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Date : 20080619

Dossier : T‑2059‑01

Référence : 2008 CF 768

Ottawa (Ontario), le 19 juin 2008

En présence de monsieur le juge Campbell

 

 

ENTRE :

ROCHELLE MOSS

demanderesse

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE

défenderesse

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

 

[1]               Depuis de nombreuses années, Mme Moss est en conflit avec le ministre du Revenu national (le ministre) à propos de ses obligations fiscales. Le désaccord actuel concerne une ordonnance conservatoire obtenue par le ministre, qui l’autorise à saisir des sommes en dépôt dans des polices d’assurance appartenant à Mme Moss. Mme Moss soutient que les décisions du ministre lui causent un préjudice. Pour les motifs qui suivent, je ne partage pas cet avis.

 

[2]               L’intégralité de la déclaration de Mme Moss en date du 1er novembre 2002 se présente ainsi :

[traduction]

 

La demanderesse est une contribuable qui vit dans la ville de Winnipeg, province du Manitoba, et elle travaille pour le gouvernement fédéral :

 

1.                  La demanderesse réclame :

a)      des dommages‑intérêts correspondant aux cotisations fiscales qui lui ont été délivrées pour les années 1998 jusqu’à aujourd’hui.

b)      les dépens de la présente action;

c)      toute autre réparation que la Cour pourra juger à propos.

2.                  L’ADRC a obtenu une ordonnance conservatoire en application des dispositions de la Loi de l’impôt sur le revenu. Cette ordonnance conservatoire a été signifiée aux compagnies d’assurance suivantes, qui détiennent des fonds au bénéfice de la demanderesse :

a)      L’Équitable Compagnie d’Assurance‑Vie du Canada;

b)      NN Compagnie d’Assurance‑Vie du Canada;

c)      Financière Manuvie.

3.                  L’ADRC non seulement a fait bloquer les polices d’assurance de la demanderesse, mais a rendu la demanderesse incapable de transférer les fonds à une police et un instrument non susceptibles d’entraîner des obligations fiscales, ce que la demanderesse était en train de faire, lui imposant ainsi des obligations fiscales inutiles.

4.                  En raison des décisions de l’ADRC, la demanderesse n’a pas été en mesure de transférer ses actifs qui étaient entre les mains des compagnies d’assurance susmentionnées vers des investissements non imposables et, en conséquence, elle a été empêchée d’organiser ses affaires d’une manière avantageuse sur le plan fiscal. La demanderesse dit que, en conséquence des décisions de l’ADRC, des impôts lui sont réclamés sur un revenu qui autrement ne serait pas imposable, et la demanderesse sollicite l’autorisation de se référer aux autres détails relatifs à ces décisions durant l’instruction de la présente affaire.

5.                  En conséquence des décisions de la défenderesse, la demanderesse a subi un préjudice.

 

                        [Non souligné dans l’original.]

 

[3]               La preuve produite par Mme Moss et par le ministre durant l’audition de la présente action simplifiée est uniquement une preuve documentaire. Elle comprend des conclusions de fait et de droit tirées dans des décisions judiciaires qui ont examiné les diverses questions fiscales de Mme Moss et qui sont reconnues comme contraignantes pour l’issue de la présente action.

 

[4]               Les faits essentiels et non contestés qui sont au cœur de la présente réclamation ont été résumés ainsi par la juge Dawson dans la décision Moss c. Le Ministre du Revenu national et l’Agence des douanes et du revenu du Canada, 2001 CFPI 49, 2001 DTC 5123 (la décision Moss n° 1), aux paragraphes 2 à 5 et 8 :

En janvier 1997, une cotisation a été établie à l’égard de la demanderesse en vertu des dispositions de la Loi et de la Loi sur la taxe d’accise, L.R.C. (1985), ch. E‑15, et ce tant à titre personnel qu’en ce qui concerne l’obligation fiscale qui incombait à son époux par suite d’un certain nombre d’opérations non sans liens de dépendance qui ont résulté en un transfert de biens de ce dernier à elle. La cotisation établie à l’égard de la demanderesse s’élevait à 301 956,21 $.

