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Date : 20071101

Dossier : T-754-07

Référence : 2007 CF 1131

[TRADUCTION FRANÇAISE]

Ottawa (Ontario), Le 1er novembre 2007

                        En présence de monsieur le juge Lemieux

 

 

ENTRE :

LA PREMIÈRE NATION TZEACHTEN

LA PREMIÈRE NATION SKOWKALE, et

LA PREMIÈRE NATION YAKWEAKWIOOSE

 

Demanderesses

et

 

PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

SOCIÉTÉ IMMOBILIÈRE DU CANADA LIMITÉE, et

SOCIÉTÉ IMMOBILIÈRE DU CANADA SIC LIMITÉE, et

 

Défendeurs

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

I.  Introduction

[1]               La Cour est saisie de deux requêtes :

 

(a)   Une requête du Procureur général du Canada (Canada) déposée le 17 août 2007 demandant la radiation de la demande de contrôle judiciaire des demanderesses déposée le 3 mai 2007 au motif qu’elle a été présentée hors. La demande de contrôle judiciaire vise une décision fédérale rendue et communiquée en 2003; subsidiairement, le Canada demande une ordonnance de notre Cour exigeant des demanderesses qu’elles obtiennent une ordonnance de prorogation avant que la procédure se poursuive.

 

(b)   Subsidiairement, un avis de requête des demanderesses demandant une prorogation du délai pour déposer sa demande de contrôle judiciaire. La requête en prorogation de délai des demanderesses est avancée subsidiairement, car elles soutiennent que le délai de 30 jours permettant de contester une décision ou une ordonnance d’un tribunal fédéral ne s’applique pas à l’espèce des suites de la décision de la Cour d’appel dans Krause c. Canada, [1999] F.C.J. no 179.

 

[2]               Les parties étaient d’accord avec la suggestion de la Cour voulant que la requête de prorogation de délai des demanderesses ainsi que leur argumentaire en regard de Krause, précitée, doive être tranchée en premier lieu, car la décision de notre Cour en regard de ces deux éléments était déterminante pour les deux requêtes.

 

II.  Faits

[3]               Les demanderesses sont des communautés de la tribu Chilliwack ayant des réserves indiennes à l’intérieur des limites de la ville de Chilliwack, située à proximité de terres comprenant l’ancienne Base des Forces canadiennes (BFC) de Chilliwack (la Base). La tribu Chilliwack est un sous-groupe au sein des Sto:lo, qui font partie du peuple autochtone des Salish du littoral.

 

[4]               La demande de contrôle judiciaire, visée par les deux requêtes, portent sur une décision rendue par le Conseil du trésor à une date inconnue des demanderesses visant à transférer à la Société immobilière du Canada SIC limitée (SIC) pratiquement toutes les terres restantes dans l’inventaire de terres de la Base. SIC est une filiale sous propriété exclusive de la Société immobilière du Canada (SIC mère). Les terres visées par la demande de contrôle judiciaire sont dites la Parcelle C, comprenant deux zones connues sous les noms du « champ de tir » et du « promontoire », lesquelles entourent généralement la réserve de la première demanderesse, la Première nation Tzeachten (les Tzeachten).

 

[5]               À même cette demande, les demanderesses cherchent également une mesure de réparation [traduction] « eu égard aux obligations légales du ministre de la Défense nationale (MDN), de la SIC mère et de la SIC de consulter avec les demanderesses et d’accommoder leurs intérêts en lien avec les terres de la BFC de Chilliwack », puis une injonction pour restreindre tout autre transfert de terres de la BFC de Chilliwack à la SIC. Plus particulièrement, elles demandent les suivantes :

 

(i)    un jugement déclaratoire quant à l’invalidité ou à l’illégalité du transfert de terres à la SIC;

 

(ii)   un jugement déclaratoire voulant que le Conseil du trésor et le MDN avait, depuis le 16 juin 2000, à l’instar de la SIC et de la SIC mère puisqu’elles ont acquis le titre sur la Parcelle C, l’obligation légale de consulter les demanderesses et de les accommoder avant de transférer, de vendre, ou d’aliéner ou développer autrement [...] le champ de tir ou le promontoire.

 

(iii)  une ordonnance de mandamus enjoignant au MDN, à la SILC mère et à la SILC de consulter les demanderesses et de les accommoder en regard de la Parcelle C; et

 

(iv)  une ordonnance de la nature d’une injonction empêchant la SILC de transférer, de vendre ou d’aliéner autrement toute autre terre de la Parcelle sans l’accord des demandeurs ou toute autre ordonnance de la Cour.

 

[6]               Les demanderesses ont explicitement indiqué qu’elles ne cherchaient aucune réparation en lien avec la vente de 14 acres de la Parcelle C au Conseil scolaire de Chilliwack par la SILC en 2004.

