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Date : 20080118

Dossier : IMM-1345-07

Référence :  2008 CF 68

Ottawa (Ontario), le 18 janvier 2008

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE BLANCHARD

 

ENTRE :

 

RIZAYEV AZIZ

demandeur

 

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

 

défendeur

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

I.         Introduction

[1]               Le demandeur, Rizayev Aziz, citoyen du Turkménistan, est arrivé au Canada le 22 octobre 2004. Il a présenté une demande d’asile parce qu’il craignait d’être exposé à un risque s’il retournait dans son pays de citoyenneté compte tenu de deux incidents avec des agents du KNB, anciennement le KGB, survenus en 1994 et 1995, et des activités qu’il a menées contre le régime pendant son séjour aux États-Unis.

[2]               En avril 1997, le demandeur a quitté le Turkménistan et, le 4 novembre de la même année, il a demandé l’asile aux États‑Unis. Là-bas, il n’a pas comparu à l’audience et sa demande d’asile a par la suite été rejetée. Il est demeuré sans statut dans ce pays pendant les six années qui ont suivi. Après qu’il eut demandé, sans succès, de faire rouvrir son dossier aux États-Unis, un juge américain a ordonné son renvoi.

 

[3]               Dans une décision rendue le 2 mars 2007, un tribunal de la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié (la Commission) a rejeté la demande du demandeur en concluant qu’il n’était pas un « réfugié au sens de la Convention » ni une « personne à protéger » puisque sa demande « n’a[vait] pas de fondement crédible ».

 

[4]               Le demandeur sollicite le contrôle judiciaire de cette décision.

 

II.   Question en litige

[5]               La seule question qui se pose est celle de savoir si la Commission a commis une erreur en  tirant ses conclusions en matière de crédibilité.

 

III.   Norme de contrôle

[6]               L’appréciation de la crédibilité est « essentiellement de nature factuelle » et il faut faire preuve d’une grande retenue judiciaire à l’égard des décisions de la Section de la protection des réfugiés, qui est un tribunal spécialisé, parce qu’elle jouit d’un avantage relatif qui consiste à entendre les témoignages de vive voix et qu’elle est par conséquent la mieux placée pour apprécier la crédibilité du demandeur : Dr Q c. College of Physicians and Surgeons of British Columbia, [2003] 1 R.C.S. 226, au paragraphe 38. Il est bien établi en droit que la norme de contrôle applicable aux conclusions de la Commission en matière de crédibilité est celle de la décision manifestement déraisonnable : Aguebor c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1993] A.C.F. n732 (C.A.F.) (QL), au paragraphe 4; Chowdhury c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 139, au paragraphe 12; et Rahman c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 974, au paragraphe 27.

 

IV.  Analyse

[7]               Tant dans ses observations écrites qu’orales, le demandeur reconnaît que certains éléments de la preuve présentés à l’appui de sa demande comportaient des irrégularités. Il conteste néanmoins les conclusions de la Commission en matière de crédibilité, alléguant que cette dernière a omis de tenir compte de toutes les explications qu’il a données et qu’elle a parfois fait preuve d’un zèle excessif dans sa recherche de contradictions. Tout particulièrement, le demandeur conteste la partie des motifs énoncés par la Commission qui traite des activités qu’il a menées pendant son séjour aux États-Unis. Il allègue que la Commission n’a pas tenu expressément compte du témoignage de M. Leonid Komarovsky, dans lequel celui‑ci affirmait avoir été précisément interrogé, pendant son incarcération au Turkménistan, au sujet du demandeur. Le demandeur prétend que la Commission a commis une erreur en n’accordant aucune valeur probante au témoignage de M. Komarovsky.

 

[8]               Le défendeur soutient que la Commission n’a pas omis de prendre en compte ou mal interprété la preuve dont elle disposait et qu’elle n’a pas tiré de conclusions manifestement déraisonnables. Il prétend de plus que la conclusion générale, tirée par la Commission, quant au manque de crédibilité du demandeur, peut s’étendre à tous les éléments de preuve pertinents de son témoignage. À l’appui de cette prétention, le défendeur se fonde sur l’arrêt Sheikh c. Canada, [1990] A.C.F. 604 (QL). Selon le défendeur, la Commission n’a donc pas commis d’erreur en n’accordant pas de valeur probante au témoignage de M. Komarovsky.

