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Date : 20090303

Dossier : IMM-3445-08

Référence : 2009 CF 216

Ottawa (Ontario), le 3 mars 2009

En présence de monsieur le juge Zinn

 

 

ENTRE :

DANIELA HUERTA MORALES

demanderesse

 

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

 

[1]               Mme Huerta Morales a vingt-cinq ans, elle est citoyenne mexicaine et est originaire de Puebla. Elle fonde sa demande d’asile à titre de réfugié au sens de la Convention sur l’allégation qu’elle craint d’être persécutée par son ancien petit ami, Rogelio Roque Flores, qui est le neveu du gouverneur de l’État de Puebla. Elle raconte qu’environ trois ans après le début de leur relation, il est devenu possessif et distant, qu’il avait des relations avec d’autres femmes et qu’il buvait. Lorsqu’elle l’a confronté, il est devenu violent et l’a agressée physiquement. Il l’a menacée en août 2006, quand elle lui a dit qu’elle voulait mettre fin à leur relation. Elle semble ensuite avoir été sans contact avec lui pendant deux mois, jusqu’à son anniversaire en octobre 2006, alors qu’il est venu lui parler. Il l’a menacée avec un fusil et lui a dit qu’il préférait la voir morte plutôt que de la voir avec un autre homme. Il lui a rappelé que son oncle était le gouverneur de Puebla.

 

[2]               Après cet incident, Mme Huerta Morales a décidé de quitter Puebla et de passer les fêtes de Noël à Oaxaca. Quand le temps est venu de rentrer à Puebla, elle a fait part à sa mère qu’elle avait peur de Rogelio Roque Flores et qu’elle voulait demeurer à Oaxaca. La mère et la fille y sont restées, et le reste de la famille est rentré à Puebla. Rogelio Roque Flores l’a toutefois retrouvée et l’a appelée, la menaçant de représailles auprès de son père si elle ne rentrait pas. La résidence de sa famille a subséquemment été pillée et ses frères ont été battus. Rogelio Roque Flores lui a dit que ce qui venait d’arriver n’était qu’un avant-goût de ce qui allait suivre. Mme Huerta Morales est rentrée à Puebla et a porté plainte auprès de la police, mais sans résultat aucun. La police lui a dit de bien réfléchir à l’identité de la personne qu’elle dénonçait, faisant apparemment référence à l’oncle de Rogelio Roque Flores. Les menaces ont continué. Mme Huerta Morales n’a donc envisagé d’autre possibilité que de demander asile à l’étranger. Elle est arrivée au Canada en mars 2007 et a demandé asile à titre de réfugié.

 

[3]               La Commission a, dans sa décision du 13 juin 2008, rejeté la demande de Mme Huerta Morales au motif qu’il existait une possibilité de refuge intérieur (PRI) à Mexico ou à Guadalajara. Elle s’est expressément référée à la législation fédérale mexicaine adoptée en 2007 pour répondre à la violence conjugale contre les femmes, et au counselling juridique, psychologique et médical dont peuvent bénéficier gratuitement les victimes de violence conjugale à Guadalajara, par l’intermédiaire du Sistema Nacional para el Desarollo Integral de la Familia. La Commission a conclu que l’allégation de la demanderesse selon laquelle Rogelio Roque Flores pourrait la localiser était sans fondement, et elle a mentionné que la façon dont, selon la demanderesse, il l’avait retrouvée à Oaxaca n’était pas plausible. La Commission a également souligné que Mme Huerta Morales a uniquement tenté d’obtenir l’aide de la police locale et municipale. Sa principale conclusion a été que « même si la demandeure d’asile se faisait poursuivre à Mexico ou à Guadalajara, et j’estime que cela n’est pas probable, une protection policière pourrait raisonnablement lui être assurée. L’agent de persécution exercerait une influence limitée dans ces villes. »

 

Les questions en litige

[4]               La demanderesse soulève trois questions :

a)      La conclusion de la Commission selon laquelle il était improbable que l’agresseur soit capable de la retrouver à quelque endroit que ce soit au Mexique est-elle déraisonnable?

b)      La Commission a-t-elle commis une erreur en ne tenant pas correctement compte de ce que l’identité de l’agresseur, plus précisément celle de l’oncle de celui-ci, influerait sur la possibilité de bénéficier de la protection de l’État?

c)      La Commission a-t-elle commis une erreur en concluant que la demanderesse pourrait bénéficier de la protection de l’État à Mexico et à Guadalajara?