 

[7]               Les demanderesses avancent deux revendications distinctes en lien avec la Parcelle C. En premier lieu, elles revendiquent que la Parcelle C a été établie autour de 1864 à partir de terres de la réserve illégalement d’abord pour l’établissement de non-autochtones, puis pour l’établissement de la Base. La deuxième revendication est que la Parcelle C figure parmi les territoires traditionnels de la tribu Chilliwack de Sto:lo; conséquemment, elle est visée par les titres et les droits ancestraux non éteints des demanderesses. La revendication relative à la réserve a été entreprise en 1988 par les demanderesses ainsi que d’autres communautés Sto:lo conformément à la politique des revendications particulières du gouvernement fédéral. En 1999, les fonctionnaires fédéraux ont refusé de reconnaître la revendication relative à la réserve en qualité de revendication particulière. La question a été portée en appel devant la Commission des revendications des Indiens; l’appel est présentement suspendu.

 

[8]               La revendication quant au titre ancestral fait l’objet de négociations de traités depuis 1995 lorsque 18 communautés de Sto:lo, y compris les demanderesses, ont déposé une déclaration d’intention de négocier un traité sous les auspices de la Commission des traités de la Colombie-Britannique (la CTCB) à propos des territoires traditionnels, ce qui comprend la Parcelle C. Les négociations sont présentement à l’étape 4 du processus en six étapes de la CTCB, soit celle où les parties négocient une entente de principes.

 

[9]               La requête des demanderesses visant une prorogation du délai est appuyée de l’affidavit de Joseph Hall, le chef élu des Tzeachten. Il n’a pas été soumis à un contre-interrogatoire. Entre autres, le chef Hall a fait état des discussions intervenues avec le gouvernement fédéral et la SILC avant juin 2000, plus précisément de 1996 à juin 2000, quant aux terres de la BFC de Chilliwack ainsi que des revendications des demanderesses quant à la Parcelle C, tant du point de vue la revendication relative à la réserve qu’au titre ancestral revendiqué. Le chef Hall a décrit leur besoin pressant d’obtenir des terres pour loger la population croissante de la réserve, ainsi que pour répondre aux besoins sociaux et économiques des générations actuelles et futures. Il a affirmé que la réserve disposait seulement de 30 acres pour sa croissance.

 

[10]           Le chef Hall a fait référence à la suggestion informelle du Canada voulant que les demanderesses abandonnent leurs revendications en regard des terres de la Base en échange de terres situées plusieurs kilomètres plus loin dans la vallée Columbia, d’une partie du champ de tir, voire d’autres terres dans la vallée de Chilliwack qui pourraient être éventuellement disponibles. Cette offre informelle a été rejetée. Les Premières nations ont déposé une contre-offre voulant que le Canada achète les terres de la Base à leur juste valeur marchande. Il conclut en affirmant que le Canada a mis fin aux discussions à la suite de cette offre et [traduction] « qu’il n’a pas fait d’autre proposition dans le but d’arriver à un terrain d’entente entre nos positions respectives ». Le gouvernement a simplement procédé à fermeture de la BFC de Chilliwack, puis au transfert des terres à la SILC à des fins de vente de développement, selon le chef Hall.

 

[11]           Le chef Hall a ensuite abordé ce qu’il appelle la décision de juin 2000 figurant dans une lettre adressée à l’avocat des demanderesses par le directeur de la Division de la gestion des biens immobiliers du Conseil du Trésor et datée du 16 juin 2000.

 

[12]           Dans cette lettre, il était mentionné que le Canada avait décidé de vendre la Parcelle A des terres de la Base à la SILC [traduction] « à des fins d’améliorations pour en rehausser la valeur, puis de vente ». La lettre mentionnait également les suivantes :

 

•      Les 2/3 des terres de la Bande, y compris la Parcelle C, seraient conservées dans l’inventaire fédéral pendant deux ans afin de permettre la tenue de discussions sur ces terres dans le cadre du processus de négociation de traité; et

 

•      Le MDN allait coordonner la gestion des terres ainsi conservées. La SILC mènerait les discussions sur le réaménagement de la Base et aurait pour mandat de tenir compte des mesures socioéconomiques de la ville de Chilliwack ainsi que des communautés des Premières nations de Sto:lo.

 

•      Affaires indiennes et du Nord Canada (AINC) mènerait les discussions quant aux traités, y compris le choix des terres; et

 

•      Le ministère de la Défense nationale (MDN), la SILC et AINC procéderont rapidement quant à leurs responsabilités eu égard aux terres de la Base.

 

[13]           Le chef Hall affirme que les demanderesses n’ont pas été consultées en regard de la décision de fermeture de juin 2006 ainsi que sur les modalités de celle-ci. Les demanderesses, ainsi qu’une autre Première nation, ont entrepris des procédures judiciaires pour contester la décision de juin 2000. Finalement, cette procédure en Cour fédérale a été abandonnée après que la SILC eut vendu la Parcelle A à des fins de développement et que les Premières nations n’eurent pas réussi à empêcher son transfert.