 

[9]               Les conclusions de la Commission reposent sur de nombreuses contradictions, omissions et incohérences contenues dans le témoignage du demandeur. La Commission a conclu que le demandeur n’avait pas pu expliquer de manière satisfaisante les divergences entre ses exposés circonstanciés canadien et américain et les omissions de ceux-ci. Ces divergences et omissions se rapportent à la date du divorce du demandeur, à la date de sa conversion au christianisme et à celle de son baptême, à la tentative de viol de son ex-épouse et à son incident impliquant le KNB. De plus, la Commission a conclu que le demandeur n’avait pas été en mesure d’expliquer pourquoi il avait omis de mentionner dans son exposé circonstancié canadien sa relation avec « Serdar », un bon ami de la famille, dont le père était le chef du parti d’opposition en exil. Selon le propre témoignage du demandeur, c’est la mort de Serdar qui l’a incité à rédiger des articles aux États-Unis sous un nom d’emprunt. Le demandeur a décrit ces faits importants dans son exposé circonstancié américain, mais il a omis de le faire dans son exposé circonstancié canadien.

 

[10]           La Commission a conclu que le demandeur avait inventé un récit dans le but d’obtenir un statut au Canada et a donc jugé qu’« il n’était absolument pas crédible ».

 

[11]           La Commission a traité la preuve documentaire présentée par le demandeur et le témoignage rendu par M. Komarovsky de la manière suivante :

N’ayant pas cru ses problèmes et son histoire, nous n’avons accordé aucune valeur probante aux documents suivants : P‑34 (divers articles), P-35 (première page de la lettre), R-35 (A) (deux pages d’une lettre du parti républicain du Turkménistan), P-36 (documents de divorce), P-37 (acte de baptême) et P‑38 (copies de courriels). Compte tenu des problèmes de crédibilité constatés en l’espèce, nous n’accordons pas non plus de valeur à la déposition du témoin, M. Komarovsky, qui est un ami du demandeur d'asile.

 

[12]           En ce qui concerne le témoignage de M. Komarovsky, la Commission a écrit dans ses motifs : « Au début de la première séance de l'audience, nous avons écouté attentivement le témoignage de M. Komarovsky, un journaliste et citoyen des États-Unis d’Amérique. Il nous a dit être un ami du demandeur d'asile. » Au début de son analyse, la Commission a exposé ce qui suit au sujet de ce témoignage :

Premièrement, M. Komarovsky est venu livrer son témoignage. Il a corroboré le fait que le demandeur d'asile aurait signé d’un nom d’emprunt les articles qu’il a rédigés. Il nous a dit que sa relation avec le demandeur d'asile aurait d’abord été de nature professionnelle, puis était devenue une « relation d’amis ». Il nous a affirmé connaître le demandeur d'asile depuis cinq ans. Cependant, M. Komarovsky n’a pas pu nous indiquer la nationalité du demandeur d'asile, disant : [traduction] « Il vient du Caucase, mais je ne me suis jamais intéressé à son origine. » Invité à nous dire si le demandeur d'asile lui a déjà dit qu’il était persécuté du fait de sa nationalité, il a répondu : [traduction] « Je ne me souviens pas si nous avons discuté expressément de cette question, mais toutes les personnes qui ne sont pas des Turkmènes pure laine sont persécutées. » Il nous a dit avoir lui-même été accepté aux États‑Unis en qualité de réfugié en 1995 du fait de son ethnie, c.‑à‑d. du fait qu’il est juif. À notre avis, si la nationalité du demandeur d'asile lui posait des problèmes au Turkménistan, M. Komarovsky l’aurait su parce qu’ils étaient des amis et qu’ils ont discuté des problèmes que le demandeur d'asile avait au Turkménistan.

[13]           Nulle part dans ses motifs la Commission n’a tiré de conclusion générale quant à la crédibilité de M. Komarovsky. Comme je l’ai déjà indiqué, la Commission n’a pas accordé de valeur probante au témoignage de M. Komarovsky essentiellement parce qu’elle n’a pas cru le récit du demandeur et l’a jugé non crédible. Le défendeur allègue que la Commission pouvait tirer une telle conclusion et il renvoie à l’arrêt Sheikh, précité, une décision qui appuie la conclusion de la Commission.