 

Analyse

[5]               Depuis quinze ans, la Cour fédérale formule et développe le droit canadien relatif à la protection de l’État, en interprétant et en appliquant l’arrêt de principe à cet égard, Canada (Procureur général) c. Ward, [1993] 2 R.C.S. 689. Le juge La Forest y a souligné la nature supplétive de la protection des réfugiés; la responsabilité du Canada ne sera engagée que si l’État étranger n’assure pas de protection. En l'absence d'un effondrement complet de l'appareil étatique, il y a lieu de présumer que celui-ci est en mesure d’assurer cette protection. Le principe de la substitution a soulevé divers problèmes relativement à l’intensité de la présomption de la protection de l’État et au type de preuve susceptible d’en démontrer l’absence. Les principes suivants ont été formulés à cet égard :

i)        plus les institutions de l’État en cause seront démocratiques, plus lourde sera pour le demandeur la charge de réfuter la présomption de protection de l’État : Kadenko c. Canada (Solliciteur général), (1996), 206 N.R. 272 (C.A.F.).  

ii)               Le demandeur d’asile doit raisonnablement tenter de solliciter la protection de son État, mais n’a pas à épuiser tous les recours possibles : Chaves c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 193.

iii)              La preuve suffisante pour réfuter la présomption doit être « claire et convaincante » : Hinzman c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CAF 171.

iv)             La protection supplétive du Canada ne se trouvera pas engagée parce qu’il n’existe pas de protection parfaite ou idéale dans l’État en cause; c’est la « suffisance » qui importe, non pas l’efficacité intrinsèque : Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. Carillo, 2008 CAF 94.

 

[6]               Le droit relatif à la PRI est étroitement associé à la notion de protection de l’État. Le juge Kelen a récemment résumé les principes juridiques à cet égard dans Farias c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 1035, au paragraphe 34 :

1.      Si la PRI est une question litigieuse, la Commission du statut de réfugié doit en aviser le demandeur d’asile avant l’audience (Rasaratnam, précité, par le juge Mahoney au paragraphe 9, Thirunavukkarasu) et identifier des lieux précis comme PRI dans le pays d’origine du demandeur d’asile (Rabbani c. Canada (MCI), [1997] 125 F.T.R. 141 (C.F.), précitée, au paragraphe 16, Camargo c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) 2006 CF 472, 147 A.C.W.S. (3d) 1047, aux paragraphes 9 et 10);

 

2.      Il convient d’appliquer un test disjonctif à deux volets afin de déterminer s’il existe une PRI. Voir, p. ex., Rasaratnam, précité; Thirunavukkarasu, précité; Urgel, précitée, au paragraphe 17.

 

                                                                     i.      La Commission doit avoir été persuadée par le demandeur d’asile, selon la prépondérance de la preuve, qu’il existe une possibilité sérieuse qu’il soit persécuté dans les lieux qu’elle a proposés comme PRI; ou

                         

                                                                   ii.      Compte tenu de la situation propre au demandeur, il serait déraisonnable que le demandeur cherche refuge dans les lieux proposés comme PRI;

 

3.      Le demandeur a la charge de prouver qu’il n’existe pas de PRI ou que cette PRI est déraisonnable dans les circonstances. Voir Mwaura c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) 2008 CF 748, par la juge Tremblay-Lamer, au paragraphe 13; Kumar c . Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) 130 A.C.W.S. (3d) 1010, 2004 CF 601, par le juge Mosley, au paragraphe 17;

 

4.      Le critère est élevé pour déterminer ce qui rend une PRI déraisonnable dans la situation du demandeur d’asile : voir Khokhar c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 449, par le juge Russell, au paragraphe 41. Selon Mwaura, précitée, au paragraphe 16, et Thirunavukkarasu, précité, au paragraphe 12, il convient d’appliquer un critère souple pour déterminer si une PRI est déraisonnable en tenant compte de la situation particulière au demandeur. C’est un critère objectif;

 

