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Date : 20071218

Dossier : IMM-508-07

Référence : 2007 CF 1332

Ottawa (Ontario), le 18 décembre 2007

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE DE MONTIGNY

 

ENTRE :

EMMA UWASE

demanderesse

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

[1]               La demanderesse, citoyenne du Rwanda et d'ethnie tutsie, est née en 1987. La Section de la protection des réfugiés (la SPR) a reconnu qu’elle est une survivante du génocide rwandais de 1994, mais elle n’a pas cru qu’elle était prise pour cible par les auteurs du génocide du fait de son témoignage éventuel contre eux. La SPR a donc conclu que la demanderesse n’était pas une réfugiée au sens de la Convention ni une personne à protéger. C'est cette décision, rendue le 6 décembre 2006, qui fait l'objet du présent contrôle judiciaire.

 


LE CONTEXTE

[2]               La demanderesse n’était âgée que de sept ans lorsque le président Habyarimana est décédé dans un accident d’avion le 6 avril 1994. Peu après eut lieu le commencement d’une des périodes les plus sombres de l’histoire de l’humanité pendant laquelle des milliers de Rwandais (essentiellement des Tutsis) furent assassinés à cause de tensions ethniques qui s’étaient intensifiées depuis des années et qui éclatèrent à la suite du décès du président. Mme Uwase avait été laissée pour morte, étendue à côté des corps de ses parents et de sa sœur, après qu’un groupe de Hutus eut fait irruption dans la résidence familiale et attaqué les membres de sa famille avec des machettes, des massues, des fusils et d’autres armes. Elle a finalement été secourue par des soldats du Front patriotique rwandais, qui l’ont amenée à un camp de réfugiés où elle a retrouvé sa grand-mère paternelle.

 

[3]               En septembre 2004, la demanderesse a appris que les survivants du génocide de sa province natale devaient s’enregistrer pour témoigner devant les tribunaux gacaca créés pour faire enquête sur les crimes commis entre le 1er octobre 1990 et le 31 décembre 1994 et intenter les poursuites nécessaires. Essentiellement, l’organisation et le fonctionnement de ces tribunaux publics reposent sur des mécanismes de résolution de conflits traditionnels rwandais. Les tribunaux en question ont été créés pour alléger la charge de travail du système judiciaire rwandais qui, comme on l’a rapidement constaté, ne serait pas en mesure de s’occuper du vaste nombre de crimes liés au génocide.

 

[4]               La demanderesse a indiqué qu’elle a vu, le jour où elle est allée se faire enregistrer, les deux assassins de sa famille. Elle a ajouté que peu après, lorsqu’elle se promenait un soir dans son quartier avec son fiancé de l’époque, les deux hommes l’ont abordée et prévenue de ne pas témoigner sous peine de mort. Elle a reçu d’autres menaces les 4 juillet et 26 août 2005, et elle a précisé que ce n’est qu’en criant fort qu’elle a réussi à se sauver. Il semble que tous ces incidents aient été signalés à la police.

 

[5]               Quelques jours après ce dernier incident, la demanderesse a trouvé une note sous la porte qui indiquait qu’elle et son époux seraient tués s’ils témoignaient devant le tribunal gacaca. Elle a remis la note à la police qui lui aurait dit qu’elle ne pouvait rien faire en raison du nombre important de personnes qui se trouvaient dans une situation semblable à la sienne. La demanderesse a donc décidé de quitter le Rwanda et est arrivée au Canada le 7 décembre 2005. Elle a présenté une demande d’asile fondée sur sa crainte d’être tuée par les assassins de sa famille.

 

LA DÉCISION CONTESTÉE

[6]               La SPR a reconnu l’identité de la demanderesse, et elle a accepté le fait qu’elle est une survivante du génocide, au cours duquel ses parents et sa sœur ont été tués, qu’elle a sans aucun doute été traumatisée, et que certains survivants du génocide au Rwanda sont pris pour cibles et tués parce qu’ils ont témoigné (ou se sont enregistrés pour témoigner) devant les tribunaux gacaca. Cependant, elle n’a pas retenu les allégations de la demanderesse compte tenu des nombreuses incohérences et omissions importantes et pertinentes contenues dans son témoignage, entre autres, concernant le moment et le lieu où elle a vu les assassins et la date de leur mise en liberté, le nombre de fois qu’elle s’est présentée au poste de police, le nombre d’hommes qui l’ont abordée, et aussi les questions de savoir si elle était réellement allée se faire enregistrer auprès du tribunal gacaca et si des personnes l’avaient recherchée après son départ vers le Canada.

