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Date : 20080221

Dossier : IMM-1504-07

Référence : 2008 CF 226

Ottawa (Ontario), le 21 février 2008

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE KELEN

 

 

ENTRE :

CRAIG DANIEL MAIMBA

demandeur

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire d’une décision rendue le 23 mars 2007 par la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (la Commission), dans laquelle elle a jugé que le demandeur, Craig Daniel Maimba, n’était ni un réfugié au sens de la Convention, ni une personne à protéger.

 

LE CONTEXTE

[2]               Le demandeur, citoyen du Zimbabwe âgé de 36 ans, demande l’asile au Canada en raison de ses opinions politiques et de son appartenance au Mouvement pour le changement démocratique (le MDC), le parti de l’opposition au Zimbabwe. Le demandeur affirme que ses problèmes au Zimbabwe ont débuté après être devenu président de la section ligue des jeunes du MDC.

 

[3]               Dans son Formulaire de renseignements personnels (le FRP), le demandeur soutient qu’il y a deux incidents de persécution particuliers qui expliquent son départ du Zimbabwe. Tout d’abord, le demandeur a fait part d’une situation qui s’est produite en juillet 1999 lorsque de jeunes membres du parti au pouvoir, l’Union nationale africaine du Zimbabwe-Front patriotique (le ZANU-PF), ont défié le demandeur et d’autres membres du MDC à une station d’autobus et ont ensuite commencé à les menacer et à les harceler. L’altercation a été violente. Les membres du ZANU‑PF ont sorti des armes et battu le demandeur et ses compagnons. Le demandeur affirme qu’il a été grièvement blessé lors de l’attaque, sa mâchoire a été fracturée et il a dû subir une chirurgie dentaire. Le demandeur soutient que, bien qu’il ait signalé l’incident à la police, aucune enquête sérieuse n’a été entreprise, et les malfaiteurs n’ont jamais été appréhendés.

 

[4]               Le second incident mentionné par le demandeur a eu lieu en avril 1999, lorsqu’il a été au prise avec des agents de sécurité de l’État qui l’ont arrêté. Selon le demandeur, ils ont menacé de le torturer et de le tuer s’il ne leur fournissait pas des renseignements au sujet du MDC et de ses activités. Il affirme avoir été interrogé pendant trois jours et ensuite relâché lorsque les agents de sécurité se sont rendu compte qu’il ne leur fournirait aucun renseignement. Le demandeur affirme qu’après l’avoir relâché, les forces de sécurité ont surveillé ses allées et venues.

 

 

[5]               En août 2000, le demandeur a quitté le Zimbabwe et s’est rendu aux États-Unis muni d’un visa d’étudiant. D’août 2000 jusqu’en février 2006, le demandeur est resté aux États-Unis où il a étudié dans un collège située à Wichita, au Kansas. Le 15 février 2006, le demandeur est arrivé au Canada, et il a présenté une demande d’asile. L’audience devant la Commission concernant la demande d’asile s’est tenue le 18 janvier 2007.

 

La décision contestée

[6]               Le 23 mars 2007, la Commission a rejeté la demande d’asile. Dans sa décision, la Commission a conclu que le demandeur n’était pas crédible et elle n’a pas retenu ses allégations de persécution. La Commission a conclu ce qui suit à la page 1 de la décision :

Je conclus que le demandeur d’asile n’a pas qualité de réfugié au sens de la Convention ni de personne à protéger. À mon avis, les allégations du demandeur d’asile à l’appui de sa demande d’asile ne sont pas crédibles, compte tenu des incohérences et invraisemblances contenues dans son témoignage. Je constate en outre l’absence de crainte subjective puisqu’il n’a pas présenté de demande d’asile ailleurs. […]

 

La Commission a donc rejeté la demande.

 

LES QUESTIONS EN LITIGE

[7]               Le demandeur a soulevé un certain nombre de questions dans son mémoire. Cependant, la Cour reformule les questions en litige de la façon suivante :

1.      La Commission a‑t‑elle commis une erreur en concluant que le témoignage du demandeur n’était pas crédible?

2.      La Commission a‑t‑elle commis une erreur en concluant que le demandeur n’avait pas de crainte subjective de persécution étant donné qu’il avait tardé à partir du Zimbabwe?

