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Date : 20071212

Dossier : IMM‑5982‑06

Référence : 2007 CF 1306

Ottawa (Ontario), le 12 décembre 2007

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE ORVILLE FRENETTE

 

 

ENTRE :

LYUBOV TSYMBALYUK

demanderesse

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

 

défendeur

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire de la décision rendue le 17 octobre 2006 par la Section de la protection des réfugiés (la Commission), qui a conclu que Lyobov Tsymbalyuk (la demanderesse) n’est ni une réfugiée au sens de la Convention ni une personne à protéger en application des articles 96 et 97 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27. L’autorisation de présenter une demande de contrôle judiciaire a été accordée le 30 août 2007 par la juge Simpson.

 

[2]               La demanderesse est une citoyenne de l’Ukraine qui allègue craindre d’être persécutée parce qu’elle est membre d’un groupe social particulier, c’est‑à‑dire celui des femmes victimes de violence conjugale.

 

[3]               La demanderesse est arrivée au Canada en avril 2005 et elle a immédiatement revendiqué le statut de réfugié. Selon ses propos, elle a été victime de violence de la part de son ex‑mari, Alexander Tsymbalyuk‑Andrushchenko (Alexander) en Ukraine, pendant et après leur mariage. La demanderesse a épousé Alexander dans les années 80. En 2001, elle a engagé secrètement une procédure de divorce contre lui et elle a obtenu le divorce en avril 2002. Cependant, elle continua de cohabiter avec lui jusqu’en janvier 2005.

 

[4]               Bien que la demanderesse se soit plainte de nombreuses disputes entre elle et Alexander, dans son Formulaire de renseignements personnels (FRP), elle a décrit quatre incidents particuliers. En 1991, à la suite d’une querelle entre Alexander et ses parents dans laquelle la demanderesse était intervenue, Alexander lui avait donné des coups de poing. En 1995, Alexander lui avait tailladé le bras droit avec un couteau. En décembre 2003, Alexander l’avait poussée et elle avait dégringolé dans l’escalier. Elle avait été transportée à l’hôpital par ambulance et soignée pour une blessure à la clavicule. Un médecin avait téléphoné à la police, qui avait questionné la demanderesse par la suite, mais aucune punition n’avait été donnée à Alexander. En juin 2004, Alexander avait renversé délibérément un chaudron de confiture chaude sur la main de la demanderesse.

 

[5]               Enfin, la demanderesse a affirmé que [traduction] « à la suite d’un terrible incident » en janvier 2005, elle avait quitté Alexander et déménagé dans un village voisin. Cependant, Alexander l’a retrouvée, a exigé d’elle des explications et l’a menacée de mort. La demanderesse a déménagé à plusieurs reprises, mais chaque fois, Alexander l’a retrouvée. En avril 2005, elle s’est finalement enfuie pour se réfugier au Canada, où elle a présenté une demande d’asile.

 

LA DÉCISION DE LA COMMISSION

[6]               Après avoir résumé les allégations de la demanderesse, la Commission a conclu que sa crainte de persécution dans son pays n’était pas justifiée, parce qu’elle a estimé que des aspects importants du témoignage de la demanderesse manquaient de crédibilité. 

 

[7]               La Commission était persuadée que certains éléments de preuve présentés par la demanderesse avaient été inventés et que les incidents mentionnés dans son FRP ne s’étaient pas déroulés de la façon décrite, ou encore, ne s’étaient pas produits du tout. Plus particulièrement, la Commission n’était pas convaincue que la demanderesse avait été victime de violence, tout comme elle allègue que son mari l’avait suivie aux villages voisins, ou qu’elle s’était enfuie de l’Ukraine en raison de la violence conjugale. Ayant décidé que ces incidents n’avaient pas eu lieu ou qu’ils s’étaient déroulés d’une façon autre que celle décrite par la demanderesse, la Commission a conclu que la demanderesse n’avait pas de véritable crainte subjective si elle devait retourner dans son pays d’origine.

