Décisions de la Cour fédérale

Informations sur la décision

Contenu de la décision

 

Date : 20080529

Dossier : T‑1133‑02

Référence : 2008 CF 693

ENTRE :

ABBOTT LABORATORIES et

ABBOTT LABORATORIES LIMITED

demanderesses

et

 

LE MINISTRE DE LA SANTÉ

et APOTEX INC.

défendeurs

 

 

 

TAXATION DES DÉPENS - MOTIFS

Charles E. Stinson

Officier taxateur

[1]               Les présents motifs, déposés au présent dossier de la Cour (le dossier T‑1133‑02) et dont il est aussi déposé copie au dossier de la Cour d'appel fédérale A‑510‑05 (le dossier A‑510‑05), au dossier de la Cour fédérale T‑1847‑03 (le dossier T‑1847‑03), au dossier de la Cour d'appel fédérale A‑59‑07 (le dossier A‑59‑07) et au dossier de la Cour fédérale T‑840‑05 (le dossier T‑840‑05), s'appliquent selon le cas à chacune des causes correspondantes (qui portent le même intitulé). En conséquence de la décision de compensation ici prononcée, il est en outre déposé copie des présents motifs aux dossiers de la Cour d'appel fédérale A‑51‑04, A‑126‑06 et A‑308‑06, qui intéressent les mêmes plaideurs.

 

[2]               Les demanderesses (Abbott) ont introduit, sous le régime du Règlement sur les médicaments brevetés (avis de conformité), DORS/93‑133 (le Règlement AC), diverses demandes en interdiction au ministre de la Santé de délivrer avant l'expiration de certains brevets canadiens un avis de conformité (AC) à l'égard de la forme générique de clarithromycine (antibiotique servant au traitement des infections de l'appareil respiratoire) fabriquée par la défenderesse, Apotex Inc. (Apotex). Dans le dossier T‑1133‑02, la Cour a rejeté la demande d'Abbott avec dépens, à taxer selon la colonne III. Dans le dossier A‑510‑05, la Cour a rejeté avec dépens l'appel interjeté par Abbott contre la décision du dossier T‑1133‑02. Dans le dossier T‑1847‑03, la Cour a aussi rejeté la demande, et les parties ont convenu que les dépens seraient taxés au milieu de la fourchette de la colonne IV, que seraient recouvrés les honoraires du second avocat au titre de sa présence à l'audience et que serait réclamé un seul ensemble de frais de déplacement pour les avocats. Dans le dossier A‑59‑07, la Cour a rejeté avec dépens l'appel interjeté par Abbott contre la décision du dossier T‑1847‑03. Enfin, dans le dossier T‑840‑05, la Cour a rejeté la demande avec dépens, à taxer au milieu de la fourchette de la colonne IV.

 

[3]               Apotex a présenté un mémoire de dépens pour chacune de ces instances. Abbott a quant à elle présenté deux mémoires de dépens afférents à une demande interlocutoire et à certains appels interlocutoires, à porter en déduction des dépens taxés en faveur d'Apotex. Les dossiers de ces affaires sont volumineux. Conformément à l'approche que j'ai définie au paragraphe 2 de Halford c. Seed Hawk Inc., [2006] A.C.F. no 629 (O.T.) [Halford], l'exposé que je donne dans les présents motifs des positions respectives des parties est parfois un peu sommaire. Il est assez détaillé pour que le lecteur puisse se faire une idée des questions en litige, mais celui‑ci ne devra pas oublier que les volumineux dossiers de pièces, d'écritures et de transcriptions, que j'ai tous lus et pris en considération, révèlent beaucoup plus de nuances et de particularités de ces questions. Je n'ai pas résumé les savantes observations des avocats relatives aux honoraires réclamés au titre de l'article 24 (temps de déplacement de l'avocat), et je rejette les diverses réclamations faites dans le cadre de cet article, sauf concession de la partie adverse, conformément à la conclusion que j'ai formulée au paragraphe 6 de Marshall c. Canada, [2006] A.C.F. no 1282 (O.T.) [Marshall], selon laquelle l'officier taxateur ne peut faire droit aux réclamations d'honoraires pour le temps de déplacement de l'avocat à moins que la Cour ne l'y ait explicitement autorisé. Une telle autorisation explicite n'est cependant pas nécessaire pour taxer les débours de déplacement de l'avocat. Les réclamations de dépens non contestées sont accueillies telles quelles.

 

I. Le dossier T‑1133‑02

Honoraires d'avocat (réclamés dans tous les cas au milieu de la fourchette de la colonne III)

Articles relatifs aux honoraires d'avocat

2 Dossier de la défenderesse : 5,5 unités réclamées (à raison de 120,00 $ par unité) pour chacun des 11 affidavits et pour le dossier lui-même.

4 Préparation de la requête non contestée d'Abbott en dépôt d'affidavits supplémentaires : 3 unités réclamées.

5 Préparation de la requête d'Abbott en radiation des affidavits en réponse d'Apotex : 5 unités réclamées.

6 Comparution lors de la requête en radiation d'Abbott : 2 unités par heure réclamées.

8 Préparation des contre-interrogatoires sur les affidavits : 3,5 unités réclamées pour chacun des 10 souscripteurs d'affidavit.

9 Présence aux contre-interrogatoires : 1,5 unité réclamée par heure pour le premier et le second avocat au titre de la présence à neuf contre-interrogatoires, et pour le premier avocat au titre de la présence au dixième.

14a) Présence du premier avocat à l'audience : 2,5 unités par heure réclamées.

14b) Présence du second avocat à l'audience : la moitié du montant réclamé pour l'alinéa 14a).

15 Plaidoyer écrit : 5 unités réclamées pour chacun des deux répertoires, et 5 unités pour le mémoire en date du 4 juillet 2005.

25 Services rendus après le jugement et non mentionnés ailleurs : 1 unité réclamée.

26 Taxation des dépens : 4 unités réclamées.

27 Autres services acceptés aux fins de la taxation par l'officier taxateur : 2 unités réclamées au titre de l'établissement du mémoire de dépens.

 

Débours

Déplacement (11 140,44 $); témoins experts James Hendrickson (30 616,78 $), Robert McClelland (33 815,43 $), Michael Cima (21 650,00 $), Stan Brown (68 933,84 $) et Nicholas Taylor (71 715,53 $); téléphone (990,20 $); télécopie (776,50 $), photocopie (28 117,43 $), coursiers (2 198,84 $); stationnement, taxis et kilométrage (175,76 $); transcription (16 642,63 $); huissiers (630,00 $); rémunération d'agents (453,80 $); dossier d'antériorité (2024,96 $); temps d'ordinateur (2 646,90 $); historiques de dossier (1 730,00 $); Quicklaw (3 261,76 $); prime d'assurance à verser à la LPIC (50,00 $); et TPS applicable aux débours (17 854,24 $).

 

A. La position d'Apotex

[4]               Apotex fait valoir de manière générale qu'Abbott a vigoureusement contesté chaque étape de ces cinq instances mettant dix brevets en litige. Des questions difficiles et nouvelles parfois, comme celle du polymorphisme, ont été soulevées dans le dossier T‑1133‑02. Étaient aussi en litige dans ce dossier le caractère suffisant de l'avis d'allégation, la charge de la preuve, la crédibilité des experts, la validité, la prédiction valable et l'utilité. Le mémoire des dépens, présenté au montant de 369 655,99 $, est raisonnable compte tenu du travail qu'il a fallu à Apotex pour obtenir gain de cause dans cette affaire. Me Andrew R. Brodkin, l'un des avocats chargés de celle‑ci, a souscrit un affidavit en date du 5 octobre 2007 (l'affidavit de Brodkin sur le dossier T‑1133‑02) à l'appui de la réclamation de dépens d'Apotex. Cet affidavit confirme la complexité des questions examinées et la taille des dossiers, soit ceux de la demanderesse (1 267 pages réparties en six volumes) et de la défenderesse (12 volumes faisant un total de 2 802 pages). Ces dossiers comprenaient également onze affidavits souscrits pour le compte d'Apotex et sept pour Abbott. En outre, l'affidavit de Brodkin confirme l'importance pour Apotex de ce litige, qui mettait en jeu l'accès au marché canadien de la clarithromycine, d'une valeur annuelle d'environ 65 millions de dollars. Comme le monopole de brevet devait durer jusqu'en 2017, la valeur du marché potentiel s'élevait à quelque 650 millions de dollars.

 

[5]               Apotex fait valoir que l'affidavit de Brodkin sur le dossier T‑1133‑02 constitue la preuve de nécessité raisonnable prévue par le paragraphe 1(4) du tarif B des Règles des Cours fédérales, qui porte que, « [à] l'exception des droits payés au greffe, aucun débours n'est taxé ou accepté aux termes du présent tarif à moins qu'il ne soit raisonnable et que la preuve qu'il a été engagé par la partie ou est payable par elle n'est fournie par affidavit ou par l'avocat qui comparaît à la taxation ». La décision Eli Lilly Canada Inc. c. Novopharm Ltd., [2006] A.C.F. no1002 (prot. C.F.) [Eli Lilly 2006] porte à ce sujet les observations suivantes :

15        Quant aux débours, l'affidavit de Nancy Schuurmans établit que tous les débours énumérés dans le projet de mémoire de dépens soumis par Lilly ont été effectivement engagés et qu'ils ont été facturés à Lilly pour la préparation et le déroulement de la présente instance. Les frais semblent compatibles avec le dossier et ils montrent que Lilly a préparé et déposé neuf affidavits, dont huit avaient été souscrits par des experts. Je conclus donc que Lilly a démontré que ces débours étaient jusqu'à preuve contraire raisonnables. Certes, Lilly n'a pas déposé de factures ou de pièces justificatives, mais elle n'avait pas à le faire pour démontrer le bien-fondé apparent de sa réclamation. Novopharm avait la possibilité de contre-interroger Mme Schuurmans au sujet de son affidavit et d'exiger la production de pièces à l'appui. Or, elle ne s'est pas prévalue de cette possibilité et la preuve soumise en réponse est loin de démontrer que les débours réclamés n'ont pas été effectivement engagés pour la présente affaire ou encore qu'ils étaient excessifs ou déraisonnables. Je taxe donc à 73 277,71 $ les débours réclamés.

 

Dans la présente espèce, Abbott a demandé et reçu d'autres pièces justificatives, mais elle n'a pas interrogé Me Brokdin au sujet de son affidavit sur le dossier T‑1133‑02, de sorte que le caractère raisonnable des débours d'Apotex est présumé établi en l'absence de preuve contraire acceptable. La contestation par Abbott de la preuve d'Apotex doit être rejetée parce qu'elle est contraire à la règle de longue date, formulée dans l'arrêt Browne v. Dunn (1893), 6 R. 67 (H.L.) [Browne], comme quoi l'on ne peut attaquer la crédibilité d'un témoin à moins de lui avoir demandé des explications sur les défauts supposés de son témoignage.

 

[6]               Apotex fait valoir que la longueur (43 pages) de la décision rendue dans le dossier T‑1133‑02 témoigne de la complexité scientifique et technique des litiges sur les brevets pharmaceutiques portant sur diverses allégations d'invalidité qui entraînent toutes des conséquences économiques de grande portée, par exemple l'accès à la part de marché considérable en jeu dans les cinq instances dont cette affaire était la première. L'auteur de la décision Merck & Co. c. Canada (Ministre de la Santé), [2007] A.C.F. no 428 (O.T.) [la taxation Merck], qui examinait pourtant un différend portant sur un seul brevet (et de même nature que le présent litige en ce qu'il relevait du Règlement AC et mettait en jeu l'accès à un marché pharmaceutique considérable), a accordé des dépens de 605 575,78 $. La Cour, saisie d'un recours contre cette taxation, a réduit ce montant à 384 686,01 $ par la décision Merck & Co. c. Apotex Inc., [2007] A.C.F. no 1337 (C.F.) [la décision du recours Merck]. Le montant de 369 655,99 $ réclamé ici n'est donc pas disproportionné, étant donné les enjeux économiques.

[7]               L'article 2 du tableau du tarif B porte sur la préparation « de [tous] les dossiers et documents des intimés ». Apotex soutient que les réclamations qu'elle présente au titre de l'article 2 ne sont pas contraires à la conclusion, formulée au paragraphe 28 de Novopharm Ltd. c. AstraZeneca AB, [2006] A.C.F. no 854 (O.T.) [la taxation Novopharm], qui rejetait des réclamations multiples au titre de l'article 1 (dont le libellé, concernant les dossiers de demande, est semblable à celui de l'article 2) au motif des frais en double. En effet, le travail considérable qu'a nécessité en l'occurrence l'établissement de chacun des affidavits se distinguait nettement du travail d'établissement du dossier de la défenderesse. Les réclamations multiples au titre de l'article 2 (affidavits et dossier), non contestées dans la taxation Merck (due au même officier taxateur que la taxation Novopharm), ont été déclarées raisonnables et accueillies au paragraphe 25, d'où il faut conclure au pouvoir discrétionnaire de taxer les éléments de cette nature au cas par cas, à condition d'exclure les frais en double. Apotex présente subsidiairement une réclamation au titre de l'article 2 pour le dossier de la défenderesse, ainsi que d'autres au titre de l'article 27 pour les affidavits considérés isolément, y compris les trois qu'ont souscrit respectivement MM. McClelland et Brown, qui exigeaient chacun un travail distinct. Abbott aurait pu former en vertu de l'article 403 des Règles une requête en directives excluant ces réclamations, mais ne l'a pas fait.

 

[8]               Apotex fait observer que, s'il est vrai que l'ordonnance sous-jacente à la réclamation au titre de l'article 4 ne se prononce pas sur les dépens, elle a dû engager des frais pour le travail nécessaire à l'examen de la requête et au consentement à celle‑ci, de sorte qu'elle a droit au recouvrement de ces frais en vertu de l'adjudication globale des dépens suivant l'issue de la cause qui a été prononcée dans le cadre de la demande de contrôle judiciaire. Pour ce qui concerne les réclamations au titre des articles 5 (préparation d'une requête) et 6 (comparution lors d'une requête), Apotex soutient que la disposition de l'ordonnance du 7 octobre 2003 comme quoi, « [s]i les parties ne peuvent s'entendre sur la question des dépens, ceux‑ci peuvent être examinés séparément », me donne compétence pour entendre des observations sur les réclamations de dépens et y faire droit, les parties n'ayant pas abordé entre-temps cette question non réglée. Il n'aurait pas été approprié de présenter à cet égard une requête en vertu de l'article 397 des Règles, puisqu'un nouvel examen de la décision n'était pas la question. Apotex a décidé de faire examiner ces dépens, conformément à la directive ci‑dessus, dans le cadre de la présente taxation. De même, il n'aurait pas convenu de présenter une requête en directives sur les dépens sous le régime de l'article 403 des Règles. Apotex a obtenu gain de cause pour l'essentiel, puisqu'une faible proportion seulement des paragraphes a été radiée, de sorte qu'elle a droit aux dépens afférents à la requête.

 

[9]               Apotex répond à l'objection d'Abbott aux réclamations faites au titre des articles 8 (préparation) et 9 (présence) pour le contre-interrogatoire de M. Allan William Rey sur son affidavit, objection fondée d'une part sur l'absence de preuve de la nécessité et d'autre part sur le dépassement de la limite de cinq experts, en invoquant l'argument de présomption sauf preuve contraire avancé ci‑dessus à propos de la non-contestation du caractère raisonnable et en rappelant que la décision de la Cour ne relève aucune difficulté concernant sa preuve. En outre, Abbott n'a pas demandé de directives limitant à cinq le nombre des experts d'Apotex comme on l'a fait parfois dans d'autres affaires, et la Cour n'a pas émis de telles directives de sa propre initiative. La Cour, dans Merck & Co. c. Canada (Ministre de la Santé), 30 C.P.R. (4th) 342 (C.F.) [Merck 2003], a statué en appel que le protonotaire avait commis une erreur de droit en négligeant et en ne suivant pas la jurisprudence existante selon laquelle la limite du nombre d'experts que prévoit l'article 7 de la Loi sur la preuve au Canada, L.R.C. 1985, ch. C‑5, doit être appliquée à chaque question en litige et non à l'ensemble de l'affaire. L'auteur de la taxation Merck, précitée, a accepté et appliqué cette conclusion au paragraphe 47. Selon le paragraphe 49 de la même taxation, l'observation formulée au paragraphe 78 de Pfizer  Canada Inc. c. Canada (Ministre de la Santé), [2005] A.C.F. no 2155 (C.F.) [Pfizer], selon laquelle le montant des honoraires des experts ne devrait pas « dépasser ceux qui sont accordés à l'avocat principal pour préparer et plaider sa cause », ne faisait qu'exprimer les inquiétudes d'un juge particulier devant la montée en flèche des honoraires des experts et n'était pas contraignante aux fins de la taxation des dépens. La taxation Merck et la décision du recours Merck ont accordé des dépens correspondant à plus de cinq experts sans que leurs auteurs évoquent la possibilité que la jurisprudence limite le recouvrement aux frais de cinq experts.

 

[10]           Apotex note qu'Abbott concède que la réclamation au titre de l'article 9 peut être accueillie telle quelle pour le premier avocat, mais conteste la même réclamation pour le second avocat au motif de l'absence de directives en ce sens de la Cour. Bien que la taxation des frais de la nature prévue à l'alinéa 14b) soit explicitement subordonnée à l'émission préalable de directives, il n'en va pas de même pour l'article 9. Le recours à un second avocat pour les contre-interrogatoires des souscripteurs d'affidavit était raisonnable, puisqu'on pourrait soutenir que ces contre-interrogatoires constituaient l'étape la plus importante du litige. L'avocat d'Apotex affirme que, bien que l'affidavit de Me Brodkin sur le dossier T‑1133‑02 ne parle pas de la nécessité du second avocat, la comparution de ce dernier devant moi remplit le critère de preuve que prévoit le paragraphe 1(4) du tarif B. Dans la taxation Merck, la réclamation au titre de l'alinéa 14b) a été rejetée faute de directives préalables. Cependant, la réclamation pour le second avocat au titre de l'article 9 a été accueillie même en l'absence de telles directives. Dans un cas, un agent de brevets non-avocat du cabinet d'avocats Ivor M. Hugues LLP [le cabinet Hugues] (maison qui a partagé la tâche de la représentation d'Apotex avec l'avocat inscrit au dossier) a rempli les fonctions nécessaires de second avocat et devrait être indemnisé en conséquence. Subsidiairement, il devrait être indemnisé à 50 % au titre de l'article 28 (services autorisés par le Barreau de la province).

 

[11]           Apotex a calculé sa réclamation au titre de l'alinéa 14a) sur la base d'une journée d'audience de dix heures et a qualifié de déraisonnable la proposition d'Abbott de réduction de deux heures par jour pour une audience complexe ayant duré quatre jours. L'avocat était pleinement occupé dans les moments précédant l'ouverture des séances, pendant les suspensions (où il lui arrivait même souvent de rester dans la salle d'audience) et pendant les pauses repas, et il a demandé à son client des honoraires en conséquence, ainsi que l'établit la preuve prima facie. Apotex reconnaît ne pas avoir obtenu de directives préalables pour les honoraires de l'alinéa 14b), mais elle fait valoir que le dossier montre clairement en l'occurrence qu'elle a eu recours à un second avocat.

 

[12]           Apotex soutient que se justifient les réclamations relatives à l'établissement des répertoires (employés conjointement avec le dossier aux fins de la consultation de la preuve ou de la jurisprudence citée) que le juge d'audience accepte et utilise pour s'orienter dans un dossier volumineux. L'usage de tels répertoires s'est répandu ces dernières années, témoin le paragraphe 1 de la directive en date du 4 octobre 2007, dans le dossier de la Cour fédérale T‑2131‑05 (Janssen‑Ortho Inc. c. Apotex Inc.), qui en prescrivait l'établissement. Subsidiairement, la réclamation des frais afférents aux répertoires pourrait être accueillie au titre de l'article 27 si l'on estime qu'ils ne peuvent en toute rigueur entrer dans la catégorie des plaidoyers écrits au sens de l'article 15.

 

[13]           Apotex a majoré devant moi sa réclamation au titre de l'article 26, applicable à l'ensemble des cinq instances, pour la porter au maximum de 6 unités, au motif que les retards d'Abbott dans la signification des pièces de la taxation lui avaient compliqué la tâche. Apotex soutient qu'il convient d'accueillir sa réclamation au titre de l'article 27 pour l'établissement du mémoire de dépens parce que le travail y afférent est indépendant, et très différent, de la préparation et de la présence – dont les frais sont réclamés au titre de l'article 26 – qu'a exigées une audience de taxation de deux jours.

 

[14]           Apotex rappelle qu'elle a produit à la demande d'Abbott, à l'appui des débours, des pièces justificatives qui viennent s'ajouter aux passages pertinents de l'affidavit de Brodkin sur le dossier T‑1133‑02. Elle fait valoir qu'il était difficile ou impossible, et qu'il n'était d'ailleurs pas nécessaire, de retrouver par exemple chaque reçu de taxi et d'étayer de pièces les dépenses telles que les pourboires. Les montants réclamés au titre des déplacements sont en fait inférieurs de plusieurs milliers de dollars aux frais réellement engagés et détaillés dans la preuve. La preuve dépasse en l'occurrence celle produite dans la taxation Merck, où, mis à part des réductions mineures liées au recours à un troisième avocat, qu'on a jugé excessif, on a accordé les débours réclamés, y compris pour le deuxième avocat. La décision du recours Merck a confirmé ce résultat. Les deux décisions citent les conclusions que j'ai formulées dans Carlile c. Canada (M.R.N.) (1997), 97 D.T.C. 5284 (O.T.) [Carlile], concernant la taxation des dépens dans les contextes où la preuve n'atteint pas la rigueur maximale. Apotex a passé en revue les dépenses réellement engagées en l'occurrence pour en retrancher les éléments inappropriés ou faisant double emploi. Par exemple, bien que les litiges de la nature considérée exigent la flexibilité que permet la classe affaires, Apotex a réclamé dans son mémoire de dépens un plein tarif de classe économique au lieu du tarif de classe affaires effectivement payé pour Me Brodkin le 10 septembre 2003.

 

[15]           Apotex note que certaines inscriptions peuvent sembler élevées à première vue, mais qu'elles rendent compte en fait des dépenses de deux personnes à un même titre et sont donc raisonnables; c'est par exemple le cas du contre-interrogatoire de M. Leonard Chyall à Chicago en janvier 2004, pour lequel les dépenses sont comptées avec celles correspondant à M. Jerry L. Atwood. L'état du cabinet Hugues en date du 3 novembre 2004 porte la somme de 1 850,08 $ comme prix du billet d'avion de M. Michael Cima entre Boston et Toronto. Cette somme semble élevée pour un tarif de classe économique, mais manifestement sa note comprenait à la fois l'avion, l'hôtel, les repas et les taxis, qui ont été payés puis facturés au client sous la seule rubrique, de nature à induire en erreur, du billet d'avion. 

