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Date: 20080219

Dossier: IMM-3133-07

Référence: 2008 CF 213

Ottawa (Ontario), le 19 février 2008

En présence de Monsieur le juge Simon Noël 

 

ENTRE :

RITA ELISABETH AYALA AYALA,

TANIA ALEXANDRA PERDOMO ET

TAMARA ADRIANNA PERDOMO

Demanderesses

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L'IMMIGRATION

Défendeur

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Il s'agit d'une demande de contrôle judiciaire de la décision de la Section de la protection des réfugiés (la SPR), datée du 13 juillet 2007, selon laquelle madame Rita Elisabeth Ayala Ayala (la demanderesse principale) n’est ni une « réfugiée au sens de la Convention » ni une « personne à protéger ». La demande d’asile des demanderesses Tania Alexandra Perdomo et Tamara Adrianna Perdomo, filles de la demanderesse, nées en Virginie, aux États-Unis, les 12 et 13 février 2006 a également été rejetée. La demanderesse principale a informé la SPR que ses filles n’allèguent aucun risque de retour aux États-Unis ni ne prétendent y craindre la persécution. Le père des enfants demande l’asile lui aussi mais dans un autre dossier.

 

I.          Question en litige

[2]               La SPR a-t-elle erré en fait ou en droit lorsqu’elle a conclu que la demanderesse n’était pas crédible?

 

[3]               La Cour constate que la décision de la SPR n’était pas entachée d’erreur invitant son intervention; par conséquent la demande de contrôle judiciaire ne sera pas accueillie.

 

III        Les faits

[4]                Citoyenne du Salvador, la demanderesse principale allègue avoir une crainte bien fondée de persécution aux mains de son ancien petit ami, monsieur Pedro Alvarado, qu’elle prétend être le chef des Maras. Ce dernier l’avait agressé et avait tiré des coups de feu sur sa maison lorsqu’elle l’a quitté et elle a porté plainte contre lui auprès de la police.

 

[5]               Selon son récit écrit, elle quitte le Salvador le 14 juin 2005, transite dans plusieurs pays d’Amérique centrale où elle a rencontré celui qui deviendrait père de ses deux filles. Le couple conjugal séjourne pendant sept mois aux États-Unis avant d’arriver par camion à Lacolle, au Canada, le 1er septembre 2006 pour ensuite demander l’asile à la frontière.

 

 

 

 

 

IV.       Décision à l’étude

[6]               Après avoir pris en considération la Directive No. 4 du président de la Commission de l'immigration et du statut de réfugié concernant les Revendicatrices du statut de réfugié craignant d’être persécutées en raison de leur sexe, la SPR a conclu que les conditions n’ont pas été réunies pour accorder le statut de réfugié à la demanderesse principale. Cette conclusion est fondée sur le constat qu’il y a eu de multiples contradictions et d’invraisemblances concernant des éléments majeurs du récit de la demanderesse principale, nuisant ainsi à sa crédibilité.

 

[7]               Par exemple, la SPR constate qu’au paragraphe 7 de son récit en réponse à la question 31 dans son Formulaire de Renseignements Personnels (FRP), la demanderesse écrit ceci :

« Vers la fin d’avril 2005, lorsque nous étions chez ses parents, j’ai remarqué pour la première fois des tatouages dans son avant bras et épaules. »

 

Toutefois, dans son témoignage elle persiste à dire que l’événement chez les parents de son ex-copain a eu lieu en mai 2004.  Plus loin, elle témoigne qu’il était membre de deux gangs, le MS et le Mara 18, dont il était le chef de cette dernière. Pourtant, le modus operandi de ces deux gangs était d’éliminer les membres de l’un et de l’autre. Il serait donc invraisemblable qu’il puisse être membre de deux gangs.

 

[8]               Quant à l’allégation que son ex-copain aurait tiré des balles en direction de sa maison, la demanderesse a donné trois versions différentes de ce qu’elle a écrit dans le récit. Lorsque la SPR lui a demandé laquelle des trois versions était la vérité, les transcriptions révèlent ce qui suit: 

 

« PAR LA COMMISSAIRE (s’adressant à la revendicatrice)

 

Q.        Madame, nous avons trois versions différentes. Maintenant, vous pouvez nous dire la vraie version?

 

R.         Je vous dis la vérité, je suis un peu mêlée, mais bon, devant Dieu, je vous dis la vérité;

 

Q.        Vous êtes assermenté, ce n’est pas nécessaire de répéter « devant Dieu,» vous êtes assermentée. Alors . . . alors, étiez-vous dans la maison, en dehors de la maison ou vous n’étiez pas encore arrivée à la maison?

 

R.         Je rentrais presque à la maison.

[. . .]

Q.        Pourquoi vous avez déclaré quelque chose de différent il y a quelques minutes?

 

R.         Mais c’est à peu près la même chose, il faut juste y mettre un peu de logique et ça revient au même. »

 

 

[9]               La SPR a estimé que dans ce cas particulier, les prétentions de la demanderesse étaient tout à fait invraisemblables et contraires à la preuve documentaire.

 

V.        Analyse

[10]           À la lecture de l’ensemble du dossier, il convient de souligner que les faits que plaide la demanderesse perdent parfois tous sens chronologique. De plus, les contradictions et incohérences dans le récit, ainsi que les omissions dans son formulaire de renseignements personnels laissent le lecteur perplexe.

 

[11]           Devant de telles contradictions et incohérences, le membre de la SPR présidant l’audience a, à de multiples reprises, demandé à la demanderesse de prendre son temps avant de répondre aux questions. Celles-ci ont été répétées et reformulées afin d’assurer la clarté et la compréhension. La demanderesse avait une interprète et elle était également représentée par une avocate. En dépit de ces efforts afin de s’assurer que la demanderesse avait compris les questions et les contradictions ou incohérences entre ses réponses et son récit, la SPR n’a pu que conclure que la demanderesse n’était pas crédible.

 

[12]           Il est établi qu’un Tribunal tel que la SPR est mieux placé que la Cour pour observer les gestes et analyser le comportement d’un témoin. La Cour ne devrait pas intervenir ou substituer son opinion à celle de la SPR (voir Rosta v. Thiel, [1986] N.S.J. No. 555 aux paragraphes 18, 19 et 20).  En l’espèce, les faits sont incontournables; la décision sous étude ne peut être manifestement déraisonnable.

 

[13]           Les parties furent invitées à soumettre des questions pour fin de certification, ce qu’elles n’ont pas fait.

 

 


 

JUGEMENT

 

LA COUR ORDONNE CE QUI SUIT:

 

-  La demande de contrôle judiciaire est rejetée;

-  Aucune question ne sera certifiée.

 

« Simon Noël »

Juge

 

 

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM-3133-07

 

INTITULÉ :                                       RITA ELISABETH AYALA AYALA ET AL c. MCI

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 MONTRÉAL

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 13 février 2008

 

MOTIFS DU JUGEMENT &

JUGEMENT:                                     L’Honorable juge Simon Noël

 

DATE DES MOTIFS :                      Le 19 février 2008

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Me Gisela Barraza

514-289-9146

 

POUR LE(S) DEMANDEUR(ERESSE)(S)

Me Caroline Doyon

514-283-9146

 

POUR LE(S) DÉFENDEUR(ERESSE)(S)

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

BARRAZA WHALEN GONZALES, Avocats

Montréal (Québec)

 

POUR LE(S) DEMANDEUR(ERESSE)(S)

John H. Sims, c.r.

Sous-Procureur Général du Canada

Montréal (Québec)

 

POUR LE(S) DÉFENDEUR(ERESSE)(S)

 

 

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