 

[14]           Le chef Hall indique qu’il n’y a eu aucune autre discussion entre le Canada, la SILC et les demanderesses en regard des terres restantes de la Base depuis la décision de juin 2000 et l’abandon de la procédure devant la Cour fédérale. Il affirme qu’aucun fonctionnaire fédéral n’a tenté d’entreprendre des discussions avec lui ou, à sa connaissance, avec tout autre représentant des demanderesses, quant aux questions entourant les terres de la Bande, que ce soit en lien avec la revendication liée à la réserve ou avec le titre ancestral revendiqué.

 

[15]           Le chef Hall aborde ensuite ce qu’il nomme la décision de transfert. Il évoque [traduction] « à un moment donné, et sans discussion ou consultation préalables avec les Premières nations demanderesses, le Canada a décidé de transférer pratiquement toutes les terres restantes de la BFC de Chilliwack, y compris la Parcelle C, à la SILC ». Il affirme que le Canada n’a pas communiqué la décision de transfert aux demanderesses à l’époque, et encore à ce jour.

 

[16]           Il mentionne une lettre datée du 8 août 2003 du MDN affirmant [traduction] « le gouvernement fédéral a autorisé la vente du reste des terres excédentaires de la Base à la SILC » puis que [traduction] « le transfert sera complété au cours des mois à venir ». Le deuxième paragraphe de cette lettre indiquait que la démarche de la SILC quant à la planification du réaménagement de ces terres « comprendra un processus de consultation publique invitant toutes les parties intéressées à des discussions exhaustives. Je vous encourage à effectuer le suivi auprès de la Société immobilière afin que votre point de vue sur l’avenir de ces terres puisse être pris en compte ».

 

[17]           Le chef Hall a été informé par le brigadier général Irwin du MDN, avant la décision de transfert et dans une lettre datée du 26 juin 2002, que la période deux ans citée dans la lettre du 16 juin 2002 était expirée que AINC avait décidé de ne pas acquérir d’autres terres de l’ancienne BFC de Chilliwack à des fins d’un traité définitif. Il a ainsi été informé que le MDN s’apprêtait à remettre les terres au Conseil du trésor [traduction] « conformément au plan d’aliénation de juin 2000 visant le reste des terres de Chilliwack ».

 

[18]           Le chef Hall a ensuite abordé le plan du Conseil scolaire de Chilliwack visant à acquérir une part de la Parcelle C de la SILC afin d’y établir une nouvelle école secondaire. Après en avoir fait la demande, les demanderesses ont appris le 12 mai 2004, de la voix de l’avocat pour la Colombie-Britannique de la SILC, que le titre de la Parcelle C, y compris les terres visées par le projet d’école secondaire, avait été transféré à la SILC. Il soutient qu’aucune communication n’a eu lieu avec la nation Sto:lo à propos du projet d’école en dépit de leur demande de consultation et d’accommodement du 19 août 2004. Finalement, le 14 décembre 2004, l’avocat de la CILC a affirmé que la SILC ne consulterait pas les Tzeachten sur quelque question que ce soit quant aux terres de la Base, car elle n’était pas un agent de la Couronne fédérale. En outre, SILC est assimilable à la tierce partie dans Nation Haïda c. Colombie-Britannique [2004], 3 R.C.S. 511, a-t-il soutenu.

 

[19]           L’avocat des Tzeachten a ensuite écrit au Conseil du trésor le 22 décembre 2004 à propos du transfert de la Parcelle C à la SILC aux fins d’aliénation, en dépit du fait qu’il n’y ait eu aucune consultation. La Première nation a été informée par le Conseil du trésor que [traduction] « la responsabilité ministérielle du projet a été transférée du Conseil du trésor au MDN en juillet 2000, soit au moment de l’approbation de la transaction d’origine ». L’avocat des Tzeachten s’est ensuite adressé par lettre au directeur général de Planification et Politiques immobilières au MDN le 11 février 2005 au sujet de l’absence de consultation et d’accommodement. L’avocat à Justice Canada lui a répondu le 23 mars 2005. Il a affirmé que des discussions avaient eu lieu jusqu’à juin 2002 afin de sélectionner des terres aux fins des négociations de traité, mais qu’aucune entente n’avait été conclue. L’avocat de Justice Canada a soutenu qu’il avait été informé des faits suivants : le Conseil du trésor a autorisé le transfert des terres du MDN à la SILC en juin 2003 et les Premières nations avaient été informées de ceci en août 2003, mais le MDN n’avait reçu aucune réponse de leur part. Il a indiqué que le transfert avait eu lieu en mars 2004. Il a affirmé qu’il estimait que le Canada avait rempli toute obligation de consulter en lien avec les terres de la Base.