 

[16]           Apotex, se fondant sur les observations ci‑dessus, affirme avoir prouvé à première vue le caractère raisonnable des frais engagés pour ses cinq experts. Les frais d'expert ici réclamés et la preuve ici produite sont compatibles avec la taxation Merck et la décision du recours Merck, où seule la réclamation relative à un des huit experts, dont la note dépassait 300 000,00 $, a été notablement réduite par l'officier taxateur, puis par le juge en révision. La réclamation totale ici présentée de 226 731,53 $ équivaut à une moyenne de 45 346,31 $, somme comparable à la rémunération moyenne des trois experts d'Abbott, qui se chiffre approximativement à 35 000,00 $. Ces chiffres montrent qu'Apotex ne s'est pas conduite de manière déraisonnable en engageant des experts du type « Cadillac ». Les plaideurs obligés d'engager des experts pour étudier des questions complexes aux conséquences financières considérables ne devraient pas voir limiter par la sagesse rétrospective leur capacité à recouvrer les frais nécessaires afférents à cette obligation; voir la page 131 de la décision Apotex Inc. c. Egis Pharmaceuticals, 4 O.R. (3d) 321 (C. Ont., Div. gén.) [Egis]. En outre, les frais d'expert d'Abbott auraient dû être moins élevés parce que, comme le confirme le dossier, les brevets en question ont fait l'objet de quelque 22 litiges mettant en jeu des drogues génériques, de sorte que ses experts ont sans doute eu à fournir moins de travail pour préparer la preuve, du fait de la connaissance acquise de ces brevets, que s'ils étaient partis de zéro. Apotex rappelle qu'il est arrivé à plusieurs reprises au juge de l'audience de conclure en sa faveur au motif de la force de sa preuve d'expert et de la faiblesse de celle d'Abbott.

 

[17]           Apotex affirme qu'aucun élément du dossier ne justifie de réduire la somme de 30 616,78 $ réclamée pour M. James Hendrikson, qui est du même ordre de grandeur que les montants accordés dans la taxation Merck et la décision du recours Merck. Elle explique qu'il est naturel que les frais réclamés pour MM. Robert Brown (68 933,84 $) et Nicholas Taylor (71 715,43 $) dépassent ceux qui correspondent à M. Cima (21 650,00 $) parce que les tâches des deux premiers, qui comprenaient des travaux considérables d'expérimentation et de laboratoire, l'emportaient de beaucoup sur celles du troisième, qui consistaient pour l'essentiel à passer en revue les publications pertinentes. La preuve d'Abbott sur les frais auxquels on aurait pu s'attendre ne témoigne que d'une sagesse rétrospective dénuée de pertinence. L'argument d'Abbott selon lequel la décision ne se réfère pas aux témoignages de M. Brown ni de M. Taylor n'est pas pertinent, puisque la Cour fédérale ne pratique pas l'adjudication distributive des dépens, c'est‑à‑dire qu'elle permet au plaideur de recouvrer les frais qu'il a engagés prudemment pour se préparer à l'examen de questions qui n'ont pas eu en fin de compte d'effet déterminant sur l'issue du litige; voir Illinois Tool Works Inc. c. Cobra Fixations Cie, 29 C.P.R. (4th) 417 (C.A.F.) [Illinois Tool Works].

 

[18]           Apotex a fait observer, à l'encontre de la position d'Abbott sur les affidavits multiples de certains experts d'Apotex, qu'Abbott semblait avoir conclu que la force de la preuve initiale d'Apotex était telle que la Cour pourrait se fonder sur elle, ce qu'elle avait fait en fin de compte, de sorte qu'Abbott avait demandé l'autorisation de déposer des affidavits en réponse. Apotex y avait consenti à la condition de pouvoir elle-même déposer des affidavits supplémentaires en réplique, dont le contenu ne répétait pas celui de sa preuve initiale. Par la suite, Abbott avait demandé la radiation de certains passages de ces affidavits supplémentaires. La Cour n'avait accueilli qu'en partie cette requête en radiation, et Apotex avait alors établi des affidavits pour la troisième fois. La Cour s'était en fin de compte fondée sur cet ensemble d'affidavits rendu nécessaire par la conduite d'Abbott. Les frais réclamés à cet égard ne sont pas excessifs ni de l'ordre de ceux réclamés pour le témoin qualifié de « Cadillac » des experts dans Apotex Inc. c. Syntex Pharmaceuticals International Ltd., 2 C.P.R. (4th) 368 (C.F. 1re inst.) [Syntex], qui se trouve être le même que celui dont la taxation Merck et la décision du recours Merck ont considérablement réduit la note. Les frais réclamés ici correspondent plutôt aux efforts prudents déployés par l'avocat d'Apotex pour mettre le dossier en état.

 

[19]           Apotex conteste la proposition, qu'elle qualifie d'arbitraire, visant à réduire de 75 % les frais de photocopie, dont les pièces justificatives n'ont pas été contredites. Il fallait trois exemplaires pour le dépôt, au moins deux pour les avocats d'Apotex, un pour le client, des exemplaires pour signification à deux parties défenderesses, ainsi que des copies des publications et antériorités pertinentes. La taille du dossier justifie le montant réclamé à cet égard de 28 117,43 $.

[20]            Apotex rappelle la conclusion de Carlile selon laquelle les réductions à zéro dollar ne sont pas réalistes lorsqu'il apparaît à l'évidence que des dépenses réelles ont nécessairement été engagées, ainsi que les références faites à Carlile dans la décision du recours Merck et la taxation Merck. Les frais réclamés au titre du dossier d'antériorité et les autres débours, ainsi que la preuve présentée à l'appui, correspondent ici à ceux qu'a acceptés l'auteur de la taxation Merck, confirmée à cet égard par la décision du recours Merck en dépit d'objections déclarant ces frais excessifs et déraisonnables. La Cour, exprimant dans la décision du recours Merck son approbation de l'approche suivie par l'officier taxateur, s'est explicitement référée au paragraphe 69 de la taxation Merck, rédigé comme suit :

69      Ainsi qu'il a été mentionné plus haut, la présente procédure a été engagée le 29 mai 2003 et une décision a été rendue presque deux ans plus tard. Plusieurs des factures figurant parmi les pièces jointes à l'affidavit de Andrew R. Brodkin, souscrit le 7 mars 2006, ne contiennent aucun détail concernant les débours en question. Cependant, j'ai examiné les éléments pertinents pour faire avancer un litige comme la présente espèce, notamment le recours à des témoins experts provenant de plusieurs villes et pays, les efforts nécessaires pour réunir de l'information pertinente et la soumettre à l'examen des experts, les diverses méthodes employées pour transmettre la documentation pertinente aux experts, la recherche de documentation et d'éléments de preuve auprès de diverses sources, les réunions nécessaires, ainsi que les appels téléphoniques préliminaires et de suivi et la correspondance connexe. Tenant compte des facteurs que j'ai énumérés, il me semble qu'il était raisonnable pour la défenderesse Apotex d'engager, tout au long de ces deux années pour faire avancer le litige, des dépenses considérables qui sont supérieures aux frais indirects courants de son cabinet d'avocats. C'est pourquoi j'estime que les montants des débours concernant les recherches informatisées, la facturation du temps d'utilisation des ordinateurs, les services de messagerie et l'affranchissement, les sténographes judiciaires et les transcriptions, les réunions, les frais téléphoniques et les frais de télécopie semblent raisonnables. Pour ces motifs, j'exerce mon pouvoir discrétionnaire et j'accorde pour ces débours un total de 25 247,66 $, plus la TPS applicable.

 

 

Pour des raisons analogues et par courtoisie judiciaire, la présente réclamation de débours (y compris les frais de déplacement du second avocat et de l'agent de brevets assistant l'avocat principal) devrait être déclarée raisonnable à première vue, et accueillie une fois majorée de la TPS applicable. Il n'a été produit dans la présente espèce aucun élément tendant à prouver le paiement de rémunérations d'heures supplémentaires ou de suppléments pour service accéléré de coursiers, auxquels on a trouvé à redire dans la jurisprudence citée par Abbott.

 

[21]           En contre-preuve, Apotex a contesté sous plusieurs rapports les conclusions présentées en réponse par Abbott. Apotex fait valoir qu'Abbott avait le choix, et que sa décision d'introduire l'instance considérée – laquelle a automatiquement entraîné le sursis réglementaire de 24 mois interdisant à Apotex l'accès au marché en question – à la suite de l'avis d'allégation présenté par cette dernière sous le régime du Règlement AC, l'oblige maintenant à indemniser Apotex des frais qu'elle réclame. Abbott aurait pu s'éviter ces dépenses en reconnaissant les limites de ses brevets et en s'abstenant d'introduire l'instance qui nous occupe.

 

[22]           Apotex a écarté les observations d'Abbott sur les économies de travail qu'aurait pu permettre la familiarité croissante des experts avec les questions principales au fur et à mesure que de nouvelles instances étaient introduites en faisant valoir que la procédure T‑1133‑02 s'était déroulée avant les autres litiges et que, quoi qu'il en soit, l'invention revendiquée dans chaque brevet étant nouvelle et unique, elle exigeait un travail indépendant quelle que soit l'expérience acquise avec les ingrédients actifs. La Cour s'est fondée sur les témoignages de l'ensemble des experts d'Apotex pour ses conclusions sur un bon nombre de questions. Le nombre et le coût des experts d'Abbott n'ont pas de pertinence pour la présente évaluation de la justesse des décisions d'Apotex concernant les experts nécessaires. Il est prudent de faire en sorte que les témoignages des experts se recouvrent en partie au cas où un expert donné aurait des difficultés en contre-interrogatoire et où un autre expert devrait étayer la preuve. Les observations d'Abbott rapportent incorrectement le résultat du recours Merck, où la Cour n'a pas limité les dépens à 206 411,00 $, mais a adjugé 384 686,00 $. En fait, le chiffre de 206 411,00 $ est le montant dont la Cour a réduit la somme accordée par l'officier taxateur, dont une part de 205 911,00 $ correspondait aux frais d'un seul expert, déclarés disproportionnés à ceux de ses homologues. Aucune anomalie de cette nature ne peut être constatée ni n'est alléguée ici.

 

[23]           Apotex fait valoir que la note de M. Taylor (de 71 715,43 $) s'explique par son travail considérable d'analyse d'ingrédients en fonction des revendications des divers brevets en jeu. Ses diplômes et ses antécédents professionnels sont impressionnants, et le fait que sa carrière soit indépendante des parties, gage d'intégrité, a ajouté à la valeur de sa preuve, qui formait le pivot scientifique d'une grande partie des prétentions et moyens d'Apotex dans les diverses instances considérées. Les honoraires qu'il a demandés pour les services de consultant fournis après la rédaction de son affidavit peuvent être acceptés aux fins de la taxation, comme des frais semblables l'ont été dans d'autres affaires.

 

[24]           Apotex fait valoir que, s'il est vrai que le paragraphe 16 (page 25) de la décision AB Hassle c. Genpharm Inc., 34 C.P.R. (4th)  18 (C.F.) [AB Hassle] a écarté le fait que la défense d'un brevet exige potentiellement plus de travail et de dépenses que d'autres types de litiges comme justification de l'adjudication de dépens supérieurs aux dépens normaux entre parties, c'est‑à‑dire de dépens procureur-client, cette conclusion concerne essentiellement les honoraires d'avocat et n'est pas pertinente pour la taxation des débours, tels que ceux relatifs aux experts, dont la complexité et la quantité du travail, comme par exemple en l'occurrence, sont manifestement à prendre en considération.

 

[25]           Bien que le nombre des experts dans le dossier T‑1133‑02 ne fût pas à proprement parler en litige, Apotex a traité cette question dans le cadre de la contre-preuve qu'elle a opposée aux observations générales d'Abbott sur le recours à des experts dans l'ensemble des instances considérées. Apotex soutient que, si la jurisprudence évolue peut-être vers la mise de côté des conclusions antérieures comme quoi l'article 7 de la Loi sur la preuve au Canada, qui dispose qu'une partie ne peut produire plus de cinq témoins experts sans la permission du juge qui préside, veut dire cinq experts par question en litige et non pour l'ensemble de l'instance, elle n'en est pas encore là. Par conséquent, il est trop tard, au stade de la taxation des dépens, pour alléguer qu'Apotex a dépassé la limite du nombre d'experts, ce qui aurait dû être fait devant le juge qui présidait l'instance. Si une charge pesait sur Apotex, elle s'en est trouvée implicitement libérée lorsque la Cour a accepté les témoins produits et s'est fondée sur leurs dépositions, de sorte que le nombre des experts ne peut maintenant entrer en ligne de compte dans la taxation des dépens. Il est notamment interdit à l'officier taxateur de radier des affidavits d'expert déjà acceptés par la Cour. Il serait possible de réduire le recouvrement des frais correspondants si, par exemple, on estimait qu'un aspect donné du travail est dénué de pertinence ou a été exécuté sur des instructions erronées de l'avocat.

 

[26]           Apotex rappelle que la décision Eli Lilly Canada Inc. c. Novopharm Ltd., [2007] A.C.F. no 800 (C.F.) [Elli Lilly 2007 no 1] indique quel est le bon moment pour contester le nombre des experts. Au paragraphe 5 de cette décision, le juge d'audience déclare que, s'il « pense que certaines décisions de notre Cour ont amené d'aucuns à penser » que la Loi sur la preuve au Canada permet la production de cinq experts par question en litige, il « n'[essaiera] pas de décider cette question ici ». Il note ensuite la difficulté pour les juges d'assimiler d'immenses quantités d'information (on avait produit 21 experts devant lui) et déclare qu'il faut réduire le nombre des témoins et la quantité des documents dans les instances relatives à un AC. Il a tiré les conséquences de ces préoccupations au stade de l'adjudication des dépens en limitant le recouvrement des frais de la partie ayant obtenu gain de cause à cinq experts de son choix. Par ailleurs, il avait auparavant rappelé que, selon le paragraphe 41 de Pharmascience Inc. c. Canada (Ministre de la Santé), [2007] A.C.F. no 506 [Pharmascience], la validité forme une seule question, et que cette question était la seule en litige devant lui. Les conclusions de ce juge n'ont donc pas changé le droit qui permet cinq experts par question en litige. Il lui était permis de limiter à cinq le nombre des experts dans le cadre de son pouvoir discrétionnaire de juge présidant cette instance déterminée relative à un AC, pouvoir dont les officiers taxateurs ne sont pas investis.

[27]           La Cour, dans la décision Altana Pharma Inc. c. Novopharm Ltd., [2007] A.C.F. no 853 (prot. CF) [Altana], rendue neuf jours après Eli Lilly 2007 no 1 et se référant à celle‑ci, a examiné une requête selon laquelle les demanderesses avaient dépassé la limite permise par la Loi sur la preuve au Canada en déposant 13 affidavits d'expert. Au paragraphe 5, la protonotaire a déclaré souscrire à la thèse de la défenderesse comme quoi cette loi limitait chaque partie à cinq experts pour l'ensemble de l'affaire et non par question en litige, mais elle a ajouté qu'elle était tenue d'appliquer la jurisprudence existante, par exemple Merck 2003, qui permet cinq experts par question en litige. La défenderesse avait aussi soutenu devant elle que les demanderesses avaient dépassé même la limite de cinq experts par question en litige. Après avoir examiné la question de sa compétence, la protonotaire a conclu qu'il lui était permis de décider cette question au lieu de la renvoyer au juge saisi de la demande relative à l'AC. L'officier taxateur est dépourvu d'une telle compétence. Dans son examen ultérieur du nombre des questions nécessaires pour l'application de Merck 2003, la protonotaire s'est référée au paragraphe 41 de Pharmascience. Or, fait valoir Apotex, ledit paragraphe 41 n'aborde pas le problème du nombre d'experts par rapport à la notion de l'invalidité comme formant une seule question. Apotex ajoute que, en tout état de cause, la question de l'invalidité soulevée à propos de plusieurs brevets distincts faisant l'objet d'instances multiples se divise elle-même en questions distinctes dont chacune peut être soumise à cinq experts avant que ne devienne applicable l'obligation d'obtenir la permission du tribunal que prévoit la Loi sur la preuve au Canada.

 

[28]           Apotex rappelle le moment où a été formée la requête en production de plus de dix témoins experts dans l'affaire Eli Lilly c. Apotex Inc., [2007] A.C.F. no 1367 (F.C.) [Eli Lilly 2007 no 2], soit quelques mois avant l'instruction et non après celle‑ci, au stade de la taxation des dépens. La Cour, aux paragraphes 22 à 27 inclusivement de cette décision, émet la supposition que, si l'attention des juges d'audience dans Eli Lilly and Co. c. Novopharm Ltd. (1997), 73 C.P.R. (3d) 371 (C.F. 1re inst.) [Eli Lilly 1997] et dans Merck 2003 avait été attirée sur certains autres précédents qui ébranlaient les raisonnements de la jurisprudence existante permettant la production de cinq experts par question en litige, ils auraient conclu ou auraient pu conclure que la limite devrait être fixée à cinq experts pour l'ensemble de l'affaire. La Cour a ensuite déclaré qu'il s'ensuivait que la détermination du nombre des questions en litige n'était pas nécessaire. Il s'agit là, selon Apotex, tout au plus d'une différence d'opinion de la part du juge de l'affaire Eli Lilly 2007 no 2, qui ne change pas la jurisprudence actuelle permettant le recours à cinq experts par question en litige. Quoi qu'il en soit, de telles considérations ne sont pas de la compétence de l'officier taxateur.

 

[29]           Souscrivant à la remarque que j'ai formulée au paragraphe 31 de Biovail Corp. c. Canada (Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social), 61 C.P.R. (4th) 33, [2007] A.C.F. no 1018 (O.T.) [Biovail], selon laquelle « les juges ont des styles de rédaction variés et [...] n'indiquent pas toujours discrètement ou explicitement la manière exacte dont ils mettent ou non à contribution le témoignage des experts », remarque qui s'inscrivait dans le cadre de réserves que j'exprimais touchant l'application du critère à trois volets relatif aux experts défini dans Allied Signal Inc. c. Dupont Canada Inc., 81 C.P.R. (3d) 129 (O.T.) [Allied Signal], Apotex fait valoir qu'il y avait ici un facteur additionnel qui excluait peut-être la nécessité de récapituler et d'analyser la preuve en détail dans les exposés des motifs, à savoir l'application d'une jurisprudence contraignante à certaines questions au fur et à mesure du déroulement des cinq instances considérées. Pour ce qui concerne les deux autres volets du critère formulé au paragraphe 81 d'Allied Signal, soit le fait que l'engagement de l'expert doit avoir été prudent et raisonnable par rapport aux circonstances du moment et le fait que les conditions de cet engagement ne doivent pas constituer un chèque en blanc pour ce qui concerne les frais, Apotex fait valoir que la décision Eli Lilly 2006 est un précédent beaucoup plus récent qui confirme qu'un élément tel que l'affidavit de Brodkin sur le dossier T‑1133‑02 constitue une preuve prima facie acceptable des frais d'expert.

 

[30]           Apotex écarte le raisonnement d'Abbott fondé sur Laboratoires Servier c. Apotex Inc., [2007] A.C.F. no 465 (C.F.) [Laboratoires], en faisant valoir que la requête en question a été jugée sur dossier, de sorte que l'avocat n'a pas comparu, comme le permet le paragraphe 1(4) du tarif B et comme il l'a fait dans la présente espèce, pour prouver les débours. En outre, le juge qui a entendu l'affaire donnant lieu à l'engagement d'experts dans Laboratoires était le mieux en mesure, comme les trois juges des instances ici considérées l'auraient été, d'examiner la requête en directives sur les dépens. Or Abbott a décidé en l'occurrence de ne pas former de telles requêtes et ne peut maintenant demander de redressement comparable dans le cadre de la taxation des dépens. Comme la preuve produite dans la taxation Merck correspondait de beaucoup plus près à la démarche adoptée ici que celle produite dans Laboratoires, l'approche suivie dans la taxation Merck, approuvée par la décision du recours Merck, devrait l'emporter pour ce qui concerne les éléments tels que les « réunions », rejetés dans Laboratoires.

 

[31]           Apotex concède que le principe formulé dans Browne n'est peut-être pas absolu, mais elle rejette la position d'Abbott sur cette décision en faisant valoir qu'il aurait pu être utile de contre‑interroger Me Brodkin au sujet de son affidavit sur le dossier T‑1133‑02 parce qu'il aurait ainsi été obligé d'exposer en détail la base logique de ses affirmations sur le caractère raisonnable. L'auteur de la taxation Merck s'est référé à Browne et à Eli Lilly 2006 et a approuvé la plupart des éléments de débours sur le fondement du caractère raisonnable à première vue.

[32]           Apotex conteste la position d'Abbott sur Fournier Pharma Inc. c. Canada (Ministre de la Santé), [2007] A.C.F. no  576 (prot. C.F.) [Fournier], en faisant valoir comme ci‑dessus à propos de Laboratoires que la demande en question, ayant été jugée sur dossier, excluait la possibilité, prévue par le paragraphe 1(4) du tarif B, pour l'avocat de comparaître et de produire des éléments de preuve, alors que cette possibilité s'est matérialisée dans la présente espèce, en partie du fait de questions que j'ai posées. Un aspect de la preuve produite dans Fournier qui se révèle analogue à l'affidavit de Brodkin sur le dossier T‑1133‑02 est le tableau des débours, ventilé par catégorie et par montant. Cependant, Apotex a produit dans la présente espèce, par la voie dudit affidavit et dans le cadre des pièces supplémentaires demandées par Abbott, les factures sous-jacentes, par exemple les notes des experts, dont aucune n'a été présentée au protonotaire dans Fournier. La preuve produite ici est comparable à celle qui l'a été dans la taxation Merck. Or la décision du recours Merck a approuvé les conclusions de l'officier taxateur faisant droit aux réclamations énumérées au paragraphe 69 de la taxation sur le fondement d'une preuve prima facie.

 

[33]           Apotex conteste aussi la position d'Abbott fondée sur CCH Canada Ltée c. Barreau du Haut-Canada, [2004] A.C.F. no 1399 (C.A.F.) [CCH], Diversified Products Corp. c. Tye-Sil Corp., 34 C.P.R. (3d) 267 (C.F. 1re inst.) [Diversified], et Windsurfing International Inc. c. Bic Sports Inc., 6 C.P.R. (3d) 526 (C.F. 1re inst.) [Windsurfing], concernant les frais de photocopie et autres débours divers, en faisant valoir que la preuve prima facie produite dans la présente espèce atteint le seuil fixé dans ces décisions et en rappelant qu'Abbott a concédé que le taux de 0,25 $ par page est raisonnable et n'a pas soulevé la question des frais indirects. Les réductions proposées par Abbott sont arbitraires et incompatibles avec le travail nécessaire à cet égard.

 

[34]           Apotex soutient que l'assistance technique fournie par MM. Taylor et Cima en dehors du cadre de leurs affidavits se justifiait sur le fondement du paragraphe 29 de Biovail. Biovail confirme aussi que l'adjudication des dépens n'est pas distributive et n'applique pas la méthode de l'évaluation comparative à la taxation des frais d'expert.

 

B. La position d'Abbott

[35]           Abbott propose d'abord quelques observations générales sur les cinq instances considérées. La validité des brevets formait la question principale, la contrefaçon n'étant qu'un argument accessoire invoqué dans certains cas. Apotex, dans les dossiers T‑1847‑03 et T‑840‑04, a engagé en partie les mêmes experts, invoqué les mêmes antériorités et produit d'autres éléments de preuve identiques. Selon Abbott, la cause des litiges considérés est la décision d'Apotex de faire valoir un avis d'allégation, ce qui l'a obligée à protéger son monopole de brevet en introduisant une demande de contrôle judiciaire.

