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Date : 20071211

Dossier : IMM-6192-06

Référence : 2007 CF 1297

Ottawa (Ontario), le 11 décembre 2007

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE O’KEEFE

 

 

ENTRE :

CONTRERAS HERNANDEZ,

JOSE ARTURO

 

demandeur

 

et

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET
DE L’IMMIGRATION

 

défendeur

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

LE JUGE O’KEEFE

 

[1]               Il s’agit d’une demande présentée en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (LIPR), en vue de soumettre à un contrôle judiciaire la décision datée du 1er novembre 2006 par laquelle la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (la Commission) a conclu que le demandeur n’avait ni la qualité de réfugié ni celle de personne à protéger.

 

[2]               Le demandeur demande que la décision soit annulée et l’affaire renvoyée à un tribunal différemment constitué de la Commission pour qu’il statue à nouveau sur l’affaire.

 

Le contexte

 

[3]               Jose Arturo Contreras Hernandez (le demandeur) est citoyen du Mexique. Il a demandé l’asile du fait de son appartenance à un groupe social, soit les homosexuels de sexe masculin vivant au Mexique. Les circonstances l’ayant amené à demander l’asile sont décrites dans l’exposé circonstancié de son formulaire de renseignements personnels (FRP).

 

[4]               Le demandeur est né à Victoria City. À l’âge de quatorze ans, il a été chassé de chez lui par sa famille, après qu’elle eut découvert son orientation sexuelle. Il est allé vivre chez sa marraine pendant sept ou huit mois. Un jour, il a croisé son père dans la rue. Ce dernier l’a saisi au cou et l’a frappé, lui laissant un œil poché et la bouche en sang. Le demandeur a alors décidé de quitter Victoria City et de s’installer à Monterrey, où il a travaillé dans le domaine agricole durant plusieurs années.

 

[5]               En mai 2001, le demandeur a été agressé au travail, dans les toilettes, par trois hommes travaillant au même étage que lui au ministère de l’Agriculture, à Mexico. Les trois hommes ont fait des remarques sur la mauvaise odeur que dégageaient les homosexuels. Le demandeur a réagi et l’un des trois hommes lui a donné un coup de pied. Le demandeur a essayé d’arrêter son agresseur, mais un autre homme l’a saisi au cou. Le premier agresseur a alors approché son visage de celui du demandeur et lui a dit qu’ils ne l’aimaient pas du tout et qu’ils le surveillaient. Le demandeur ne s’est pas plaint à son supérieur, ni n’a signalé l’incident.

 

[6]               En décembre 2001, en sortant d’une boîte de nuit appelée « El Taller », au centre-ville de Mexico, le demandeur a été agressé par quatre hommes. Ces derniers l’ont emmené dans leur automobile, lui ont mis une arme dans la bouche et l’ont forcé à les supplier de lui laisser la vie sauve. Ils ont fini par l’abandonner sur une route, où il a hélé un taxi. Il n’a pas signalé l’incident.

 

[7]               À ce stade, le demandeur a décidé de quitter le Mexique pour apprendre l’anglais pendant un an au Canada. Il est arrivé au pays en avril 2003 et a demandé l’asile en avril 2005. En 2005, pendant son séjour au Canada, le demandeur a été diagnostiqué séropositif pour le VIH. Une audience d’immigration a eu lieu le 26 juin 2006 et une décision défavorable a été rendue le 1er novembre suivant. C’est la décision de la Commission qui fait l’objet du présent contrôle judiciaire.