 

[20]           Le 6 juin 2005, les demanderesses dans l’espèce ont intenté un recours collectif à la Cour suprême de la Colombie-Britannique à l’encontre du Canada, de la SILC et de la SILC mère. La demande de contrôle judiciaire subséquente déposée devant notre Cour le 3 mai 2007 et visée par les deux requêtes de l’espèce reprend les faits, l’obligation de consulter et d’accommoder ainsi que la mesure de réparation de cette première procédure.

 

[21]           Le procureur général du Canada a demandé à la Cour suprême de la Colombie-Britannique de le radier des défendeurs du recours collectif. La SILC et la SILC mère n’ont pas contesté la compétence de la Cour suprême de la Colombie-Britannique. Le juge en chambre a rejeté la requête en radiation du procureur général, mais cette décision a été infirmée à l’unanimité par les membres du banc de la Cour d’appel de la Colombie-Britannique le 3 mars 2007 (voir Chief Joe Hall c. Canada (Procureur général), 2007 BCCA 133).

 

[22]           Dans la procédure en Colombie-Britannique, le Canada a soutenu que la Cour fédérale avait la compétence exclusive sur le dossier; c’est-à-dire quant aux réclamations à l’encontre du Conseil du trésor et du MDN, tandis que les Premières nations demanderesses ont avancé que la Cour suprême de la Colombie-Britannique et la Cour fédérale avaient une compétence concurrente en regard des questions soulevées dans leur déclaration.

 

[23]           Le juge en chef Finch a tenu les propos suivants aux paragraphes 46 et 51 :

 

[traduction]

[46]      La question fondamentale en l’espèce telle qu’avancée par les intimés dans leur déclaration est à savoir si la décision d’août 2003 du Conseil trésor, sur recommandation du ministre de la Défense, était inopérante et donc, si le transfert subséquent du titre à la SILC était illégal ou invalide. Il pourrait bien être judicieux de déterminer si la Couronne fédérale a omis à son obligation de consulter à même l’examen de légalité de la décision du Conseil du trésor. Or, peu importe le résultat d’une décision (présumant qu’elle est rendue par la Cour fédérale du Canada), une cour supérieure provinciale ne sera jamais en position d’avoir à faire respecter ou à appliquer une loi fédérale invalide. Si la Cour fédérale du Canada décide que la Couronne a manqué à son obligation de consulter, notre Cour pourrait accorder une réparation appropriée. Une telle décision ne viendrait aucunement nuire à la compétence de la Cour suprême de la Colombie-Britannique, ou la limiter, de statuer dans d’autres dossiers incluant une obligation de consulter comme elle le juge appropriée en regard du droit et des faits présentés.

 

[51]      Il restera les réclamations à l’encontre des deux autres défendeurs. L’avocat de la Couronne a accepté durant ses observations verbales que la Cour fédérale du Canada aurait également la compétence en regard des deux sociétés, y compris la filiale laquelle n’est pas un agent de la Couronne. Étant donné que seule la Cour fédérale a la compétence pour entendre les réclamations contre le Procureur général du Canada, il serait plus pratique de présenter les réclamations à l’encontre des trois défendeurs devant la Cour fédérale.

 

 

III.  Discussion

 

[24]           Deux questions doivent être tranchées dans le cadre de la requête subsidiaire des demanderesses visant à obtenir une prorogation du délai pour entreprendre la présente demande de contrôle judiciaire :

 

1.    Est-ce que les principes de Krause, précitée, s’appliquent de façon à rendre facultatif le délai de 30 jours?

 

2.    Si Krause ne s’applique pas à l’espèce, les demanderesses ont-elles satisfait au critère pour obtenir une prorogation de délai?

 

[25]           Bien que représentées par leur avocat à l’audience devant moi, la SILC et la SILC mère n’ont adopté aucune position quant à aucune question des deux requêtes. Leur avocat avait produit de brèves observations écrites auxquelles il n’a pas fait allusion.

 

1. L’applicabilité de Krause, précitée

[26]           L’avocat des demanderesses soutient que les principes de Krause s’appliquent à l’espèce. Il avance que les demanderesses cherchent à obtenir un contrôle judiciaire en vertu de l’article 18.1 de la conduite de fonctionnaires fédéraux dans le cadre de plusieurs mesures; par conséquent, le délai maximal de 30 jours prévu au paragraphe 18.1(2) n’est pas applicable. Il soutient que l’espèce découle du défaut soutenu de la Couronne de s’acquitter de son obligation de consulter les demanderesses et de les accommoder. Les demanderesses avancent que la jurisprudence établit clairement que l’obligation de la Couronne est actuelle et continue et qu’elle ne se limite pas à une décision. En outre, la Cour fédérale a la compétence lui permettant de s’assurer que les représentants de la Couronne fédérale se conforment à cette obligation sans se limiter à une décision précise.