 

Le ministre du Revenu national (le ministre) a obtenu ce qu’on appelle une ordonnance dite « de recouvrement préventif » en vertu de l’article 225.2 de la Loi [en date du 5 février 1997]. Cette ordonnance permettait au ministre de prendre des mesures de recouvrement contre la demanderesse avant la fin du processus d’appels en matière fiscale.

 

En vertu de cette ordonnance, le ministre a émis des ordres de payer à trois compagnies d’assurance, soit NN Life, Manulife et Equitable Life, qui détenaient toutes des contrats au nom de la demanderesse.

 

La demanderesse a invité notre Cour, en application du paragraphe 225.2(8) de la Loi, à examiner l’ordonnance de recouvrement préventif. La Cour a rejeté sa demande dans une ordonnance datée du 19 novembre 1997 et confirmé l’ordonnance de recouvrement préventif originale. […]

 

[…]

Pour ce qui est des ordres de payer, chaque compagnie d’assurance avait d’abord soutenu que comme les contrats prévoyaient des versements d’annuités, ils ne pouvaient faire l’objet d’une saisie ou exécution. Chaque compagnie a donc fait valoir qu’au lieu de verser à Revenu Canada le montant de l’ordre de payer qui lui avait été signifié, elle suspendrait plutôt le contrat, empêchant ainsi la demanderesse de retirer des fonds en vertu de ce dernier jusqu’à ce qu’on ait tranché le statut de ces contrats ou déterminé le montant d’impôt que la demanderesse devait payer.

 

            (Recueil de documents de la défenderesse, onglet 8)

 

 

 

[5]               Le préjudice qui, selon Mme Moss, donne ouverture à poursuite civile est l’obligation fiscale qui a pris naissance après que les demandes formelles de paiement furent délivrées aux compagnies d’assurance conformément à l’ordonnance conservatoire. En fait, quatre polices d’assurance étaient l’objet d’une saisie : deux polices de NN (n° 5037678 et n° 1119986); une police de Manuvie; et une police de l’Équitable. À la date des saisies, Mme Moss croyait que les avantages qui lui revenaient au titre de la police NN n° 1119986 n’étaient pas imposables. L’une des particularités de la présente action est que, pour ne pas être assujettie à l’impôt, Mme Moss avait demandé l’autorisation de transférer les fonds des autres polices à la police NN n° 1119986. Les transferts n’ont pas eu lieu et, en conséquence, Mme Moss dit qu’elle a été imposée à tort sur des indemnités qui revenaient aux fonds non transférés. La question préliminaire essentielle à décider est celle de savoir si le ministre est à l’origine de cette obligation fiscale. À mon avis, ce lien de causalité n’a pas été établi.

 

[6]               L’ordonnance conservatoire n’a pas été rendue par le ministre; la Cour a accordé l’ordonnance ex parte et a plus tard confirmé que l’ordonnance était justifiée compte tenu de la preuve. Il ne fait aucun doute que le ministre était tenu en droit de recouvrer l’impôt dû par Mme Moss. Je suis donc d’avis qu’aucun acte dommageable n’a été commis par le ministre lorsqu’il a prié la Cour de rendre l’ordonnance conservatoire.