 

Les motifs de décision

 

[8]               Selon la Commission, la question déterminante dans cette demande particulière était de savoir si, au Mexique, le demandeur bénéficiait de la protection de l’État. La Commission a été convaincue par la preuve documentaire sur le Mexique que la crainte du demandeur n’avait pas de fondement objectif. Le fait que des services de police locaux ne soient pas efficaces, a-t-elle signalé, n’équivaut pas à un manque de protection de la part de l’État. Concluant que la preuve documentaire était plus crédible et digne de foi, elle a donc accordé à celle-ci plus de poids qu’à l’opinion du demandeur. Elle a fait remarquer que, d’après la preuve documentaire, il continue d’y avoir des attitudes homophobes très marquées au sein du grand public au Mexique, et que les gais et les lesbiennes sont victimes de discrimination. Toutefois, a-t-elle déclaré, le demandeur est tenu de chercher d’abord protection dans son pays d’origine, et il ne l’a pas fait. Elle a conclu que la crainte du demandeur n’avait aucun fondement objectif.

 

[9]               La Commission a déclaré aussi que, selon la preuve documentaire, le gouvernement s’occupe comme il faut de la question de l’orientation sexuelle et des soins de santé. Toujours selon cette preuve, il y a eu ces dernières années d’importants gains politiques et juridiques pour les minorités sexuelles, surtout à l’échelon fédéral. La Commission a signalé que, suivant l’exemple de Mexico, les États d’Aguascalientes et du Chiapas ont adopté des lois anti‑discrimination qui font explicitement état de l’orientation sexuelle, ainsi que de sanctions pour [traduction] « crimes contre la dignité personnelle ». Au vu de la preuve documentaire, la Commission a conclu que la responsabilité de faire des démarches auprès de l’État en vue d’obtenir une protection n’était pas déraisonnable dans les circonstances.

 

[10]           La Commission a conclu qu’il était déraisonnable que le demandeur ne se soit pas efforcé de solliciter la protection de la police ou d’autres autorités étatiques. Elle a jugé déraisonnable aussi que le demandeur n’ait rien fait pour avoir accès à la protection de l’État de Mexico. 

 

[11]           En ce qui concerne la demande de protection du demandeur pour cause de séropositivité pour le VIH, la Commission a passé en revue la preuve documentaire et noté qu’à Mexico, le programme de lutte contre le VIH/SIDA offre comme traitement un cocktail antiviral complet à toutes les personnes atteintes du VIH/SIDA qui, par ailleurs, n’auraient pas les moyens de se faire soigner. Elle a signalé de plus que, selon le directeur de ce programme, n’importe quel habitant du district fédéral qui peut présenter une carte d’inscription électorale et une preuve de résidence actuelle est admissible à une aide.

 

[12]           La Commission est arrivée à la conclusion qu’eu égard à la totalité de la preuve, le demandeur n’avait pas la qualité de réfugié au sens de la Convention, ni celle de personne à protéger.

 

Les questions en litige

 

[13]           Le demandeur a soumis la question suivante à l’examen de la Cour :

1.         La Commission a-t-elle tiré une conclusion arbitraire ou abusive quant à la crédibilité, sans tenir dûment compte de la preuve qui lui a été validement soumise?

 

[14]           Je reformulerais la question en litige comme suit :

1.         Quelle est la norme de contrôle appropriée?

2.         La Commission a-t-elle commis une erreur en concluant que le demandeur n’avait pas réfuté la présomption de protection de l’État?

3.         La Commission a-t-elle commis une erreur en concluant qu’en tant que personne atteinte du VIH, le demandeur bénéficiait d’une protection adéquate de l’État?

4.         La Commission a-t-elle commis une erreur en ne traitant pas du risque de persécution que courait le demandeur en tant que travesti/transgendériste?