3.      La Commission a‑t‑elle commis une erreur en ne prenant pas en considération et en interprétant de façon erronée la preuve objective selon laquelle le demandeur, en qualité de membre du MDC, était une personne à protéger?

 

LA NORME DE CONTRÔLE

[8]               Les questions en litige soulevées en l’espèce concernent l’évaluation de la crédibilité du demandeur effectuée par la Commission. Il est de jurisprudence constante que les questions de crédibilité et de vraisemblance des témoignages doivent recevoir le plus haut degré de retenu et que les conclusions relatives à la crédibilité ne seront infirmées que si elles sont jugées manifestement déraisonnables : voir Gonzalez c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 FC 128.

 

ANALYSE

La question en litige no 1 :

 

La Commission a‑t‑elle commis une erreur en concluant que le témoignage du demandeur n’était pas crédible?

 

[9]               Le demandeur soutient que la Commission a commis un certain nombre d’erreurs graves dans sa conclusion défavorable selon laquelle il n’était pas crédible. Plus particulièrement, le demandeur allègue que la Commission a commis une erreur :

1.      parce qu’elle a tiré une conclusion défavorable relativement à de prétendues incohérences entre la déclaration faite au point d’entrée et l’exposé circonstancié du FRP; 

 

2.      parce qu’elle a tiré une conclusion défavorable du témoignage du demandeur relativement à la persécution qu’il a subie et qu’elle n’a pas appréciée de façon adéquate la preuve fournie à l’appui du témoignage;

 

3.      parce qu’elle a fondé sa décision défavorable sur le fait que le demandeur n’a pas quitté le Zimbabwe avant août 2000;

 

4.      parce qu’elle a conclu qu’il est improbable que le demandeur ait pu faire partie du groupe jeunesse du MDC avant la création du parti en septembre 1999.

 

 

Les incohérences entre les différentes déclarations

 

[10]           Dans sa décision, la Commission a conclu que la déclaration au point d’entrée était nettement différente des allégations de mauvais traitements rapportés dans l’exposé circonstancié du FPR. Plus particulièrement, le demandeur avait affirmé au point d’entrée avoir été détenu par des agents de sécurité vers 1995, alors que selon l’exposé circonstancié du FPR, la détention aurait eu lieu en avril 1999. De plus, si selon la déclaration au point d’entrée il aurait été agressé au travail, l’exposé circonstancié du FPR dit plutôt que l’agression aurait eu lieu à une station d’autobus. Le demandeur soutient que ces deux conclusions [traduction] « relèvent plus du fantasme que de la réalité » et que la Commission a commis une erreur en tirant ces conclusions à ce sujet.

 

[11]           La Cour n’a pas accepté la déclaration du demandeur selon laquelle il travaillait à la station d’autobus lorsqu’il a été agressé par le groupe des jeunes membres du ZANU‑PF. Bien que la Cour reconnaisse que le demandeur travaillait pour une entreprise faisant affaires dans les navettes et le transport touristique, le témoignage du demandeur devant la Commission révèle clairement que l’attaque s’est produite alors qu’il attendait à la station d’autobus en compagnie d’amis et de parents. Il y a une incohérence nette entre la déclaration du demandeur au point d’entrée et son témoignage devant la Commission. Par conséquent, il était justifié que la Commission tire une conclusion défavorable relativement à la crédibilité du demandeur en raison de cette incohérence.

 

[12]           En outre, la Cour n’accepte pas non plus l’argument du demandeur selon lequel la Commission a omis de fournir des motifs quant au rejet de son explication selon laquelle il n’était pas certain de la date exacte de son arrestation. À la page 2 de la décision, la Commission dit clairement qu’il était simplement invraisemblable que le demandeur se soit trompé de quatre ans au sujet de l’année de son arrestation. Il s’agit d’une différence significative entre la version des faits que l’on trouve dans la déclaration au point d’entrée et celle de l’exposé circonstancié du FRP. Par conséquent, la conclusion tirée par la Commission était justifiée eu égard à la preuve dont elle disposait.