 

[7]               Le juge Muldoon, qui avait instruit la requête de Mme Moss en révision de l’ordonnance conservatoire ex parte, a fait une analyse détaillée des mesures qui avaient conduit à l’octroi de cette ordonnance et a même confirmé qu’une preuve suffisante avait été produite au soutien de l’ordonnance (Canada (Ministre du Revenu national) c. Moss, [1997] A.C.F. n° 1583, 98 D.T.C. 6016 ) (preuve de la demanderesse, pièce 1). Le paragraphe 24 de cette décision reprend les conclusions sur la conduite de Mme Moss qui avaient été soumises à la juge Tremblay‑Lamer, laquelle avait rendu l’ordonnance ex parte :

Il ressort des preuves produites que le mari de l’intimée [M. Moss], c’est‑à‑dire le cédant, n’a fait aucun paiement volontaire d’impôt depuis 1990 à peu près. L’intimée elle‑même [Mme Moss] n’a payé l’arriéré d’impôt qu’après menaces ou procédures effectives de poursuite judiciaire, saisie‑arrêt et autre saisie. Les deux ont montré qu’ils n’hésitaient pas à cacher leur actif aux créanciers légitimes. Le système de l’impôt du revenu du Canada repose sur la déclaration du contribuable, le système d’honneur, mais le fisc a toujours été obligé de menacer, saisir‑arrêter ou poursuivre en justice l’intimée. Bien entendu, celle‑ci, comme tous les autres contribuables, a le droit de recourir aux moyens légaux d’éviter l’impôt encore que ceux‑ci soient bien limités. Quoi qu’il en soit, cette inclination, démontrée par ses faits et gestes, à se dérober au recouvrement de l’impôt est un facteur qui engage à en inférer que ce recouvrement serait compromis par les délais requis pour les mécanismes de recouvrement prévus par la loi.

 

 

S’agissant de la saisie des polices d’assurance, le juge Muldoon tirait la conclusion suivante, au paragraphe 26 :

Il appert donc que les assurances souscrites chez NN Life, Manulife et Equitable Life présentent une caractéristique propre à des comptes‑chèques bancaires : les fonds peuvent être retirés en tant que de besoin pour les dépenses essentielles de la famille ou toute autre dépense. Ce fait même fait craindre que le recouvrement ne soit compromis. Qui plus est, ces placements, qui ressemblent à des comptes‑chèques, sont détenus de telle manière que l’intimée pensait qu’ils étaient à l’abri des saisies‑arrêts et autres saisies par l’effet de l’article 173 de la Loi sur les assurances du Manitoba, S.R.M. 1987, chap. I‑40. Bien que cette croyance ne soit pas avérée en droit, on peut certainement en inférer que le but en est de faire échec au recouvrement.

 

Je suis donc d’avis que c’est la conduite de Mme Moss qui est à l’origine de l’ordonnance conservatoire qui fut rendue, que, comme je l’ai dit, le ministre n’a commis aucune faute en demandant l’ordonnance et que le ministre n’a commis aucune faute en saisissant les polices d’assurance.

 

[8]               Il n’est pas contesté que, après avoir reçu signification des demandes formelles de paiement, les compagnies d’assurance ont demandé l’avis du ministre sur la ligne de conduite qui devrait être adoptée concernant les polices saisies et l’avocat du ministère de la Justice, au Bureau régional de Winnipeg, leur a répondu en tant qu’avocat du ministre. Trois réponses du genre sont produites dans la preuve de la demanderesse et sont acceptées dans la présente action comme reflétant la position du ministre à propos de chacun des assureurs et chacune des polices saisies. La lettre du 25 mars 1997 adressée à NN expose ainsi la position générale du ministre :

[traduction]

 

Objet :  Rochelle Moss

            Police n° 1119986

            Bref de Fieri Facias daté du 5 février 1997

 

Nous vous informons que notre ministère représente Revenu Canada dans l’affaire susmentionnée. En réponse à votre lettre du 19 mars 1997, qui contenait copie d’une demande de changement d’option d’investissement et un formulaire de changement de bénéficiaire, Revenu Canada est d’avis que la débitrice fiscale ne peut pas maintenant chercher à modifier les détails de l’investissement d’une manière qui serait préjudiciable à Revenu Canada.

 

Les brefs de Fieri Facias ont été exécutés par un shérif le 5 février 1997. Le shérif agissait d’après les directives du créancier Revenu Canada et plus exactement en tant que mandataire. J’ai été informé que votre cliente et la titulaire de la police ont toutes deux exprimé l’avis que les actifs qui ont été l’objet de la saisie sont insaisissables conformément aux dispositions de la Loi sur les assurances.

