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Date : 20071212

Dossier : T-1731-06

Référence : 2007 CF 1311

Ottawa (Ontario), le 12 décembre 2007

EN PRÉSENCE DE MADAME LA JUGE SIMPSON

 

 

ENTRE :

ZHIJUN ZHENG

demandeur

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

 

[1]               Le demandeur, Zhijun Zheng, se représente lui‑même. Il dit de sa demande qu’elle est une demande de contrôle judiciaire mais, en fait, il s’agit d’un appel interjeté en vertu du paragraphe 14(5) de la Loi sur la citoyenneté, L.R.C. (1985), ch. C‑29 (la Loi). Cet appel fait suite à la décision, en date du 19 juin 2006, par laquelle un juge de la citoyenneté a conclu qu’il ne croyait pas le témoignage du demandeur concernant la période qu’il a passée au Canada à titre de résident.

 

CONTEXTE

 

[2]               Le demandeur est résident permanent depuis le 18 septembre 2001. Trois ans et trois jours plus tard, soit le 21 septembre 2004, il a demandé la citoyenneté et déclaré 1 099 jours de résidence (la période). Il a donc prétendu ne pas avoir quitté le Canada après en être devenu un résident permanent.

 

NORME DE CONTRÔLE

 

[3]               À mon avis, la question de savoir si un demandeur de citoyenneté satisfait à l’exigence de résidence de 1 095 jours énoncée à l’alinéa 5(1)c) de la Loi est une question mixte de fait et de droit où la recherche des faits occupe une place de premier plan. Dans la présente affaire, la question de la crédibilité est en cause, de sorte qu’il y a lieu de faire preuve de retenue. Toutefois, le fait qu’un droit d’appel soit prévu, que l’examen porte surtout sur le demandeur et que le juge de la citoyenneté ne possède aucune connaissance pertinente, appelle un degré de retenue moindre.

 

[4]               Pour ces motifs, je conclus que la norme du caractère raisonnable simpliciter est la norme de contrôle qu’il convient d’appliquer.

 

LA DÉCISION

 

[5]               Le juge de la citoyenneté n’a pas cru que le demandeur n’avait jamais quitté le Canada au cours de la période au motif que ce dernier n’a occupé un emploi au Canada que pendant seize mois durant cette période, qu’il n’a gagné que 25 201 $, qu’il avait une sœur qui vivait à Long Island, dans l’État de New York, dont il a fourni le numéro de téléphone dans sa demande de citoyenneté comme étant son numéro de téléphone « à la maison », que l’une des lettres d’un locateur ne semblait pas avoir été signée, qu’il n’avait aucune famille immédiate au Canada et que le numéro de téléphone qu’il avait subséquemment indiqué dans son questionnaire sur la résidence s’était avéré non inscrit à l’annuaire.

 

L’AUDIENCE SUR LE CONTRÔLE JUDICIAIRE

 

[6]               Dans les observations qu’il a présentées de vive voix à la Cour, le demandeur a fourni des renseignements généraux sur l’audience tenue devant le juge de la citoyenneté de même que sur les échanges qu’avaient eus des fonctionnaires de Citoyenneté et Immigration avec ses locateurs. Il a également fourni des explications sur les problèmes que le juge de la citoyenneté avait relevés concernant les documents et la preuve qu’il avait présentés. Il a cependant reconnu que les renseignements contenus dans ces observations ne constituaient pas une preuve; je n’en ai donc pas tenu compte pour prendre ma décision.

 

[7]               De plus, le demandeur n’a pas hésité à affirmer que le traitement de sa demande de citoyenneté avait été retardé parce que le juge de la citoyenneté et les fonctionnaires voulaient de l’argent. En réponse aux questions de la Cour, le demandeur a toutefois reconnu que personne ne lui avait demandé d’argent à quelque moment que ce soit, qu’il n’avait jamais remis d’argent à personne et que ses allégations n’étaient que des conjectures.

 

[8]               Bien que le demandeur se soit présenté à l’audience accompagné d’un interprète, il lui a rarement demandé de l’aide. Il a choisi de présenter la plupart de ses observations et de répondre à la plupart des questions de la Cour sans recourir à ses services. À une ou deux occasions, la Cour a demandé à l’interprète de traduire une question ou un texte tiré d’un document pour s’assurer de la bonne compréhension du demandeur. Je suis convaincue que le demandeur a parfaitement compris le déroulement de l’instance. Tout au long de celle‑ci, il s’est montré quelque peu frénétique, mais il n’a pas paru déconcerté et il est demeuré poli en tout temps.

 

LES QUESTIONS EN LITIGE

 

[9]               Le demandeur a dit ceci :

(i)                  L’agent de la citoyenneté a noté que le demandeur avait été au Canada pendant 1099 jours; cette note constituait une décision suivant laquelle le nombre de jours déclarés avait été accepté. Le nombre de jours qu’il a déclarés ayant été noté, l’agent ne pouvait plus lui faire parvenir un questionnaire sur la résidence et le juge de la citoyenneté ne pouvait conclure qu’il n’avait pas satisfait à l’exigence de résidence.