 

[27]           Je suis de l’avis que le raisonnement énoncé dans Krause, précitée, s’applique à l’espèce et qu’ainsi, aucune prorogation de délai n’est nécessaire lorsque l’objet principal du litige est d’obtenir une mesure de réparation dans un cas où l’obligation de consulter et d’accommoder les intérêts autochtones et des réserves est engagée. La réparation demandée dans l’espèce est une combinaison de jugements déclaratoires, d’interdiction et d’ordonnance de mandamus. En outre, il s’agit de trois types de réparations parmi celles identifiées par le juge Stone, dans Krause, précitée au paragraphe 23, comme n’étant pas visées par le délai fixé par le paragraphe 18.1(2).

 

[28]           Au paragraphe 17, le juge Stone a statué que la présentation du paragraphe 18.1(2) se voulait plus une mesure préventive, plutôt que corrective, afin de permettre une forme de surveillance judiciaire, non pas des tribunaux administratifs, mais des autorités administratives en général. Voir également ses commentaires aux paragraphes 16 et 18 quant à l’ordonnance de mandamus et au jugement déclaratoire.

 

[29]           Les réparations demandées par les demandeurs dans l’espèce ne visent pas à annuler ou à écarter la décision d’un tribunal fédéral; par conséquent, elles sont, à mon sens, particulièrement adaptées aux dossiers où l’obligation de consulter et d’accommoder les Premières nations est en cause.

 

[30]           Mon point de vue provient du raisonnement sous-jacent aux motifs de la juge en chef dans Haïda, précitée, alors qu’elle a tranché que la Couronne avait une obligation légale de consulter et d’accommoder dans le contexte des droits ancestraux revendiqués, mais non encore établis. L’obligation légale de consulter et d’accommoder a été perçue par la Cour suprême du Canada comme un mécanisme découlant de l’honneur de la Couronne et se voulant comme une alternative à l’injonction interlocutoire. L’obligation légale de consulter et d’accommoder vient essentiellement préserver le titre et les droits ancestraux jusqu’à ce qu’ils soient établis, ce qui peut prendre un temps considérable. La juge en chef a statué que l’obligation de consulter naît lorsqu’un représentant de la Couronne a connaissance, concrètement ou par imputation, de l’existence potentielle d’un titre ou de droits ancestraux et envisage des mesures susceptibles d’avoir un effet préjudiciable sur ces droits ou ce titre. Elle a également statué que le contexte de l’obligation de consulter variait selon la solidité du droit revendiqué et de l’effet préjudiciable éventuel de la décision en regard du titre et du droit revendiqué.

 

[31]           Dans Harold Leighton et al c. Sa Majesté la Reine du Chef du Canada, représentée par le Procureur général du Canada, 2007 CF 553, notre Cour est parvenue à la même conclusion quant à l’applicabilité des principes de Krause, précitée, dans des circonstances semblables à l’espèce, nommément que l’obligation de consulter et d’accommoder avait été déclenchée (voir paragraphes 50 et 58).

 

[32]           Je remarque également que mon collègue le juge Phelan, rejetant la requête en radiation de la Couronne pour cause de présentation au-delà des 30 jours permis, avait adopté un point de vue semblable à Krause dans Airth c. Ministre du Revenu national, 2006 CF 1442. Par ailleurs, il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire.

 

[33]           Ma conclusion quant à l’applicabilité des principes énoncés dans Krause, précitée, s’accorde bien au raisonnement de la Cour d’appel de la Colombie-Britannique dans Chief Joe Hall, précitée, laquelle a reconnu la compétence exclusive de la Cour fédérale en regard du contrôle judiciaire de dossiers où l’obligation de consulter les Autochtones était soulevée à l’encontre d’une entité fédérale.

 

[34]           L’application de Krause, dans l’espèce, s’harmonise également bien avec les commentaires formulés par la juge Southin dans Musqueam Indian Band c. British Columbia (Minister of Sustainable Resource Management, dossier : CA031826, un autre dossier concernant l’obligation de consulter. Dans ce dossier, la juge Southin avait avancé que la loi sur la procédure de contrôle judiciaire de la Colombie-Britannique [traduction] « n’était pas appropriée au traitement des réclamations de l’espèce, car l’appelante ne soutient pas que la transaction en cause est interdite par une loi. En d’autres termes, elle n’avance aucun motif de nature administrative ». Au paragraphe 17, elle a soutenu que [traduction] « les dossiers émanant des revendications territoriales autochtones portent, de nature, non pas à savoir si les pouvoirs conférés par une législation sont bien exercés, mais sur une obligation constitutionnelle générale ».