 

[8]               La Commission a ensuite fait ressortir huit préoccupations particulières quant à la crédibilité de la demanderesse, qu’elle décrit comme étant des incohérences et des omissions importantes quand son FRP, son témoignage lors de l’audience et les notes prises au point d’entrée sont confrontés.

 

LA QUESTION EN LITIGE

[9]               À mon avis, la seule question en litige à trancher dans la présente demande de contrôle judiciaire est de savoir si la Commission a fait une erreur susceptible de contrôle dans son appréciation de la crédibilité de la demanderesse.

 

ANALYSE

[10]           Selon la demanderesse, la Commission a commis une erreur dans l’appréciation de chacune des « préoccupations quant à la crédibilité » en omettant de tenir compte des éléments de preuve fournis dans son FRP et en interprétant erronément les notes prises au point d’entrée. Cependant, le défendeur soutient que les conclusions de la Commission sont claires, qu’elle est la mieux placée pour apprécier la crédibilité de la demanderesse et que, par conséquent, la Cour ne devrait pas intervenir.

 

[11]           La Cour fédérale a exposé à de nombreuses reprises les principes qui s’appliquent au contrôle judiciaire de conclusions de la Commission quant à la crédibilité. La conclusion quant à la crédibilité d’un demandeur constitue l’essence de la compétence de la Commission, et la Cour ne doit pas substituer sa propre opinion à celle de la Commission lorsqu’il n’y a aucune conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des documents présentés; voir Aguebor c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) (1993), 160 N.R. 315, [1993] A.C.F. no 732 (C.A.) (QL); R.K.L. c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CFPI 116, [2003] A.C.F. no 162 (1re inst.) (QL) [ R.K.L.]; Mohacsi c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2003] 4 C.F. 771, [2003] A.C.F. no 586 (1re inst.) (QL).

 

[12]           Toutefois, dans certaines circonstances, la Cour peut intervenir relativement aux conclusions tirées par la Commission quant à la crédibilité. Par exemple, si la Commission a effectué un examen à la loupe de questions accessoires et non pertinentes, l’intervention de la Cour est alors justifiée; voir Attakora c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) (1989), 99 N.R. 168, [1989] A.C.F. no 444 (C.A.) (QL); R.K.L., précitée; Hilo c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration) (1991), 130 N.R. 236, [1991] A.C.F. no 228 (C.A.) (QL).

 

[13]           En l’espèce, les préoccupations quant à la crédibilité soulevées par la Commission doivent être examinées par la Cour pour qu’elle puisse décider si la conclusion de la Commission selon laquelle la demanderesse n’était pas crédible était justifiée.

 

            a) L’incident de janvier 2005 et la période suivant le déménagement

[14]           Selon la Commission, l’incident de janvier 2005, qui a incité la demanderesse à déménager dans un village voisin, n’était ni mentionné dans les notes prises au point d’entrée ni décrit dans le FRP de la demanderesse. De plus, la demanderesse n’avait pas signalé que la violence physique avait continué de la part d’Alexander après son déménagement.

 

[15]           Par souci de commodité, je cite au complet la réponse donnée par la demanderesse lorsqu’on lui a demandé pourquoi elle revendiquait le statut de réfugié (tirée des notes prises au point d’entrée) : [traduction] « C’est à cause de mon ex‑mari. Il était violent physiquement et il me battait. Après le divorce, nous avons continué de cohabiter dans l’appartement. Une fois, il m’a attaqué à coups de couteau et j’ai dû subir une intervention chirurgicale à la clavicule par la suite [...] ».

 

[16]           Dans son FRP, la demanderesse a déclaré ce qui suit : [traduction] « À la suite d’un terrible incident en janvier 2005, j’ai rassemblé mes effets personnels et j’ai quitté Alexander. » Elle n’a pas donné d’autres détails.