 

[36]           Il est étrange de la part d'Apotex d'affirmer d'une part que l'instance T‑1133‑02 était la première à mettre en litige des questions relatives au polymorphisme cristallin et d'autre part de demander moins de dépens au titre de cette instance que pour les dossiers ultérieurs T‑1847‑03 et T‑840‑05, alors qu'entre-temps lesdites questions devraient en principe avoir été étudiées. C'est le contraire qui aurait dû se produire, étant donné en particulier que certaines questions, par exemple la charge de la preuve dans les instances relatives à un AC, tenaient plus de place dans le dossier T‑1133‑02 que dans les deux autres. En outre, des économies d'approche auraient dû être réalisées dans les instances ultérieures, étant donné la connaissance croissante de la chimie de la clarithromycine et l'identité des arguments opposés à la validité dans l'ensemble des instances. En général, les frais d'expert réclamés sont exorbitants; par exemple, ceux du dossier T‑1847‑03 sont presque égaux au total du mémoire de dépens afférent au dossier T‑1133‑02. Les frais réclamés pour M. Taylor sont les plus élevés, alors qu'il n'est pas une personne versée dans l'art dont relève l'invention. Son expertise n'était pas nécessaire, étant donné le potentiel d'analyse interne d'Apotex. En outre, son travail postérieur à la rédaction de son affidavit relève de la fonction, qui ne peut donner lieu à indemnisation, de conseiller technique des avocats.

 

[37]           Abbott soutient que les frais de photocopie réclamés sont exorbitants pour ce qui concerne l'ensemble des instances, et en particulier les dossiers T‑1847‑03 et T‑840‑05. Apotex a produit plus d'experts dans le dossier T‑840‑05, la dernière des trois instances relatives à un AC, qui ne concernait que deux brevets et les mêmes questions relatives à la validité, que dans le dossier T‑1847‑03, où sept brevets étaient en litige. Les mêmes éléments de preuve, parfois textuellement identiques, ont été produits dans des instances différentes. Le fait que les frais de photocopie réclamés au titre du dossier T‑840‑05 (98 335,66 $), qui concernait le plus petit nombre de brevets, soient les plus élevés des trois instances milite contre la position d'Apotex voulant que la taille du dossier et le montant des frais de photocopie soient en rapport direct avec le nombre nécessaire d'experts.

[38]           Se fondant sur l'article 409 et l'alinéa 400(3)a) des Règles, ainsi que sur le paragraphe 50 de Consorzio del Prosciutto di Parma c. Maple Leaf Meats Inc., 22 C.P.R. (4th) 177 (C.A.F.) [Consorzio], Abbott avance que le fait d'obtenir gain de cause ne signifie pas nécessairement qu'on ait droit à des dépens plus élevés ni qu'on soit exempté de la charge de prouver ses frais. Abbott fait aussi valoir, à propos de l'alinéa 400(3)c) des Règles (l'importance et la complexité des questions en litige) et sur le fondement du paragraphe 6 de la décision Aird c. Country Park Village Property (Mainland) Ltd., [2004] A.C.F. no 1153 (C.F.) [Aird], que c'est l'importance et la complexité des questions sur le plan juridique, et non l'objet factuel, qui justifient la majoration des dépens. AB Hassle fait état de conclusions analogues. Les instances ici considérées n'étaient pas plus complexes que ne le sont la plupart. La décision du recours Merck a accordé 206 411,00 $ dans une affaire qui mettait en jeu un marché d'une valeur annuelle de 130 millions de dollars canadiens, soit deux fois plus que le marché en question ici. On devrait donc octroyer dans la présente espèce un montant considérablement inférieur à celui de la décision du recours Merck. Abbott soutient en outre, à propos de l'alinéa 400(3)g) (la charge de travail) que la production par Apotex d'écritures et de pièces en réponse injustifiées (supplémentaires) dans le dossier T‑1133‑02 a entraîné du travail inutile.

 

[39]           Abbott affirme que, comme il incombait à Apotex, selon la jurisprudence, d'obtenir la permission de produire plus de cinq experts, il n'est pas trop tard au stade de la taxation des dépens pour faire valoir contre elle la règle qui en limite le nombre. Le paragraphe 34 de la décision Altana, se référant aux paragraphes 5 à 7 d'Eli Lilly 2007, porte que la charge de demander la permission de dépasser cinq rapports d'expert pèse sur la partie qui veut produire ces rapports. En outre, Altana conclut que la validité constitue une seule question. La validité peut se diviser en sous-questions, par exemple l'utilité, la prédiction, l'antériorisation, etc., mais elle n'en forme pas moins une seule question.

 

[40]           Abbott allègue qu'Apotex, en tant que défenderesse dans l'affaire Eli Lilly 2007 no 2, y a fait ce qu'elle aurait dû faire ici, c'est‑à‑dire demander à la Cour l'autorisation de produire plus de cinq experts. La Cour, dans Eli Lilly 2007 no 2, a examiné en détail la jurisprudence touchant le point de savoir si le nombre des experts est limité par question en litige ou pour l'ensemble de l'instance et a conclu au paragraphe 27 que l'article 7 de la Loi sur la preuve au Canada, bien interprété, limite le nombre des experts à cinq pour l'ensemble de l'instance et que la partie qui souhaite dépasser ce nombre doit en demander l'autorisation à la Cour. Par conséquent, le nombre des questions en litige est dénué de pertinence. Altana a conclu que le fait de permettre la production d'un nombre excessif d'experts entravait l'accomplissement par la Cour de sa charge de travail.

 

[41]           Abbott rappelle le critère à trois volets applicable à la taxation des frais d'expert formulé au paragraphe 81 de la décision Allied Signal : les débours doivent être prudents et raisonnables au moment où ils sont engagés, les conditions de l'engagement ne constituent pas un chèque en blanc, et le poids accordé au témoignage de l'expert par le juge du procès est un facteur à prendre en considération. Syntex conclut aux paragraphes 19 et 20 que la partie qui succombe n'est pas tenue d'indemniser la partie adverse de dépenses excessives, soit en l'occurrence la rémunération d'experts du type « Cadillac ». Selon Biovail, l'insuffisance de la preuve ou la présence de cas où les experts font le travail des avocats devraient entraîner la réduction ou le rejet des réclamations de frais. Le paragraphe 17 de Laboratoires porte que la somme de 97 907,58 $ est disproportionnée pour un expert engagé par Apotex (défenderesse dans cette affaire); or cette somme est inférieure à la note présentée par M. Taylor dans le dossier T‑1847‑03.

[42]           Abbott fait valoir que Browne n'exprime pas une règle de droit absolue, mais plutôt un principe général dont le champ et le mode d'application doivent varier selon les circonstances; voir Palmer c. la Reine, [1980] 1 R.C.S. 759, à la page 782 [Palmer], et Hurd c. Hewitt, (1995) 120 D.L.R. 105, à la page 117 (C.A. Ont.) [Hurd]. Tout contre-interrogatoire de Me Brodkin au sujet de son affidavit sur le dossier T‑1133‑02 aurait donné lieu à des affirmations de caractère raisonnable dépourvues de valeur, étant donné qu'Apotex n'a pas contre-interrogé Me Steven G. Mason, avocat expérimenté d'Abbott dans les instances relatives aux AC et dont l'affidavit, en date du 24 octobre 2007 (l'affidavit de Mason sur le dossier T‑1133‑02), contredit de telles affirmations de caractère raisonnable, de sorte que nous nous trouvons ici essentiellement en présence d'un dossier consistant dans les témoignages de deux avocats, qui possèdent l'un comme l'autre une connaissance détaillée du dossier T‑1133‑02, mais expriment des points de vue opposés sur le caractère raisonnable des frais engagés. Cet état de choses rend Browne inutile dans la présente espèce. Il ne suffit pas d'une simple affirmation, comme en l'occurrence par un avocat dans un affidavit, pour établir le caractère raisonnable. Il faut plutôt pour cela des éléments de preuve tels que des factures, et d'autres relatifs aux circonstances de l'affaire et aux facteurs qu'énumère le paragraphe 400(3) des Règles, dont aucun n’a été produit par Apotex. L'absence de contre-interrogatoire au sujet de l'affidavit Brodkin sur le dossier T‑1133‑02 n'a pas entraîné le préjudice qu'une telle absence aurait pu entraîner dans une affaire pénale.

 

[43]           Abbott, se fondant sur le paragraphe 23 de Fournier, soutient qu'Apotex avait la charge, dont elle ne s'est pas acquittée, de produire une preuve suffisante pour établir la nécessité et le caractère raisonnable de ses débours. La Cour, dans Fournier, a jugé défavorablement des éléments de preuve semblables à ceux produits dans la présente espèce, c'est‑à‑dire des tableaux de débours dépourvus de la ventilation qui aurait pu contribuer à l'établissement du caractère raisonnable des frais en question, et a rejeté intégralement la réclamation de débours. Abbott ne cherche cependant pas à obtenir ici un rejet complet de la réclamation de débours, mais plutôt de fortes réductions.

 

[44]           Abbott soutient, à propos de l'ensemble des cinq instances considérées, que les frais de photocopie réclamés sont excessifs, étant donné en particulier qu'Apotex, en tant que partie défenderesse, n'avait pas comme Abbott la charge d'établir les dossiers pour les Cours. Les paragraphes 23 à 25 de CCH portent que la partie qui réclame les débours contestés doit produire des éléments prouvant leur engagement, faute de quoi des réductions devraient être prononcées. Les conclusions sur les frais de photocopie formulées dans Diversified, Fournier et Windsurfing concordent avec cette opinion. L'auteur de la taxation Merck, bien qu'il se soit montré généreux à propos de plusieurs postes de débours, n'en a pas moins accordé pour la photocopie un montant sensiblement inférieur aux frais réclamés. Abbott soutient sur le fondement de Fournier et de Laboratoires que les débours divers tels que les frais de transcription, de coursiers, de recherche informatisée, de traduction, etc., doivent être réduits en cas d'insuffisance de la preuve. Une réclamation vague au titre des réunions, semblable à celle présentée ici, a été rejetée dans Fournier.

 

[45]           Abbott conteste la position générale d'Apotex concernant l'article 26, selon laquelle des tâches urgentes dans le programme de travail chargé de l'avocat d'Apotex auraient fait obstacle à la signification des pièces alors que la conduite d'Abbott aurait été entachée d'insuffisances. En fait, Apotex a eu plusieurs mois, après avoir présenté son mémoire de dépens, pour réunir ses pièces justificatives, alors qu'Abbott n'a disposé que de deux semaines pour se préparer dans le cadre du calendrier convenu. L'absence de factures a nui à la capacité de réponse d'Abbott.

 

[46]           Abbott, se fondant sur Kassam c. Canada, [2005] A.C.F. no 799 (O.T.) [Kassam], soutient que le terme « toutes » de l'article 2 du tableau du tarif B (« Préparation [...] de toutes les [...] réponses [...] ou dossiers et documents des intimés ») exclut les réclamations multiples, en particulier si on compare cet article à l'article 4. Le terme « une » de celui‑ci permet manifestement une réclamation distincte pour chaque requête, contrairement à l'article 2, qui ne prévoit la possibilité que d'une seule réclamation, quel que soit le nombre d'affidavits et de documents qui constituent le dossier de l'intimé. Abbott subirait un préjudice si la réclamation restante établie au milieu de la fourchette de l'article 2 était portée au maximum de celle‑ci une fois que les autres réclamations fautives au titre du même article auraient été rejetées. L'article 27 concerne les services non prévus à un autre article du tarif, par exemple à l'article 2, et ne peut donc être invoqué à l'appui des réclamations au titre de ce dernier qui sont à rejeter. Abbott ne souscrit pas nécessairement à l'idée que les frais d'établissement de répertoire soient recouvrables, mais note que, comme le tarif ne prévoit pas explicitement de dépens pour cette activité, elle entrerait plus facilement dans le cadre de l'article 27 que les réclamations multiples présentées pour les affidavits au titre de l'article 2.

 

[47]           Pour ce qui concerne les articles 4, 5 et 6 du tableau du tarif B, Abbott, se fondant sur Mark M. Orkin, c.r., The Law of Costs, feuilles mobiles, 2e éd., Aurora (Ont.), Canada Law Book, 2007, vol. 2, ch. 4, paragraphe 402, fait valoir qu'il ne peut être taxé de dépens en exécution d'une ordonnance muette quant à cette question. Quant à la requête en radiation des affidavits en réponse d'Apotex, l'ordonnance y afférente enjoignait aux parties de se mettre d'accord sur les dépens, faute de quoi elles pourraient les faire examiner. La procédure correcte n'est pas de les faire examiner dans le cadre de la taxation des dépens, mais plutôt de former soit une requête en nouvel examen sous le régime de l'article 397 des Règles, soit une requête en directives en vertu de leur article 403; voir AB Hassle, qui, il est vrai, concernait le montant des dépens et non le droit à ceux‑ci, dont il s'agit dans la présente espèce. Apotex ne peut acquérir par le moyen d'une taxation des dépens un droit aux dépens inexistant.

 

[48]           Abbott a produit devant moi une copie du mémoire de dépens d'Apotex, à laquelle elle a ajouté deux colonnes, dont la première résumait ses objections à des éléments déterminés, et la seconde portait le montant (parfois nul) qu'elle proposait à la place. Ce document m'a été très utile. Abbott concède telles quelles les réclamations au titre de l'article 8 pour tous les experts d'Apotex, sauf M. Rey, à propos de qui elle invoque le dépassement de la limite de cinq experts, le caractère excessif du montant réclamé et la non-pertinence. Abbott concède le calcul des heures et des montants au titre de l'article 9 pour ce qui concerne la présence du premier avocat. Elle conteste cependant les réclamations relatives à la présence d'un second avocat, étant donné l'absence d'autorisation de la Cour. Elle voit en outre une autre raison de rejeter certaines réclamations au titre de l'article 9 dans le fait qu'elles concernent un agent de brevets qui n'est pas avocat. Il ne peut rien être accordé selon elle pour l'agent de brevets au titre de cet article du tableau, puisqu'il se limite à la rémunération de l'avocat pour son temps. On pourrait peut-être accorder un montant à cet égard au titre de l'article 28 (services qu'autorise à fournir le Barreau de la province).

 

[49]           Abbott soutient sur le fondement du paragraphe 22 de la décision AB Hassle que la possibilité de réclamer des dépens au titre de l'alinéa 14b) est subordonnée à une directive préalable de la Cour. Abbott propose de réduire la réclamation au titre de l'alinéa 14b) en calculant les frais sur la base d'une journée de huit heures plutôt que de dix, parce que c'est là la durée habituelle d'une journée de séance. Elle soutient que les répertoires, étant essentiellement des compilations de preuve, ne constituent pas des plaidoyers écrits au sens de l'article 15. Abbott concède que l'article 27 s'appliquerait peut-être mieux à ce service, mais fait valoir que, comme les avocats ordonnent en général aux clercs d'établir les répertoires en réunissant les éléments de preuve déjà déposés, rien ne devrait être accordé à ce titre. Abbott concède la réclamation de 480,00 $ au titre de l'article 26 et soutient qu'il ne devrait être rien accordé au titre de l'article 27 pour l'établissement du mémoire de dépens, au motif que cette tâche est déjà visée aux articles 25 et 26.

 

[50]           Concernant les débours, Abbott note que, selon la décision T‑1133‑02, la chimie organique est la spécialité principale de trois des experts d'Apotex, soit MM. McClelland, Brown et Hendrickson. Il s'agit là d'une mobilisation excessive de compétences dans le même domaine. Les honoraires de M. Brown se révèlent disproportionnés à l'échelle de ceux de M. McClelland, qui était le seul chimiste médicinal du groupe. L'affidavit de M. McClelland était beaucoup plus détaillé et approfondi que celui de M. Brown, et pourtant la note du premier ne faisait qu'environ la moitié de celle du second. M. Cima était le seul ingénieur chimiste du groupe et était compétent en matière de polymorphisme. La Cour dit au paragraphe 34 de la décision T‑1133‑02 qu'elle examinera les travaux des experts et leur donnera le poids qui convient; il semble logique d'en conclure qu'elle a cité les éléments de preuve qu'elle estimait les plus pertinents pour sa décision.

 

[51]           Abbott a réaffirmé que la validité était la seule question en litige qui exigeait la production de preuve d'expert. Les deux autres points en litige, soit la charge de la preuve et le caractère suffisant de l'avis d'allégation d'Apotex, ne nécessitaient pas le témoignage d'experts. La question de la validité se divisait en sous-questions. Concernant la nouveauté, la Cour a cité (au paragraphe 63) les déclarations de MM. Hendrickson et Brown. La Cour a rejeté la thèse d'Apotex en ce qui a trait à l'antériorisation et n'a pas cité de preuve d'expert à ce sujet. Touchant la validité de la prédiction, la Cour a cité (aux paragraphes 80, 88 et 93) les déclarations de MM. McClelland, Brown et Cima. Le passage du paragraphe 80 selon lequel MM. Brown et Cima « ont abondé dans le même sens dans leurs témoignages » que M. McClelland équivaut à une conclusion implicite de double emploi d'éléments de preuve. Pour ce qui concerne la question de l'inutilité, la Cour a cité les témoignages de MM. McClelland et Hendrickson, ainsi que les analyses effectuées par MM. Allan Rey et Carlos Zetina Rocha en tant qu'employés d'Apotex. Le paragraphe 133 de la décision de la Cour dit essentiellement que l'affidavit de M. Rocha était inutile parce que celui‑ci était l'assistant de M. Rey. Cette observation devrait aussi être appliquée à M. Taylor, qui n'a fait pour l'essentiel que des analyses, dont le témoignage n'a pas été cité dans la décision T‑1133‑02 et qui a demandé les honoraires les plus élevés. Si l'on accorde des dépens pour M. Taylor, ils devraient être minimaux, étant donné que sa note ne remplit pas le critère d'Allied Signal.

 

[52]           Abbott concède telle quelle la réclamation de 21 650,00 $ au titre des honoraires de M. Cima, sous réserve d'une réduction d'environ 1 900,00 $ correspondant à son travail postérieur à son contre-interrogatoire d'octobre 2004, qui consistait vraisemblablement à assister l'avocat et non à créer des éléments de preuve. Abbott soutient, dans le prolongement de sa thèse exposée plus haut de l'insuffisance de la preuve, que les honoraires réclamés pour MM. Hendrickson, McClelland, Brown et Taylor sont excessifs et devraient être réduits respectivement à 15 308,39 $, 22 318,18 $, 22 748,17 $ et 20 000,00 $, sommes comparables à celles demandées par les autres experts. Comme la preuve d'Apotex n'établit pas l'absence de frais en double relativement aux passages radiés et aux passages de remplacement des affidavits de MM. McClelland et Brown, les réclamations correspondant à ces deux experts devraient être réduites. Les réductions opérées dans Biovail ont donné lieu à l'octroi d'un total d'environ 115 000,00 $ pour les experts, somme comparable aux frais de quelque 105 000,00 $ engagés en l'occurrence par Abbott. La Cour a conclu dans Engine & Leasing Co. c. Atlantic Towing Ltd., [1995] A.C.F. no 250 (C.F. 1re inst.) [Engine & Leasing], que le caractère raisonnable des honoraires d'expert est un facteur pertinent pour établir la possibilité de leur recouvrement. Dans Laboratoires, tous les postes des débours réclamés ont été réduits de moitié environ. La décision du recours Merck a réduit à 31 000,00 $ la somme de 237 000,00 $ accordée pour M. Langer dans la taxation Merck. L'analyse exposée dans la décision du recours Merck est importante parce que la Cour y a fondé le calcul de sa réduction sur le nombre moyen d'heures réclamées par les autres experts d'Apotex. La Cour, dans Fournier, a rejeté en totalité les réclamations de 15 000,00 $ et de 79 000,00 $ au motif de l'absence de preuves de l'utilité et du caractère raisonnable des dépenses en question.

 

[53]           Abbott, se fondant sur AB Hassle et Fournier, affirme que le montant de 226 731,53 $ réclamé au titre des experts est manifestement excessif. La Cour a accordé plus de poids à la preuve de M. McClelland, beaucoup plus détaillée, qu'à celle de M. Brown, dont les honoraires font environ le double de ceux du premier. Abbott n'a pas à supporter les conséquences d'une telle prodigalité, étant donné en particulier le chevauchement de ces éléments de preuve. Abbott concède qu'Apotex a droit au recouvrement de ses frais d'experts, mais soutient que ceux‑ci doivent être considérablement réduits dans certains cas. La conclusion de la décision Illinois Tool concernant la décomposition des dépens par question en litige n'empêche pas l'application d'Allied Signal à la note de M. Taylor, par exemple, qui n'est pas mentionné dans la décision T‑1133‑02 et à propos de qui il n'a pas été produit de preuve pertinente.

 

[54]           Selon Abbot, le dossier ne justifie pas la réclamation des frais de déplacement d'un second avocat pour les contre-interrogatoires, en particulier d'un agent de brevets qui n'est pas avocat. La somme raisonnable à accorder à ce titre serait de 2 660,11 $. Abbott propose une réduction de 75 % des frais de photocopie, qu'elle établirait ainsi à 6 779,36 $, étant donné l'absence de preuves de leur utilité et de leur caractère raisonnable. Elle souscrit à la méthode suivie dans la taxation Merck, qui consiste à multiplier le nombre de pages des documents par le nombre d'exemplaires nécessaires aux fins du dépôt et de la signification, puis de multiplier ce produit par le taux convenu de 0,25 $ la page. Le facteur de huit exemplaires retenu dans la taxation Merck pourrait cependant être excessif, en particulier pour les appels où Abbott avait la charge de la reproduction.

 

[55]           Se fondant sur Johnson & Johnson Inc. c. Bristol-Myers Squibb Canada Inc., 71 C.P.R. (3d) 24 (C. Ont., Div. gén.) [Johnson & Johnson], Abbott soutient que la rémunération des heures supplémentaires représente des frais indirects et n'est donc pas recouvrable. Selon Abbott, les frais de coursiers sont acceptables s'ils n'incluent pas de suppléments pour service accéléré, mais il convient néanmoins de les réduire en l'occurrence de 75 % pour les établir à 549,71 $. Abbott concède les frais de téléphone et de télécopie, sous réserve de la production de pièces justificatives. La réclamation au titre de la rémunération d'agents (453,80 $) n'est pas étayée d'une preuve suffisante. Abbott soutient que les réclamations au titre du stationnement, des taxis et du kilométrage, du temps d'ordinateur, des historiques de dossier (qui relèvent selon elle du stockage hors place) et de la prime à verser à la LPIC (prime d'assurance que doivent payer les cabinets d'avocats pour chaque litige) entrent dans la catégorie des frais indirects et font dans certains cas double emploi avec d'autres réclamations telles que celle correspondant à la consultation de Quicklaw, de sorte qu'elles devraient être entièrement rejetées. Si les avocats d'Apotex décident de stocker leurs archives hors place, Abbott ne devrait pas avoir à payer les frais de recherche de documents qui s'ensuivent. Se fondant sur les montants proposés dans l'affidavit de Mason sur le dossier T‑1133‑02, Abbot affirme que les frais réclamés au titre de la consultation de Quicklaw sont excessifs et devraient être réduits de 50 % pour s'établir à 1 630,88 $. Le dossier indique que certains travaux de recherche informatisée ont été facturés par l'intermédiaire du cabinet Hugues (le co-avocat), et aucun élément de preuve ne confirme à cet égard l'absence de frais en double ou injustifiés. Abbott soutient que les frais réclamés pour la transcription sont excessifs, dépassent ceux qui sont demandés dans n'importe lequel des autres dossiers et devraient être réduits de 75 % pour se chiffrer à 4 160,66 $. Elle a concédé la réclamation pour les huissiers, présentée au montant de 630,00 $.