5.         La Commission a-t-elle commis une erreur en concluant que le témoignage du demandeur était peu vraisemblable?

 

Les observations du demandeur

[15]           Premièrement, le demandeur a fait valoir que l’analyse de la Commission est le reflet d’une utilisation hautement sélective de la preuve documentaire relativement à la protection de l’État. Dans ses décisions, a-t-il ajouté, la Commission n’est pas tenue de faire référence à la totalité de la preuve documentaire, mais elle ne peut pas appuyer ses conclusions sur une utilisation hautement sélective de la preuve, en faisant abstraction d’éléments de preuve importants qui vont à l’encontre de ses conclusions (Hassanzadeh-Oskoi c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1993] A.C.F. no 644). Le demandeur a fait remarquer que la Commission, dans sa décision, déclare à la page 4 que, « selon la preuve documentaire, le gouvernement se préoccupe des questions d’orientation sexuelle et de soins de santé ». Il a soutenu que cette conclusion contredit des éléments de preuve soumis à la Commission, dont le rapport d’Amnistie internationale sur le Mexique publié en 2005 (page 1) et, dans la série World Policy Reports, le document intitulé « Sex Orientation and Human Rights in the Americas » (pages 3, 55, 59, 60 et 61). Essentiellement, ces documents étayent la conclusion selon laquelle, au Mexique, les homosexuels sont souvent la cible de diverses formes de mauvais traitements et de discrimination et que, même si la loi indique peut-être le contraire, des agents de police et des membres de l’appareil judiciaire se servent de leur situation au sein de la société pour persécuter davantage les homosexuels dans ce pays. En outre, le demandeur a fait valoir que la Commission a omis de prendre en considération une lettre datée du 1er juin 2006 du Grupa Hola (une organisation de défense des gais et lesbiennes latino-américains, dont le siège se trouve à Toronto) dans laquelle cette organisation fournit des preuves de la persécution constante de tous les homosexuels au Mexique et de la réticence des victimes à solliciter la protection de l’État. Au dire du demandeur, même si la Commission n’est pas obligée de traiter de la totalité des éléments de preuve sur lesquels se fondent les avocats, elle ne s’acquitte pas de son obligation en faisant simplement abstraction, sans expliquer pourquoi, d’éléments de preuve contraires à sa décision.

 

[16]           Le deuxième argument du demandeur est que la Commission n’a pas évalué le risque qu’il courait d’être persécuté en tant que travesti/transgendériste, un type de personne qui, pour les homophobes, constitue une cible plus visible. Il a soutenu que, d’après la page 61 des World Policy Reports, que le tribunal avait en main au moment de rendre la décision, les travestis de Tijuana sont victimes de mauvais traitements et d’extorsion par des agents de police municipaux qui les prennent pour cibles parce qu’ils savent où ils vivent et attendent qu’ils quittent leur domicile.

 

[17]           Le troisième argument du demandeur est que la Commission a commis une erreur en décidant que les personnes atteintes du VIH/SIDA au Mexique bénéficient de la protection de l’État. Il a fait valoir que la Commission s’est fondée sur des documents gouvernementaux concernant les programmes de financement disponibles, mais qu’elle n’a pas évalué les preuves concrètes concernant le fait de savoir si le demandeur pouvait obtenir facilement les médicaments nécessaires. Par ailleurs, la Commission n’a pas tenu compte des renseignements indiqués à la page 61 du document de la série World Policy Reports, à savoir que le président de la Commission des droits de la personne de l’État du Yucatan a déclaré que [traduction] « il faudrait mettre les sidéens en quarantaine et, si une personne infectée franchit une ligne de sécurité établie, l’abattre [...] Il est préférable que ces personnes meurent. Il faudrait les mettre sur une île où elles ne pourraient pas infecter d’autres personnes ». Selon le demandeur, l’omission de la Commission de prendre cette preuve en considération constitue une erreur susceptible de contrôle (Owusu-Ansah c. Canada (1989), 8 Imm. L.R. (2d) 106 (C.A.F.)).