 

[17]           En examinant les notes prises au point d’entrée, la Commission a négligé le fait que ces notes constituent le premier contact d’un demandeur d’asile avec les autorités canadiennes et qu’il pourrait, par crainte, hésiter à se confier à elles (affaire R.K.L., précitée). Prise isolément, l’omission de la part de la demanderesse pourrait ne pas être suffisante pour justifier une conclusion défavorable quant à la crédibilité. Pourtant, comme le défendeur l’a souligné, la demanderesse a décrit en détail d’autres incidents dans son FRP, mais a omis de le faire pour les incidents qui étaient apparemment des facteurs clés l’ayant incité, premièrement, à quitter Alexander et, deuxièmement, à quitter l’Ukraine. « Il ne suffit pas à un requérant d’affirmer que ce qu’il a dit dans son témoignage oral était un développement. Tous les faits pertinents et importants devraient figurer dans un FRP. » (Voir Basseghi c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1994] A.C.F. no 1867 (1re inst.) (QL).) Cependant, la Commission a eu l’occasion de questionner la demanderesse à cet égard et d’obtenir des précisions sur des points qu’elle considérait importants.

 

            b) L’incident du couteau

[18]           La Commission a également fait remarquer qu’il y a des incohérences quant aux allégations de la demanderesse selon lesquelles elle a été attaquée à coups de couteau et blessée à la clavicule. Il ressort des notes prises au point d’entrée que l’incident du couteau et la blessure de la demanderesse à la clavicule auraient eu lieu en même temps, apparemment à la suite du divorce. Par contre, dans son FRP et son témoignage, la demanderesse a déclaré que l’incident du couteau avait eu lieu en 1995 et que sa blessure à la clavicule avait été infligée en 2003 par Alexander lorsqu’il l’avait poussée et qu’elle avait dégringolé dans l’escalier. À l’audience, lorsqu’on lui demanda d’expliquer cette incohérence, la demanderesse répondit qu’il y avait probablement une erreur parce qu’il s’agissait en fait de deux incidents distincts (transcription de l’audience, dossier certifié du tribunal, à la page 153).

 

[19]           Il est clairement écrit dans les notes prises au point d’entrée que la demanderesse a subi une intervention chirurgicale à la clavicule par suite des coups de couteau, tandis que la demanderesse a nettement témoigné qu’il s’agissait de deux incidents distincts. Il incombait à la Commission de décider si l’explication de cette incohérence donnée par la demanderesse était satisfaisante; elle décida que non. À mon avis, j’aurais tranché cette question différemment. Par conséquent, la conclusion de la Commission sur cette question n’est pas manifestement déraisonnable, mais je crois qu’il faut évaluer cette conclusion en la plaçant dans le contexte général d’interprétation des faits par la Commission, soit son examen à la loupe de questions secondaires.

 

            c) Le divorce en 2001

[20]           Selon la Commission, bien que la demanderesse n’ait fait mention d’aucune agression physique de la part d’Alexander dans son FRP autres que les incidents de 1995 et de 2003, à l’audience, la demanderesse a dit dans son témoignage que de nombreux incidents mineurs s’étaient produits dans l’intervalle. De plus, la Commission a conclu que la demanderesse n’avait pas expliqué de façon satisfaisante pourquoi elle avait demandé le divorce en 2001, vu que seuls des incidents « mineurs » étaient survenus entre elle et Alexander, ni pourquoi elle n’avait pas pris des mesures pour quitter l’appartement au moment où elle avait engagé la procédure de divorce. Enfin, l’allégation de la demanderesse selon laquelle Alexander n’avait pas réagi de façon agressive ou violente lorsqu’il fut informé du divorce « [...] semble [...] incompatible avec les autres renseignements concernant le mari [...] ». Pourtant, dans son témoignage, la demanderesse a mentionné qu’elle avait déménagé à plusieurs reprises au cours des mois de février, de mars et d’avril 2005, en soulignant que son mari l’avait retrouvée et maltraitée chaque fois.