 

[7]               Pour ce motif, la SPR a conclu que la demanderesse ne s’était pas réellement enregistrée auprès des tribunaux gacaca, qu’elle n’avait pas vu les assassins de sa famille et qu’elle n’était pas une cible pour quiconque. La SPR a tiré ces conclusions quant à la crédibilité de la demanderesse après avoir tenu compte de son jeune âge et de sa capacité de témoigner lors de l’audition de sa demande d’asile.

 

[8]               Comme elle ne disposait d’aucune explication raisonnable quant aux multiples incohérences contenues dans le récit de la demanderesse et d’aucune preuve crédible ou digne de foi à l’appui des faits allégués, la SPR a conclu que la demanderesse ne serait pas exposée à un risque grave de persécution au Rwanda. Elle a également conclu que le renvoi de la demanderesse au Rwanda ne l’exposerait pas personnellement au risque d’être soumise à la torture, dont l’existence est étayée par des éléments de preuve sérieux, ni à une menace à sa vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités.

 

LES QUESTIONS EN LITIGE

[9]               L’avocat de la demanderesse n’a pas contesté les conclusions de la SPR quant à la crédibilité de sa cliente. À l’audience, il a aussi abandonné son argument selon lequel la demanderesse aurait subi un préjudice du fait que la SPR n’avait pas fourni un enregistrement audible de l’audience, étant donné qu’une transcription de l’audience tenue devant la SPR avait été fournie à la demanderesse conformément à l’article 17 des Règles des Cours fédérales en matière d’immigration et de protection des réfugiés, DORS/93-22. Ainsi, la seule question à trancher est de savoir si la commissaire de la SPR a commis une erreur en omettant de tenir compte de l’ensemble de la preuve et de procéder à une analyse distincte du risque auquel la demanderesse serait exposée aux termes de l’article 97 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la LIPR).

 

L’ANALYSE

[10]           Il est désormais bien établi en droit qu’une conclusion défavorable en matière de crédibilité quoique pouvant être déterminante quant à une demande en vertu de l'article 96 de la LIPR, ne le sera pas nécessairement quant à une demande en vertu du paragraphe 97(1) de la LIPR. Les éléments requis pour établir le bien-fondé d'une demande aux termes de l'article 97 ne sont tout simplement pas les mêmes que ceux requis en regard de l'article 96. Par conséquent, la SPR est tenue d’évaluer les menaces et les risques objectifs mentionnés aux alinéas 97(1)a) et b) de la LIPR lorsque les éléments de preuve qui ont été présentés sont susceptibles d’étayer une telle conclusion quant au risque, et ce, même si elle a rejeté une demande fondée sur l’article 96 pour des motifs de crédibilité. Comme le juge Blanchard l’a écrit dans la décision Bouaouni c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CF 1211, au paragraphe 41 :

Il peut y avoir des cas où l'on conclut qu'un revendicateur du statut de réfugié, dont l'identité n'est pas contestée, n'est pas crédible pour ce qui est de la crainte subjective d'être persécuté, mais où les conditions dans le pays sont telles que la situation individuelle du revendicateur fait de lui une personne à protéger. Il s'ensuit qu'une conclusion défavorable en matière de crédibilité, quoique pouvant être déterminante quant à une revendication du statut de réfugié en vertu de l'article 96 de la Loi, ne le sera pas nécessairement quant à une revendication en vertu du paragraphe 97(1). Les éléments requis pour établir le bien-fondé d'une revendication aux termes de l'article 97 diffèrent de ceux requis en regard de l'article 96, la crainte fondée de persécution pour un motif visé à la Convention devant être démontrée dans ce dernier cas. Bien que le fondement probatoire puisse être le même pour les deux revendications, il est essentiel que chacune d'elles soit considérée distincte. Une revendication fondée sur l'article 97 appelle l'application par la Commission d'un critère différent, ayant trait à la question de savoir si le renvoi du revendicateur peut ou non l'exposer personnellement aux risques et menaces mentionnés aux alinéas 97(1)a) et b) de la Loi.