 

[18]           Et, en dernier lieu, le demandeur a allégué que la Commission a commis une erreur en concluant que son témoignage était peu vraisemblable. Il a ajouté que la norme de contrôle concernant les conclusions d’invraisemblance est la décision raisonnable : les inférences que la Commission a tirées sont-elles à ce point déraisonnables qu’il est justifié que la Cour intervienne? (Aguebor c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) (1993), 160 N.R. 315)

 

Les observations du défendeur

 

[19]           Au dire du défendeur, il est bien établi en droit que, jusqu’à preuve du contraire, il est présumé que la Commission a pris en considération la totalité des éléments de preuve, peu importe qu’elle dise dans ses motifs l’avoir fait ou pas. Selon le défendeur, l’examen des motifs montre que la Commission a effectivement pris en considération la totalité des éléments de preuve soumis (Hassan c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) (1992), 147 N.R. 317 (C.A.F.)). À preuve, à la page 3 de ses motifs, la Commission reconnaît que d’après la preuve documentaire, « la population mexicaine en général demeure très homophobe, [...] les gais et les lesbiennes sont victimes de discrimination et [...], malgré la loi, certains policiers se livrent à des actes de harcèlement arbitraires allant jusqu’à l’arrestation, particulièrement de groupes vulnérables tels que les homosexuels et les lesbiennes ». Selon le défendeur, le caractère adéquat de la protection de l’État est susceptible de contrôle selon la norme de la décision manifestement déraisonnable (Malik c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2005] A.C.F. no 1453).

 

[20]           En ce qui concerne l’argument du demandeur selon lequel la Commission n’a pas pris en considération le risque que courait le demandeur d’être persécuté en tant que travesti, le défendeur a fait valoir que le demandeur n’a relevé aucune preuve montrant qu’au Mexique, il s’expose à plus de risques qu’un homosexuel non travesti. Le défendeur a fait également état des incohérences relevées dans les observations du demandeur à propos de son identité. Plus précisément, au paragraphe 13 de son mémoire, le demandeur allègue être transgendériste et il dit ensuite qu’il est travesti (cross-dresser); au paragraphe 14, il dit qu’il est travesti. Par ailleurs, le défendeur a signalé qu’aucune de ces allégations n’apparaît dans le FRP du demandeur et que, dans son affidavit, il dit qu’il est travesti, mais pas qu’il est transgendériste.

 

[21]           Au sujet de la présomption de protection de l’État, le défendeur a fait valoir que le demandeur a soutenu que c’est à lui-même qu’incombe le fardeau de la preuve. Le défendeur a ajouté que, plus les institutions de l’État sont démocratiques, plus le demandeur doit s’être efforcé de vérifier la capacité de l’État à le protéger (Kadenko c. Canada (Solliciteur général) (1996), 143 D.L.R. (4th) 532 (C.A.F.)). En l’espèce, le demandeur n’a fait aucun effort pour chercher protection.

 

[22]           Le défendeur a soutenu qu’il faut rejeter l’allégation du demandeur selon laquelle il serait persécuté parce qu’il est séropositif pour le VIH. L’incapacité d’un pays de fournir des soins médicaux n’est pas un fondement valable à une demande d’asile. Quoi qu’il en soit, la Commission a pris cet argument en considération et est arrivée à la conclusion que des médicaments contre le VIH sont largement disponibles au Mexique. En outre, le défendeur a soutenu que l’allégation du demandeur selon laquelle il serait victime de persécution doit être rejetée. Il a fait valoir que, comme preuve de ce fait, le demandeur a produit une seule citation d’un haut responsable gouvernemental qui parlait de mettre en quarantaine les personnes infectées par le VIH. Selon le défendeur, une déclaration faite il y a plus de cinq ans par un haut responsable d’un État dans lequel le demandeur n’a jamais vécu est loin d’étayer un argument quelconque selon lequel toutes les personnes souffrant du VIH/SIDA au Mexique courent plus de risques d’être persécutées que dans un autre pays. La Commission a pris cet argument en considération et est arrivée à une conclusion raisonnable en se fondant sur la preuve objective qui lui a été soumise, à savoir que le Mexique a établi d’importantes lois contre la discrimination.

 

[23]           Et, en dernier lieu, le défendeur a soutenu que l’argument du demandeur selon lequel la Commission a tiré une conclusion d’invraisemblance est tout simplement fausse. Jamais la Commission n’a-t-elle conclu qu’un aspect quelconque du récit du demandeur était invraisemblable.