 

C. Taxation du dossier T‑1133‑02

[56]           J'examinerai d'abord dans l'ordre chronologique la jurisprudence citée devant moi afin d'établir tous principes qui s'appliqueraient à la résolution des problèmes que pose la présente taxation. Ce faisant, j'aborderai pour des raisons de commodité des questions non nécessairement pertinentes pour le dossier T‑1133‑02, mais qui le sont pour d'autres instances ici considérées. Je devrais en théorie examiner isolément chacun des mémoires de dépens, mais le fait est qu'ils se rapportent tous à un seul long différend relatif à divers aspects d'un produit pharmaceutique au marché considérable. À ce propos, j'ai accordé un certain poids à la thèse d'Abbott selon laquelle les experts d'Apotex auraient dû travailler avec plus d'efficience au fur et à mesure de l'introduction des instances considérées, étant donné leur connaissance croissante du produit pharmaceutique en question. Ce poids sera cependant limité, étant donné qu'un expert, me paraît‑il, ne peut présumer que le travail nécessaire pour traiter un avis d'allégation dans une instance donnée puisse servir de modèle à appliquer sans souplesse ni réflexion à l'avis d'allégation et aux brevets différents d'une autre instance, même mettant en jeu le même produit pharmaceutique.

 

[57]           Il se trouve qu'Abbott a cité un certain nombre de précédents après l'audience de la présente espèce : Altana Pharma Inc. c. Novopharm Ltd., [2007] A.C.F. no 1421 (C.F.) [la décision du recours Altana], en date du 23 octobre 2007; Pfizer Canada Inc. c. Canada (Ministre de la Santé), [2008] A.C.F. no 3 (C.F.) [Pfizer 2008], en date du 2 janvier 2008; et Eli Lilly Canada Inc. c. Apotex Inc., 63 C.P.R. (4th) 406 (C.F.) [Eli Lilly 2008], en date du 5 février 2008. Il s'en est suivi un vif désaccord entre les avocats des parties en présence sur le point de savoir s'il était permis à l'avocate d'Abbott de citer cette jurisprudence et sur le poids qu'il convenait de lui accorder. Abbott soutenait que l'infraction supposée d'Apotex à la disposition limitant le nombre des experts à cinq avait entraîné la réclamation de dépens excessifs, et Apotex faisait valoir de son côté que la jurisprudence existant au moment où les experts avaient été produits enlevait toute pertinence à la position d'Abbott dans la présente taxation des dépens, le nombre des experts n'ayant pas été mis en litige devant le juge chargé de la gestion de l'instance ni devant le juge de la demande. Apotex a insisté sur le fait que l'évolution de la jurisprudence relative à l'article 7 de la Loi sur la preuve au Canada n'est pas pertinente pour la présente taxation, thèse qu'Abbott rejette en se fondant sur Eli Lilly 2008. Apotex a elle-même cité après l'audience la décision Fournier Pharma Inc. c. Canada (Ministre de la Santé), 2008 A.C.F. no 462 (C.F.) [la décision du recours Fournier], en date du 20 mars 2008, qui annulait le rejet de la réclamation de débours prononcé dans Fournier et renvoyait la taxation à un officier taxateur. Elle a également cité Biovail Corp. (faisant affaire sous le nom de Biovail Pharmaceuticals Canada) c. Canada (Ministre de la Santé nationale et du Bien-être social), [2008] A.C.F. no 342 (C.F.) [la décision du recours Biovail], en date du 29 février 2008, qui confirmait Biovail (en date du 23 juillet 2007). Ces décisions étayent l'idée que la conduite de litiges représente des frais réels et que la taxation de ces frais peut exiger l'application de mesures approximatives.

 

[58]           Je pense qu'il convient de décourager la présentation de conclusions non sollicitées après l'audience, mais je pense aussi que les avocats soucieux de s'acquitter aussi bien de leur obligation d'agir dans l'intérêt de leurs clients que de leur responsabilité de fonctionnaires de la Cour peuvent porter à l'attention de celle‑ci la jurisprudence susceptible de l'aider à trancher les questions dont elle est saisie. En fait – et je ne veux en rien critiquer par là la conduite antérieure de qui que ce soit –, la question même dont je suis saisi, à savoir le dépassement supposé par Apotex de la limite de cinq experts, aurait pu être écartée si l'attention de la Cour, avant la communication de la décision Eli Lilly 1997, avait été attirée sur certains précédents pertinents non cités à l'audience. On peut lire au paragraphe 31 de la décision du recours Altana que « la question du nombre de témoins "par question", par opposition au nombre "par affaire", ne constitue pas l'élément central de ce qui était une décision interlocutoire rendue au cours de l'instruction ». Le paragraphe 8 du même arrêt rappelle que la décision Eli Lilly 1997 « a été confirmée en appel sans qu'il soit fait référence à la question relative à l'article 7 ». On lit aussi au paragraphe 43 de la même décision qu'« [i]l convient [...] que la Cour examine de manière plus directe l'article 7 dans le contexte de la jurisprudence récente ». Je remercie les avocats des deux parties d'avoir porté cette jurisprudence supplémentaire à mon attention, et leur suis également reconnaissant des objections qu'ils ont courtoisement exposées. J'appliquerai cette jurisprudence, mais pas précisément de la manière proposée par les avocats.

 

[59]           Je crois utile de m'écarter, à propos d'un point, de mon intention exprimée plus haut d'examiner la jurisprudence dans l'ordre chronologique, parce que je réduirai ainsi la nécessité de commenter certains précédents. Plus précisément, je doute de pouvoir ajouter quoi que ce soit aux observations et conclusions concises formulées dans la décision du recours Altana sur l'état de la jurisprudence relative au nombre d'experts par question en litige ou par affaire. La Cour, dans cette décision, a statué que l'article 7 de la Loi sur la preuve au Canada prévoit seulement cinq experts par affaire, a annulé la conclusion d'Altana qui permettait cinq experts par question en litige et a invité les parties à soumettre à la protonotaire chargée de gérer l'instance la question de la majoration du nombre des experts au‑delà de la limite de cinq. Je reprends à mon compte le principe appliqué dans cette décision et, sous réserve de sa modification ou de son annulation en appel, je tiens pour acquis qu'elle rend compte de la pratique prescrite, celle‑ci consistant à permettre la production de cinq experts par affaire sous le régime de l'article 7, sauf ordonnance contraire de la Cour, et ce, pour l'avenir en général, étant donné que la Cour fait observer que ce principe devrait être étendu au‑delà des instances relatives à un AC. Par conséquent, je n'irai pas ajouter aux conclusions de la Cour mon analyse des thèses qu'Apotex et Abbott ont exposées devant moi sur ce sujet, mais je tiens à assurer les deux parties que j'ai examiné attentivement les écritures et pièces afférentes à cette question qu'elles ont présentées concernant le détail des réclamations qu'elles voulaient voir accueillir telles quelles, réduire ou rejeter.

 

[60]           Il n'est pas nécessaire que j'ajoute d'autres observations sur Eli Lilly 1997 (en date du 25 avril 1997), Merck 2003 (en date du 22 décembre 2003), Pharmascience (en date du 5 avril 2007), Eli Lilly 2007 no 1 (en date du 5 juin 2007), Altana (en date du 14 juin 2007) ni Eli Lilly 2007 no 2 (en date du 10 octobre 2007). Mon analyse de la jurisprudence s'ordonne autour de trois thèmes ou facteurs que je dois prendre en considération pour établir l'ensemble de la taxation des dépens : i) le caractère suffisant de la preuve ou le seuil de preuve; ii) le point de savoir si la compétence que me confère l'article 405 des Règles, qui dispose que les dépens « sont taxés par l'officier taxateur », me permet d'accorder un redressement de la nature de celui prononcé dans la décision du recours Altana; et iii) le point de savoir si la pratique suivie dans Biovail (et confirmée par la décision du recours Biovail) et dans Halford est valable et pertinente pour la présente espèce.

 

[61]           Ni la taxation Merck ni la décision du recours Merck n'ont analysé la pertinence de Browne (en date du 28 novembre 1893) pour la taxation des dépens. J'estime pour ma part que Browne n'a qu'une valeur limitée dans les circonstances de la présente affaire. Browne concernait la preuve factuelle produite oralement par un témoin au procès, plus précisément le point de savoir si un témoin s'était concerté avec le défendeur et lui avait donné des instructions. Cette affaire ne paraît pas avoir mis en jeu la contestation d'une opinion subjective sur des événements antérieurs assimilable aux affirmations de l'affidavit de Brodkin sur le dossier T‑1133‑02 touchant le caractère raisonnable des frais engagés. Il est de droit constant que la taxation des dépens est une procédure interlocutoire, accessoire à l'examen des questions de fond du litige. Ce fait donnait à Apotex le droit de produire ledit affidavit exposant des informations et des opinions. Cette preuve diffère de celle qui était en question dans Browne sous un rapport important : l'affidavit de Brodkin, contrairement à la preuve de Browne, qui paraît n'avoir été que factuelle, relève à la fois de la preuve factuelle, c'est‑à‑dire vise à établir que les débours en cause ont été engagés dans l'instance T‑1133‑02, et de la preuve d'opinion, c'est‑à‑dire tend à établir que ces débours étaient raisonnables. L'affidavit de Mason sur le dossier T‑1133‑02 conteste pour l'essentiel la preuve d'opinion contenue dans l'affidavit de Brodkin sur le même dossier.

 

[62]           Je ne pense pas être lié dans tous les cas par Browne à l'égard d'un élément de preuve factuel tel que l'affidavit de Brodkin sur le dossier T‑1133‑02, étant donné que lord Morris a judicieusement prévu des exceptions à la page 79, notamment la preuve factuelle incompatible avec le dossier. Je ne pense pas que Browne m'oblige à accepter sans poser de questions une preuve d'opinion prima facie fondée sur l'information et la conviction.

 

[63]           Je conclus que je peux me fonder sur Browne pour constater ici, malgré l'absence d'un ensemble complet de factures (dont certaines ont été produites après la preuve initiale), que Me Brodkin, qui est fonctionnaire judiciaire de la Cour en vertu du paragraphe 11(3) de la Loi sur les Cours fédérales, a établi à première vue que les frais en question ont été engagés et qu'ils se rapportaient au dossier T‑1133‑02. Son assistant, qui a comparu devant moi, a confirmé cette preuve factuelle conformément au paragraphe 1(4) du tarif B. Ce paragraphe dispose qu'« aucun débours n'est taxé ou accepté aux termes du présent tarif à moins qu'il ne soit raisonnable et que la preuve qu'il a été engagé par la partie ou est payable par elle n'est fournie par affidavit ou par l'avocat qui comparaît à la taxation ». Je pense que, en l'absence d'éléments de preuve pertinents tendant à établir le contraire, la preuve factuelle visée dans le passage suivant le terme « et » peut être acceptée à première vue. Il est permis à l'avocat, témoignant sur le fondement des renseignements dont il dispose et de sa conviction, de faire valoir une preuve d'opinion comme quoi les débours étaient « raisonnables », mais le passage précité, considéré dans son ensemble, n'assigne pas à l'avocat la responsabilité de décider s'ils étaient raisonnables ou non à la place de l'officier taxateur. Les termes « n'est taxé ou accepté [...] à moins qu'il ne soit raisonnable » du paragraphe 1(4) du tarif B, lus à la lumière de l'article 405 des Règles, qui dispose que les dépens « sont taxés par l'officier taxateur », indiquent que le poids à accorder à la preuve d'opinion de l'avocat sur le « caractère raisonnable », ou la retenue à pratiquer à son égard, sont différents et vraisemblablement moindres que lorsqu'il s'agit de preuve factuelle. 

 

[64]           La Cour, dans Palmer (en date du 21 décembre 1979), a examiné la question de la preuve factuelle et a exprimé aux pages 781 et 782 son adhésion à la jurisprudence se référant à Browne, selon laquelle il ne peut y avoir de règle de preuve générale ou absolue en l'absence de contre‑interrogatoire. John Sopinka et al., aux paragraphes 16.146 à 16.148 (pages 954 à 956) de The Law of Evidence in Canada, 2e éd., Toronto, Butterworths, 1999, se sont prononcés dans le même sens après examen de divers précédents. Je souscris à l'affirmation formulée par l'officier taxateur au paragraphe 20 d'Allied Signal, selon laquelle il n'était pas lié par « une affirmation générale sur le caractère raisonnable des honoraires et des débours faite par l'un des avocats, quel que soit le contexte dans lequel elle a été faite » et que « c'est à l'officier taxateur qu'il revient de juger le caractère raisonnable en matière de taxation des dépens » (la question se posant dans cette affaire à propos d'un échange de lettres entre les avocats des parties en présence). Ayant accepté à première vue que les frais en question ont été engagés, il m'incombe d'établir si les éléments de frais pris isolément étaient raisonnables et nécessaires, et d'accueillir, de réduire ou de rejeter les réclamations correspondantes selon qu'il me paraîtra convenir.

 

[65]           Windsurfing (en date du 26 septembre 1985) a confirmé le rejet de l'ensemble de la réclamation des frais de photocopie au motif de l'absence de preuve tendant à établir quels documents avaient été photocopiés, ainsi que la pertinence et la nécessité raisonnable des activités de photocopie. Je pense que l'application des conclusions que j'ai formulées dans Syndicat canadien de la fonction publique, section locale 4004 c. Air Canada, [1999] A.C.F. no 464 (O.T.) [SCFP] (en date du 25 mars 1999), ainsi que des paramètres exposés ci‑dessous relativement à Carlile, est une pratique raisonnable touchant les frais de photocopie, qui m'a permis jusqu'à maintenant de trouver le juste équilibre entre le droit du plaideur qui obtient gain de cause à être indemnisé de ses frais raisonnables et nécessaires et le droit du plaideur qui succombe à être protégé contre l'obligation de rembourser des frais excessifs ou inutiles. Ces remarques s'appliquent aussi à Diversified (en date du 22 novembre 1990).

 

[66]           Egis (en date du 5 juillet 1991), aux pages 323 et 324, note les répercussions économiques considérables des litiges sur les produits pharmaceutiques et le fait bien réel qu'ils entraînent habituellement des frais élevés étant donné les enjeux financiers. Ces observations ne me paraissent avoir rien perdu de leur pertinence à la lumière des faits que j'ai ici à examiner. Cependant, j'hésiterais à souscrire absolument à l'idée (exprimée à la page 323) que les plaideurs n'ont pas à comparer les prix en vue de trouver les services les moins chers. Cette observation s'inscrit dans le contexte de l'affirmation qu'il est permis aux plaideurs de retenir [TRADUCTION] « les services des avocats qui seront le mieux en mesure de présenter leur cause à la Cour ». Il s'agissait dans Egis d'adjuger une somme globale, et la Cour a bien pris soin de préciser à la page 326 qu'elle n'adjugeait pas de dépens. Cependant, le fait qu'elle ait accueilli à la page 330 une réclamation de débours divers au motif qu'elle n'était pas déraisonnable, qu'elle allait de soi pour la plus grande partie et qu'elle avait été expliquée de manière satisfaisante par l'avocat comparaissant à ce sujet, ce fait indique qu'une approche pratique de la question des dépens se justifie, ce qui semble cadrer avec mes observations ci‑dessous touchant Carlile. Le passage de la page 331 de la décision Egis selon lequel on ne devrait pas recourir à la sagesse rétrospective [TRADUCTION] « pour établir si un service facturé était un supplément ou un luxe qui n'était pas raisonnablement nécessaire pour faire valoir les moyens du client » reste applicable en 2008 à la taxation des dépens. Ajoutons enfin que les faits de l'affaire Egis, où il s'agissait du versement d'une somme globale visant à indemniser les avocats, sont assez différents des faits de la présente espèce pour exclure l'application directe à celle‑ci de la décision à laquelle cette affaire a donné lieu. Cependant, le paragraphe 1(4) du tarif B permet, sous réserve que soit atteint le seuil de la nécessité raisonnable, l'indemnisation intégrale des débours. Il me paraît intéressant de noter que la Cour, dans Egis, n'était guère disposée à appliquer aux taux horaires une formule fondée sur un barème de réclamations déjà accueillies par des officiers taxateurs, c'est‑à‑dire une approche relevant de l'évaluation comparative.

 

[67]           Hurd (en date du 8 novembre 1994) n'a ici qu'une pertinence restreinte. Bien qu'elle ne vise pas précisément la taxation des dépens, l'observation formulée par la Cour à la page 112 de cet arrêt concernant la preuve et les plaidoiries dans le système adversatif défini par les procès civils, comme quoi [TRADUCTION] « l'une des faiblesses du système adversatif, ou l'une des concessions qu'il doit faire, est qu'on y recherche, non pas la vérité absolue, mais ce qu'on peut atteindre de plus proche de la vérité sur le fondement de la preuve produite », pourrait être appliquée à la taxation des dépens, dans le prolongement des observations ci‑dessous sur Carlile.

 

[68]           La Cour, dans Engine & Leasing (en date du 15 février 1995), reconnaît la nécessité de la justice sommaire, des approximations raisonnées et des jugements de valeur dans la taxation des dépens. Elle a envisagé dans cette affaire la possibilité d'apporter des restrictions au recouvrement des frais afférents aux tâches que les experts remplissent hors du cadre de la préparation directe de leur preuve. Ma pratique, exposée dans Biovail et confirmée en appel, permet le recouvrement des frais relatifs aux conseils techniques fournis par les experts à l'avocat superviseur au‑delà de telles restrictions. Selon Johnson & Johnson (en date du 26 novembre 1996), les frais de repas, constituant des frais indirects, ne sont pas recouvrables. J'incline à penser de même si ces frais ne sont pas engagés dans le cadre d'un déplacement nécessaire, mais je ne pense pas qu'on devrait exclure universellement les frais d'une catégorie déterminée sans se demander s'ils ne pourraient être accordés dans des circonstances particulières.

 

[69]           Eli Lilly 1997 (en date du 25 avril 1997) n'est pas une taxation de dépens. Cependant, les observations qui suivent, formulées à la page 407 de cette décision, me paraissent utiles pour la présente affaire dans la mesure où celle‑ci met en jeu un dossier de taille considérable :

Il est toujours difficile pour le juge du procès de déterminer jusqu'à quel point il doit fournir des motifs détaillés. S'il omet certaines parties de la preuve, il existe toujours un risque qu'il soit soutenu ultérieurement, et avec succès, que le juge n'en a pas tenu compte. Par ailleurs, évaluer et commenter par écrit chaque détail prend beaucoup de temps et entraîne la rédaction de motifs extrêmement longs. Même si la Cour fait des commentaires sur certains aspects de la preuve, cela ne signifie pas qu'elle a considéré ou conclu que tous les points passés sous silence avaient une certaine valeur ou devaient être écartés [...]

 

 

Les observations que j'ai formulées au paragraphe 2 de Halford allaient dans le même sens. Dans la présente espèce, il m'est arrivé dans certains cas de ne résumer qu'à grands traits les positions respectives des parties, mais je tiens encore une fois à assurer celles‑ci que j'ai lu et pris en considération toutes les écritures et pièces de la taxation, ainsi que des sections considérables du dossier de la Cour, selon que je l'estimais pertinent.

 

[70]           Je professe toujours l'opinion, que j'ai souvent exprimée dans le prolongement de l'approche illustrée par Carlile (en date du 8 mai 1997), ainsi que des observations formulées par lord Russell à la page 608 de Re Eastwood (deceased) (1974), 3 All E.R. 603, selon lesquelles la taxation des dépens est [TRADUCTION] « une forme de justice grossièrement déterminée, au sens où elle consiste pour une grande part en approximations raisonnées » – je professe toujours, dis‑je, l'opinion qu'on peut user d'une certaine marge d'appréciation pour parvenir, en matière de dépens, à un résultat raisonnable et équitable pour les deux parties. Il me semble que ce point de vue est étayé par les commentaires que proposent des articles 57 et 58 des Règles le juge James J. Carthy, W.A. Derry Millard et Jeffrey G. Gowan dans Ontario Annual Practice 2005-2006, Aurora (Ont.), Canada Law Book, 2005, commentaires selon lesquels la taxation des dépens est plutôt un art que l'application de règles et de principes, en ce qu'elle met en œuvre l'impression générale produite par le dossier et les questions en litige, ainsi que le jugement et l'expérience de l'officier taxateur, aux prises avec la tâche difficile d'équilibrer les effets de facteurs qui peuvent être à la fois multiples et aussi bien subjectifs qu'objectifs.

 

[71]           Certaines observations contenues dans la preuve qui sont citées au paragraphe 31 de la décision Almecon Industries Ltd. c. Anchortek Ltd., [2003] A.C.F. no 1649 (O.T.), concernant la réalité d'une multitude de débours essentiels dont le coût de la preuve pourrait dépasser ou dépasserait le montant, me paraissent pragmatiques et sensées malgré leur caractère intéressé. Je ne veux cependant pas dire que les plaideurs peuvent s'en tirer sans produire aucun élément de preuve, en se fiant à l'appréciation et à l'expérience de l'officier taxateur. La preuve dans la présente espèce n'a rien d'absolu, mais je pense que les dossiers respectifs de la Cour fédérale et de la Cour d'appel fédérale contiennent suffisamment d'éléments pour me permettre d'évaluer les efforts et les frais qu'il fallait pour plaider raisonnablement et suffisamment la cause d'Apotex. Le manque de renseignements détaillés rend difficile d'établir avec certitude si l'approche la plus efficiente a en fait été suivie ou s'il n'a pas été donné d'instructions erronées exigeant un travail correctif, comme c'était par exemple le cas dans Halford. L'insuffisance de la preuve des faits relatifs à chacun des éléments de dépenses rend difficile pour le défendeur à la taxation et l'officier taxateur de se convaincre de la nécessité raisonnable de chacun de ces éléments. Moins il y a de preuve, plus la partie qui demande la taxation doit s'en remettre au pouvoir discrétionnaire de l'officier taxateur, lequel doit l'exercer de manière prudente, en ne perdant pas de vue le principe d'austérité qui doit présider à la taxation, afin de ne pas porter préjudice à la partie condamnée aux dépens. Cependant, la conduite d'un litige exige de réelles dépenses : la taxation des dépens à zéro dollar serait absurde. 

 

[72]           J'ai exprimé au paragraphe 31 de Biovail mes réserves touchant l'application de la décision Allied Signal (en date du 11 mai 1998) aux notes d'expert. La Cour, dans Syntex (en date du 23 septembre 1999), a approuvé les dépens réclamés pour un expert agissant comme conseiller de l'avocat.

 

[73]           L'arrêt Consorzio (en date du 28 octobre 2002) est utile sous plusieurs rapports. Lorsque l'ordonnance est muette sur les dépens, je rejette toutes réclamations relatives à la requête sous‑jacente conformément aux conclusions que j'ai formulées au paragraphe 6 de Balisky c. Canada (Ministre des Ressources naturelles), [2004] A.C.F. no 536 (O.T.) [Balisky], et au paragraphe 10 de la taxation Aird c. Country Park Village Properties (Mainland) Ltd., [2005] A.C.F. no 1426 (O.T.) [la taxation Aird]. Je ne pense pas que l'observation du paragraphe 10 de la taxation Aird touchant le dessaisissement de la Cour après adjudication des dépens entre en contradiction avec le paragraphe 3 de Consorzio, selon lequel « une requête déposée en vertu de l'article 403 des Règles doit être considérée comme une procédure sanctionnée par la loi en ce qui concerne la modification d'un jugement ». La Cour ne peut changer son adjudication des dépens de sa propre initiative. Le paragraphe 25 (l'opinion dissidente) exprime un point de vue différent. Un appel en bonne et due forme semble être la seule autre façon de modifier l'adjudication des dépens.