 

Voir aussi : Nyathi c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2003 CF 1119, au paragraphe 21; Kilic c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 84, aux paragraphes 22 à 27; Ozdemir c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 1008, aux paragraphes 5 à 11.

 

[11]           Après avoir jugé que la demanderesse était non crédible et qu’il n’existait aucune preuve digne de foi à l’appui des faits allégués, la SPR a conclu que la demanderesse ne serait pas exposée à un risque grave de persécution au Rwanda. Ensuite, sans aucune autre analyse ou discussion, la SPR a jugé que le renvoi de la demanderesse ne l’exposerait pas personnellement au risque d’être soumise à la torture, dont l’existence était étayée par des éléments de preuve sérieux, ni à une menace à sa vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités, aux termes du paragraphe 97(1) de la LIPR.

 

[12]           Le défendeur a fait valoir que la SPR était justifiée de ne pas procéder à une analyse plus approfondie de l’article 97, parce qu’il n’existait pas suffisamment d’éléments de preuve crédibles, objectifs ou autres, pour établir que la demanderesse serait exposée à un risque. La demanderesse n’a évidemment pas souscrit à cet argument et a plaidé que la Commission s’était fondée sur une conception erronée des tribunaux judiciaires gacaca en concluant que la demanderesse ne pouvait être exposée à un risque que si elle s’était enregistrée pour témoigner devant ces tribunaux.

 

[13]           La Cour doit donc examiner la preuve documentaire en vue de déterminer si la SPR a effectivement commis une erreur en omettant de tenir compte de l’ensemble de la preuve et si elle pouvait tirer les conclusions quant au mode de fonctionnement des tribunaux gacaca auxquelles elle en est arrivée.

 

[14]           Une lecture attentive des motifs exposés par la SPR permet de constater que celle-ci a rejeté la demande de la demanderesse car, à son avis, seules les personnes qui ont témoigné ou qui se sont enregistrées pour témoigner s’exposent à un risque. En fait, l’examen de la SPR consistait principalement à déterminer s’il existait des éléments de preuve suffisants pour appuyer la prétention de la demanderesse selon laquelle elle s’était effectivement enregistrée auprès des tribunaux gacaca. Dans le fond, la commissaire de la SPR a commencé et terminé son analyse par la même conclusion, celle voulant que certains survivants du génocide au Rwanda soient pris pour cibles et tués parce qu’ils ont témoigné ou se sont enregistrés pour témoigner devant les tribunaux gacaca (aux pages 2 et 8 des motifs). Cependant, on ne trouve nulle part de discussion sur le rôle et le mode de fonctionnement de ces tribunaux. La question dont est saisie la Cour est donc de savoir si cette conclusion est étayée par la preuve.

 

[15]           La preuve documentaire n’est pas très étoffée au sujet des tribunaux gacaca et de leur mode de fonctionnement, abstraction faite du rapport de 20 pages rédigé par un groupe appelé l'Institut d'études de sécurité (l’ISS) qui apporte des précisions sur les audiences tenues par les tribunaux gacaca. Il semble que ces tribunaux aient été créés en janvier 2001 dans le but d’éradiquer la culture d’impunité au Rwanda et, espérons-le, de prévenir l’éclatement d’un autre génocide. L’organisation et le fonctionnement des tribunaux gacaca, qui relèvent de l’État, reposent sur des mécanismes de résolution de conflits traditionnels rwandais. Inaugurés à titre de projet pilote, les tribunaux gacaca siègent désormais dans tout le pays. À l’échelon de la cellule, qui est le premier palier du système, les responsables des tribunaux gacaca se réunissent une fois par semaine. Des assemblées générales sont tenues tous les trois mois ou lorsque le président les convoque. Les fonctions et les compétences des tribunaux gacaca à l’échelon des cellules consistent à diriger la phase du processus judiciaire gacaca se rapportant à la collecte de renseignements, à recevoir des aveux et des plaidoyers de culpabilité, ainsi que des éléments de preuve et des renseignements, à faire enquête sur ces renseignements et, enfin, à traduire en justice les personnes qui sont accusées des crimes les moins graves. De plus, il existe un tribunal gacaca du secteur devant lequel les auteurs des crimes les plus graves sont traduits en justice et qui entend les appels des jugements rendus par le tribunal gacaca de la cellule, ainsi qu’une cour générale d’appel gacaca.