 

2. La requête en prorogation de délai des demanderesses

[35]           Advenant que j’aie commis une erreur en appliquant les principes de Krause, précitée, à l’espèce, je suis de l’avis que la requête en prorogation de délai des demanderesses devrait avoir gain de cause. Dans Harold Leighton, précitée, j’ai eu l’occasion de résumer un principe réaffirmé par la Cour d’appel fédérale des principes pertinents quant aux circonstances justifiant l’attribution d’une prorogation de délai. Ces principes sont énoncés aux paragraphes 33, 34 et 41 de cette décision, et je cite :

 

[33]     Accorder ou rejeter une demande de prorogation du délai prévu pour l’introduction d’une procédure de contrôle judiciaire relève d’un pouvoir discrétionnaire qui doit être exercé d’après les principes applicables. Ces principes sont bien établis depuis un arrêt de la Cour d’appel fédérale, Grewal c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) [1985] 2 C.F. 263, qui fait aujourd’hui jurisprudence.

[34]     D’après l’arrêt Grewal ainsi que d’autres arrêts de la Cour d’appel fédérale, la tâche à accomplir est la suivante :

• plusieurs facteurs ou considérations doivent être pris en compte dans l’exercice du pouvoir discrétionnaire;

• ces facteurs sont les suivants : (1) l’intention constante de déposer la demande, (2) l’absence de préjudice pour la partie adverse, (3) le motif du délai, (4) le bien‑fondé de la demande, à savoir si elle repose sur des arguments défendables (ci‑après le critère en quatre volets), et (5) tous les autres facteurs pertinents propres à l’affaire [c’est moi qui souligne], voir l’arrêt James Richardson International Ltd. c. Canada [2006] A.C.F. 180, paragraphes 33 à 35;

• ainsi que l’expliquait la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Jakutavicius c. Canada (Procureur général) [2004] CAF 289, ces facteurs ou considérations ne sont pas des règles qui entravent le pouvoir discrétionnaire de la Cour. Après que sont choisis les facteurs ou considérations à retenir, un poids suffisant doit être accordé à chacun d’eux;

le poids à accorder à chacun des facteurs ou considérations variera selon chaque cas d’espèce (Stanfield c. Canada, 2005 CAF 107);                        

• Le principal facteur à prendre en compte dans une demande de prorogation de délai est la nécessité de faire en sorte que justice soit rendue entre les parties. La prise en compte des facteurs accessoires compris dans le critère en quatre volets, à savoir l’intention constante de déposer la demande, l’existence d’arguments défendables, motif du délai et l’absence de préjudice pour la partie adverse, constitue un moyen de garantir l’accomplissement du critère principal, celui de faire en sorte que justice soit rendue entre les parties. Une prorogation de délai peut être accordée même si l’un des facteurs accessoires n’est pas respecté (Ministre du Développement des ressources humaines c. Hogervrost, 2007 CAF 41; et

• les facteurs compris dans le critère ne sont pas conjonctifs (arrêt Grewal, précité, aux pages 11 et 13).       

[41]     En guise d’observation générale, je dirais que les défendeurs ont adopté une approche rigide à propos du pouvoir discrétionnaire de la Cour lorsqu’elle est saisie d’une requête en prorogation de délai. Cette approche a été écartée par la Cour d’appel fédérale, pour qui il fallait faire preuve de souplesse pour ce qui est de l’examen des facteurs propres à chaque cas d’espèce, de l’importance à accorder à chacun des facteurs variant selon les circonstances de chaque cas et de la mise en balance de tous les facteurs, afin qu’il en résulte une solution équitable pour les deux parties. 

 

[36]           Avant d’analyser et de pondérer les facteurs pertinents à une prorogation de délai, je souligne un élément qui semble étrange à notre Cour : il s’agit de l’existence et de la communication de la décision pertinente. Parallèlement à leur demande de contrôle judiciaire, les demanderesses ont demandé, en vertu de l’article 317 des Règles des Cours fédérales, 1998 à recevoir les documents que le tribunal a en sa possession quant au dossier. La Couronne fédérale s’est opposée à la divulgation en invoquant, le 1er octobre 2007, le certificat signé par Kevin G. Lynch, greffier du Conseil privé de la Reine pour le Canada et secrétaire du Cabinet, et l’article 39 de la Loi sur la preuve au Canada par rapport à trois documents :

 

        Série de courriels échangés entre différents fonctionnaires du Conseil du trésor et du MDN le 13 mars 2003, le 20 mars 2003 et le 3 juin 2003 à propos d’une soumission au Conseil du trésor et d’un précis;

 

        Ébauche de soumission au Conseil du trésor préparée par le ministre de la Défense nationale, non daté [préparé le 25 février 2003 ou autour de cette date]; et

 

        Décision du Conseil du trésor transmise au sous-ministre de la Défense nationale par le sous-secrétaire, Secteur des opérations gouvernementales du Secrétariat du Conseil du Trésor, datée du 18 juin 2003 et les pièces jointes;

 

Je remarque que le délai pour déposer une demande de contrôle judiciaire en vertu du paragraphe 18.1(1) ne commence pas à courir avant que la décision ou l’ordonnance soit d’abord communiquée par l’office fédéral à la partie directement touchée par celle-ci.