 

[14]           Dans l’arrêt Sheikh, le juge MacGuigan, s’exprimant au nom de la Cour d’appel fédérale, a présenté son point de vue de la manière suivante aux paragraphes 7 et 8 de ses motifs :

[7]      Le concept de la crédibilité des éléments de preuve et celui de la crédibilité du demandeur sont évidemment deux choses différentes, mais il est évident que lorsque la seule preuve soumise au tribunal qui relie le demandeur à sa demande est celle que ce dernier fournit lui-même (outre, peut-être, les dossiers sur différents pays dont on ne peut rien déduire directement à l'égard de la revendication du demandeur), la perception du tribunal que le demandeur n'est pas un témoin crédible équivaut en fait à la conclusion qu'il n'existe aucun élément crédible sur lequel pourrait se fonder le second palier d'audience pour faire droit à la demande.

 

[8]     J'ajouterais qu'à mon sens, même sans mettre en doute chacune des paroles du demandeur, le premier palier d'audience peut douter raisonnablement de sa crédibilité au point de conclure qu'il n'existe aucun élément de preuve crédible ayant trait à la revendication sur lequel le second palier d'audience pourrait se fonder pour y faire droit. En d'autres termes, la conclusion générale du manque de crédibilité du demandeur de statut peut fort bien s'étendre à tous les éléments de preuve pertinents de son témoignage. Naturellement, puisque le demandeur doit établir qu'il réunit tous les éléments de la définition de l'expression réfugié au sens de la Convention, la conclusion du premier palier d'audience que sa revendication ne possède pas un minimum de fondement est suffisante. [Non souligné dans l’original.]

 

 

[15]           La Cour d’appel fédérale a eu l’occasion d’appliquer l’arrêt Sheikh dans l’affaire Rahaman c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2002] 3 C.F. 537. Elle a conclu que l’arrêt Sheikh n’assimile pas la conclusion d'« absence de minimum de fondement » à une conclusion selon laquelle le témoignage du demandeur n'est pas crédible. La Commission ne peut conclure à l'« absence de minimum de fondement » si elle dispose d'éléments de preuve crédibles ou dignes de foi qui peuvent lui permettre de faire droit à la demande, même si elle décide, en se fondant sur la preuve dans son ensemble, que la demande est dénuée de fondement. En outre, la Cour d’appel a explicitement déclaré que la Commission doit prendre en considération tous les éléments de preuve qui lui sont présentés.

 

[16]           La proposition juridique énoncée par le juge MacGuigan dans l’arrêt Sheikh visait clairement à s'étendre à tous les éléments de preuve « du témoignage [du demandeur] » et à s’appliquer dans les circonstances où « la seule preuve » dont dispose la Commission est celle que le demandeur fournit lui-même. En l’espèce, on peut soutenir que le témoignage de M. Komarovsky n’émanait pas du témoignage du demandeur et que la Commission n’a pas tiré de conclusion quant à la crédibilité de M. Komarovsky. Dans de telles circonstances, d’autres principes juridiques doivent être appliqués. Premièrement, comme je l’ai indiqué précédemment, le tribunal doit tenir compte de tous les éléments de preuve qui lui sont présentés dans son appréciation de la crédibilité. Voir l’arrêt Owusu-Ansah c. Canada (MEI) (1998), 8 Imm. L. R. (2nd) 106 (C.A.F.). Cette règle est conforme aux principes et aux méthodes d’établissement des faits énoncés dans le Guide des procédures et critères à appliquer pour déterminer le statut de réfugié, publié par le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés. Le paragraphe 199 de ce Guide est en partie ainsi rédigé : « En elles-mêmes, des déclarations inexactes ne constituent pas une raison pour refuser le statut de réfugié et l’examinateur a la responsabilité d’évaluer de telles déclarations à la lumière des diverses circonstances du cas. »

 

[17]           Deuxièmement, plus la preuve qui n'a pas été expressément mentionnée ni analysée dans les motifs du tribunal est importante, et plus une cour de justice sera disposée à inférer de ce silence que le tribunal a tiré une conclusion de fait erronée « sans tenir compte des éléments dont il [disposait] ». Autrement dit, l'obligation du tribunal de fournir une explication augmente en fonction de la pertinence de la preuve en question au regard des faits contestés. Voir la décision Cepeda‑Gutierrez c. Canada (MEI), [1998] A.C.F. no 1425 (C.F. 1re inst.) (QL).