 

[21]           J’estime que ces conclusions sont manifestement déraisonnables. La Commission a non seulement négligé les descriptions précises d’incidents particuliers fournies par la demanderesse dans son FRP, mais encore elle n’a pas tenu compte des déclarations que la demanderesse avait formulées dans son FRP selon lesquelles les incidents décrits n’étaient pas les seuls moments où Alexander avait réagi violemment à son égard. Dans son FRP, la demanderesse a aussi décrit les incidents qui l’ont finalement poussé à recourir au divorce :

[traduction]

En 2001, Alexander a commencé à consommer beaucoup d’alcool. Son comportement était encore davantage imprévisible. Alexander a tenté deux fois de se suicider. Entre‑temps, ma santé émotionnelle se détériorait. À l’automne 2001, j’ai engagé secrètement une procédure de divorce et j’ai obtenu le divorce en avril 2002. Lorsque mon ex‑mari fut informé du divorce, il n’a pas réagi; il m’a dit que cela était une perte de temps. Nous cohabitions dans le même immeuble d’habitation et le divorce n’a pas influencé son comportement violent.

 

 

À l’audience, la Commission a demandé à la demanderesse pourquoi elle avait continué à cohabiter avec Alexander après le divorce. Elle a répondu que bien qu’elle ait tenté de trouver son propre logement, elle n’était pas en mesure de s’en procurer un sans le consentement d’Alexander. En rendant sa décision, la Commission a tout à fait négligé ces explications. À mon avis, la Commission se devait d’apprécier ces explications, vraisemblablement raisonnables, données en réponse aux questions qu’elle avait soulevées.

 

            d) D’autres incohérences : « prendre soin de » et mari/ex‑mari

[22]           Dans son FRP, la demanderesse a déclaré qu’Alexander avait pris soin d’elle lorsqu’elle se remettait de son intervention chirurgicale à la clavicule. Pendant son témoignage, la demanderesse a dit qu’Alexander avait fait quelques emplettes et lui avait apporté du thé à quelques reprises durant cette période. La Commission « estime que les actes du mari, décrits par la demandeure, ne cadrent pas avec sa déclaration selon laquelle il avait pris soin d’elle ». De plus, la Commission a fait remarquer qu’au cours de son témoignage, la demanderesse alternait entre les termes mari et ex‑mari pour désigner Alexander.

 

[23]           Je crois que la conclusion de la Commission quant à l’expression « prendre soin de » est manifestement déraisonnable. Il n’est pas invraisemblable pour une femme constamment victime de violence, ou même d’indifférence, de la part de son conjoint de penser qu’une personne qui lui apporte du thé prend soin d’elle. Le fait que la Commission ait considéré ce propos comme étant une incohérence résulte, à tout le moins, d’un examen à la loupe des allégations de la demanderesse. Dans le même ordre d’idées, je crois que le fait que la Commission trouve suspecte la façon dont la demanderesse alterne entre les termes « mari » et « ex‑mari », particulièrement lorsque celle‑ci s’exprimait par l’intermédiaire d’un interprète, constitue un examen à la loupe du témoignage de la demanderesse. Bien que certaines incohérences prises isolément puissent sembler peu importantes, mais gagner en importance lorsqu’elles sont considérées dans le contexte de la revendication dans son ensemble, dans la présente affaire, la Commission a négligé encore une fois l’explication de la demanderesse, soit qu’elle avait alterné entre ces termes parce qu’elle [traduction] « ne croyait pas qu’il était important de le dire d’une façon ou de l’autre »; voir Nejme c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1994] A.C.F. no 1822 (1re inst.) (QL); transcription de l’audience, dossier certifié du tribunal, à la page 134.

 

            e) Des preuves documentaires et des preuves tangibles

[24]           Pour étayer sa revendication, la demanderesse a présenté un rapport médical qui fait état du traitement qu’elle a reçu à la suite de l’incident de décembre 2003. La Commission a accordé peu de poids à ce document au motif que les preuves documentaires démontrent qu’il est facile d’obtenir de faux documents de l’Ukraine. De plus, bien que la demanderesse eût des cicatrices, la Commission a conclu qu’« étant donné les préoccupations de la Commission quant à la crédibilité du témoignage de la demandeure d’asile et des renseignements figurant dans son FRP et les notes prises au PDE, la Commission n’est pas convaincue du fait que les cicatrices aient été la conséquence de violences conjugales ».