 

[16]           À l’échelon de la cellule, c’est une personne qui est désormais chargée de compiler, pour dix foyers,  les renseignements sur les personnes qui, à l’époque du génocide, étaient en vie, ont été tuées et sont les auteurs de ces crimes, plutôt que l’assemblée générale de la cellule, comme c’était le cas au début. La participation aux activités des tribunaux gacaca est obligatoire. Une fois par semaine, les habitants de chaque cellule doivent participer à une audience du tribunal gacaca. Des peines sont même infligées (trois à six mois d’incarcération) aux personnes qui sont appelées à témoigner dans une affaire en particulier et qui ne se présentent pas, ou qui font une dénonciation diffamatoire au cours d’un procès. Le gouvernement a également lancé une campagne médiatique de sensibilisation pour encourager les gens à témoigner. Malgré tout cela, beaucoup de personnes choisissent de rester loin des tribunaux gacaca par crainte apparemment d’être accusées ou d’être appelées à témoigner.

 

[17]           Dans ses observations écrites, l’avocat de la demanderesse a expliqué que toutes les personnes présentes à une audience peuvent être appelées à témoigner ou à répondre à des accusations, ce qui signifie que Mme Uwase peut, à tout moment se voir poser la question de savoir si, le jour de l’audience, se trouve dans le public une personne qu’elle peut identifier comme étant l’auteur d’un crime. Il n’y a donc aucune distinction entre le public en général et le témoin éventuel, puisque les témoignages sont recueillis de façon continue et spontanée. Ainsi, il importe peu que la personne se soit volontairement enregistrée ou non pour témoigner.

 

[18]           Avec la plus grande déférence, il n’est pas tout à fait clair s’il s’agit d’une description exacte du système actuel. Par suite des modifications apportées en juin 2004, la collecte de renseignements est désormais effectuée avant la réunion de l’assemblée générale, et malgré la participation obligatoire au processus judiciaire gacaca, il ne semble pas y avoir de sanction pour défaut de comparution. Le rapport de l’ISS indique clairement que bien des gens choisissent de garder leurs distances par rapport aux tribunaux gacaca, par crainte (soit d’être appelés à témoigner, soit d’être dénoncés) ou par manque d’intérêt. Il est donc loin d’être évident que la demanderesse aurait été contrainte à témoigner ou même à dénoncer les assassins de sa famille.

 

[19]           Cela dit, le défendeur a-t-il raison de prétendre qu’il n’était pas nécessaire d’analyser plus à fond la question de savoir si la demanderesse courait objectivement un risque aux termes des articles 96 ou 97 de la LIPR, étant donné qu’il n’existait pas suffisamment de preuve crédible pour établir qu’elle serait contrainte à témoigner? Les personnes qui ont témoigné ou qui se sont enregistrées pour témoigner sont-elles les seules à courir un risque? Ce n’est pas ce que la preuve révèle. Le rapport de l’ISS à lui seul indique, à la page 17 (p. 48 du dossier de la demanderesse) :

[traduction]

 

Il a été prouvé dans un certain nombre de cas que des personnes ayant porté des accusations ou susceptibles de le faire ont été attaquées ou tuées, ont disparu ou ont vu leur maison détruite. Quelques-uns de ces incidents ont été signalés à la presse, renforçant chez les gens le sentiment que les témoins, en particulier les survivants du génocide, sont pris pour cible et tués facilement par les personnes impliquées dans les crimes liés au génocide.

 

 

[20]           On trouve des rapports semblables dans la documentation dont la Commission de l'immigration et du statut de réfugié dispose. Dans une réponse à la demande d'information datée du 27 août 2004 (RWA42872.E) figure l’énoncé suivant :

[traduction]

 

Divers rapports indiquent également que des survivants du génocide ont été pris pour cible et tués, ou qu’ils ont subi de l’intimidation et du harcèlement, dans le but de les empêcher de témoigner devant les tribunaux gacaca.