 

[74]           Consorzio, où il s'agissait de l'adjudication d'une somme globale, porte au paragraphe 8 qu'une adjudication de dépens partie-partie « ne constitue pas un exercice exact » et, au paragraphe 9, qualifie d'arbitraires les honoraires d'avocat prévus au tarif B. Ces remarques ne visaient pas la taxation des dépens proprement dits, mais elles me paraissent confirmer les observations que j'ai formulées ci‑dessus dans le prolongement de Carlile. Selon le paragraphe 28 de Consorzio, toute requête en directives à l'officier taxateur formée sous le régime de l'article 403 des Règles à la suite d'une adjudication de dépens déclenchant l'application de leur article 407 (qui prévoit la taxation en conformité avec la colonne III en l'absence d'une ordonnance contraire) vise en réalité la modification de l'ordonnance en question et devrait donc être déposée devant le juge qui l'a rendue. Ce raisonnement me paraît confirmer les conclusions que j'ai formulées dans Balisky et dans la taxation Aird. La Cour ajoute au paragraphe 52 de Consorzio que, bien qu'elle « ne souhaite pas juger après coup la pertinence du travail des avocats », elle ne peut aveuglément obliger la partie adverse à payer une indemnité considérable (sur la foi d'une preuve qui consiste simplement en déclarations générales de pertinence). Enfin, la Cour a accordé au paragraphe 53 des dépens au titre de l'article 27 pour la préparation de l'audience de l'appel, service dont elle ne s'explique pas qu'il soit omis dans le tarif B.

[75]           Je souscris aux observations d'Apotex sur Illinois Tool Works (en date du 30 septembre 2003) et je n'ai rien à ajouter à l'analyse que j'ai proposée de cette décision dans Halford. La Cour, dans AB Hassle (en date du 22 juin 2004), a analysé les conclusions de Consorzio pour elle-même conclure que seul un appel en bonne et due forme, et non une requête formée sous le régime de l'article 403 des Règles, peut entraîner la modification d'une adjudication de dépens. Elle rappelle au paragraphe 22 que l'officier taxateur n'a pas le pouvoir d'examiner les réclamations relevant de l’alinéa 14b) et de l’article 24 en l'absence de directives. Il semble (à en croire le paragraphe 25) que l'article 24 a été présenté à la Cour comme le poste applicable aux débours de déplacement de l'avocat et que celle‑ci les a examinés à ce titre. Soit dit en toute déférence, le libellé du tarif B milite contre cette façon de faire, encore que je pense comme la Cour qu'elle peut valablement examiner les débours de déplacement en vertu du pouvoir discrétionnaire que lui confère le paragraphe 400(1) des Règles. L'article 24 ne vise que les frais afférents au temps passé par l'avocat en déplacement. Les débours correspondants, le cas échéant, relèvent du paragraphe 1(4) du tarif B, qui ne comporte pas de disposition comparable à celle de l'article 24 limitant le pouvoir de l'officier taxateur. Autrement dit, je pense que les conclusions que j'ai exposées dans Marshall restent applicables.

 

[76]           La Cour, dans Aird (en date du 30 juin 2004), a refusé de donner des directives qui auraient entraîné la réduction ou le rejet d'une réclamation de frais d'expert, bien qu'elle ait d'abord déclaré que les évaluations produites en preuve n'étaient pas « entièrement satisfaisantes » (paragraphe 10). Cette conclusion et l'observation du paragraphe 11 selon laquelle l'adjudication des dépens « n'est pas une science » me semblent confirmer mes observations ci‑dessus touchant Carlile. CCH (en date du 25 août 2004) concernait une requête en majoration des dépens, la Cour suprême du Canada ayant adjugé ceux‑ci « devant toutes les cours ». La Cour, après avoir examiné cette adjudication à la lumière de Consorzio, a conclu à sa compétence sur une telle requête, pour autant qu'elle ne rendrait pas une ordonnance incompatible avec l'arrêt de la Cour suprême du Canada. À condition de ne pas oublier que la Cour n'effectuait pas là une taxation de dépens, je reste convaincu que son approche, consistant à opérer certaines réductions du fait de l'insuffisance de la preuve, se révèle à la fois pratique et pertinente dans le contexte de mes remarques ci‑dessus sur Carlile.

 

[77]           Je ne pense pas qu'accueillir ici une seule réclamation au titre de l'article 2 équivaille à l'octroi d'un montant qui atteindrait le seuil de l'indemnisation partielle. Cependant, je pense aussi que Kassam (en date du 9 mai 2005) reste applicable, et je dois limiter Apotex à une seule réclamation au titre de l'article 2 pour chaque affaire.

 

[78]           Les paragraphes 34 et 41 de Pfizer (en date du 20 décembre 2005) rappellent utilement et succinctement que le rôle des experts dans les litiges relatifs à des brevets n'est pas d'interpréter les revendications, mais d'aider le juge du fond à les interpréter en connaissance de cause. La Cour, au paragraphe 78 de cette même décision, a exprimé son inquiétude devant la montée en flèche des honoraires d'expert. Je ne pense pas que ce paragraphe ait force obligatoire pour moi, mais la limitation qui y est proposée des honoraires des experts au montant des honoraires de l'avocat principal pourrait se révéler un principe utile.

 

[79]           Je ne crois pas que la taxation Novopharm soit utile ici, parce que son auteur avait reçu des directives relatives au second avocat par suite d'une requête formée sous le régime de l'article 403 des Règles. En outre, je dois dire à regret que le raisonnement qui y est appliqué aux frais relatifs au second avocat ne me convainc pas entièrement. L'alinéa 1(iv) des directives de la Cour autorisait l'octroi d'honoraires pour le second avocat au gré de l'officier taxateur. Pourtant, ce dernier écrit au paragraphe 25 qu'il n'avait pas reçu de directive de cette nature. En outre, le paragraphe 50 est censé exposer certaines conclusions de la jurisprudence concernant les débours; or le passage cité est en fait tiré des conclusions d'une partie. 

 

[80]           Le fait que la possibilité de répartir les dépens entre des instances semblables concernant le même produit pharmaceutique, quoique rejetée, ait été évoquée dans Eli Lilly 2006 (en date du 19 juin 2006) montre que la présente affaire n'est pas la seule où l'on ait invoqué la présence d'éléments de travail communs à plusieurs instances. Le paragraphe 11 de cette décision porte qu'on ne peut recouvrer plusieurs fois les frais correspondant à un service déterminé en les réclamant au titre de chacun des dossiers en question. L'expert ne peut facturer deux fois le même travail. Selon mon interprétation, le paragraphe 15 ne signifie pas que la Cour soit automatiquement tenue d'accepter les débours comme ayant été prouvés à première vue en l'absence d'un contre-interrogatoire sur l'affidavit produit à l'appui. La Cour les a plutôt acceptés à première vue parce qu'ils semblaient « compatibles avec le dossier ». Je m'estime autorisé à suivre une approche semblable. Lorsque j'estime qu'il y a incompatibilité avec le dossier, je peux réduire ou rejeter les réclamations en conséquence.

 

[81]           Je souscris à la conclusion de la taxation Merck (en date du 22 mars 2007) concernant les articles 14 et 24, comme quoi l'officier taxateur ne peut examiner les réclamations au titre de ces articles qu'en vertu d'une directive explicite de la Cour. Je souscris aussi à l'idée que cette règle ne s'applique pas aux débours de déplacement correspondants. L'auteur de la taxation Merck  a noté que les frais réclamés au titre de l'article 2 n'étaient pas contestés et les a accordés plusieurs fois. Cette question n'était pas en litige dans le recours Merck (décidé le 9 octobre 2007), et la Cour n'est pas intervenue à ce sujet. Ce résultat ne me lie pas si j'établis que le libellé de l'article 2 limite Apotex à une seule réclamation à ce titre en l'absence de directives contraires. L'auteur de la taxation Merck a appliqué une formule – huit copies par page – arrêtée en fonction de son impression générale du litige. Ma façon d'envisager les frais de photocopie exposée dans SCFP et mes remarques ci‑dessus sur Carlile cadrent avec cette approche, même si je n'ai pas appliqué de formule. D'après mon expérience, les débours afférents à la reliure, aux onglets, etc., inclus dans cette formule, sont souvent réclamés séparément.

 

[82]           Le différend concernant le dossier d'antériorité dans la taxation Merck était centré sur le point de savoir si les frais correspondants avaient déjà été payés, et la question réglée, dans une instance distincte. L'officier taxateur a noté certaines lacunes de la preuve et a accueilli la réclamation telle quelle. Je souscris à son approche, tout en faisant observer que ce résultat n'a pas force obligatoire dans les circonstances de la présente espèce. Cependant, je n'en pense pas moins que si les instances en question ne diffèrent pas beaucoup, on peut s'attendre à ce que des dépens comparables soient taxés au titre d'articles déterminés, c'est‑à‑dire à ce que soit appliquée une façon d'évaluation comparative.

[83]           Je souscris à la démarche très pratique, exposée au paragraphe 69 de la taxation Merck, selon laquelle son auteur a fixé le montant des débours divers en fonction d'une récapitulation des travaux et facteurs pertinents dans la conduite du litige.

 

[84]           Dans Laboratoires (en date du 30 mars 2007), la Cour a examiné la question du droit aux dépens en même temps qu'une requête tendant à obtenir une somme globale. Une telle opération diffère de la taxation des dépens proprement dits, mais il ne s'ensuit pas nécessairement que les conclusions auxquelles on est ainsi arrivé sur des éléments de frais déterminés soient dénuées de pertinence. La Cour a appliqué une évaluation comparative à la réclamation relative à l'un des experts. Elle a aussi qualifié de très vague la catégorie « réunions » et d'inhabituelle l'expression des frais de déplacement et d'hôtel en chiffres ronds. Elle a en fin de compte fixé à un maximum de 100 000,00 $ la possibilité de recouvrement des débours.

 

[85]           Dans Fournier (en date du 23 avril 2007), la Cour avait à examiner la question du droit aux dépens procureur-client et, subsidiairement, la possibilité de l'octroi d'une somme globale majorée. Après avoir refusé d'accorder les dépens procureur-client, elle a envisagé ladite possibilité. Elle a conclu que la preuve, apparemment comparable à celle dont je dispose, était insuffisante pour une réclamation de débours s'élevant à 146 299,40 $ et a refusé d'accorder quoi que ce soit à ce titre au motif que ce serait là une adjudication arbitraire, attendu qu'il n'était pas évident que les débours étaient raisonnables et que leur justification n'avait pas été établie. Ce résultat, annulé par la décision du recours Fournier, est concevable dans le cadre d'une taxation de dépens, mais, soit dit en toute déférence, j'hésite en général à conclure dans ce sens étant donné mes observations ci‑dessus concernant Carlile. Je note que le paragraphe 5 confirme qu'une adjudication de dépens interlocutoire ne peut être modifiée que par la voie d'un appel ou d'une requête en nouvel examen.

 

[86]           La décision du recours Merck (en date du 9 octobre 2007) est le précédent qui pourrait avoir le plus d'effet sur l'examen des questions dont je suis saisi. J'ai essayé de limiter mes remarques sur la taxation Merck à un résumé des résultats et aux caractéristiques de la pratique acceptable, considérant qu'il ne m'appartenait pas d'analyser à mon tour des questions déjà traitées dans la décision du recours Merck. J'aborderai celle‑ci sous un angle différent, car j'estime devoir examiner, entre autres choses, l'usage qui y est fait de l'évaluation comparative en tant que méthode d'application potentiellement obligatoire à la taxation des dépens.

 

[87]           La Cour, au paragraphe 4 de la décision du recours Merck, a accepté la taille du marché comme facteur à prendre en considération dans une taxation de dépens sous le régime de l'alinéa 400(3)o) des Règles (toute autre question que la Cour juge pertinente), c'est‑à‑dire qu'il fallait selon elle s'attendre à des dépens considérables dans une instance relative à un AC mettant en jeu un marché d'une valeur annuelle de 130 millions de dollars.

 

[88]           La décision du recours Merck expose le « principe d'utilisation d'un point de référence ou d'une fourchette » (c'est‑à‑dire le principe de l'évaluation comparative), que j'interprète comme signifiant grosso modo que les frais des experts pris isolément devraient être comparables si le travail exigé d'eux était pour l'essentiel le même. Le principe de l'évaluation comparative pose que la note d'expert la plus élevée n'est pas la norme en fonction de laquelle les notes des autres experts sont mesurées. L'auteur de la taxation Merck a évalué par comparaison les taux horaires des experts en se fondant sur des tableaux produits en preuve et a précisé qu'il avait examiné les factures pour décomposer le travail en ses éléments. On trouve dans son exposé des motifs peu de signes d'une analyse directe des rapports eux-mêmes.

 

[89]           La décision du recours Merck a confirmé le montant octroyé dans la taxation Merck pour M. David Weissberg sur le fondement d'une preuve guère détaillée et en vertu d'un pouvoir discrétionnaire interprété d'une manière analogue à celle que j'expose plus haut dans les observations s'inscrivant dans le prolongement de Carlile. La décision du recours Merck a annulé l'octroi d'un montant prononcé par référence à Carlile pour M. Franco A. Tassone, dont la Cour a déclaré l'affidavit irrégulier et inadmissible, faisant observer que l'alignement sur la décision d'un autre officier taxateur ne se justifiait pas dans ce cas. Je noterai seulement que la taxation Merck a rapporté incorrectement la proposition en question de Carlile.

 

[90]           L'examen du cas de M. Robert S. Langer (la Cadillac des experts dont parle Syntex) exposé aux paragraphes 35 à 38 de la décision du recours Merck illustre les doutes que m'inspire la méthode de l'évaluation comparative. Ces paragraphes parlent d'au moins trois formules d'évaluation comparative. La première, rejetée dans la taxation Merck, aurait consisté à retenir comme point de référence le taux horaire inférieur et le moins grand nombre d'heures facturables d'un autre expert. La deuxième, appliquée dans la taxation Merck mais rejetée dans la décision du recours Merck, avait pour point de référence un taux horaire établi en partie d'après d’autres instances, mais sans tenir compte des différences entre les nombres d'heures facturables des experts. La troisième, retenue dans la décision du recours Merck, consistait à comparer à un point de référence les heures réclamées par M. Langer, à adopter le taux horaire établi dans la taxation Merck et à appliquer le point de référence rejeté dans celle‑ci, de manière à réduire encore les notes de cet expert. La Cour a ainsi accordé un montant de 31 785,00 $, qui est certainement du même ordre de grandeur que les 28 236,46 $ octroyés pour M. Weissberg sur le fondement non pas d'une évaluation comparative, mais de l'appréciation subjective du litige par l'officier taxateur. Autrement dit, on a obtenu des résultats comparables en mettant en œuvre, d'une part, des moyens passablement subjectifs, et de l'autre, les moyens plus quantitatifs de l'évaluation comparative. Je pense que l'évaluation comparative peut se révéler une méthode utile, mais qu'elle ne devrait pas être nécessairement suprême ou obligatoire. Je veux dire qu'il peut y avoir des facteurs qui font varier la quantité et la nature du travail, et donc les frais correspondants. Par exemple, M. Weissberg paraît avoir établi son affidavit d'après des instructions appelant une preuve par ouï-dire et non une opinion d'expert, problème que l'évaluation comparative ne réglerait pas facilement.

 

[91]           La décision du recours Merck a confirmé la taxation Merck pour ce qui concerne le dossier d'antériorité. Elle a aussi confirmé l'application par la taxation Merck aux débours de déplacement d'une conclusion de Carlile accordant ces débours pour le second avocat en vertu du pouvoir d'appréciation de l'officier taxateur. La décision du recours Merck a en outre confirmé la taxation Merck sous le rapport des débours divers.

 

[92]           J'ai énuméré au paragraphe 60 ci‑dessus trois thèmes ou facteurs qui éclairent mon analyse de la jurisprudence. Pour ce qui concerne le premier de ces facteurs (le caractère suffisant de la preuve ou le seuil de preuve), on aura compris à la lecture des observations que j'ai formulées dans le prolongement de Browne et de Carlile que, à mon sens, la nature non détaillée de l'affidavit de Brodkin sur le dossier T‑1133‑02 ne signifie pas nécessairement que les frais réclamés par Apotex devraient être considérablement réduits, mais pourrait justifier des réductions générales si j'estime que les montants en question sont incompatibles avec le dossier.

 

[93]           Touchant le deuxième facteur, soit ma compétence pour limiter l'indemnisation d'Apotex aux frais de cinq experts, je conclus que je n'ai pas cette compétence. Je dois présumer que le juge ayant présidé l'instance a agi conformément à la loi. Je ne puis conjecturer sur le point de savoir si ce juge pensait à la limite que prévoit la Loi sur la preuve au Canada lorsqu'il a permis la production de plus de cinq experts dans le litige et adjugé les dépens à Apotex dans ce contexte. Il est indéniable que les dépens ont été ainsi adjugés. Comme il n'a pas été émis sur ce point de directives en vertu de l'article 403 des Règles, je conclus que le seul recours d'Abbott aurait été d'interjeter un appel en bonne et due forme sous le régime de l'alinéa 27(1)a) de la Loi sur les Cours fédérales. La réparation prononcée dans la décision du recours Altana est fondée sur un précédent problématique. Ma conclusion selon laquelle je ne peux accorder la même réparation ne m'oblige cependant pas à accepter sans restrictions les réclamations telles quelles pour tous les experts, puisqu'elles restent soumises à la règle de la nécessité raisonnable. C'est‑à‑dire que je pourrais encore rejeter intégralement une réclamation non parce qu'elle représente un dépassement de la limite de cinq experts prévue par la loi, mais parce que, par exemple, elle est fondée sur des dépenses superflues.

 

[94]           En ce qui a trait au troisième facteur, je conclus qu'il me reste permis de taxer des dépens, notamment pour ce qui concerne les experts, conformément à la pratique que je décris au paragraphe 29 de Biovail :

J'ai taxé les comptes des trois experts de la défenderesse conformément à mon analyse dans les décisions Merck, précitée, confirmée par [2002] A.C.F. no 1357 (C.F. 1re inst.) et Bayer, précitée. J'y avais pris en compte une partie de la jurisprudence avancée en l'espèce : je ne pousserai pas plus à fond l'analyse, vu le renvoi en l'espèce à la décision Halford, précitée, dans laquelle j'ai analysé des comptes des experts de façon assez détaillée. En plus du travail qu'ils effectuent pour la production de leurs propres rapports et leur témoignage de vive voix, les experts peuvent offrir une assistance technique pour les aspects de la préparation du dossier qui excèdent les capacités de l'avocat qui assure la surveillance. Toutefois, ce travail, qui sera éventuellement recouvrable sur la base d'une indemnité complète au motif qu'il était raisonnablement nécessaire, ne devrait pas toucher aux aspects incombant uniquement à l'avocat assurant la surveillance. Bref, les limites du tarif pourraient être contournées puisque les dépens taxables de l'avocat sont limités à l'indemnité partielle […]

 

 

Pour établir l'indemnisation qui convient au titre des experts dans l'instance considérée, j'ai tenu compte du fait que cette dernière est une demande en interdiction, procédure dont le seuil de preuve est différent de celui de l'action en contrefaçon de brevet.

 

[95]           Les termes clés de l'article 2 du tableau du tarif B sont « Préparation [...] de [tous] les [...] dossiers et documents des intimés ». L'adjectif « tous » ou « toutes » paraît englober les affidavits d'expert. Je ne peux accueillir qu'une seule réclamation au titre de l'article 2. À ce propos, je note que selon l'expérience que j'ai acquise de la jurisprudence au fil du temps, l'indemnisation partielle prévue par les tarifs des cours supérieures peut varier entre un tiers et deux tiers. Les factures établies pour le client se trouvaient au dossier, mais les montants des honoraires en avaient été retranchés. Il ne fait pour moi aucun doute que le montant de 660,00 $ que j'accorde au titre de l'article 2 est nettement inférieur à cet ordre de grandeur.

 

[96]           Pour ce qui concerne l'article 4, mes observations ci‑dessus sur Consorzio réfutent la thèse d'Apotex selon laquelle un jugement sur les questions de fond du litige fait valoir dans les faits une compétence résiduelle pour autoriser la taxation des dépens d'une procédure interlocutoire ayant donné lieu à une ordonnance muette sur les dépens. Cependant, selon mon expérience, il peut arriver que le mémoire de dépens comporte des erreurs dans la désignation des éléments de frais et les dates. La Cour a rendu le 28 mai 2003, en réponse à une requête d'Abbott en dépôt d'affidavits supplémentaires, une ordonnance par consentement adjugeant les dépens suivant l'issue de la cause. L'ordonnance ne prévoyait pas le paiement de ces dépens sans délai, et aucun élément de preuve ne donne à penser qu'ils aient été payés ou aient fait l'objet d'une transaction entre les parties. J'accorde un montant de 360,00 $ au titre de l'article 4 pour cette requête.

 

[97]           L'ordonnance en date du 7 octobre 2003 portait la disposition suivante : « Si les parties ne peuvent s'entendre sur la question des dépens, ceux‑ci peuvent être examinés séparément. » Je rejette la position d'Apotex selon laquelle ces dépens peuvent être examinés devant un officier taxateur. Toute décision consécutive à ladite disposition de l'ordonnance n'aurait pu mettre en jeu que le pouvoir discrétionnaire que la Cour tient du paragraphe 400(1) des Règles, qu'elle aurait peut-être exercé dans le sens de l'octroi des dépens, peut-être de leur refus. Ce qui ne fait aucun doute, c'est que je ne puis exercer la compétence conférée à « la Cour » par le paragraphe 400(1), puisque je ne suis pas « la Cour » au sens de ce paragraphe; voir à ce sujet la première phrase du paragraphe 6 de Marshall. Je rejette la réclamation de 600,00 $ au titre de l'article 5. Il s'ensuit que je dois aussi rejeter la réclamation correspondante au titre de l'article 6 pour la comparution.

 

[98]           Dans mon examen des réclamations au titre des articles 8 et 9, il m'a fallu considérer la nécessité raisonnable de la quantité de la preuve d'expert, étant donné qu'Abbott a mis cette question en litige. Ce facteur était pertinent aussi pour l'évaluation ci‑dessous des notes proprement dites des experts. J'ai lu l'avis d'allégation en date du 31 mai 2002, puis examiné la preuve produite par les deux camps dans le cadre de la demande de contrôle judiciaire. J'ai examiné en outre les instructions de l'avocat superviseur aux experts d'Abbott touchant les paramètres du travail à effectuer et les différences y afférentes. Par exemple, M. Jerry Atwood, l'un des experts d'Abbott, a d'abord reçu pour instructions de répondre aux arguments factuels et scientifiques de l'avis d'allégation sous un certain nombre de rapports, et plus tard de répondre aux erreurs d'interprétation de ses déclarations supposées avoir été commises par M. McClelland.