5.      La PRI doit être réalistement accessible au demandeur, p. ex. le demandeur n’est pas censé s’exposer à un grand danger physique ou subir des épreuves indues lorsqu’il se rend dans un lieu de PRI ou y demeure. Le demandeur ne devrait pas être tenu de se cacher dans une région isolée, par exemple dans une caverne, dans le désert ou dans la jungle. Voir : Thirunavukkarasu, précitée, au paragraphe 14;

 

6.      Le fait que le demandeur d’asile n’a ni amis ni parents dans le lieu proposé comme PRI ne rend pas cette PRI déraisonnable. Le demandeur d’asile n’a probablement pas d’amis ni de parents au Canada. Le fait que le demandeur d’asile ne soit pas en mesure de se trouver un emploi approprié dans son domaine de profession peut ou non rendre la PRI déraisonnable. Cela vaut également pour le Canada;

 

[7]               Gardant ces principes à l’esprit, j’examinerai à présent les questions précises soulevées par la demanderesse en l’espèce.

 

         L’agresseur pourrait-il retrouver la demanderesse?

[8]        La Commission a conclu qu’« aucun élément de preuve convaincant ne démontre que Rogelio serait capable de retrouver la demandeure d’asile à quelque endroit que ce soit au Mexique ». La demanderesse prétend que la Commission s’est posé la mauvaise question. Elle aurait dû se demander s’il existait un risque raisonnable ou une possibilité sérieuse de persécution :

Adjei c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1989] A.C.F. no 67 (C.A.F.). Elle fait valoir qu’au lieu de se demander ce qui pourrait raisonnablement survenir, la Commission s’est demandé ce qui arriverait et a, de ce fait, appliqué un critère trop rigoureux.

 

[9]        Le défendeur allègue qu’aucune erreur de cette nature n’a été commise. Il soutient que la conclusion que l’agresseur ne pourrait probablement pas retrouver la demanderesse au Mexique était une conclusion de fait, non une affirmation de la norme de preuve à laquelle la demanderesse était tenue de satisfaire. L’avocate renvoie à des passages de la décision où la Commission décrit avec précision le fardeau selon lequel la demanderesse doit « prouver qu’il y a une possibilité raisonnable d’être persécuté dans tout le pays ». [Non souligné dans l’original.]

 

[10]      La demanderesse répond que la situation en l’espèce ressemble fort à celle des décisions Carpio c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1994] A.C.F. no 383, 76 F.T.R. 64, et Ghose c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2007] A.C.F. no 464, dans lesquelles, même si la Commission avait correctement énoncé le critère au début de l’analyse, l’utilisation du conditionnel dans une conclusion clé soulevait un doute, partant une erreur susceptible de contrôle, quant à savoir quel critère la Commission avait effectivement employé.

 

[11]      Comme l’a fait remarquer la juge Reed dans Carpio, dans des circonstances comme celles de l’espèce, il ne convient pas d’interpréter les mots hors contexte – il faut examiner l’ensemble de la décision. La question à poser est donc si, après avoir lu toute la décision, on se demande encore si la Commission a appliqué le bon critère. Si oui, l’affaire est alors susceptible de contrôle. Elle ne l’est pas s’il ne fait aucun doute que le bon critère a été appliqué.

 

[12]      Dans les décisions citées par la juge Snider au paragraphe 21 de Ghose, les termes qu’avait employés la Commission donnaient à penser qu’elle exigeait que les demandeurs prouvent qu’ils seraient persécutés. Dans la décision Carpio par exemple, la Commission avait écrit que [traduction] « cela ne signifie pas […] que le revendicateur risque fort d’être persécuté ». Ainsi formulé, le critère est à l’évidence plus rigoureux que ce qu’implique l’expression « crainte fondée de persécution », qui a son fondement dans la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés et dans la loi qui l’a précédée. La juge Snider a examiné dans Ghose l’extrait suivant de la décision qu’elle étudiait : « [Il est] déraisonnable de conclure que les hommes de main du BNP ou du JI reconnaîtraient le demandeur d’asile dans la région densément peuplée de Dacca ou, de façon plus précise, que le chef local du BNP, Siddique, ou celui du JI, à Maulvibazar, puissent apercevoir le demandeur d’asile à Dacca s’ils s’y rendaient. » La juge Snider a conclu qu’avec un tel libellé, même s’il ne s’agissait pas d’une formulation du critère aussi erronée que l’expression étudiée dans Carpio, « la Commission semble avoir exigé que le demandeur prouve que, selon toute vraisemblance, il serait persécuté à Dacca. » La décision Ghose peut être mis en opposition avec Nilani c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 1041, une décision antérieure dans laquelle la juge Snider a rejeté une allégation de même nature concernant l’usage que la Commission a fait du mot « probable », sur le fondement que dans l’expression contestée, elle ne discutait pas en réalité la probabilité de la persécution, mais quelque chose d’autre.