 

[37]           Bien que je n’aie pas à trancher cette question, il subsiste un certain doute à savoir quand la décision appropriée de l’office fédéral approprié a été communiquée aux demanderesses, voire si elle l’a été. Le dossier démontre que la Cour ne révèle ni la décision du Conseil du trésor du 18 juin 2003 ni la décision du MDN de transférer la Parcelle C à la SILC.

 

[38]           Aux fins de la demande de prorogation, je présumerai que la décision pertinente est celle du Conseil du trésor de juin 2003, car c’est à celle-ci que font référence les demanderesses dans leur demande de contrôle judiciaire du 3 mai 2003. Par contre, la prorogation de délai demandée ne porte que sur la période s’étendant de juin 2003 à la date du début du recours collectif des demanderesses en 2005 devant la Cour suprême de la Colombie-Britannique, ce sur quoi toutes les parties s’entendent.

 

[39]           À mon sens, le critère en quatre parties est en faveur des demandeurs. Étant donné les circonstances de l’espèce, j’accorde le plus d’importance aux facteurs sur le fond de la demande ainsi que sur l’absence de préjudice pour les défendeurs. J’attribuerais un peu de poids aux facteurs de l’intention continuelle de poursuivre la demande ainsi qu’à l’explication raisonnable du retard.

 

[40]           La jurisprudence démontre clairement qu’on doit accorder un poids considérable à la preuve sur le fond dans le cadre d’une demande de contrôle judiciaire. Dans Leighton, précitée, je tiens les propos suivants au paragraphe 49 à ce chapitre :

 

[49]      Il ressort clairement de la jurisprudence qu’un poids considérable doit être accordé, dans une requête en prorogation de délai, au fait que la demande sous-jacente de contrôle judiciaire dont le délai de présentation est expiré atteste un bien-fondé certain et donne à penser que la décision contestée était erronée. Tel était le cas dans l’arrêt Grewal, précité, où le délai était expiré depuis plus d’un an, mais où le demandeur invoquait de très solides arguments. Tel était également le cas dans l’arrêt Jakutavicius, précité, où le juge Rothstein, alors juge à la Cour d’appel fédérale, a estimé que le décideur était tout probablement dans l’erreur. Tel était le cas dans un jugement récent, daté du 20 février 2007, rendu par mon collègue le juge Martineau, Huard c. Procureur Général du Canada, 2007 CF 195, où il faisait droit à une demande de contrôle judiciaire dont le délai de présentation était expiré depuis plusieurs années, vu que, selon lui, la demande sous-jacente de contrôle judiciaire présentait un incontestable bien-fondé. Tel est le cas ici de la décision du 27 octobre 2005. 

 

[41]           Je suis d’accord avec l’avocat des demanderesses que, même s’il n’y a pas eu de contre-interrogatoire de Joseph Hall en regard de son affidavit, elles ont produit à la Cour la preuve que la Cour fédérale avait connaissance d’une cause prima facie de titre ancestral et d’intérêt d’une réserve quant à la Parcelle C et pouvait manifestement entrevoir des répercussions négatives si les terres étaient remises à la SILC à des fins de développement privé. Au surplus, les demanderesses ont soulevé une question importante en lien avec la SILC et la SILC mère; il suffit de se rapporter à la décision du juge Phelan dans Musqueam Indian Band c. Canada (Gouverneur en conseil), 2004 CF 1564 au paragraphe 32 :

 

[32]     Bien que les défenderesses en question possèdent bon nombre des caractéristiques d’une société privée, leur organisation et leur mandat comportent certains aspects publics non négligeables. Ainsi, la société mère est un mandataire de la Couronne et la filiale agit comme mandataire ou représentante de la société mère. Les deux défenderesses ont les mêmes politiques, qui sont conformes aux politiques du gouvernement. SICL, la société mère, rend compte de ses activités au Parlement par l’entremise du ministre et elle respecte les objectifs de la Couronne fédérale. C’est la Couronne fédérale qui définit le mandat des deux défenderesses SIC.

 

[42]           Je conclus à l’absence de préjudice pour les défendeurs. La Parcelle C a vraisemblablement été remise à SILC, qui a transmis quatorze acres de celle-ci au Conseil scolaire de Chilliwack, une transaction que les demanderesses ne contestent pas. La SILC et sa société mère n’ont produit aucun affidavit en preuve alléguant un préjudice advenant que la Cour accorde cette prorogation de délai.