 

Analyse et décision

 

[24]           La question no 1

Quelle est la norme de contrôle appropriée?

Pour ce qui est de la question du caractère adéquat de la protection de l’État, le défendeur a fait valoir que la norme de contrôle applicable est la décision manifestement déraisonnable (Malik, précité). Dans la décision M.P.C.R. c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 772, la Cour indique ce qui suit, au paragraphe 42 :

On estime généralement que si les conclusions de fait sous‑jacentes sont assujetties à la norme de la décision manifestement déraisonnable, les conclusions de la Commission concernant le caractère adéquat de la protection de l’État constituent une question mixte de fait et de droit à laquelle s’applique la norme de la décision raisonnable simpliciter (voir Machedon c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2004] A.C.F. no 1331, et Chaves c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’immigration), [2005] A.C.F. n232).

 

 

[25]           À mon avis, le demandeur conteste la conclusion générale de la Commission quant au caractère adéquat de la protection de l’État et, par conséquent, la norme de contrôle appropriée est la décision raisonnable.

 

[26]           Je souhaite régler maintenant la question no 4.

 

[27]           La question no 4

            La Commission a-t-elle commis une erreur en ne traitant pas du risque de persécution que courait le demandeur en tant que travesti/transgendériste?

Au dire du demandeur, la Commission n’a pas tenu compte dans sa décision de la capacité de l’État de protéger les personnes telles que le demandeur, qui est travesti et transgendériste. Il ressort de la décision que l’identité du demandeur en tant que travesti et transgendériste n’a pas été prise en compte. La décision n’évalue pas la capacité du Mexique de protéger convenablement de telles personnes.

 

[28]           J’ai examiné le dossier certifié du tribunal (le DCT) et, même si le FRP du demandeur et l’interrogatoire effectué au point d’entrée sont muets sur le sujet, on trouve, à la page 120 du DCT, une lettre de l’avocate du demandeur, datée du 20 juin 2006, dans laquelle le demandeur modifie son FRP pour ajouter que lors de l’incident de la boîte de nuit il était [traduction] « vêtu comme une femme ». En outre, à la page 133 de la transcription de l’audience, le demandeur révèle qu’il craint de retourner au Mexique parce qu’il est homosexuel et aime se vêtir en femme. Quand la commissaire qui présidait l’audience lui a demandé pourquoi il n’avait pas dit dans son FRP qu’il était travesti et transgendériste, le demandeur a répondu (page 136 de la transcription) qu’il avait été gêné de le dire à son avocate, même après son arrivée au Canada. Aux pages 137 et 138, la commissaire interroge de nouveau le demandeur sur son identité en tant que travesti et transgendériste et, en réponse, le demandeur explique qu’il avait eu peur de signaler l’incident à la police.

 

[29]           À mon avis, la Commission avait entre les mains suffisamment de preuves pour se rendre compte que le demandeur était non seulement homosexuel, mais aussi travesti et transgendériste. En n’évaluant pas l’aptitude de l’État à protéger convenablement les homosexuels qui sont travestis et transgendéristes, la Commission a commis une erreur.

 

[30]           Vu ma conclusion concernant la question no 4, il n’est nul besoin que je traite des autres questions en litige.

 

[31]           La demande de contrôle judiciaire est donc accueillie, la décision de la Commission est annulée et l’affaire est renvoyée à un tribunal différemment constitué pour qu’il statue à nouveau sur l’affaire.

 

[32]           Ni l’une ni l’autre des parties n’a souhaité soumettre à mon examen une question grave de portée générale pour qu’elle soit certifiée.


 

JUGEMENT

 

[33]           LA COUR ORDONNE que la demande de contrôle judiciaire soit accueillie, la décision de la Commission annulée et l’affaire renvoyée à un tribunal différemment constitué pour qu’il statue à nouveau sur l’affaire.