 

Comme vous le savez certainement, lorsqu’on se demande si un actif est effectivement insaisissable en vertu des dispositions de la Loi sur les assurances, il importe de considérer le détail du contrat pertinent. Puisque le shérif, en tant que mandataire de Revenu Canada, a exécuté les brefs sur ces actifs et, ce faisant, a pris en son nom le contrôle et la possession légale de tels actifs, toute action ou directive de la débitrice qui prétendrait modifier la nature des avoirs et/ou les modalités du contrat régissant les actifs, et qui risquerait de préjudicier aux prétentions de Revenu Canada sur tels actifs serait à notre avis nulle et sans effet.

 

Je ferais observer par exemple que la titulaire a demandé un changement de bénéficiaire sur la police n° 1119986. Je crois comprendre que les bénéficiaires désignés pour le moment, et à la date de la saisie, sont et étaient la titulaire elle‑même de la police et son conjoint. Il semblerait donc que, puisque l’un des bénéficiaires est la titulaire elle‑même de la police, l’application ou l’étendue de toute clause d’insaisissabilité prévue par le paragraphe 173(2) de la Loi sur les assurances pourrait être mise en doute, même si l’on devait présumer que cette disposition serait par ailleurs applicable à ce genre de contrat. La titulaire de la police ne peut prétendre avoir le droit d’apporter des modifications au contrat pour mieux répondre à une clause d’insaisissabilité après que la saisie a eu lieu.

 

Vu la nature des actifs, et puisqu’ils ont déjà été saisis, il semblerait que la titulaire de la police n’a pas la capacité de modifier les modalités contractuelles en vertu desquelles tels actifs sont détenus, surtout si une telle modification risque de mettre en péril les intérêts du créancier.

 

J’espère que ce qui précède saura éclairer notre position.

(Preuve de la demanderesse, pièce 3)

 

La lettre du 16 mai 1997 adressée à l’Équitable mentionne le désir du ministre d’être consulté concernant toute modification d’investissement :

[traduction]

 

Objet :  Police l’Équitable de Mme Moss et Revenu Canada

 

Nous vous informons que notre ministère représente Revenu Canada dans l’affaire relative à la police susmentionnée. Je réponds à votre lettre du 25 avril 1997. Je puis vous informer que Revenu Canada est d’avis que la crédirentière désignée n’a plus le pouvoir de modifier les options d’investissement ni les bénéficiaires, puisqu’elle n’a plus la possession légale de l’actif. Je vous informe donc que Revenu Canada entend être consulté sur toute modification que la crédirentière prétendrait apporter à l’investissement. Pour le cas où la modification ne résulterait que des fluctuations du marché boursier, j’imagine que Revenu Canada n’aurait aucune difficulté à consentir à une telle modification.

 

J’espère que ce qui précède répond à vos préoccupations.

 

(Preuve de la demanderesse, pièce 5)

 

La lettre du 21 juillet 1997 adressée à NN énonce la position du ministre :

[traduction]

 

Objet :  Rochelle Moss

            Polices nos 5037678 et 1119986

 

Comme suite à notre correspondance passée, la présente vise à préciser la position de Revenu Canada concernant les véhicules d’investissement qui sont l’objet des deux polices susmentionnées. Revenu Canada est d’avis que les titulaires ne peuvent exercer, pour ces polices, aucune option qui aurait pour effet de préjudicier au droit de Revenu Canada sur telles polices. Particulièrement importante est la portion des contrats appelée « modalités de règlement », lesquelles traitent des genres d’indemnités qui pourront être payées à la titulaire à l’échéance. À notre avis, ces modalités sont importantes pour la question de savoir si une clause d’insaisissabilité pourrait ou non s’appliquer dans cette situation, influant par le fait même sur la saisie pratiquée par Revenu Canada.