 

[13]      En l’espèce, quand la Commission a conclu qu’« aucun élément de preuve convaincant ne démontre que Rogelio serait capable de retrouver la demandeure d’asile à quelque endroit que ce soit au Mexique », à mon avis, elle ne faisait pas référence au point de savoir si la persécution était plus que probable ni ne formulait aucun type de critère à cet égard. Elle commentait plutôt quelque chose d’autre – une absence de preuve fiable relativement à l’allégation de la demanderesse que Rogelio la retrouverait partout au Mexique, puisqu’il l’avait retrouvée à Oaxaca. Quand on lui avait demandé comment il l’y avait localisée, elle avait répondu que c’était soit par sa carte d’électeur et ses reçus de téléphone ou en se servant de l’influence de son oncle. La Commission a conclu que ces explications étaient peu plausibles ou constituaient des moyens impossibles de localiser la demanderesse. Elle a donc raisonnablement conclu que, d’après son analyse des éléments de preuve, il n’existait pas de preuve convaincante que le petit ami pourrait retrouver la demanderesse dans les villes ayant été désignées comme des PRI.

 

[14]      Dans Mutangadura c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CF 298, où l’emploi du conditionnel à propos d’un risque de persécution faisait également problème, le juge Phelan a observé qu’ « [U]ne personne ne peut s’arrêter sur ces mots ou se poser des questions de sémantique sans tenir compte de la décision entière et du contexte dans lequel ces mots sont employés ». Je suis d’accord. À mon avis, et en conservant à l’esprit que la démarche qui convient est d’étudier la décision dans son ensemble, il est clair que la Commission n’imposait pas une norme trop élevée à la demanderesse. À la page 3 de sa décision, la Commission a observé avec raison qu’« [i]l incombe toujours à un demandeur d’asile de prouver qu’il y a une possibilité raisonnable d’être persécuté dans tout le pays », ce qui constitue une formulation exacte du critère. Après avoir étudié les preuves concernant la façon dont le petit ami avait prétendument retrouvé la demanderesse, la Commission écrit que « [...] si la demandeure d’asile se faisait poursuivre à Mexico ou à Guadalajara, et j’estime que cela n’est pas probable, une protection policière pourrait raisonnablement lui être assurée ». Ce passage établit clairement que la Commission estime improbable que la demanderesse soit persécutée, et de surcroît, une protection lui serait de toute façon assurée. Ces conclusions sont absolument incompatibles avec l’existence d’une possibilité sérieuse, ou d’un risque raisonnable, de persécution.

 

[15]      Même si j’avais quelque doute sur le point de savoir si la Commission a appliqué le bon critère, je rejetterais la demande de contrôle judiciaire si cela était le seul motif invoqué pour contester la décision de la Commission. J’affirme ceci car, quelque soit le critère employé à propos de la possibilité que M. Roque Flores retrouve la demanderesse, la demande aurait été rejetée, étant donné la conclusion de la Commission que la protection de l’État pourrait être assurée dans les PRI désignées.

 

         L’identité de l’agresseur pourrait-elle influer sur la possibilité de bénéficier de la protection de l’État?

[16]      La demanderesse allègue qu’il a été déraisonnable de la part de la Commission de conclure que « l’agent de persécution exercerait une influence limitée » à Mexico et à Guadalajara, étant donné la charge occupée par l’oncle de celui-ci. Elle prétend que les conclusions de la Commission sont pure spéculation et nullement étayées par la preuve.

 

[17]      La demanderesse invoque des documents qui traitent d’une [traduction] « culture d’impunité et de corruption fortement ancrée » au Mexique et soutient que par l’intermédiaire de la situation de gouverneur de son oncle et de son influence, l’agresseur serait en mesure de la localiser n’importe où au Mexique. Ainsi que je l’ai mentionné, la Commission a conclu qu’il serait improbable que l’agresseur localise la demanderesse à Mexico et à Guadalajara. 

