pas soupeser à nouveau la preuve : Suresh c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CSC 1, au par. 39.

 

[12]           Par conséquent, je conclus que la décision n’est pas manifestement déraisonnable et que la demande est rejetée. Aucune question grave de portée générale n'a été proposée et aucune question ne sera certifiée.

 

 

JUGEMENT

 

LA COUR STATUE que la demande est rejetée. Aucune question n’est certifiée.

 

« Richard G. Mosley »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

Aude Megouo

 


COUR FÉDERALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM-4906-06

 

INTITULÉ :                                       MOHAMMAD REZA ASHOFTEH YAZDI,

                                                            MARYAM ASHOFTEH YAZDI,

                                                            KIMIA ASHOFTEH YAZDI

 

                                                            ET

                                                           

                                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                                            ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               LE 29 AOÛT 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT :            LE JUGE MOSLEY

 

DATE DES MOTIFS :                      LE 5 SEPTEMBRE 2007

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Lorne Waldman

 

POUR LES DEMANDEURS

Marina Stefanovic

 

                    POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

LORNE WALDMAN

& Associates

Toronto (Ontario)

 

POUR LES DEMANDEURS

JOHN H. SIMS, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

                    POUR LE DÉFENDEUR

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.