 

Le récit des faits du demandeur et la preuve corroborante

 

[13]           Dans sa décision, la Commission a tiré une conclusion défavorable du témoignage imprécis du demandeur relativement aux deux incidents de harcèlement au Zimbabwe. La Commission a affirmé ce qui suit aux pages 2 et 3 de sa décision :

[…] Il ne se rappelait pas de la date de l’agression survenue en juillet 1999 et n’a pas révélé la date de sa détention en avril 1999. Si ces événements se sont véritablement produits dans cet ordre, il n’a pas suivi les instructions demandant de les consigner chronologiquement dans son FRP. Son FRP laisse entendre que l’agression s’est produite avant la détention. Le demandeur d’asile nous a transmis une version révisée de l’exposé circonstancié figurant dans son FRP et, plutôt que de clarifier les dates, il a ajouté « approximativement » devant avril 1999, ce qui n’a fait que brouiller les cartes en ce qui concerne les dates mentionnées dans ses allégations. […] Au moins trois lettres d’appui, dont une de sa mère, font allusion à une agression à l’aide d’un coup-de-poing américain, mais pas une seule de ces lettres ne mentionne la date à laquelle cette agression serait survenue. La note du médecin attestant des blessures qu’aurait subies le demandeur d’asile en juillet 1999 ne porte aucune date non plus. Pour toutes ces raisons, j’estime que ses preuves documentaires et son témoignage de vive voix ne sont pas dignes de foi et je ne suis pas convaincu que ses allégations sont crédibles.

 

 

[14]           Le demandeur conteste cette conclusion en faisant valoir un certain nombre de points. Tout d’abord, il affirme que les modifications apportées à son FRP n’avaient pas pour but de brouiller les cartes quant aux dates, mais qu’elles consistaient simplement en une clarification devant montrer que le demandeur n’est pas vraiment doué pour se souvenir des dates. Ensuite, il allègue que la Commission a appliqué un [traduction] « critère spécieux relativement à l’évaluation de la crédibilité » et rejeté ses arguments simplement parce qu’ils n’étaient pas présentés en ordre chronologique. Finalement, il soutient que la Commission a rejeté la preuve à l’appui du récit du seul fait que le rapport médical n’était pas daté.

 

[15]           Cependant, la Cour conclut que le témoignage du demandeur et la preuve, considérés dans leur ensemble, soulèvent de sérieux doute quant au moment où les faits se seraient produits. Le demandeur a la responsabilité de fournir la preuve à l’appui de ses allégations de persécution : voir Kovacs c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 1473, [2006] 2 R.C.F. 455. Bien que le demandeur en l’espèce ait déposé un certain nombre de lettres personnelles à l’appui de ses allégations, aucune ne fait mention du moment où ces faits se seraient produits. De plus, bien que le rapport médical confirme la date du traitement, la lettre comme telle n’est pas datée. Par conséquent, considérés dans leur ensemble, le témoignage et la preuve à l’appui du récit fournie par le demandeur font en sorte qu’il était raisonnable que Commission tire une conclusion défavorable relativement à sa crédibilité.

 

[16]           En outre, étant donné qu’elle avait conclu que le demandeur n’était pas crédible dans son témoignage concernant l’attaque alléguée, il était loisible à la Commission de conclure qu’elle ne devait pas accorder beaucoup de poids aux lettres corroborant le récit du demandeur : Kalangestani c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 1528, [2006] A.C.F. no 1916 (QL); Hamid c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1995] A.C.F. n1293 (1re inst.) (QL).

 

 

[17]           Enfin, le demandeur soutient également que la Commission a commis une erreur en concluant qu’il était invraisemblable qu’un membre en vue du MDC ne soit pas empêché de quitter le Zimbabwe; il affirme qu’une telle conclusion contredit son témoignage non contesté, selon lequel il n’y a aucun contrôle effectué à la sortie du pays. Cependant, le défendeur a souligné que la décision de la Commission n’avait pas comme fondement l’existence de contrôle à la sortie du pays, mais qu’elle se fondait plutôt sur le propre témoignage du demandeur, selon lequel les agents de sécurité avaient continué de surveiller ses allées et venues d’avril 1999 jusqu’au moment où il avait quitté le pays. Il était donc loisible à la Commission de conclure que si les agents de sécurité s’étaient réellement intéressés au demandeur, ils auraient su qu’il s’apprêtait à quitter le Zimbabwe, et ils l’en auraient empêché.