 

[18]      Il appartenait à la demanderesse de prouver de façon claire et convaincante que l’oncle serait disposé à aider son neveu et qu’il avait la situation et le pouvoir pour la localiser. La Commission a fait observer que la demanderesse n’avait pas rencontré cet oncle une seule fois pendant les trois années et demie qu’avait duré sa relation avec Rogelio Rogue Flores. Elle a également conclu qu’« [a]ucun élément de preuve convaincant ne démontre qu’il existe une relation étroite entre Rogelio et le gouverneur ». Même si l’oncle était en mesure de se servir de sa situation pour localiser la demanderesse, rien ne prouve donc qu’il ait été disposé à le faire. C’est à mon avis une conclusion que la Commission a raisonnablement tirée vu les preuves dont elle disposait. En l’absence d’une preuve selon laquelle l’oncle et le neveu étaient proches ou que l’oncle avait indiqué vouloir aider son neveu à localiser la demanderesse, il est purement hypothétique de sa part d’alléguer que l’oncle aiderait Rogelio Roque Flores à la retrouver. On ne peut en conséquence affirmer que la conclusion de la Commission était déraisonnable.

 

La preuve de la protection de l’État

[19]      La demanderesse allègue que la Commission a commis une erreur lorsqu’elle a jugé qu’elle bénéficierait de la protection de l’État à Mexico et à Guadalajara. Elle prétend qu’une telle conclusion est déraisonnable, car elle n’a fait que partiellement référence aux documents sur la situation du pays, sans prendre en compte les preuves contradictoires ou sans rien en dire. La demanderesse soutient qu’un document en particulier méritait que la Commission le commente et l’examine, soit le rapport de 2006 de Human Rights Watch. Elle soutient que ce rapport présente des éléments de preuve des difficultés auxquelles sont confrontées les victimes de violence conjugale à Mexico et ailleurs au Mexique.

 

[20]      La loi n’oblige pas la Commission à faire précisément référence à tous les documents que lui remettent les parties. Si un document, toutefois, présente une preuve claire et convaincante qui va à l’encontre des conclusions de la Commission, celle-ci peut alors devoir expliquer pourquoi elle n’a pas été convaincue par le document. En l’espèce, la Commission s’est beaucoup appuyée sur la loi fédérale générale sur le droit des femmes à vivre une vie sans violence, qui a été adoptée au Mexique le 1er février 2007, et sur l’application de cette loi dans le district fédéral de Mexico et dans l’État de Jalisco dont Guadalajara est la capitale. Cette loi est plus récente que le rapport qui, selon la demanderesse, a été passé sous silence. Au vu de cette loi nouvellement adoptée, on peut soutenir que l’information du rapport de 2006 de Human Rights Watch est ancienne.

 

[21]      La lecture de l’ensemble de la décision révèle que la Commission a exposé pourquoi elle a préféré les éléments de preuves auxquels elle a accordé du poids. J’estime, après examen du dossier certifié du tribunal, que la Commission n’a pas disposé d’éléments de preuve qui étaient contraires à ses conclusions, ni si impérieux qu’une analyse se serait imposée. On ne peut à ce titre affirmer que la conclusion de la Commission était déraisonnable.

 

[22]      Pour tous ces motifs, la présente demande de contrôle judiciaire sera rejetée. Les parties n’ont proposé aucune question en vue de la certification et ce dossier n’en révèle aucune. La présente affaire repose sur des faits qui lui sont propres.


 

JUGEMENT

LA COUR STATUE que:

1.                       la présente demande est rejetée;

2.                       aucune question n’est certifiée.

                                                                                                              « Russel W. Zinn »

Juge

 

Traduction certifiée conforme

 

Christian Laroche, LL.B.

Réviseur


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM-3445-08

 

INTITULÉ :                                       DANIELA HUERTA MORALES c.

                                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                                            ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 4 février 2009

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              Le juge ZINN

 

DATE DES MOTIFS
ET DU JUGEMENT :
                       le 3 mars 2009

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Douglas Lehrer

POUR LA DEMANDERESSE

 

Alison Engel-Yan

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

VanderVennen Lehrer

Avocats

Toronto (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

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