 

[99]           En outre, j'ai lu attentivement les transcriptions des contre-interrogatoires des souscripteurs d'affidavit des deux camps pour me faire une idée des difficultés, le cas échéant, que présentait pour Apotex la réponse à la preuve d'Abbot et pour évaluer les efforts exigés de l'avocat superviseur et des experts eux-mêmes. Le dialogue entre M. Atwood et l'avocat de la partie adverse concernant la capacité inventive, qu'on trouve aux pages 53 à 60 de la transcription du contre-interrogatoire sur son affidavit mené le 22 janvier 2004, me donne à penser qu'il n'était pas toujours facile pour les avocats d'élaborer la stratégie à mettre en œuvre dans le litige ni pour les experts de produire une preuve convaincante capable de résister aux attaques d'homologues compétents de la partie adverse. La discussion sur les points de fusion qu'on peut lire aux pages 109 à 128 de la transcription du contre-interrogatoire (en date du 8 janvier 2004) de M. Stephen Byrn, expert d'Abbott, sur son affidavit constitue un autre exemple de la difficulté du travail en cause.

[100]       Ni les instructions données à MM. McClelland, Cima, Brown et Hendrickson, témoins d'Apotex, ni leurs tâches n'étaient identiques, mais elles se ressemblaient plus entre elles qu'elles ne ressemblaient aux instructions et tâches de MM. Rey et Taylor concernant la cristallographie. Les instructions de M. Taylor venaient de M. Rey. J'ai noté les différences entre les experts d'Apotex sous le rapport des qualités professionnelles et de l'expérience, ainsi que les observations formulées dans la décision T‑1133‑02 sur la preuve par ouï‑dire.

 

[101]       J'accueille au montant demandé les diverses réclamations faites au titre de l'article 8, conformément à mes observations ci‑dessus sur la jurisprudence. Je fais droit aussi, au montant demandé, aux diverses réclamations relevant de l'article 9 pour le premier avocat. Je pense que le recours à un second avocat était prudent et raisonnable, mais le régime du tarif, qui prévoit la nécessité d'une directive de la Cour pour pouvoir réclamer des dépens relatifs à un second avocat au titre de l'article 14, par exemple, m'amène à penser que, comme l'article 9 ne dispose explicitement rien de tel, il est conçu pour permettre l'octroi d'une somme globale indépendamment du nombre d'avocats qui remplissent les tâches en question. Il n'est donc pas nécessaire de trancher la question du recours à un agent de brevets.

[102]       J'applique systématiquement le principe que la présence à la Cour de l'avocat au sens de l'alinéa 14a) comprend nécessairement un certain temps passé dans la salle de tribunal avant l'heure prévue pour l'ouverture ou la reprise de l'audience afin de se présenter au greffe, d'attendre l'appel de la cause et de remplir les autres formalités nécessaires pour assurer le greffe que tout est prêt pour l'audience, tous éléments que j'estime exclus du temps de préparation prévu par les autres articles relatifs aux honoraires d'avocat. Par conséquent, le compte rendu sommaire d'audience contenu dans le dossier est un instrument utile, mais sans valeur absolue, pour évaluer le temps de présence à une audience qui peut avoir été entrecoupée de suspensions et de pauses-repas plus ou moins longues. Le dossier révèle que les quatre journées de séance ont duré respectivement 6 h 40, 7 h 20, 7 h 50 et 6 h 48, ce qui montre que l'hypothèse d'Abbott d'une journée de séance de huit heures ne correspond pas tout à fait à la réalité. Cependant, je pense qu'elle peut permettre d'établir une indemnisation adéquate pour l'ensemble de l'audience et je l'applique en conséquence, de manière à réduire à 9 600,00 $ la réclamation de 12 000,00 $ pour le premier avocat. Tout comme je le disais ci‑dessus à propos de l'article 9, le recours à un second avocat me paraît prudent, mais je dois rejeter la réclamation de 6 000,00 $ présentée à ce titre.

 

[103]       Un répertoire n'est pas un plaidoyer écrit au sens de l'article 15 du tableau. Selon une interprétation large, on pourrait considérer l'établissement d'un répertoire comme faisant partie de la préparation de l'instance au titre de l'article 2 ou de la préparation de l'audience au titre de l'article 13. Cependant, je rejette ce point de vue parce que, à mon sens, ces deux articles visent la mise en œuvre par les avocats de leur formation professionnelle, de leur expérience et de leurs compétences dans le but d'élaborer une stratégie propre à assurer la victoire de leur client. Le répertoire, instrument technique, peut être établi par des employés subalternes sur les instructions de l'avocat superviseur. J'accorde 2 unités (à raison de 120,00 $ par unité), au milieu de la fourchette de l'article 27, pour chacun des répertoires, étant donné que leur établissement n'était pas selon moi la plus difficile des tâches.

 

[104]       Bien que soit juste la position d'Apotex distinguant l'établissement du dossier de la taxation et la comparution pour la plaider, j'ai réuni ces deux services sous le seul article 26. Je rejette la réclamation au titre de l'article 27, mais accueille en partie la demande d'Apotex de majoration au titre de l'article 26 en lui accordant 5 unités à cet égard.

 

[105]       Les factures de M. Hendrickson, qui a été contre-interrogé sur son affidavit le 16 décembre 2003, sont typiques des experts selon mon expérience, c'est‑à‑dire qu'elles sont détaillées sous certains rapports – il y indique par exemple six heures le 24 août 2002 pour le calcul des nombres d'isomères –, mais vagues à d'autres égards – il note par exemple qu'il a consacré trois heures le 28 avril 2003 à l'évaluation et à la consultation en vue de la réponse. Il y a eu un week-end entre le 25 avril 2003, jour où il a facturé trois heures pour l'analyse de l'affidavit d'Abbott, et le travail du 28. Je pense que ces deux séances de travail étaient liées. La preuve prima facie ne m'a été d'aucune utilité pour comprendre pourquoi le taux horaire de 250,00 $US appliqué du 8 août 2002 au 29 avril 2003 avait augmenté de 60 % pour passer à 400,00 $US en décembre 2003, ce dernier taux ayant été appliqué à 25 heures (dont 14 de déplacement). Son billet d'avion de 1 037,24 $US entre Boston et Toronto n'était pas à tarif réduit. C'était peut-être un billet de classe affaires, mais ce ne sont pas toutes les lignes court-courriers qui offrent la classe affaires. L'avocat d'Apotex a voyagé entre Toronto et Chicago en classe affaires, mais, selon la preuve, on n'a réclamé à ce titre que les prix estimés de la classe économique. De ce que les distances entre Toronto et Boston et entre Toronto et Chicago sont comparables, il ne s'ensuit pas nécessairement que les prix des billets d'avion le soient aussi, étant donné qu'ils peuvent être déterminés par des facteurs de marché différents. Le plein tarif de classe économique réclamé pour Toronto-Chicago fait cependant tout juste un peu plus de 1 000,00 $CAN. M. Hendrickson semble avoir facturé 63 heures de travail. Je réduis sa note de 25 heures x 150,00 $US par heure x 1,37 (le taux de change de la facture du 17 décembre 2003), pour accorder à son égard un montant de 25 497,28 $, que je ne considère pas comme un point de référence.

 

[106]       M. McClelland a été contre-interrogé sur son affidavit le 18 décembre 2003. La preuve prima facie n'explique pas pourquoi son taux horaire a varié sur l'ensemble de l'année 2003 entre 300,00 $CAN, 350,00 $CAN et 400,00 $CAN. Pourquoi par exemple a‑t‑il demandé 400,00 $CAN l'heure pour la rédaction d'un rapport le 15 mai et seulement 300,00 $CAN l'heure (son taux horaire de déplacement du 13 juin) pour la même tâche le 25 mai? Certains éléments de sa note touchant une requête non spécifiée en production de contre-preuve sont antérieurs à la requête qui a donné lieu à l'ordonnance du 7 octobre sur la contre-preuve, à l'égard de laquelle j'ai refusé les dépens. Ces éléments sont à peu près contemporains de l'ordonnance du 28 mai 2003 relative à la requête d'Abbott en production de preuve supplémentaire, pour laquelle j'ai accordé les dépens. Cette dernière ordonnance portait aussi sur la contre-preuve. Une telle imprécision rend difficile d'établir si les sommes demandées se rapportent ou non à des requêtes interlocutoires, pour lesquelles il n'a pas été adjugé de dépens. Ce fait, ainsi que l'usage inexpliqué de trois taux horaires pendant la même année, m'amènent à réduire la note de M. McClelland à 27 000,00 $. Il est tenu compte dans cette réduction de la radiation de certains passages de son affidavit.

 

[107]       M. Cima a été contre-interrogé sur son affidavit le 29 octobre 2004. Son taux horaire est passé de 300,00 $US le 10 janvier 2003 à 350,00 $US le 28 octobre 2004, puis à 400,00 $US le 2 décembre 2005. Il a facturé des services rendus après son contre-interrogatoire. Ses factures comportent des annotations qui semblent être des taux de change. Le total de ses honoraires s'élève à 19 799,97 $CAN. La différence entre ce montant et les 21 650,00 $ réclamés, soit la somme de 1 850,03 $, pourrait être à mettre au compte des frais de laboratoires, qui sont partout déclarés comme inscrits séparément. Les factures de M. Cima définissent son travail comme [TRADUCTION] « services de consultation ». La nature et la pertinence de son travail ressortent assez clairement du dossier, sauf pour ce qui concerne les tâches remplies après son contre-interrogatoire. Je n'accorde pas les frais relatifs à ces dernières tâches (1 823,38 $) et je soustrais du compte de M. Cima une somme de 500,00 $ au titre du travail en laboratoire, pour approuver ce compte au montant de 19 326,62 $.

 

[108]       M. Brown a été contre-interrogé sur son affidavit le 19 novembre 2004. Il a facturé 179,59 heures, soit un peu plus de 22 journées (à raison de huit heures par journée), au taux horaire de 400,00 $, du 17 janvier 2003 au 20 novembre 2004. Je ne pense pas que le dossier justifie tant d'heures de travail, étant donné la quantité de travail accompli par les autres experts. Je réduis le compte de M. Brown, y compris au titre de la radiation de certains passages de son affidavit (comme je l'ai fait plus haut), pour l'approuver au montant de 56 500,00 $.

 

[109]       M. Taylor a été contre-interrogé sur son affidavit le 27 janvier 2004. Il a facturé 122 heures, au taux horaire de 450,00 $, de janvier 2003 à janvier 2004. Dans le contexte global des moyens qu'Apotex devait contrer, la preuve qu'il avait à établir exigeait plus de temps. Certains éléments de sa note sont vagues, par exemple l'examen des affidavits. Je réduis quelque peu son compte pour l'approuver au montant de 65 000,00 $.

 

[110]       Je réduis la réclamation au titre des déplacements, qui est raisonnable, pour l'accueillir au montant de 9 836,82 $, afin de tenir compte des dépens afférents à l'ordonnance du 7 octobre 2003, que j'ai refusé d'accorder ci‑dessus. J'accueille telles quelles les réclamations au titre des frais de téléphone, de télécopie, de transcription, d'établissement du dossier d'antériorité et d'assurance (LPIC). On a tendance, pour ce qui concerne les frais de photocopie, à y inclure les exemplaires du client et parfois la photocopie liée aux procédures interlocutoires pour lesquelles il n'est pas adjugé de dépens. Il pourrait y avoir des photocopies superflues. Le dossier était en l'occurrence volumineux. Je n'accorde que 21 000,00 $ au titre de la photocopie. Le travail des coursiers est facturé différemment, mais peut susciter des préoccupations analogues. Je n'accorde que 1 700,00 $ à ce titre. Il est difficile d'évaluer le bien-fondé des frais de 175,76 $ réclamés pour le stationnement, les taxis et le kilométrage, aussi bien à cause du manque de précision que parce qu'ils peuvent avoir été engagés à plusieurs moments. Je n'accorde à ce titre que 45,00 $. La rémunération d'agents (453,80 $) pourrait être à peu près n'importe quoi, mais dans les affaires de propriété intellectuelle, ces frais se rapportent parfois à la recherche de copies conformes de documents officiels, d'antériorités et d'autres éléments de preuve. J'accorde 400,00 $ à ce titre. La preuve d'Apotex, c'est‑à‑dire les factures expurgées, distingue les historiques de dossier de la recherche de dossiers, mais n'explique pas en quoi ces historiques sont nécessaires. Les réclamations au titre de l'historique des poursuites relatives aux brevets sont acceptées aux fins de la taxation. Si je constatais que les historiques de dossier susdits sont de cette nature, je me poserais la question de leur utilité et de leur caractère raisonnable. Cependant, je dois à regret conclure que la présentation de cet élément de frais est trop obscure et je rejette en conséquence la réclamation y afférente de 1 730,00 $.

 

[111]       Ma décision Englander c. Telus Communications Inc., [2004] A.C.F. no 440 (O.T.), confirme que j'accorde couramment des dépens pour la recherche en ligne. Cependant, on ne peut examiner ces frais sans se demander si, dans sa totalité ou au moins en partie, la recherche était raisonnablement nécessaire ou dénuée de pertinence, ou visait simplement à rassembler des éléments de jurisprudence accessoires ou de précaution, compte tenu des obligations professionnelles de l'avocat, qui sont, envers son client, de le représenter avec diligence, et envers la Cour, de l'aider dans toute la mesure du possible à prendre en considération tous les aspects du droit susceptibles de déterminer la décision finale sur les questions de fond du litige. Les notes expurgées du cabinet d'avocats ne se sont révélées d'aucune utilité à cette fin ni pour les autres éléments examinés ci‑dessus. Il est probable qu'une partie des frais réclamés pour la recherche en ligne concerne les requêtes. Je réduis les montants réclamés au titre de ce service pour accorder 2 350,00 $ (temps d'ordinateur) et 2 370,00 $ (consultation de Quicklaw).

 

[112]       Il apparaît que le mémoire de dépens majore de la TPS des frais d'expert et de déplacement engagés à l'étranger. Comme le dossier ne dissipe pas mes doutes là‑dessus, j'ai effectué un calcul d'exclusion de la TPS. Le total des débours taxés est de 252 140,01 $. Je soustrais de ce montant la somme de 50 317,52 $ (soit les frais d'expert et de déplacement taxés en dollars américains, non assujettis à la TPS, et convertis en monnaie canadienne suivant les divers taux de change spécifiés au dossier), ce qui laisse une somme de 201 822,49 $ soumise à la TPS. (Ce calcul d'exclusion de la TPS est porté sur le mémoire de dépens taxé et comporte la soustraction de 150,00 $CAN comme facteur global de transport terrestre au Canada). Le taux de TPS retenu (6 %), appliqué au montant de 201 822,49 $, donne 12 109,35 $. Ce problème est compliqué par le fait qu'on a apparemment calculé la TPS sur certains éléments de frais qui comprenaient déjà cette taxe; c'est par exemple le cas des frais d'hôtel de M. Hendrickson à Toronto. Il peut y avoir d'autres dépenses diverses auxquelles la TPS n'est pas applicable. Afin d'être certain de ne pas pénaliser Abbott par mégarde, je réduis encore le montant à accorder au titre de la TPS pour le fixer à 12 037,35 $. Le mémoire de dépens d'Apotex pour le dossier T‑1133‑02, présenté au montant de 369 655,99 $, est taxé à 295 413,36 $.

 

II. Le dossier A‑510‑05

A. Taxation

[113]       Abbott a concédé les réclamations relatives aux honoraires d'avocat, sauf au titre des articles 26 et 27, invoqués de la même manière que ci‑dessus à propos du dossier T‑1133‑02. Pour les motifs exposés plus haut, j'accorde telle quelle la réclamation au titre de l'article 26 à 4 unités, et je rejette la réclamation au titre de l'article 27.

 

[114]       Abbott concède certains débours et ne met en litige que ceux relatifs à la photocopie, aux réunions, à la consultation de Quicklaw et à la recherche de dossiers, réclamés aux montants respectifs de 9 165,98 $, 155,14 $, 1 261,78 $ et 132,00 $. Elle soutient que les réclamations au titre des réunions et de la recherche de dossiers devraient être rejetées, au motif qu'il s'agit de frais indirects et que l'engagement de ces débours n'est pas prouvé. Elle affirme que les réclamations pour la photocopie et la consultation de Quicklaw sont excessives et non étayées de preuves, et devraient être réduites respectivement à 2 291,50 $ et 315,45 $. Apotex met de l'avant une preuve prima facie et des observations semblables à celles qui lui ont servi ci‑dessus au sujet du dossier T‑1133‑02. Elle fait valoir que les frais réclamés au titre des réunions concernent vraisemblablement les aliments et boissons servis pendant les conférences avec le client, les parties adverses et d'autres personnes concernées par le litige.

 

[115]       Je note qu'Abbott, en tant qu'appelante, était en principe chargée de la production du dossier d'appel, mais qu'Apotex a sans doute dû établir des copies de ses écritures et pièces et de sa jurisprudence aux fins de la signification et du dépôt. Les frais d'établissement des copies destinées au client ne sont pas taxables. J'accorde 5 500,00 $ au titre de la photocopie, et 1 100,00 $ pour la consultation de Quicklaw. Je rejette les réclamations au titre des réunions et de la recherche de dossiers. La taxation au titre de la TPS est réduite en conséquence. Le mémoire de dépens d'Apotex, présenté au montant de 15 508,69 $, est taxé à 10 906,89 $.

 

III. Le dossier T‑1847‑03

[116]       Les réclamations relatives aux honoraires d'avocat concédées par Abbott sont accueillies telles quelles. Malgré les savantes observations de l'avocat d'Apotex, je ne fais droit qu'à une seule réclamation au titre de l'article 2, comme ci‑dessus. Ainsi qu'elle l'avait fait à propos des dossiers examinés plus haut, l'avocate d'Abbott a proposé de savantes observations tendant à limiter Apotex à cinq experts, mais pour les motifs exposés plus haut, j'accueille telles quelles les réclamations touchant les honoraires d'avocat que cette dernière a présentées au titre des articles 8 et 9. Abbott a contesté l'une des réclamations au titre de l'article 8 au motif que le témoin avait été préparé par un agent des brevets et non un avocat. Je pense que ce facteur aurait pu militer en faveur de la réduction de la réclamation, n'eût été la transaction établissant le recouvrement au milieu de la fourchette de la colonne IV. Je pense tout simplement que l'avocat superviseur avait néanmoins un rôle à jouer, de sorte que je fais droit à cette réclamation particulière au titre de l'article 8. Comme ci‑dessus, je rejette la réclamation au titre de l'article 27 pour l'établissement du mémoire de dépens et limite l'article 26 aux 5 unités présentées. J'accueille les réclamations de 177,97 $ et de 305,00 $ présentées respectivement pour les frais de télécopie et d'huissier, qui sont les deux seuls postes de débours concédés par Abbott. Ma conclusion sur les observations respectives des parties concernant la preuve prima facie produite par Apotex est conforme à la conclusion correspondante formulée ci‑dessus à propos du dossier T‑1133‑02. 

 

A. La position d'Apotex sur les débours relatifs au dossier T‑1847‑03

[117]       Apotex soutient que la préparation de sa cause s'est trouvée compliquée par le fait qu'elle a d'abord dû examiner sept brevets. En fin de compte, le juge de l'audience n'a eu à en examiner que trois. Abbott voulait absolument une audience, malgré la jurisprudence récente établissant que les antériorités invoquées par Apotex étaient destructrices de la nouveauté. Là encore, la valeur du marché en jeu était considérable. Le fait qu'Apotex et Abbott aient déposé respectivement 11 et 9 rapports d'expert, le consentement d'Abbott à la taxation des dépens au milieu de la fourchette de la colonne IV et la longueur (43 pages) de la décision de la Cour témoignent de la complexité de cette instance. Le fait qu'Abbott ait attendu le moment du dépôt de son mémoire des faits et du droit pour exclure quatre brevets du litige a entraîné des frais inutiles pour Apotex.

 

[118]       Apotex réclame 395 584,68 $ au titre de neuf experts, ainsi que 47 215,53 $ au titre de services de laboratoire relatifs à diverses expériences techniques et scientifiques exécutées à l'égard des sept brevets. La moyenne des frais d'Abbott par expert s'élève à quelque 42 500,00 $. Le chiffre correspondant pour Apotex, y compris les services de laboratoire, est d'environ 49 200,00 $. La différence ne donne certainement pas à penser qu'on ait eu recours à des experts de luxe (du type « Cadillac »). Apotex n'avait pas comme Abbott l'avantage d'une expérience antérieure de la clarithromycine. Toute expérience antérieure des experts d'Apotex ne pouvait concerner qu'un des sept brevets en litige.

 

[119]       Apotex soutient que les frais réclamés pour MM. Mathew Buck (7 000,00 $) et Carlos Zetina Rocha (8 465,33 $) sont taxables parce que ces experts n'étaient plus ses employés au moment pertinent. Abbot aurait pu soulever la question du caractère excessif des frais d'expert réclamés au moment de la transaction sur le niveau des dépens, mais elle ne l'a pas fait, pas plus qu'elle n'a demandé de directives restrictives. Il convient, ajoute Apotex, de rejeter l'argument d'Abbott induisant du nombre des heures facturées par M. Stang le caractère excessif du nombre des heures facturées par les autres experts d'Apotex, parce que le mandat de ces derniers, qui visait sept brevets, était beaucoup plus large que celui du premier. La note de M. Taylor pour le présent dossier (128 100,00 $) est plus élevée que pour le dossier T‑1133‑02 parce qu'un plus grand nombre de brevets étaient en litige, dont certains n'ont été exclus du débat qu'à un stade avancé de la procédure. En outre, M. Taylor a dû effectuer un bon nombre d'expériences. La décision de la Cour aurait pu être plus longue encore, et la preuve de M. Taylor y tenir plus de place, si l'ensemble des sept brevets avait été examiné. Le travail de cet expert a probablement amené Abbott à retirer certaines questions du litige. Que la Cour n'ait pas longuement cité dans son exposé des motifs la preuve d'expert d'Apotex n'enlève rien au fait que celle‑ci forme la base scientifique de sa décision.

 

[120]       Apotex fait remarquer qu'Abbott a concédé le taux de 0,25 $ par page appliqué à la réclamation de frais de photocopie (79 926,89 $). En proposant de réduire cette réclamation à 10 000,00 $, Abbott ne tient pas compte de la réalité du nombre des brevets en litige et de la quantité de documentation nécessaire pour leur examen. Abbott a tort de se plaindre du caractère excessif de la réclamation de frais de déplacement (31 729,33 $), étant donné que, par exemple, Londres et Chicago sont des villes chères. Apotex soutient comme ci‑dessus, invoquant la taxation Merck, la décision du recours Merck et Carlile, que les débours divers ont contribué au résultat du litige. Ici encore, le cabinet Hughes agissait comme co‑avocat, mais il n'y a pas eu travail en double, par exemple la recherche informatisée de Hugues ne faisait pas double emploi avec celle de l'avocat inscrit au dossier. Apotex soutient qu'Abbott invoque à tort AB Hassle, étant donné que cette affaire concernait le droit à une majoration des dépens, question qui n'est pas en litige dans la présente taxation. Apotex fait valoir enfin que des frais importants et nécessaires s'inscrivaient dans le cadre d'un ensemble plus large de litiges multiples portant sur de nombreux brevets qui bloquaient selon elle l'accès au marché.