 

[18]           Il convient d’examiner le témoignage que M. Komarovsky a rendu devant la Commission. Le témoin a affirmé avoir connu le demandeur il y a environ cinq ans, par l’intermédiaire d’un ami, et lui avoir demandé de l’aider pour trouver un fournisseur d’accès Internet par satellite pour le Turkménistan, domaine que le demandeur connaissait très bien. Il a expliqué que le président du Turkménistan avait interdit l’utilisation d’Internet dans le pays. M. Komarovsky a réussi par la suite à obtenir l’accès à ce service pour lui‑même et d’autres membres de l’opposition résidant aux États-Unis.

 

[19]           M. Komarovsky a affirmé dans son témoignage que le demandeur avait ensuite fait circuler des renseignements importants contre le gouvernement turkmène qu’il avait utilisés dans la rédaction de ses propres articles qui figuraient sur trois sites Web de l’opposition. Il a aussi expliqué que le demandeur avait écrit plusieurs articles signés de différents noms d’emprunt, qui avaient été affichés sur les sites en question, et il a confirmé que le demandeur était l’auteur des articles produits comme pièce P-34.

 

[20]           M. Komarovsky a poursuivi en indiquant que lorsqu’il avait été arrêté au Turkménistan en 2002 et incarcéré pendant cinq mois, il avait été interrogé de manière précise au sujet du demandeur. Je reproduis ci-dessous les extraits pertinents de son témoignage tirés de la transcription de l’audience :

[traduction]

 

LE CONSEIL (s’adressant au témoin)

 

Q.        Vous a-t-on interrogé au sujet de vos activités pour l’opposition?

 

R.         C’est exactement ce qu’on me demandait presque toujours.

 

Q.        Et lors de ces interrogatoires, vous a-t-on posé des questions au sujet d’une personne en particulier?

 

R.         Oui, bien sûr, on me posait ce genre de question presque à chaque fois. Avant tout, on voulait que je décode les noms d’emprunt qui avaient été utilisés par les auteurs des articles figurant sur Gundogar et d’autres sites. On me nommait des douzaines de noms de famille et on me montrait des douzaines de photos pour que j’établisse l’identité de l’une ou l’autre de ces personnes.

 

Q.        Avez-vous reconnu des personnes sur les photos qu’on vous a montrées ou des noms?

 

R.         Non, je leur ai dit que je ne reconnaissais personne et que je n’avais rien à voir avec ces personnes. En fait, je dois dire que je m’en suis sorti parce que je n’ai rien admis, car si j’avais admis quelque chose, je ne serais pas assis ici aujourd’hui. Toutes les autres personnes qui ont parlé ont été condamnées à purger des peines d’emprisonnement de vingt ou vingt-cinq ans, voire à perpétuité. Et c’est le cas pour plus d’un millier de personnes.

 

Q.        Pour bien comprendre, en réalité, connaissiez-vous vraiment certaines de ces personnes dont on vous avait donné les noms, autrement dit vous avez tout simplement menti?

 

R.         Évidemment que je connaissais bon nombre d’entre elles.

 

Q.        M. Rizayev était-il l’une de ces personnes?

 

R.         Oui.

 

Q.        Que voulait-on savoir au sujet de M. Rizayev?

 

R.         Oui. On voulait plus particulièrement savoir s’il vivait aux États-Unis et s’il se réunissait régulièrement avec des Turkmènes. De plus, on m’a parlé du fait qu’il portait atteinte à la réputation du Turkménistan et qu’il avait fait des émissions spéciales et rédigé des articles contre le président du Turkménistan. C’est ce genre de questions qu’on me posait sur M. Rizayev.

 

Q.        Vous a-t-on déjà expliqué d’où provenaient ces renseignements?

 

R.         En fait, ces personnes ne vous donnent jamais d’explications; c’est plutôt de vous qu’elles tentent d’en obtenir. Mais ce n’était pas difficile de deviner. Parmi les personnes qui ont connu Aziz et qui lui ont donné de l’information, je crois qu’il y avait probablement des agents qui travaillaient jadis pour le service secret du KGB et qui leur ont fourni des renseignements au sujet des activités qu’Aziz menait aux États-Unis. Mais là encore, ce n’est qu’une supposition. Ces personnes se méfient vraiment de tous les étrangers. Le Turkménistan est l’un des rares pays où le sens du mot traître existe encore et aussi le […] tous des traîtres, des traîtres à leur patrie.