 

À ce stade, Revenu Canada ne s’oppose pas au transfert de sommes d’un fonds à l’autre de la police, en conséquence des fluctuations du marché et/ou pour prévenir une baisse inutile de la valeur de la police, dans la mesure où les sommes en question restent effectivement à l’intérieur de la police. Revenu Canada adopte cette position sous toutes réserves, à titre provisoire, et vous tiendra informé pour le cas où sa position serait modifiée.

 

Comme l’indique la récente lettre de M. Gil Desroches, Revenu Canada croit néanmoins que les sommes provenant de l’un des deux régimes doivent être remises conformément aux directives de M. Desroches [sic] et à la demande formelle de paiement. Revenu Canada vous a mis au fait de cette position et se réservera le droit de pénaliser NN en cas de refus de celle‑ci de se conformer, ainsi que le prévoit le paragraphe 224(4). Évidemment, la position de Revenu Canada sur le transfert de sommes entre instruments d’investissement ne s’applique qu’à la police et/ou à la portion de la police pour laquelle aucune remise n’est faite à M. Desroches. Je crois comprendre que, à ce stade, il a demandé la remise de l’une des polices seulement. L’étendue de la remise requise dépendrait en outre si Revenu Canada parvient ou non à un résultat dans d’autres mesures de recouvrement. Je vous renverrais à la lettre de M. Desroches [sic] datée du 13 juin et à la demande qu’il vous a faite de communiquer avec lui avant la remise de toute somme.

 

À titre de précision supplémentaire, il ne faut voir ici aucun consentement autorisant la titulaire à retirer ou transférer des sommes de la police, ou à procéder à un changement de bénéficiaires ou à tirer parti des modalités de règlement, ou de toute autre modalité, d’une manière qui modifierait la nature des indemnités ou qui nuirait autrement à la position de Revenu Canada.

 

Si vous voulez d’autres éclaircissements ou si vous avez des questions ou préoccupations, n’hésitez pas à communiquer avec M. Desroches au (204) 984‑5200 ou avec moi‑même, au numéro de téléphone indiqué plus haut.

 

(Preuve de la demanderesse, pièce 4)

 

Au vu de cette preuve, je suis d’avis que, même si l’avocat du ministre exprimait des avis concernant la gestion des polices en question, le ministre n’exerçait aucun contrôle sur la gestion des polices.

[9]               Comme le confirmait la lettre du 21 juillet 1997, le ministre a exigé, conformément aux demandes formelles de paiement qui avaient été signifiées, que les sommes détenues dans les polices soient consignées auprès de la Cour. Comme l’écrit la juge Dawson, les compagnies d’assurance ont refusé de le faire, pour une raison :

Bien que les ordres de payer n’aient pas été produits en preuve devant la Cour, on a concédé que chaque ordre avait été émis en bonne et due forme à l’égard du montant de la cotisation qui avait alors été établie. Le fait qu’on ait bloqué l’ensemble des sommes dues au titre de contrats qui, soutient‑on, prévoyaient le versement d’annuités ne résultait pas d’un quelconque vice des ordres de payer ou d’émission de ces derniers, mais plutôt de la position que chaque assureur a adoptée, selon laquelle les contrats d’assurance ne pouvaient être saisis ni exécutés. Comme la demanderesse l’a déclaré dans son affidavit, compte tenu de cette position, les assureurs [TRADUCTION] « refusaient de verser à Revenu Canada la somme que prévoyaient les ordres de payer, suspendant plutôt les contrats et refusant de permettre » à la demanderesse de retirer des fonds.

 

                        (Décision Moss n° 1, au paragraphe 15)

Il ne fait aucun doute que la cause immédiate du « blocage » des polices procédait d’une décision des compagnies d’assurance de mettre leur responsabilité à couvert.