 

B. La position d'Abbott sur les débours relatifs au dossier T‑1847‑03

[121]       Abbott soutient de manière générale qu'Apotex a eu recours à un bon nombre des mêmes experts dans les diverses instances considérées et y a fait valoir les mêmes antériorités. Le dossier montre qu'Apotex, en tant que génériqueur prospère, dispose d'un potentiel interne d'analyse et d'essais qui aurait dû réduire ses frais. Abbott conteste en particulier le recours à M. Taylor, au motif qu'il n'est pas versé dans l'art, étant cristallographe et non chimiste ou ingénieur chimiste. Son travail était dans une large mesure dénué de pertinence, et on lui a fait jouer abusivement un rôle de consultant. La réclamation totale au titre des experts égale presque la totalité du mémoire de dépens partie-partie du dossier T‑1133‑02. La lecture de la décision T‑1847‑03 montre que ce litige mettait en jeu un bon nombre des mêmes questions que le dossier T‑1133‑02, d'où il s'ensuit que l'expérience acquise par Apotex dans ce dernier dossier aurait dû permettre des économies. Selon Biovail, l'expérience antérieure ou la production de certains éléments de preuve communs devraient donner lieu à des réductions. Les frais de laboratoire sont demandés en double dans le cas des experts pour lesquels on a déjà réclamé des dépens (soit MM. Taylor et Cima). 

 

[122]       Abbott note que M. Stang, expert d'Apotex, n'a demandé que 34 189,43 $, et compare ces frais à ceux, qu'elle déclare excessifs, inutiles et réclamés en double, de MM. McClelland (76 777,05 $), Brown (64 088,01 $) et Taylor (128 100,00 $), qui ne cadrent pas avec le travail qu'exigent ordinairement les instances de la nature considérée. La décision du recours Merck a réduit la note de M. Langer, qui faisait un peu plus de 200 000,00 $, à un peu plus de 30 000,00 $. Les factures de M. Taylor ne font au total qu'environ 112 000,00 $ et indiquent qu'il a fourni des services de consultant après son contre-interrogatoire. Les factures de M. Hendrickson révèlent qu'il a joué, quoique de manière limitée, un rôle de consultant. Pour les comptes d'expert dont elle ne demandait pas le rejet intégral conformément à la règle des cinq experts, Abbott a proposé les réductions suivantes : pour M. Stang, de 34 189,42 $ à 15 000,00 $; pour M. Cima, de 35 721,04 $ à 15 000 $; pour M. McClelland, de 76 777,05 $ à 20 000,00 $; pour M. Brown, de 64 088,01 $ à 20 000,00 $; et pour M. Taylor, de 128 100,00 $ à 20 000,00 $.

 

[123]       Abbott soutient que la réclamation au titre de McRoberts Legal Services (249,25 $) devrait être rejetée, Apotex ne s'étant pas acquittée de la charge d'en prouver l'objet, l'utilité et le caractère raisonnable. Abbott a avancé des arguments semblables à propos de la prime de 50 $ versée à la LPIC (prime d'assurance obligatoire pour les litiges civils introduits en Ontario), la traduction (4 314,00 $), les réunions (1 611,30 $) et la recherche de dossiers (60,25 $). Les frais de téléphone (1 303,38 $) pourraient être accordés intégralement si Apotex avait produit des preuves de leur paiement et de leur utilité pour l'affaire considérée. Abbott a proposé pour les frais de photocopie un multiplicateur de huit : une copie pour chacun des avocats des trois parties, trois pour la Cour, une pour le client et une de réserve. L'application de ce facteur donnerait un résultat de l'ordre de 10 000,00 $ à 15 000,00 $ et non les 79 926,89 $ réclamés. La preuve est insuffisante pour les frais de coursiers (3 392,26 $) et n'exclut pas les suppléments pour service accéléré; un montant de 1 000,00 $ serait raisonnable à ce titre. Comme ci‑dessus, les réclamations relatives aux recherches informatisées (1 146,10 $) et à la consultation de Quicklaw (2 091,16 $) sont excessives, font double emploi et ne sont pas étayées de preuves; elles devraient être réduites à un total de 1 000,00 $.

 

[124]       Abbott propose de réduire à 1 000,00 $ les frais afférents au dossier d'antériorité (3 229,16 $), étant donné l'expérience acquise par Apotex touchant les antériorités et les brevets considérés. La réclamation au titre des frais de sténographie judiciaire et de transcription (18 457,50 $) devrait être réduite à 4 000,00 $, le caractère raisonnable de ces frais n'ayant pas été prouvé. De même, l'utilité et la nécessité raisonnable des frais de déplacement (31 729,33 $) n'ont pas été prouvées; il conviendrait de n'accorder que 2 000,00 $ à ce titre. Quant à la réclamation inexpliquée de frais de stationnement, de taxis et de kilométrage, elle devrait être rejetée au motif que de telles charges relèvent des frais indirects.

C. Taxation

[125]       Comme je l'ai fait ci‑dessus pour le dossier T‑1133‑02, j'ai d'abord examiné, aux fins de la taxation des frais d'expert, les dossiers d'instance des deux camps pour évaluer la difficulté et le travail que représentait pour Apotex sa tentative de s'ouvrir l'accès au marché au moyen du litige considéré. J'ai envisagé l'évaluation comparative, mais en tenant compte de toutes différences de mandats de nature à gêner ou interdire l'application de cette méthode. Il m'a fallu pour cela – cette remarque vaut pour l'ensemble des présentes taxations – lire des documents protégés par des ordonnances de confidentialité. La version confidentielle de la décision de la Cour décrit le rôle de chaque expert sans laisser entendre qu'il y ait eu travail en double. Les transcriptions des contre-interrogatoires des souscripteurs d'affidavit varient en longueur, en partie, je crois, du fait de la différence des mandats. Il me paraît donc normal que les notes d'expert varient aussi, par exemple entre 128 100,00$ pour M. Taylor et 7 000,00 $ pour M. Buck.

 

[126]       Les pages 19 à 38 de la transcription du contre-interrogatoire (effectué le 24 mai 2006) de M. Allan S. Myerson, expert d'Abbott, au sujet de son affidavit concernent le travail d'expert sur la clarithromycine qu'il a effectué pour Abbott dans le cadre de plusieurs instances et aussi en partie les méthodes qu'il a suivies dans l'établissement de ses divers rapports d'expert. Si je comprends bien ses déclarations, il a appliqué selon le cas deux approches générales, la première consistant à rédiger un projet, à l'examiner avec l'avocat et à mettre ensuite au point la version définitive avec ce dernier, et la seconde consistant à se faire communiquer l'avis d'allégation, à rédiger un projet, à le proposer à l'avocat, puis à établir la version définitive en fonction des résultats de téléconférences avec celui‑ci. Selon les pages 27 à 30, plusieurs projets peuvent être rédigés, mais je note aussi qu'il existe des styles de travail différents, dont l'un se caractérise par exemple par une révision minimale. La page 33 de la transcription du contre-interrogatoire de M. Taylor (effectué le 19 avril 2006) sur son affidavit donne un exemple de ce dernier style, qui consiste à rédiger un projet, à le retourner dans sa tête en détail, à y apporter des corrections typographiques mineures et à établir une version définitive très proche du premier état.

 

[127]       Les pages 1 à 50 de la transcription du contre-interrogatoire (mené le 16 mai 2006) de M. Stephen R. Byrn, expert d'Abbott, comportent des questions sur l'expérience et le style de travail. Certaines de ces questions concernent les points de savoir si l'expérience acquise réduit en principe le temps de travail nécessaire et si un nombre déterminé d'heures (de 30 à 55) ne serait pas insuffisant. M. Byrn s'est montré peu disposé à répondre. Les pages 174 et 175 contiennent des questions sur le nombre des versions établies dans la rédaction d'un rapport. Je suppose que ces questions, comme celles des autres exemples d'ailleurs, ne visaient pas à préparer une argumentation pour la taxation des dépens, mais plutôt à éprouver la solidité de la preuve de la partie adverse. Cependant, ces passages m'ont paru utiles pour comprendre les paramètres du travail des experts.

 

[128]       Ma première réaction au mandat de M. Lee Timothy Grady, qui consistait à formuler une opinion sur deux courtes lettres et un supplément cumulatif, a été de réduire considérablement sa note (19 746,82 $). Cependant, la lecture de la transcription du contre-interrogatoire qu'il a subi le 14 février 2006 sur son affidavit m'a incité à reconsidérer la question. La lecture des divers rapports d'expert et contre-interrogatoires des deux camps m'a fourni un contexte dans lequel examiner chacune des notes d'expert.

 

[129]       M. Hendrickson a facturé 41,5 heures au taux horaire de 400,00 $. Je ne trouve rien à redire à la réclamation correspondante et l'accueille telle quelle au montant de 21 497,00 $CAN. La note de M. Grady (19 746,82 $) est moins claire; elle est fondée sur des taux horaires de 325,00 $US et de 360,00 $US, sauf pour sa déposition (2,5 heures), au titre de laquelle son taux horaire est inexplicablement doublé pour s'établir à 720,00 $US. J'estime que ce dernier taux est inacceptable compte tenu des circonstances. M. Grady ne demande cependant qu'un taux horaire de 180,00 $ pour ses déplacements en avion. Les taux de change applicables sont consignés au dossier, de sorte que je puis calculer, par exemple, la valeur en dollars canadiens de la différence entre les taux horaires de 360,00 $ et de 720,00 $. Il pourrait y avoir eu d'autres variations inacceptables de son taux horaire, encore que ce soit peu probable. J'accorde 17 000,00 $ au titre de M. Grady.

 

[130]       Le taux horaire de M. Taylor était de 450,00 $CAN. Selon Abbott, son travail était pour une grande part inutile, du fait qu'il s'est laissé aller à des digressions sur des thèmes scientifiques qui l'intéressaient personnellement. Je n'irais pas jusqu'à dire cela, mais j'ai du mal à évaluer jusqu'à quel point il est resté dans l'axe de son mandat. Il a facturé au moins 30 heures pour la consultation sur les affidavits et les contre-interrogatoires d'Abbott. Je n'accorde que 80 000,00 $ au titre de la note de M. Taylor. Le taux horaire de M. McClelland était de 350,00 $CAN. Sa note rend compte avec précision des heures travaillées. Il me paraît normal qu'elle ne détaille pas l'emploi de chaque heure de la rédaction du rapport. Je l'accepte telle quelle, au montant de 76 777,05 $. De même, j'accepte telle quelle la note de M. Brown, au montant de 64 088,01 $ (établi suivant un taux horaire de 450,00 $CAN). Je me rends compte que ces notes sont élevées en comparaison des autres. Je ferai simplement observer qu'elles sont modestes à l'échelle de la part de marché en jeu pour les deux camps et que leur montant n'est pas en soi surprenant. Je reconnais aussi que le travail qu'exigent les instances relatives à un avis de conformité devrait en principe présenter certaines similarités, mais je note néanmoins que le produit pharmaceutique en cause et les brevets y afférents particularisent le travail nécessaire dans chaque instance. J'accepte la thèse d'Apotex touchant l'obligation où elle était de se préparer à la contestation des brevets qui n'ont pas en fin de compte été mis en litige à l'audience.

 

[131]       Le taux horaire de M. Cima était de 400,00 US. J'accepte sa note telle quelle, au montant de 35 721,04 $. M. Zetina‑Rocha a demandé un taux horaire de 300,00 $CAN. J'accepte aussi sa note telle quelle, à 8 465,33 $. M. Stang a appliqué un taux horaire de 500,00 $US, sauf pour son contre-interrogatoire (présence et préparation), pour lequel il a demandé 5 000,00 $US par jour. Il était l'un des experts payés pour examiner la preuve d'Abbott. Je ne suis pas convaincu qu'Abbott devrait supporter la totalité de sa note. Je réduis celle‑ci de 34 189,43 $ à 26 500,00 $. Si M. Buck a établi une facture, je n'ai pu la trouver au dossier. La preuve confirme que le cabinet Hughes a facturé le travail de M. Buck à Apotex (la facture porte la date du 5 avril 2006). Je réduis son compte de 7 000,00 $ à 3 500,00 $. J'accueille telle quelle la réclamation de 47 215,53 $ au titre des services de laboratoire.

 

[132]       J'admets que les services d'un autre cabinet d'avocats ou d'une entreprise de recherche sont parfois nécessaires, par exemple pour obtenir des éléments de preuve se trouvant dans un autre État, mais la preuve prima facie ne me paraît pas établir avec certitude l'objet des services de McRoberts Legal Services, de sorte que je rejette la réclamation correspondante (249,25 $). J'ai examiné le dossier en vue d'y trouver des documents exigeant d'être traduits. Le dossier de demande d'Apotex comprenait des extraits de rapports et autres textes en langues étrangères (allemand et japonais) dont je n'ai pas trouvé de traductions. Il y a aussi des demandes de brevet européennes et japonaises dont je ne suis pas certain qu'Apotex ait établi les passages traduits versés au dossier. Je réduis à 3 000,00 $ la réclamation de 4 315,00 $ au titre de la traduction. Pour des raisons semblables à celles que j'ai exposées plus haut, je réduis à 350,00 $ la réclamation de 1 570,44 $ au titre du stationnement, des taxis et du kilométrage.

 

[133]       J'accueille telles quelles les réclamations au titre de la LPIC (50,00 $), des communications téléphoniques (1 303,38 $), du dossier d'antériorité (3 229,16 $), ainsi que de la sténographie judiciaire et de la transcription (18 457,59 $). Je réduis les frais de photocopie de 79 926,89 $ à 68 000,00 $, et les frais de coursiers de 3 392,26 $ à 2 700,00 $. Les frais de déplacement réclamés pour le Canada, les États-Unis et l'Angleterre sont dans les règles, et j'accueille telle quelle la réclamation présentée à ce titre au montant de 31 729,33 $. Comme je l'ai fait plus haut, je réduis les réclamations au titre de la recherche informatisée (1 146,10 $) et de Quicklaw (2 091,16 $) pour n'accorder à cet égard qu'un total de 2 800,00 $. Je vois mal la justification des frais de réunion (1 611,30 $) en tant qu'élément de dépens partie-partie dans le contexte que dessine ici la preuve prima facie et je ne les accorde pas. Je rejette aussi la réclamation au titre de la recherche de dossiers (60,25 $). La TPS exige une correction approximative pour tenir compte des dépenses engagées en dollars américains et d'autres facteurs. L'opération est compliquée ici comme ailleurs par la réclamation apparente de la TPS sur certaines dépenses qui l'incluaient déjà vraisemblablement, par exemple les frais d'hôtel de M. Grady à Toronto. Les calculs d'exclusion de la TPS sont inscrits sur le mémoire de dépens taxé. Le mémoire de dépens d'Apotex pour le dossier  T‑1847‑03, présenté au montant de 695 312,50 $, est taxé à 591 983,32 $.

 

IV. Le dossier A‑59‑07

A. Taxation

[134]       Les réclamations non contestées au titre des honoraires et des débours sont accueillies telles quelles. Abbott met en discussion la réclamation au titre de l'article 17 (préparation de l'avis d'appel) au motif qu'Apotex n'avait pas de travail à accomplir à cet égard. Apotex répond que l'examen du point de savoir s'il y avait lieu de contester l'appel a exigé du travail et, subsidiairement, que l'article 27 pourrait être appliqué ici. Étant donné ce que le dossier nous apprend de la part de marché en jeu, je ne pense pas qu'Apotex ait hésité un instant sur la nature de sa réponse. Je rejette la réclamation au titre de l'article 17. Abbott avance des arguments semblables au sujet de l'article 18 (préparation du dossier d'appel). Je rejette sa position : Apotex, en tant qu'intimée, avait vraiment du travail à faire pour s'assurer que le dossier était complet et ne pouvait simplement rester passive. Comme je l'ai fait plus haut, je rejette la réclamation pour le second avocat au titre de l'alinéa 22b). J'accueille telle quelle la réclamation de 480,00 $ au titre de l'article 26 et rejette la demande d'indemnisation supplémentaire d'Apotex au titre de l'article 27. Apotex a réclamé des frais au titre de l'article 27 pour l'examen de la décision. Cette réclamation relève plutôt de l'article 25 (services rendus après le jugement et non mentionnés ailleurs) et est accueillie à ce titre. Les observations présentées au sujet des deux seuls éléments de débours en litige, soit la photocopie (20 200,25 $) et les déplacements (1 828,86 $), sont analogues à celles que j'ai résumées plus haut. Je conclus que la réclamation au titre des déplacements des premier et second avocats est raisonnable et je l'accueille telle quelle. Comme plus haut, j'accorde les frais de photocopie à un montant réduit : 16 500,00 $. Le mémoire de dépens d'Apotex, présenté au montant de 29 532,34 $, est taxé à 24 147,28 $.

 

V. Le dossier T‑840‑05

[135]       Les réclamations non contestées au titre des honoraires d'avocat et des débours sont accueillies telles quelles. Comme ci‑dessus, je n'accueille qu'une seule réclamation au titre de l'article 2. Comme ci‑dessus également, je rejette l'argument d'Abbott invoquant la limite de cinq experts pour contester les réclamations au titre des articles 8 et 9. La réclamation au titre de l'alinéa 14 b) pour le second avocat est rejetée. Comme je l'ai fait pour le dossier T‑1133‑02, j'accueille la réclamation relative à l'établissement du répertoire au titre de l'article 27 (au milieu de la fourchette de la colonne IV, conformément au jugement). Je rejette la réclamation au titre de l'article 27 pour l'établissement du mémoire de dépens et accueille telle quelle la réclamation au titre de l'article 26 présentée au montant de 600,00 $.

 

A. La position d'Apotex

[136]       Apotex souligne toute l'importance pour elle de cette instance, qui était la troisième de la triade visant à lui ouvrir l'accès au marché de la clarithromycine; la première concernait un brevet, la deuxième sept, et l'instance considérée les neuvième et dixième brevets. Cela explique qu'Apotex ait produit 15 affidavits alors qu'Abbot n'en a déposé que cinq. Apotex fait valoir que la thèse d'Abbott sur le recours Merck est erronée, thèse selon laquelle le montant des dépens adjugés dans cette affaire, de 206 411,00 $, est raisonnable dans les instances relatives à un AC. En fait, dans le recours Merck, la Cour a adjugé 384 686,01 $, après avoir réduit de 206 411,00 $ le montant accordé par la taxation Merck. Qui plus est, une part de 205 911,00 $ de cette réduction concernait la note d'un seul expert, déclarée disproportionnée aux comptes des autres experts. On ne constate ni n'invoque aucun écart de cet ordre dans l'affaire qui nous occupe.

 

[137]       Apotex affirme avoir droit au recouvrement des frais qu'elle a engagés pour répondre à l'avis de demande de contrôle judiciaire tel qu'il a été déposé, malgré le fait qu'Abbott ait abandonné plusieurs revendications de brevet à une étape avancée du litige. Le nombre des questions en litige à l'audience s'en est trouvé réduit, mais seulement après que les efforts déployés, et les frais engagés, par Apotex pour établir les affidavits d'expert et le mémoire des faits et du droit aient obligé Abbott à agir dans ce sens. La Cour a noté dans son exposé des motifs la pauvreté de la preuve d'Abbott, mais n'a pas du tout critiqué celle d'Apotex. Les frais afférents au travail de MM. Rocha et Buck sont recouvrables parce qu'ils ont facturé leur temps après leur cessation d'emploi chez Apotex. La preuve de M. Taylor a entraîné l'abandon de revendications par Abbott, et les frais y afférents sont donc recouvrables, même s'il n'est pas fait mention de cette preuve dans la décision de la Cour.

 

[138]       Apotex explique que les frais de laboratoire du M.I.T. (6 540,82 $) découlent du travail de M. Cima. La réduction arbitraire des frais de téléphone (2 651,01 $) que propose Abbott est déraisonnable, étant donné la nécessité de communications internationales. Il n'est pas nécessaire de produire des factures détaillées pour chaque élément de dépenses. Le même argument s'applique à la proposition de réduire les frais de photocopie (98 335,66 $), de coursiers (5 702,58 $) et de réunion (5 223,84 $) à 10 000 $, 1 500,00 $ et zéro respectivement. Les réclamations relatives aux divers autres débours devraient être accueillies, conformément aux paragraphes 68 et 69 de la taxation Merck. La réduction proposée à 4 000,00 $ des frais de déplacement réclamés (20 038,75 $) est déraisonnable aussi, étant donné le tableau joint à la preuve et les factures ultérieurement produites.

 

B. La position d'Abbott

[139]        Abbott soutient que la ligne de conduite adoptée par Apotex est incohérente et déraisonnable; par exemple, il y avait plus de brevets en litige dans le dossier T‑1847‑03 que dans le présent, mais elle y réclamait moins de frais de photocopie qu'ici. Le total des frais d'expert (314 363,78 $) aurait dû être plus bas, étant donné les connaissances acquises sur la clarithromycine. En plus de proposer le rejet des réclamations au titre de certains comptes sur le fondement de la limite de cinq experts, Abbott soutient, invoquant l'insuffisance de la preuve prima facie, que les notes de MM. Stang (50 214,78 $), McClelland (58 411,61 $) et Brown (56 528,73 $) devraient être réduites à 32 000,00 $ chacune. Les réclamations au titre de MM. Cima (16 173,44 $) et Harris (28 851,12 $) se justifieraient si elles étaient étayées de preuves. Les affidavits de MM. Rocha et Buck sont à quelques petites différences près exactement les mêmes que dans le dossier T‑1847‑03. Il conviendrait de réduire considérablement les notes de MM. Stang, McClelland et Harris au motif de la coïncidence partielle de leurs témoignages respectifs. M. Taylor a facturé abusivement des tâches remplies après son contre-interrogatoire de septembre 2006. Il manque des factures relativement à trois experts : il n'y en a aucune pour M. Cima (16 173,44 $), celles de M. Stang ne rendent compte que d'une part de 18 628,00 $ des 50 214,78 $ réclamés, et celles de M. Rocha ne font au total que 8 983,00 $ au lieu des 12 311,03 $ dont le recouvrement est demandé.

 

[140]       Avant que l'avocate d'Abbott ne pût passer aux autres éléments de frais, je lui ai communiqué certaines propositions et posé certaines questions. J'ai formulé l'hypothèse que la méthode de l'évaluation comparative exposée dans la jurisprudence ne tient pas compte explicitement de la possibilité que des approches différentes aient été justifiées malgré les éléments communs entre les questions en litige. Mes préoccupations se trouvaient aggravées par le fait qu'Abbott, pour le dossier T‑1847‑03, proposait de limiter à 90 000,00 $ le recouvrement par Apotex des frais d'expert réclamés (de 395 584,68 $), en partie sur le fondement d'une évaluation comparative, mais proposait pour le dossier T‑840‑05, en partie au motif des connaissances acquises sur la clarithromycine, des réductions qui laissaient un total plus élevé, soit 141 024,56 $, que celui proposé pour le premier dossier. Qui plus est, la réclamation totale d'Apotex au titre des experts (314 363,78 $) était inférieure à celle du dossier T‑1847‑03. L'avocate d'Abbott a attribué cette anomalie au montant disproportionné de la note de M. Taylor dans le dossier T‑1847‑03. Ce serait peut-être une meilleure formule d'évaluation comparative, a‑t‑elle ajouté, de comparer simplement les totaux taxés dans les instances relatives à un AC. Abbott a présenté sur les débours des observations semblables à celles résumées ci‑dessus à propos des autres instances. Elle a notamment exclu complètement les frais relatifs au dossier d'antériorité (2 000,00 $), au motif que le même dossier avait été déjà établi pour les instances antérieures.