 

 

[21]           Le témoignage de M. Komarovsky, si on y prête foi, corrobore des éléments importants du récit du demandeur. En particulier, ce témoignage révèle que les autorités turkmènes sont au courant des activités menées par le demandeur aux États-Unis, qu’elles le soupçonnent d’avoir porté atteinte à la réputation de leur pays et d’avoir rédigé des articles contre leur président. Le témoignage de M. Komarovsky touche le fond de la demande du demandeur, à savoir que ce dernier serait en danger s’il retournait au Turkménistan en raison, entre autres, de ses activités politiques menées contre le régime pendant son séjour aux États-Unis. Ce témoignage contredit directement la conclusion de la Commission.  

 

[22]           Dans ses motifs, la Commission a omis d’examiner le témoignage de M. Komarovsky relativement à l’interrogatoire que les autorités turkmènes lui ont fait subir pendant son incarcération, et la Commission n’a pas fait mention des efforts faits par le demandeur pour trouver un fournisseur d’accès Internet et de l’équipement, ou pour fournir à M. Komarovsky les renseignements qu’il avait obtenus à partir de ses sources, renseignements qu’il a plus tard utilisés dans la rédaction de ses articles. Tous ces éléments de preuve serviraient à corroborer la demande du demandeur et mèneraient à une conclusion contraire à celle tirée par la Commission. Cette dernière n’a pas retenu le témoignage de M. Komarovsky compte tenu « des problèmes de crédibilité constatés en l’espèce ». Cependant, la Commission ne s’est pas prononcée expressément sur la crédibilité de M. Komarovsky. À mon avis, la Commission a été régulièrement saisie du témoignage de M. Komarovsky et aurait dû en tenir compte de manière expresse dans son appréciation de la crédibilité du demandeur. Compte tenu du silence de la Commission quant à ce témoignage dans l’énoncé de ses motifs, et compte tenu de son examen détaillé d’autres éléments de preuve à l’appui de ses conclusions, je dois conclure que la Commission a tiré sa conclusion générale en matière de crédibilité sans tenir compte de l’ensemble de la preuve. Voir la décision Cepeda-Gutierrez, précitée, au paragraphe 17.

 

[23]           La Commission pouvait peut-être en arriver à la conclusion qu’elle a tirée, mais avant de le faire elle devait tenir compte de l’ensemble de la preuve dont elle disposait, et, dans les circonstances de l'espèce, elle devait expliquer de façon convaincante pourquoi elle avait rejeté le témoignage de M. Komarovsky. En omettant de le faire, elle a commis une erreur susceptible de contrôle.

 

V.   Conclusion

[24]           Pour ces motifs, la présente demande de contrôle judiciaire sera accueillie.

 

VI.   Certification d’une question

[25]           Les parties ont eu l’occasion de soulever une question grave de portée générale conformément à l'alinéa 74d) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27, mais elles ne l'ont pas fait. Je suis d'avis que la présente affaire ne soulève aucune question grave de portée générale. Je ne certifie donc aucune question.

 


 

JUGEMENT

 

            LA COUR STATUE QUE :

 

1.         la demande de contrôle judiciaire est accueillie;

 

2.         la décision de la Commission rendue le 2 mars 2007 est annulée et l’affaire est renvoyée à la Commission pour qu’un tribunal différemment constitué statue sur elle conformément aux présents motifs; 

 

3.         aucune question de portée générale n'est certifiée.

 

 

 

« Edmond P. Blanchard »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

 

Caroline Tardif, LL.B., B.A.Trad.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                                            IMM-1345-07

 

INTITULÉ :                                                                           RIZAYEV AZIZ

                                    c.

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                    ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                                                     MONTRÉAL (QUÉBEC)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                                                   LE 29 NOVEMBRE 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                                                                  LE JUGE BLANCHARD

 

DATE DES MOTIFS :                                                          LE 18 JANVIER 2008

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Styliani Markaki

514-845-9234

 

POUR LE DEMANDEUR

Édith Savard

514-283-5115

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Styliani Markaki

Montréal

 

POUR LE DEMANDEUR

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Montréal (Québec)

 

                               POUR LE DÉFENDEUR

 

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