 

[10]           Par conséquent, selon la prépondérance de la preuve, il m’est impossible de dire que [traduction] « [l]’ADRC non seulement a fait bloquer les polices d’assurance de la demanderesse, mais a rendu la demanderesse incapable de transférer les fonds à une police et un instrument non susceptibles d’entraîner des obligations fiscales », ou que [traduction] « [e]n raison des décisions de l’ADRC, la demanderesse n’a pas été en mesure de transférer ses actifs qui étaient entre les mains des compagnies d’assurance susmentionnées vers des investissements non imposables », ou que [traduction]« [e]n conséquence des décisions de la défenderesse, la demanderesse a subi un préjudice », comme l’a prétendu Mme Moss.

[11]           En outre, au vu de la preuve versée dans le dossier, il m’est impossible de dire que la police n° 1119986 de NN est un instrument d’investissement non susceptible d’entraîner des obligations fiscales. L’unique preuve directe produite par Mme Moss à l’appui d’une telle conclusion est la disposition suivante de la police :

[traduction]

 

EXONÉRATION DE L’IMPÔT SUR LE PRODUIT À RECEVOIR

POUR L’OPTION D’INTÉRÊT GÉNÉRAL

 

Pour les contrats non‑REER, nous déterminerons le statut fiscal de la portion du présent contrat représentée par l’option d’intérêt général (la portion exonérée) à chaque anniversaire de la date d’émission. Si l’on conclut que la portion exonérée serait actuellement soumise à l’impôt entre vos mains sur la base des droits constatés, nous augmenterons la somme assurée (sous réserve d’une augmentation maximale totale que nous déterminerons périodiquement) et, au besoin, nous offrirons aussi le rachat d’une portion de la valeur du compte afin de préserver l’exonération fiscale du revenu constaté de la portion exonérée, à condition qu’il soit raisonnablement possible pour nous de le faire selon la législation fiscale ou autre en vigueur. Une telle augmentation de la somme assurée ne nécessitera pas une preuve complémentaire d’assurabilité. Ce rachat d’une portion de la valeur du compte n’entraînera pas la réduction du montant de la garantie. La clause d’ajustement de la valeur marchande et la clause de frais de rachat ne s’appliqueront pas.

 

(Preuve de la demanderesse, pièce 13, pages LS‑39L..6 – LS‑39L..7)

 

Comme je l’ai indiqué durant le procès, vu la complexité de cette disposition d’« exonération », il n’est pas possible, sans une preuve d’expert, laquelle n’a pas été produite, d’affirmer que la police constitue un instrument d’investissement qui échapperait à l’impôt, comme le prétend Mme Moss.

 

[12]           Pour les motifs susmentionnés, je suis d’avis que les allégations contenues dans la déclaration n’ont pas été prouvées et je rejetterai donc la présente action.

[13]           Étant donné que Mme Moss n’est pas représentée et que le présent litige s’est déroulé en tant qu’action simplifiée, je suis d’avis que les dépens accordés au ministre devraient en toute justice se limiter à la somme forfaitaire de 1 000 $.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

JUGEMENT

 

La présente action est rejetée. La demanderesse est condamnée à des dépens de 1 000 $ en faveur de la défenderesse.

 

 

                                                                                                            « Douglas R. Campbell »

Juge

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

 

Christian Laroche, juriste-traducteur

 

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        T‑2059‑01

 

INTITULÉ :                                       ROCHELLE MOSS

                                                            c.

                                                            SA MAJESTÉ LA REINE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 WINNIPEG (MANITOBA)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               LE 10 JUIN 2008

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              LE JUGE CAMPBELL

 

DATE DES MOTIFS

ET DU JUGEMENT :                       LE 19 JUIN 2008

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Rochelle Moss

Danny Moss

 

POUR LA DEMANDERESSE

(pour son propre compte)

Julien Bédard

 

POUR LA DÉFENDERESSE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Winnipeg (Manitoba)

 

POUR LA DEMANDERESSE

John Sims, c.r.

Sous‑procureur général du Canada

 

POUR LA DÉFENDERESSE

 

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