 

C. Taxation

[141]       Comme ci‑dessus, j'ai commencé par examiner les dossiers de demande produits par les deux camps. Pour l'essentiel, l'affidavit produit ici par M. Buck présentait simplement en pièce jointe celui qu'il avait déposé dans le dossier T‑1847‑03. Sa première feuille de temps, datée du 8 mars 2006, porte les montants de 7 000,00 $ et de 1 200,00 $, fondés sur un taux horaire de 200,00 $CAN. L'inscription de 7 000,00 $ se rapporte au numéro de référence interne au cabinet d'avocats du dossier T‑1847‑03 et comprend des frais applicables au 6 mars 2006, soit la date de son contre-interrogatoire dans cette instance. Comme son affidavit dans ladite instance a été fait le 20 avril 2005 et que le montant de 7 000,00 $ semble concerner la période de janvier à mars 2006, je ne sais pas si ce dernier montant s'applique au dossier T‑1847‑03 ou si c'est simplement par coïncidence qu'il a réclamé 7 000,00 $ pour l'instance qui nous occupe. Les frais relatifs à M. Buck n'apparaissent pas dans les sections débours des factures expurgées du cabinet d'avocats correspondant au dossier T‑1847‑03. Une feuille de temps ultérieure porte le montant de 6 000,00 $ au titre du contre-interrogatoire subi dans le cadre du dossier T‑840‑05. La transcription de son contre-interrogatoire (effectué le 31 août 2006) ne répond à aucune de ces questions. En conséquence, je réduis à 3 000,00 $ la réclamation de 7 200,00 $ au titre de M. Buck.

 

[142]       L'affidavit de M. Rocha est plus long que celui de M. Buck, et son contre-interrogatoire a duré plus longtemps. Les deux factures de M. Rocha versées au dossier font un total de 8 984,03 $, qui semble raisonnable étant donné son expérience, et que j'accorde au lieu du montant réclamé de 12 311,03 $. Les sections débours des états expurgés du cabinet d'avocats portent des montants de 2 061,66 $ pour le 5 avril 2006 et de 6 877,63 $ pour le 2 novembre de la même année. Le dossier ne dit pas en quoi ces quatre éléments se rapportent au montant réclamé de 12 311,03 $.

 

[143]       J'ai examiné les transcriptions des contre-interrogatoires sur leurs affidavits de MM. Stang, McClelland et Harris, en accordant une attention particulière aux passages qui concernent leurs diplômes, leur expérience professionnelle et leur préparation en vue du contre-interrogatoire, afin de voir si leurs connaissances acquises sur la clarithromycine pourraient avoir influé sur leur travail et, le cas échéant, dans quelle mesure. Par exemple, M. Stang (transcription du 29 novembre 2006, page 5) n'a pas examiné l'affidavit qu'il avait souscrit dans une instance antérieure, mais a examiné la transcription du contre-interrogatoire correspondant. M. Harris a confirmé en contre-interrogatoire qu'il n'avait aucune expérience antérieure relativement à la clarithromycine. Je me préoccupais de savoir si son travail ne faisait pas double emploi avec celui de MM. Stang et McClelland, étant donné une certaine similarité de leurs mandats. Je me demandais aussi si les trois experts s'étaient bien concentrés sur le sujet voulu. Par exemple, M. Harris, à la page 31 de la transcription en date du 19 septembre 2006, nie que ses centres d'intérêt scientifiques personnels aient influé sur la manière dont il a rédigé son rapport.

 

[144]       La pratique de facturation de M. McClelland est plus obscure que celle de M. Stang. Le taux horaire généralement appliqué par M. Harris est de 200,00 $US, sauf variations mineures. Il l'a parfois réduit pour des tâches telles que le téléchargement ou le balayage de rapports. Je ne trouve en général rien à redire à ces notes. Cependant, compte tenu des observations d'Abbott et sans égard pour les références faites à la preuve dans la décision, je ne suis pas convaincu qu'Abbott soit redevable de la totalité des frais réclamés pour ces trois experts. J'ai accepté à première vue la thèse qu'Apotex avait bien payé les montants réclamés. Les factures de M. Stang sont un peu dispersées dans le dossier, mais font le compte. J'accueille après réduction les réclamations relatives à MM. Stang (50 214,78 $), McClelland (58 411,61 $) et Harris (28 851,12 $), aux montants respectifs de 44 500,00 $, 52 000,00 $ et 10 000,00 $. Le mandat de M. Brown était semblable à ceux de ces trois experts. Sa note comprend de petits frais au titre du téléchargement et de l'impression. Abbott a produit une moindre quantité de preuve qu'Apotex et a succombé. Apotex a en général produit une plus grande quantité de preuve, toutes considérations de qualité mises à part, et a obtenu gain de cause. Dans un contexte où seraient appliquées la règle des cinq experts et la méthode de l'évaluation comparative, le budget total pour les experts dans les instances relatives à un AC pourrait se trouver limité dans les faits à quelque 150 000,00 $. Je ne suis pas convaincu que ce montant suffirait dans tous les cas. Cependant, il faut prévoir certaines limites sauf circonstances extraordinaires. J'accueille après réduction à 42 500,00 $ la réclamation relative à M. Brown, présentée au montant de 56 528,73 $.

 

[145]       Les pages 7 à 10 de la transcription du contre-interrogatoire de M. Taylor (en date du 14 septembre 2006) sur son affidavit font état de ses affidavits et des contre-interrogatoires correspondants (dossiers T‑1133‑02 et T‑1847‑03), qu'il a jointes en pièces annexes, et témoignent de la volonté d'éviter la répétition des contre-interrogatoires antérieurs. J'ai examiné son affidavit et l'ai comparé à son compte, pour lequel j'accorde le montant réclamé de 70 250,00 $.

 

[146]       La tâche ici assignée à M. Grady paraît semblable à celle qu'il avait à remplir dans le dossier T‑1847‑03. Ses conclusions sont un peu plus longues, mais ont des éléments en commun avec celles qu'il a formulées dans ce dernier dossier. Comme ci‑dessus, son taux horaire varie considérablement. J'accueille la réclamation relative à cet expert après l'avoir réduite de 14 423,19 $ à 11 000,00 $. Je reconnais la valeur du travail de M. Cima et accueille la réclamation correspondante, mais après l'avoir réduite de 16 173,44 $ à 12 500,00 $, au motif que j'aurais préféré que soient produites des pièces détaillant ses tâches.

 

[147]       Je conviens que des facteurs internationaux étaient en jeu, pour ce qui concerne les témoins comme la preuve, et j'accueille telles quelles les réclamations relatives aux frais de déplacement (20 038,75 $) et de téléphone (2 651,01 $). Le dossier était volumineux. J'accorde les frais de photocopie (réclamés au montant de 98 335,66 $) et de coursiers (réclamés au montant de 5 702,58 $), mais en les réduisant respectivement à 86 000,00 $ et à 5 200,00 $. J'accueille telles quelles les réclamations relatives à la transcription (9 149,38 $), aux services de laboratoire du M.I.T. découlant du travail de M. Cima (6 540,82 $), au dossier d'antériorité (2 000,00 $) et à la LPIC (50,00 $). Je conclus comme ci‑dessus que les frais de recherche informatisée (réclamés au montant de 6 405,34 $) exigent une appréciation subjective; j'accorde à cet égard 5 100,00 $, en plus de la somme de 917,32 $ déjà concédée pour la consultation de Quicklaw. Comme plus haut, les frais de traduction (2 903,00 $) me posent problème, du fait de l'obscurité de la preuve. Le dossier de la preuve contenait des passages traduits de demandes de brevet japonaises. Il se peut que les avocats aient examiné par prudence d'autres demandes de brevet étrangères qu'ils n'ont pas utilisées en fin de compte. Les titres des demandes de brevet européennes sont donnés en trois langues, dont le français et l'anglais. J'accorde à ce titre, après réduction suivant une estimation prudente, un montant de 2 100,00 $. Je rejette les réclamations relatives aux réunions (5 223,84 $), à la recherche de dossiers (372,55 $) et aux historiques de dossier (528,00 $). Comme ci‑dessus, on semble avoir réclamé la TPS sur des dépenses engagées à l'étranger; j'ai apporté en conséquence aux chiffres une correction approximative et prudente. Le calcul d'exclusion de la TPS figure sur le mémoire de dépens taxé. Le mémoire de dépens d'Apotex, présenté au montant de 567 064,05 $, est taxé à 451 936,34 $.

 

VI. La compensation des dépens

Taxation

[148]       Au cours de l'instance T‑1133‑02, la Cour a accueilli une requête d'Apotex (et des défendeurs aux dossiers de la Cour fédérale T‑1035‑02 et T‑1847‑02) en rejet de la demande en interdiction d'Abbott. Mais la Cour d'appel fédérale, dans le dossier A‑51‑04, a annulé cette décision en accordant à Abbott les dépens en appel et en première instance. Abbott présente, aux fins du rajustement par compensation de tous dépens taxés en faveur d'Apotex, un mémoire de dépens unique pour les deux instances, totalisant 16 094,51 $. Les parties ont convenu de signifier et de déposer des observations écrites, étant donné qu'il ne restait plus assez de temps pour examiner cette question à la deuxième journée d'audience devant moi. Abbott réclame les honoraires d'avocat au milieu de la fourchette de la colonne III, ce qui me paraît justifié. J'accueille telles quelles les réclamations non contestées relatives aux honoraires d'avocat aussi bien qu'aux débours. Je rejette la position d'Apotex sur l'article 25 (services rendus après le jugement), comme quoi il n'a pas été produit d'éléments de preuve tendant à établir la nature des services, au motif que j'ai accueilli plus haut sa réclamation au même titre, malgré des objections semblables.

 

[149]       Apotex soutient que le tarif n'autorise pas Abbott à présenter une seconde réclamation au titre de l'article 19 pour son mémoire supplémentaire des faits et du droit. Abbott répond que le libellé de l'article 19 comprend les documents supplémentaires et, subsidiairement, qu'on pourrait accorder ici un montant au titre de l'article 27. Je ne pense pas que l'article 27 soit applicable. Je conviens avec Abbott de l'importance du document en question. Cependant, on ne peut en général présenter qu'une seule réclamation au titre de l'article 19 pour une instance déterminée. Comme il ressort de mes remarques ci‑dessus sur Carlile, je crois disposer d'une certaine marge d'appréciation dans les circonstances extraordinaires. En conséquence, je ne fais droit qu'à une seule réclamation au titre de l'article 19, mais en majore le montant jusqu'au maximum de 840,00 $.

 

[150]       Apotex soutient qu'il convient de réduire le nombre de huit heures réclamées au titre de l'alinéa 22a) (comparution à l'audience de l'appel), au motif que, selon le rôle, l'audience n'a duré que six heures. Je souscris à cet argument. En outre, Apotex fait valoir qu'Abbott ne devrait pouvoir réclamer que deux heures, parce que cet appel a été réuni à deux autres et entendu en même temps qu'eux. Je rejette cet argument, quoique pas nécessairement pour la raison invoquée par Abbott qu'une décision dans ce sens aurait pour effet de rendre les intimés aux deux autres appels redevables d'une partie de ses frais. Je pense plutôt qu'il aurait été imprudent, et probablement peu pratique, de la part des avocats d'Abbott de se retirer au milieu d'une telle audience. J'accorde 6,5 heures à ce titre, conformément à mes observations ci‑dessus sur les réclamations d'Apotex, comme quoi les avocats doivent être présents dans la salle d'audience avant l'heure prévue pour l'ouverture de la séance.

 

[151]       Apotex a appliqué le même argument de répartition proportionnelle aux frais de photocopie (3 600,00 $) et de déplacement (869,00 $). Elle fait valoir que le dossier d'appel ne faisait en tout que 1 972 pages, et non pas le nombre de 3 451 pages figurant dans la preuve d'Abbott, auquel cette dernière a appliqué le taux d'Apotex de 0,25 $ par page. En outre, selon Apotex, les deux autres appels ne devraient pas entrer ici en ligne de compte. Par conséquent, la réclamation au titre de la photocopie devrait être réduite à 684,00 $, et celle des frais de déplacement minorée du tiers. Abbott fait valoir que sa preuve selon laquelle tous ces frais sont attribuables à Apotex n'est pas contredite, puisque cette dernière n'a pas produit de preuve contradictoire. J'accueille telle quelle la réclamation de frais de déplacement. Abbott devait envoyer son avocat à l'audience pour défendre ses intérêts, indépendamment des deux autres appels.

 

[152]       Je conviens avec Apotex qu'elle n'est pas redevable des frais directement attribuables aux deux autres appels. L'ordonnance du 12 février 2004 autorisait Abbott à déposer un seul ensemble de dossiers d'appel portant l'intitulé de la cause des trois dossiers. Cet ensemble faisait 1 972 pages et contenait des pièces ne se rapportant pas au dossier T‑1133‑02. Selon la preuve d'Abbott, une portion de 250 pages concernait le dossier T‑1133‑02, et sa réclamation au titre de la photocopie est établie sur la base de sept copies de l'ensemble au taux de 0,25 $ par page. On obtient ainsi un montant de 437,50 $, considérablement inférieur aux 3 600,00 $ réclamés. Cependant, il y avait certainement d'autres documents qui devaient être photocopiés, par exemple des éléments de jurisprudence (dont certains se rapportant peut-être aux deux autres appels), des requêtes (dont les frais ne sont pas recouvrables quand elles donnent lieu à des ordonnances muettes sur les dépens) ou des lettres. Mais même l'addition de tels documents n'étayerait pas la réclamation de 3 600,00 $. Signalons toutefois que cette dernière comprend les frais de reliure, non pris en compte dans le calcul fondé sur le taux de 0,25 $ par page. J'accorde 975,00 $ au titre de la photocopie.

 

[153]       Apotex, peut-être par mégarde, n'a pas explicitement contesté la réclamation au titre de l'article 24 (déplacement de l'avocat), non autorisée par la Cour. Toute objection de sa part se serait certainement inscrite dans le cadre de son argument de la répartition proportionnelle. J'accorde telle quelle la réclamation au titre de l'article 24. Le mémoire de dépens d'Abbott a été présenté au montant de 16 094,51 $, obtenu en reportant le chiffre de 10 430,40 $ au lieu du total partiel réel de 7 759,20 $ pour les honoraires d'avocat; les observations faisaient état d'une réclamation de 13 423,31 $, soit la somme des totaux partiels réels des honoraires d'avocat et des débours. Ce mémoire est taxé au montant de 9 655,01 $, à porter en déduction des dépens accordés à Apotex pour le dossier T‑1133‑02, soit 295 413,36 $.

 

[154]       Au cours de l'instance T‑1847‑03, la Cour a fait droit à une requête d'Abbott en ordonnant la récusation d'un expert d'Apotex, M. Jack Dunitz. Apotex a contesté cette décision devant la Cour d'appel fédérale dans le dossier A‑126‑06. Le protonotaire a rejeté la requête d'Apotex en remplacement de la preuve de M. Dunitz. La Cour fédérale a rejeté le recours exercé par Apotex contre la décision du protonotaire. Apotex a contesté ce rejet devant la Cour d'appel fédérale dans le dossier A‑308‑06. La Cour d'appel fédérale a entendu les deux appels successivement, a établi un seul exposé des motifs et a prononcé dans chaque dossier un jugement rejetant l'appel avec dépens quelle que soit l'issue de la cause. Abbott présente, aux fins du rajustement par compensation de tous dépens taxés en faveur d'Apotex au titre du dossier T‑1847‑03, un mémoire de dépens unique pour les deux appels. J'accueille telles quelles les réclamations non contestées, relatives aussi bien aux honoraires d'avocat qu'aux débours, sauf en ce qui concerne l'article 24, dont je parlerai plus loin. Les parties ont convenu que les dépens seraient taxés au milieu de la fourchette de la colonne IV. La réclamation au titre de l'article 25, contestée comme ci‑dessus, est accueillie telle quelle.

[155]       Abbott présente deux réclamations au titre de l'article 27 : l'une pour l'examen de l'avis d'appel dans le dossier A‑126‑06, et l'autre pour la même opération dans le dossier A‑308‑06 et l'établissement d'observations relatives au mémoire de dépens. Apotex conteste ces deux réclamations. J'ai rejeté la réclamation d'Apotex au titre de l'article 17 dans des circonstances semblables à propos du dossier A‑59‑07 et je fais de même ici à l'égard d'Abbott. J'ai en effet conclu plus haut que les frais d'établissement des observations en vue de la taxation ne peuvent être réclamés au titre de l'article 27.

 

[156]       Apotex, qui ne l'a pas fait dans le cas du dossier A‑51‑04, a contesté ici les réclamations au titre de l'article 24, mais pas sur le fondement de l'absence d'une directive de la Cour qui les eût autorisées. Apotex a plutôt soutenu qu'une seule réclamation au titre de l'article 24 devrait être accueillie, parce qu'il ne convient pas d'accorder ces frais deux fois à Abbott relativement au même déplacement effectué en vue d'assister à l'audience des deux appels. Abbott a fait valoir que deux avocats ont assisté à cette audience, et qu'elle a droit à une réclamation pour chacun d'eux. Utilisant au maximum ma marge d'appréciation, j'accueille la réclamation concédée par Apotex, mais non la seconde en l'absence d'autorisation de la Cour.

 

[157]       Apotex soutient que la réclamation de 433,50 $ au titre des huissiers est excessive et devrait être réduite à 216,75 $, aux motifs du petit nombre total de documents à signifier et de la preuve attestant le versement de suppléments pour service accéléré (90,00 $). Abbott répond que la taille du dossier est indifférente, que les frais unitaires s'inscrivent entre 35,00 $ et 50,00 $, et qu'Apotex a souscrit à sa concession comme quoi les suppléments pour service accéléré sont recouvrables. Ces suppléments dépassaient les frais de signification proprement dits. Abbott n'est pas redevable de la totalité des suppléments pour service accéléré, mais j'admets qu'il a été nécessaire d'en verser dans certains cas. J'accorde à ce titre, après réduction, un montant de 320,00 $.

 

[158]       Abbott a appliqué un taux de TPS de 0,06 aux honoraires d'avocat, mais de 0,08 aux débours. J'ai appliqué à l'égard de la TPS un taux de 0,06 aux débours. Le mémoire de dépens d'Abbott, présenté au montant de 7 606,45 $, est taxé au montant de 6 357,37 $, à porter en déduction des dépens accordés à Apotex dans le dossier T‑1847‑03, soit 591 983,32 $.

 

[159]       Il sera délivré, sous la forme habituelle, un certificat de taxation pour chacun des dossiers A‑510‑05, A‑59‑07, T‑840‑05, A‑51‑04 et A‑126‑06 (A‑380‑06). Il sera délivré à l'égard du dossier T‑1133‑02 un certificat de taxation libellé comme suit :

JE CERTIFIE que le mémoire de dépens de la défenderesse, Apotex Inc. (Apotex), présenté au montant de 369 655,99 $, est taxé au montant de 295 413,36 $.

 

COMPENSATION

 

JE CERTIFIE EN OUTRE que le montant de 9 655,01 $, taxé en faveur des appelantes, Abbott Laboratories et Abbott Laboratories Limited (Abbott), contre Apotex dans le dossier d'appel A‑51‑04, est porté en déduction du total taxé ci‑dessus en faveur d'Apotex de 295 413,36 $, de sorte qu'Abbott est redevable à Apotex d'un montant net de 285 758,35 $.

 

[160]       Apotex ne conteste pas la demande d'Abbott visant à faire porter deux sommes globales adjugées à cette dernière respectivement le 10 mai (2 000,00 $) et le 28 juin 2006 (4 000,00 $) en déduction des dépens taxés en sa faveur au titre du dossier T‑1847‑03. Je pense qu'une somme globale adjugée au lieu de dépens entre dans la définition du terme « dépens » du paragraphe 408(2) des Règles, qui dispose que « [l]orsque des parties sont tenues de payer des dépens les unes aux autres, l'officier taxateur peut en faire le rajustement par compensation ». Ce principe vaut pour la compensation des dépens adjugés dans le cadre de dossiers multiples mettant aux prises les mêmes parties; voir à ce sujet : Wilson c. Canada, [2000] A.C.F. no 506 (O.T.), infirmée relativement à une question d'intérêt sur les dépens, mais autrement confirmée par Wilson c. Canada, [2000] A.C.F. no 1783 (C.F. 1re inst.); et le paragraphe 300 de Halford.

 

[161]       L'entrée en vigueur de la Loi sur les Cours fédérales le 2 juillet 2003 n'a pas changé le régime fondamental des dépens ni les principes y afférents au sein de la Cour fédérale du Canada. Cette loi est en effet devenue immédiatement applicable à la date susdite à l'activité de la Cour fédérale et de la Cour d'appel fédérale dans le cadre des dispositions transitoires de l'article 191 de la Loi sur le Service administratif des tribunaux judiciaires (la LSATJ), qui dispose que les Règles restent en vigueur. Les dispositions transitoires des paragraphes 185(14) et 187(2) de la LSATJ prévoyaient respectivement mon transfert au Service administratif des tribunaux judiciaires, qui fournit des services de greffe à ces deux Cours (ainsi qu'à la Cour d'appel de la cour martiale et à la Cour canadienne de l'impôt), et le maintien en vigueur de l'ordonnance me nommant officier taxateur desdites deux Cours. Par conséquent, j'estime avoir compétence pour prononcer la compensation des dépens entre ces deux mêmes Cours.

 

 

[162]       Il sera délivré au titre du dossier T‑1847‑03 un certificat de taxation libellé comme suit :

JE CERTIFIE que le mémoire de dépens de la défenderesse, Apotex Inc. (Apotex), présenté au montant de 695 312,50 $, est taxé au montant de 591 983,32 $.

 

COMPENSATION

 

JE CERTIFIE EN OUTRE que le montant de 6 357,37 $, taxé en faveur des intimées, Abbott Laboratories et Abbott Laboratories Limited (Abbott), contre Apotex à l'égard de l'ensemble des dossiers de la Cour d'appel fédérale A‑126‑06 et A‑308‑06, ainsi que les sommes globales de 2 000,00 $ et de 4 000 $ adjugées à Apotex contre Abbott respectivement les 10 mai et 28 juin 2006 dans le dossier de la Cour fédérale T‑1847‑03, sont portés en déduction du total taxé ci‑dessus en faveur d'Apotex de 591 983,32 $, de sorte qu'Abbott est redevable à Apotex d'un montant net de 579 625,95 $.

 

 

« Charles E. Stinson »

Officier taxateur

 

 

Vancouver (Colombie-Britannique)

le 29 mai 2008

 

 

Traduction certifiée conforme

Christiane Bélanger, LL.L.

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        T‑1133‑02

 

INTITULÉ :                                       ABBOTT LABORATORIES et al.

                                                            c.

                                                            LE MINISTRE DE LA SANTÉ et al.

 

 

 

LIEU DE L'AUDIENCE :                 Toronto (Ontario)

 

DATE DE L'AUDIENCE :               Les 29 et 30 octobre 2007

 

MOTIFS DE LA TAXATION

DES DÉPENS :                                  CHARLES E. STINSON

 

DATE DES MOTIFS :                      Le 29 mai 2008

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Meighan Leon

 

POUR LES DEMANDERESSES

David E. Lederman

 

POUR LA DÉFENDERESSE APOTEX INC.

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

McCarthy Tétrault LLP

Toronto (Ontario)

 

POUR LES DEMANDERESSES

Goodmans LLP

Toronto (Ontario)

 

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LA DÉFENDERESSE

APOTEX INC.

 

POUR LE DÉFENDEUR

MINISTRE DE LA SANTÉ

 

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.