 

Voir également, sur le même sujet, une autre réponse datée du 23 janvier 2003 (RWA40362.E, à la p. 58 du dossier de la demanderesse).

 

 

[21]           Par conséquent, il semble que certains survivants du génocide puissent être exposés à un risque même s’ils n’ont pas l’intention de témoigner ou n’ont pas été appelés à le faire. La menace possible que les survivants représentent pour les auteurs des crimes peut même avoir augmenté compte tenu de la nouvelle procédure mise en place en 2004 qui prévoit que tout le monde est interrogé chez soi et, comme il a été mentionné précédemment, cette nouvelle méthode de collecte de renseignements a été expressément conçue pour faire en sorte que les victimes témoignent plus librement qu’elles ne le faisaient lors des assemblées générales. De plus, un facteur susceptible d’être important est le fait que la demanderesse est la seule survivante de sa famille, et qu’elle est vraisemblablement la seule témoin vivante de ce jour fatidique où l’attaque a eu lieu. 

 

[22]           Compte tenu de ces faits et de la preuve documentaire laissant entendre que la volonté d’empêcher des survivants du génocide de témoigner peut fournir aux auteurs des crimes une motivation suffisante de les tuer, peut-on présumer que la demanderesse ne s’expose pas à un risque simplement parce qu’on n’a pas cru qu’elle s’était enregistrée pour témoigner? Pour évaluer la menace à la vie ou le risque de traitements ou peines cruels et inusités auxquels la demanderesse serait exposée, ne devrait-on pas tenir compte non seulement de son intention de témoigner mais également de la perception que les assassins peuvent avoir de la menace qu’elle représente tant qu’elle est en vie? Malheureusement, la SPR n’a pas analysé ces questions.

 

[23]           Cela ne signifie pas que la demande d’asile de tous les survivants du génocide au Rwanda est fondée suivant les articles 96 ou 97 de la LIPR. Chaque cas doit être examiné quant au fond et soigneusement analysé compte tenu des faits propres à la situation du demandeur et à la situation générale qui règne dans le pays à une période donnée. Cependant, en écartant la possibilité que la demanderesse puisse être exposée à un risque uniquement parce qu’elle ne l’a pas crue lorsqu’elle a affirmé qu’elle s’était enregistrée pour témoigner devant le tribunal gacaca, la SPR a commis une erreur susceptible de révision.

 

[24]           Pour ce motif, je conclus que la décision rendue par la SPR doit être annulée. Les parties n’ont proposé aucune question aux fins de certification et aucune ne sera certifiée.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

ORDONNANCE

 

LA COUR ORDONNE que la présente demande de contrôle judiciaire soit accueillie, que la décision de la SPR soit annulée et que la demande de la demanderesse fondée sur sa qualité de personne à protéger soit renvoyée à la Commission afin qu'un tribunal différemment constitué l'examine à nouveau conformément aux présents motifs. J’ordonne que, lorsqu’il examinera la demande présentée par la demanderesse, le tribunal reconnaisse comme l’a fait la SPR dans la décision faisant l’objet du présent contrôle, que la demanderesse est une survivante du génocide et que ses parents et sa sœur ont été assassinés pendant le génocide rwandais de 1994. Aucune question de portée générale n'est certifiée.

 

 

« Yves de Montigny »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

 

Caroline Tardif, LL.B., trad.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                                IMM-508-07

 

INTITULÉ :                                                               EMMA UWASE

                                                                                    c.

                                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                                         TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                                       LE 11 DÉCEMBRE 2007

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                                               LE JUGE DE MONTIGNY

 

DATE DES MOTIFS :                                              LE 18 DÉCEMBRE 2007

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Raoul Boulakia

 

POUR LA DEMANDERESSE

Matina Karvellas

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Raoul Boulakia

Avocat

45, rue Saint-Nicholas

Toronto (Ontario)  M4Y 1W6

 

          POUR LA DEMANDERESSE

John H. Sims

Sous-procureur général

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

                                                                                               

 

 

 

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