 

 

 

« John A. O’Keefe »

Juge

 

Traduction certifiée conforme

David Aubry, LL.B.

 


 

ANNEXE

 

Dispositions législatives pertinentes

 

Les dispositions législatives applicables sont citées ci-dessous.

 

Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (LIPR) :

 

 

96. A qualité de réfugié au sens de la Convention — le réfugié — la personne qui, craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques :

 

a) soit se trouve hors de tout pays dont elle a la nationalité et ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de chacun de ces pays;

 

b) soit, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle, ne peut ni, du fait de cette crainte, ne veut y retourner.

 

 

97.(1) A qualité de personne à protéger la personne qui se trouve au Canada et serait personnellement, par son renvoi vers tout pays dont elle a la nationalité ou, si elle n’a pas de nationalité, dans lequel

 

elle avait sa résidence habituelle, exposée :

 

a) soit au risque, s’il y a des motifs sérieux de le croire, d’être soumise à la torture au sens de l’article premier de la Convention contre la torture;

 

b) soit à une menace à sa vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités dans le cas suivant :

 

(i) elle ne peut ou, de ce fait, ne veut se réclamer de la protection de ce pays,

 

 

(ii) elle y est exposée en tout lieu de ce pays alors que d’autres personnes originaires de ce pays ou qui s’y trouvent ne le sont généralement pas,

 

(iii) la menace ou le risque ne résulte pas de sanctions légitimes — sauf celles infligées au mépris des normes internationales — et inhérents à celles-ci ou occasionnés par elles,

 

(iv) la menace ou le risque ne résulte pas de l’incapacité du pays de fournir des soins médicaux ou de santé adéquats.

 

 

(2) A également qualité de personne à protéger la personne qui se trouve au Canada et fait partie d’une catégorie de personnes auxquelles est reconnu par règlement le besoin de protection.

 

96. A Convention refugee is a person who, by reason of a well-founded fear of persecution for reasons of race, religion, nationality, membership in a particular social group or political opinion,

 

 

 

(a) is outside each of their countries of nationality and is unable or, by reason of that fear, unwilling to avail themself of the protection of each of those countries; or

 

(b) not having a country of nationality, is outside the country of their former habitual residence and is unable or, by reason of that fear, unwilling to return to that country.

 

97.(1) A person in need of protection is a person in Canada whose removal to their country or countries of nationality or, if they do not have a country of nationality, their country of former

 

habitual residence, would subject them personally

 

(a) to a danger, believed on substantial grounds to exist, of torture within the meaning of Article 1 of the Convention Against Torture; or

 

(b) to a risk to their life or to a risk of cruel and unusual treatment or punishment if

 

 

(i) the person is unable or, because of that risk, unwilling to avail themself of the protection of that country,

 

(ii) the risk would be faced by the person in every part of that country and is not faced generally by other individuals in or from that country,

 

(iii) the risk is not inherent or incidental to lawful sanctions, unless imposed in disregard of accepted international standards, and

 

 

 

(iv) the risk is not caused by the inability of that country to provide adequate health or medical care.

 

 

 

(2) A person in Canada who is a member of a class of persons prescribed by the regulations as being in need of protection is also a person in need of protection.

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM-6192-06

 

 

 

INTITULÉ :                                                   CONTRERAS HERNANDEZ, JOSE ARTURO

            c.

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                             TORONTO (ONTARIO)

 

 

DATE DE L’AUDIENCE :                           LE 21 NOVEMBRE 2007

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                                          LE JUGE O’KEEFE

 

 

DATE DES MOTIFS :                                  LE 11 DÉCEMBRE 2007

 

 

COMPARUTIONS :

 

Lani Gozlan                                                   POUR LE DEMANDEUR

 

David Knapp                                                 POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Lani Gozlan                                                  POUR LE DEMANDEUR

Toronto (Ontario)

 

John H. Sims, c.r.                                          POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

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