L’appartenance du demandeur au MDC

 

[18]           Le demandeur soutient que la Commission a commis une erreur en concluant qu’il était invraisemblable qu’il ait fait partie du MDC en janvier 1999 étant donné que ce parti avait été officiellement créé en septembre 1999. La Cour conclut que l’indigence de la preuve présentée par le demandeur à ce sujet justifie la conclusion de la Commission. De plus, même si la Commission avait accepté le témoignage du demandeur selon lequel il était actif au sein du MDC avant sa création officielle, il est clair qu’il y avait suffisamment d’autres conclusions sur lesquelles la Commission peut adéquatement fonder sa conclusion défavorable relativement à la crédibilité du demandeur. Par conséquent, la Cour juge qu’il était justifié que la Commission conclue à la non‑crédibilité du demandeur, et elle n’interviendra pas à ce sujet.

 

La question en litige no 2 :    

 

La Commission a‑t‑elle commis une erreur en concluant que le demandeur n’avait pas de crainte subjective de persécution étant donné qu’il avait tardé à partir du Zimbabwe?

 

 

[19]           Le demandeur soutient que la Commission a commis une erreur en fondant en partie sa décision sur le fait qu’il avait tardé à partir du Zimbabwe. La Cour est d’accord.  La Commission, dans ses motifs, traite de cette tardiveté comme s’il s’agissait d’une preuve de manque de crainte subjective.

 

[20]           Le demandeur soutient, et la Cour partage son opinion, qu’étant donné que le formulaire d’examen initial de la Commission ne faisait aucunement mention de la possibilité que la tardiveté constitue un problème, la Commission a par conséquent manqué à l’équité procédurale en se fondant sur ce point sans d’abord en aviser le demandeur.

 

 

La question en litige no 3 :    

 

La Commission a‑t‑elle commis une erreur en ne prenant pas en considération et en interprétant de façon erronée la preuve objective selon laquelle le demandeur, en qualité de membre du MDC, était une personne à protéger?

 

 

[21]           Le demandeur allègue que la Commission a commis une erreur en omettant d’apprécier la preuve documentaire objective selon laquelle les membres du MDC au Zimbabwe courent toujours de sérieux risques de persécution. La Commission aurait donc dû prendre en considération cette preuve objective crédible malgré que le demandeur n’ait pas été en mesure de produire un témoignage crédible. À l’appui de ce raisonnement, le demandeur renvoie à la décision Mylvaganam c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2000] A.C.F. no 1195 (QL), rendue par la Cour fédérale, dans laquelle le juge Gibson a affirmé ce qui suit au paragraphe 10 :

¶ 10     La SSR disposait de preuves documentaires nombreuses démontrant les difficultés auxquelles font face tous les jeunes Tamouls, en particulier ceux qui viennent du nord du Sri Lanka. Même en écartant carrément, comme elle l'a fait, les actes de persécution que le demandeur prétend avoir subis, elle ne paraît pas avoir, dans le raisonnement sur lequel elle appuie sa décision en l'espèce, nié le fait que le demandeur était bien un jeune Tamoul originaire du nord du Sri Lanka. La SSR a accepté ce fait et ensuite écarté les preuves matérielles dont elle disposait selon lesquelles une personne comme ce demandeur risquait de faire l'objet de persécution s'il était obligé de retourner au Sri Lanka, qu'il pourrait donc fort bien avoir une crainte subjective d'être persécuté et que cette crainte reposait aussi sur une base objective réelle. La SSR n'a même pas envisagé cette possibilité et je suis convaincu qu'elle a pris sa décision sans tenir compte de tous les éléments de preuve dont elle disposait. […]

[Non souligné dans l’original.]

 

[22]           Par suite de l’appréciation de la preuve et de l’analyse des arguments du demandeur à ce sujet, la Cour conclut que la Commission a commis une erreur dans l’appréciation de la preuve documentaire. La jurisprudence est claire : lors de l’examen du risque objectif de préjudice que le demandeur pourrait subir en cas de renvoi dans son pays d’origine, il peut y avoir des cas où, lorsque l’identité du demandeur est acceptée, la preuve documentaire objective est telle que les circonstances particulières du demandeur font de lui une personne à protéger, malgré que la Commission ait conclu qu’il n’est pas crédible : voir Kandiah c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 181, [2005] A.C.F. no 275 (QL), rendue par le juge Martineau. Cependant, il affirme également que de telles appréciations doivent être effectuées au cas par cas selon la nature de la preuve déposée dans chaque affaire.