 

[43]           Le préjudice avancé par le Procureur général du Canada en réponse à la demande de prorogation de délai ne semble pas être de nature substantielle; il semble plutôt confiné à des questions procédurales en lien avec la réparation demandée, à étayer la prétention voulant que les dommages soient la seule réparation appropriée; et à des considérations d’équité quant à l’incapacité des demanderesses à approuver la stratégie de désaffectation de 2000 du Canada pour les terres de la Base, entraînant leur rejet de celle-ci.

 

[44]           Du point de vue technique, le procureur général a peut être raison d’affirmer que les demanderesses n’ont pas valoir leur intention d’obtenir le contrôle judiciaire de la décision de juin 2000 avant le 3 mai 2006. Cependant, étant donné les circonstances de l’espèce, il s’agit d’un facteur de forme plutôt que de fond. En outre, la Couronne fédérale avait connaissance de la revendication des demanderesses depuis 1988 alors qu’elles ont déposé une revendication particulière à l’égard de la Parcelle C. Le Canada a également connaissance depuis 1995 de la revendication des demanderesses d’un titre ancestral non éteint en regard de la Parcelle C lorsque seize communautés Sto:lo ont déposé une déclaration d’intention de négocier un traité sous les auspices de la CTCB. Par conséquent, j’accorde peu de poids à ce facteur.

 

[45]           Les demanderesses m’ont convaincu qu’elles avaient une explication raisonnable pour justifier le dépôt tardif de leur demande. En outre, lorsqu’elles ont eu connaissance du transfert des terres par le MDN à la SILC, elles ont cherché à être consultées, plutôt que d’entreprendre un processus judiciaire. Elles ont demandé la tenue de consultations avec le SILC, le Conseil du trésor et le MDN, seulement pour finalement être écartées. Elles ont ensuite cherché à obtenir une réparation par l’entremise d’un recours collectif déposé devant la Cour suprême de la Colombie-Britannique, mais leur action a été rejetée pour des motifs de compétence. Peu après la décision de la Cour d’appel de la Colombie-Britannique, les demanderesses ont intenté la présente procédure devant la Cour fédérale. Je souscris aux observations de l’avocat des demanderesses voulant que les tribunaux aient répété à maintes et maintes reprises que les règlements négociés étaient toujours préférables aux litiges lorsqu’il était question de rapprocher la souveraineté de la Couronne à l’occupation antérieure par les peuples autochtones. Les demanderesses ne devraient pas être pénalisées d’avoir chercher à obtenir un processus de consultation plutôt qu’un litige.

 

[46]           Finalement, d’autres facteurs de l’espèce viennent influencer mon exercice discrétionnaire ainsi que la pondération accordée à tout facteur pertinent. J’ai adopté les considérations dont je dresse les grandes lignes au paragraphe 50 de Leighton, précitée.

 

[47]           Ayant soupesé tous les facteurs appropriés et pondérés dans un contexte de justice entre les parties, je suis persuadé qu’une prorogation devrait être accordée aux demanderesses afin de leur permettre de demander le contrôle judiciaire de la décision de juin 2003 du Conseil du trésor.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

ORDONNANCE

 

LA COUR STATUE que la requête en prorogation de délai des demanderesses devrait être accueillie avec dépens. Le délai est prorogé jusqu’au 3 mai 2007, date à laquelle les demanderesses ont déposé leur demande de contrôle judiciaire.

 

LA COUR ORDONNE ÉGALEMENT que la requête en radiation du procureur général soit rejetée, sans frais, au motif qu’elle est théorique dans les circonstances.

 

 

 

  « François Lemieux »      

                                                                                    ______________________________

                                                                                                            Juge
COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        T-754-07

 

INTITULÉ :                                       LA PREMIÈRE NATION TZEACHTEN et al c.

                                                            PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Vancouver (Colombie-Britannique)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 22 octobre 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              JUGE LEMIEUX

 

DATE DU JUGEMENT :                 Le 1er novembre 2007

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

 

Mme Clarine Ostrove

M. Bruce Elwood

 

 

POUR LES DEMANDEURS

Mme Jennifer Chow

Mme Lucy Bell

 

 

 

M. Ryan Dalziel

POUR LE DÉFENDEUR

(PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA)

 

 

POUR LES DÉFENDEURS

(SOCIÉTÉ IMMOBILIÈRE DU CANADA ET SOCIÉTÉ IMMOBILIÈRE DU CANADA

CLC LIMITÉE)

 

 

 

 

 

 

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

 

Mandell Pinder

Avocats

Vancouver (Colombie-Britannique)

 

POUR LES DEMANDERESSES

 

John H. Sims, QC

Sous-procureur général du Canada

 

 

 

Bull, Housser and Tupper

Avocats

Vancouver (Colombie-Britannique)

 

POUR LE DÉFENDEUR

(PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA)

 

 

POUR LES DÉFENDEURS

(SOCIÉTÉ IMMOBILIÈRE DU CANADA ET SOCIÉTÉ IMMOBILIÈRE DU CANADA CLC LIMITÉE)

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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