 

[25]           Bien qu’il incombe à la Commission de décider du poids qu’elle accorde aux documents fournis par un demandeur, elle doit fonder sa décision sur les éléments de preuve. Dans l’affaire Papaskiri c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 49, 40 Imm. L.R. (3d) 211, la Cour fédérale a conclu que, pour pouvoir tirer ce genre de conclusion, il faut recourir à plus que des preuves documentaires qui affirment que le type de document en cause est facile à obtenir frauduleusement dans le pays d’origine.

 

            f)          Les faux documents

[26]           Il est de droit constant qu’un tribunal ne doit pas tenir compte d’un document qui se révèle être un faux. Il est également acceptable dans le cadre de l’appréciation de documents de considérer en particulier les preuves documentaires démontrant l’étendue de l’utilisation de faux documents dans les affaires de réfugié ou d’immigration.

 

[27]           Cependant, pour pouvoir rejeter un document officiel, il faut disposer d’éléments de preuve étayant la conclusion d’invalidité, sans quoi la conclusion de falsification tirée par la Commission ou un commissaire ne peut être maintenue et constitue une erreur susceptible de contrôle.

Ramalingan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1998] A.C.F. no 10

Halili c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CFPI 999, [2002] A.C.F. no 1335

Cheema c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 224, [2004] A.C.F. no 255

Iqbal c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 1219, [2006] A.C.F. no 1526

 

 

 

 

[28]           En l’espèce, il n’y avait aucun élément de preuve étayant la conclusion selon laquelle les documents contestés n’étaient pas authentiques. Plus particulièrement, le rapport médical confirme les blessures subies par la demanderesse, des blessures qui ont laissé des cicatrices que la demanderesse a montrées à la Commission.

 

[29]           Il est juste de dire que le rapport médical ne faisait aucune mention de la cause de ces blessures, mais la Commission n’a pas considéré le fait que le médecin, après les avoir vu, les a signalées à la police, qui n’a pas donné suite.

 

[30]           Pourquoi la Commission a‑t‑elle concrètement négligé ce fait? La Commission a accordé peu d’importance aux cicatrices de la demanderesse, qui étaient très évidentes, et elle a conclu qu’elle n’était pas convaincue que ces blessures résultaient de la violence conjugale.

 

            g)         Le moment du divorce

[31]           La Commission a conclu qu’il est « invraisemblable » que la demanderesse ait continué de cohabiter avec son mari après le divorce ou qu’elle ait seulement engagé la procédure de divorce en 2001. On peut se demander pourquoi la Commission n’a pas apporté plus d’attention aux directives du président sur cette question et n’a pas tenté de comprendre les désavantages socio‑économiques des femmes victimes de violence en Ukraine.

 

[32]           En tenant compte de l’ensemble de la preuve, je suis d’avis que l’interprétation de la Commission est manifestement déraisonnable parce qu’elle a négligé des éléments de preuve manifestes, a conjecturé sur certaines questions, a effectué un examen à la loupe de questions accessoires et secondaires et a concrètement négligé des preuves tangibles importantes, soit les cicatrices et la documentation médicale, qui étayaient clairement la version des faits exprimée par la demanderesse.

 

[33]           Par conséquent, la décision de la Commission, étant manifestement déraisonnable, ne peut pas être maintenue. La présente demande de contrôle judiciaire sera donc accueillie.


JUGEMENT

 

LA COUR STATUE que la présente demande de contrôle judiciaire est accueillie et que la demanderesse obtient une nouvelle audience devant un tribunal différemment constitué.

 

 

« Orville Frenette »

Juge suppléant

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Annie Beaulieu

 


 

 

 

 

COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                    IMM‑5982‑06

 

INTITULÉ :                                                   Lyubov Tsymbalyuk

                                                                        c.

                                                                        Le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration

 

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                             Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                           Le 28 novembre 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                                          Le juge Frenette

 

DATE DES MOTIFS :                                  Le 12 décembre 2007

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Arthur Yallen

 

POUR LA DEMANDERESSE

Manuel Mendelzon

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

YALLEN ASSOCIATES

Avocat

204, rue St. George, 3e étage

Toronto (Ontario)  M5R 2N5

 

POUR LA DEMANDERESSE

John H. Sims

Sous‑procureur général du Canada

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

 

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