 

[23]           Bien que la Commission ait conclu à la page 3 de la décision qu’elle n’était pas convaincue que le demandeur était un membre en vue au sein du MDC, elle n’a pas conclu qu’il n’était pas un membre du MDC. La Commission n’a pas tenu compte d’éléments de preuve pertinents et importants concernant le fait qu’il appartenait au MDC – à savoir une carte de membre obtenue au Zimbabwe, une lettre du MDC affirmant qu’il est membre actif et une lettre du Bureau du secrétariat général du MDC datée du 25 avril 2002 qui confirme que le demandeur était un [traduction] « membre très actif au sein du MDC » – et que son père est le conseiller du MDC pour le quartier 22-Hatfield au Zimbabwe.

[24]           Comme l’a conclu le juge Evans dans la décision Cepeda-Gutierrez c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (1998), 157 F.T.R. 35, la Commission a l’obligation d’expliquer pourquoi elle n’a pas pris en considération la preuve d’appartenance du demandeur au MDC alors que les documents semblent contredire directement sa conclusion. Comme je l’ai conclu au paragraphe 14 de la décision Chavi c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 53, [2008] A.C.F. no 63 (QL), rendue le 16 janvier 2008 :

¶ 14     Le rapport du Département d’État des États-Unis [concernant le Zimbabwe] constitue une preuve objective selon laquelle l’appartenance au MDC est suffisante pour qu’une personne soit exposée à un risque de préjudice. […]

 

[25]           Dans l’affaire Chavi, j’ai conclu que l’omission de la Commission de tenir compte de l’importante preuve objective constituait une erreur de droit dans l’examen consistant à déterminer si le membre du MDC au Zimbabwe a qualité de personne à protéger. Ici, le demandeur est membre de la section canadienne du MDC. Le demandeur a affirmé dans son témoignage qu’il a l’intention de continuer d’être membre du MDC s’il retourne au Zimbabwe. À ce sujet, la Commission aurait dû évaluer si le demandeur risque de subir des préjudices graves de la part du gouvernement du Zimbabwe, conformément à la décision que j’ai rendue dans l’affaire Chavi, précitée.

 

CONCLUSION

[26]           Pour ces motifs, la Cour conclut que la Commission a bien fourni des motifs valables pour appuyer sa conclusion selon laquelle le demandeur n’était pas crédible, et de telles conclusions relatives à la crédibilité imposent le plus haut degré de retenue judiciaire. Cependant, la Commission a commis une erreur de droit en fondant en partie sa décision sur le fait que le demandeur avait tardé à partir du Zimbabwe. La Commission a également commis une erreur en omettant de tenir compte de la preuve documentaire objective, à partir de laquelle elle aurait pu conclure que le demandeur est une personne à protéger en raison de son appartenance au MDC. La Cour ne considère pas que la Commission a conclu que le demandeur n’était pas un membre du MDC, mais plutôt qu’il n’était pas un membre en vue tel qu’il l’alléguait.

 

[27]           Par conséquent, la Cour devra accueillir la demande de contrôle judiciaire et renverra l’affaire à la Commission pour qu’elle statue à nouveau sur elle conformément aux présents motifs.

 

[28]           Les parties et la Cour conviennent que l’affaire ne soulève aucune question aux fins de certification.

 

 

 

 

 

 

 

 


JUGEMENT

 

 

LA COUR STATUE que :

 

1.         La demande de contrôle judiciaire est accueillie;

2.         La décision de la Commission est infirmée et l’affaire est renvoyée à un tribunal de la Commission différemment constitué pour qu’il statue à nouveau sur elle conformément aux présents motifs.

 

 

 

« Michael A. Kelen »

Juge

 

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Jean-François Martin, LL.B., M.A.Trad.jur.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                                                IMM-1504-07

 

 

INTITULÉ :                                                               CRAIG DANIEL MAIMBA c.

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

                                                                                  

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                                         TORONTO (ONTARIO)

 

 

DATE DE L’AUDIENCE :                                       LE 13 FÉVRIER 2008

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                                    LE JUGE KELEN

 

 

DATE DES MOTIFS :                                              LE 21 FÉVRIER 2008

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

 Jack Davis                                                                   POUR LE DEMANDEUR

                                                                                   

 

Asha Gafar                                                                   POUR LE DÉFENDEUR

                                                                                               

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Jack Davis                                                                    POUR LE DEMANDEUR

Davis and Grice

Avocats                                                                       

Toronto (Ontario)

 

John Sims, c.r.                                                              POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

 

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