(ii)                La décision du juge de la citoyenneté telle qu’elle est formulée dans l’avis au ministre en date du 19 juin 2006 était incohérente parce qu’il était indiqué qu’il avait passé 1 099 jours au Canada (ce qui est plus que le minimum requis de 1095 jours) dans la case inférieure du groupe de cases qui se trouve dans la partie supérieure droite du formulaire, mais le juge de la citoyenneté a coché, dans la partie I du formulaire, la case indiquant qu’il n’était pas convaincu que le demandeur avait satisfait à l’exigence de résidence.

(iii)               Étant donné que l’avocate du défendeur ne l’a pas contre‑interrogé relativement à son affidavit daté du 29 mai 2007, auquel était joint son passeport, le défendeur, par son inaction, a admis qu’il avait résidé du Canada pendant 1 099 jours.

(iv)              Il a été traité injustement parce que le juge de la citoyenneté ne lui a pas dit quels documents et explications étaient requis pour établir la résidence.

 

ANALYSE

      (i)         Le rôle de l’agent de la citoyenneté

 

[10]           L’agent de la citoyenneté qui a interrogé le demandeur le 12 juillet 2005 a rédigé des notes dans la partie I du formulaire d’étude de la demande de citoyenneté. Le formulaire indique qu’il a consigné les 1 099 jours de résidence que le demandeur avait déclarés. Toutefois, l’agent n’est habilité à prendre de décision sur l’exactitude du nombre de jours déclarés ni sur la question de savoir si le demandeur avait satisfait à l’exigence de résidence énoncée à l’alinéa 5(1)c) de la Loi. Le fait qu’il a consigné le nombre de jours déclarés par le demandeur ne signifiait donc pas que ce dernier avait satisfait à l’exigence de résidence. Pour ce motif, il lui était permis en droit de faire parvenir au demandeur un questionnaire sur la résidence, tout comme il lui était permis en droit de renvoyer la demande du demandeur à un juge de la citoyenneté aux fins de la tenue d’une audience.

 

(ii)       La décision renfermait-elle des incohérences internes?

 

[11]           Compte tenu des observations du défendeur, je suis convaincue que les cases qui figurent dans la partie supérieure droite de l’avis au ministre daté du 19 juin 2006 ne font pas partie de la décision du juge de la citoyenneté. Elles donnent plutôt un aperçu de l’état d’avancement de divers aspects de la demande de citoyenneté du demandeur.

 

[12]           Pour cette raison, je conclus que l’avis ne contient pas de décisions incohérentes. La seule décision figure dans la case cochée, qui indique que l’exigence de résidence n’a pas été respectée.

 

(iii)       L’omission de contre-interroger constitue‑t‑elle une admission?

 

[13]           Il n’existe aucune obligation de contre‑interroger l’auteur d’un affidavit relativement à celui‑ci, et une omission à cet égard ne donne pas lieu à une présomption d’admission.

 

(iv)       Le rôle du juge de la citoyenneté

 

[14]           Le questionnaire sur la résidence dressait une liste de documents à fournir et le demandeur a obtenu un délai supplémentaire pour faire préparer des déclarations de revenus à l’appui de sa demande. Le demandeur affirme qu’il a supposé que les documents qu’il avait fournis étaient satisfaisants puisqu’on ne lui a demandé aucun renseignement supplémentaire. Il se plaint de ne pas avoir eu l’occasion de fournir des documents supplémentaires. Toutefois, le juge de la citoyenneté n’est pas tenu de fournir continuellement à un demandeur des commentaires sur le caractère adéquat de sa documentation. Le fardeau d’établir la résidence incombe au demandeur. Une fois que celui‑ci a terminé la présentation de sa preuve en déposant des documents, le juge de la citoyenneté les examine et prend une décision qui est définitive, sous réserve uniquement d’un appel. Je ne vois aucune injustice dans ce processus.

 

[15]           Pour tous ces motifs, je conclus que la décision du juge de la citoyenneté sur le manque de crédibilité du demandeur était raisonnable et que la procédure suivie au cours du traitement de la demande de citoyenneté du demandeur était équitable.

 

JUGEMENT

 

            APRÈS examen des documents déposés et de la lettre, en date du 30 août 2007, que l’avocat du défendeur nous a fait parvenir après la tenue de l’audience;

 

            ET APRÈS audition des observations du demandeur et de l’avocate du défendeur à Toronto le mercredi 29 août 2007;

 

LA COUR STATUE que, pour les motifs énoncés précédemment, l’appel est par les présentes rejeté.

 

            De même, à la demande de l’avocate du défendeur, l’intitulé de la cause est modifié de manière à ce que le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration y figure à titre d’unique défendeur.

 

 

« Sandra J. Simpson »

Juge

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Sandra de Azevedo, LL.B.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        T-1731-06

 

 

INTITULÉ DE LA CAUSE :            ZHIJUN ZHENG c. LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 TORONTO (ONTARIO)

 

 

DATE DE L’AUDIENCE :               29 AOÛT 2007

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                       LA JUGE SIMPSON

 

 

DATE DES MOTIFS :                      12 décembre 2007      

 

 

COMPARUTIONS

 

Zhijun Zheng                                         agissant pour son propre compte

 

Amina Riaz                                           POUR LE DÉFENDEUR

                                                                                                           

 

PROCUREURS INSCRITS AU DOSSIER

 

Zhijun Zheng

(agissant pour son propre compte)        POUR LE DEMANDEUR

Toronto (Ontario)

 

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada       POUR LE DÉFENDEUR

Ministère de la Justice

Bureau régional de l’Ontario

Toronto (Ontario)

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