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Federal Court

Cour fédérale

 

Date : 20090424

Dossier : T-128-06

Référence : 2009 CF 389

ENTRE :

INGREDIA SA

PRODUITS LAITIERS ADVIDIA INC. (LES)

 

demanderesses

 

et

 

 

 

SA MAJESTÉ LA REINE DU CHEF DU CANADA,

L’AGENCE DES DOUANES ET DU REVENU DU CANADA ET

L’AGENCE DES SERVICES FRONTALIERS DU CANADA

 

défenderesses

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

(Motifs rendus d’abord à titre confidentiel le 20 avril 2009)

 

LE JUGE HARRINGTON

[1]               Les demanderesses, Ingredia, l’exportatrice française vers le Canada d’un produit appelé PROMILK 872B et sa filiale, Advidia, l’importatrice québécoise de ce produit, ont introduit une action en responsabilité civile délictuelle contre Sa Majesté la Reine pour obtenir 27 millions de dollars et d’autres réparations parce que PROMILK a été classé sous le mauvais numéro tarifaire. Les droits sous le bon tarif s’élevaient à 6,5 %, alors que les droits de douanes imposés sous le mauvais tarif représentaient un taux prohibitif de 270 %. Jusqu’à ce que la situation soit redressée par le Tribunal canadien du commerce extérieur (TCCE), décision confirmée par la Cour d’appel fédérale, les demanderesses, selon elles, se sont vues dans les faits interdire de commercialiser PROMILK au Canada. Les défenderesses (la Couronne) présentent maintenant une requête pour obtenir un jugement sommaire au motif qu’il n’y a aucune cause d’action ou, s’il y en a une, que l’action est frappée de prescription.   

 

DÉCISION

[2]               Bien que j’estime que le fondement de l’action est extrêmement fragile, je ne suis pas convaincu qu’il n’y a aucune véritable question litigieuse relativement à la déclaration ou que je dispose d’une preuve suffisante pour tirer les conclusions de fait et de droit nécessaires pour rejeter l’action. Je suis toutefois convaincu que l’action est frappée de prescription, car elle n’a pas été introduite dans les trois mois suivant la date du fait générateur du litige, comme l’exige l’article 106 de la Loi sur les douanes. La requête en jugement sommaire de la Couronne est accueillie.

 

LES FAITS

[3]               En 1998, Ingredia a entamé des discussions avec une entreprise canadienne pour qu’elle importe des produits d’isolat de protéine de lait, notamment PROMILK 872B. Le contenu en protéines de PROMILK 872B s’élevait alors à 85 % selon le poids sec. Le numéro tarifaire applicable n’était pas clairement établi. Si le produit était classé sous le chapitre 35 du Tarif des douanes, les droits applicables seraient de 6,5 %. Cependant, il était aussi possible de le classer sous le chapitre 4, lequel imposait des droits de 270 %. Les demanderesses prétendent que, à ce taux, le coût du produit au Canada aurait été prohibitif au point d’en empêcher la commercialisation. 

[4]               Un agent de l’Agence des douanes et du revenu du Canada (ADRC), comme elle s’appelait alors, a précisé que, si le contenu en protéines pouvait être augmenté à au moins 87 %, PROMILK 872B serait classé sous le chapitre 35. Les demanderesses affirment que, en conséquence, un PROMILK 872B spécial satisfaisant à cette exigence a été créé expressément pour le marché canadien.

 

[5]               Les demanderesses ont alors demandé une décision nationale des douanes (DND), un mécanisme permettant aux parties de savoir avant l’importation comment le produit sera classé. Les directives des DND prévoient que la DND lie le ministère et l’importateur tant que les conditions précisées dans la demande originale demeurent inchangées ou tant que la DND n’est pas annulée ou révoquée.

 

[6]               Bien que PROMILK 872B n’ait pas été classée sous le numéro tarifaire que prévoyaient les demanderesses, il a néanmoins été classé en 1999 sous le chapitre 35, au taux de 6,5 %. Pour permettre certains changements administratifs, la DND a été transférée en 2001 sans que des modifications soient apportées quant au fond.  

 

[7]               Cependant, en avril 2003, l’ADRC a émis un [traduction] « avis de correction », lequel plaçait PROMILK 872B sous le chapitre 4, ce qui entraînait l’application de droits de 270 %.

 

[8]               Les demanderesses ont protesté, mais l’ADRC les a informées que le seul moyen pratique de contester la validité de la nouvelle DND de 2003 était d’importer une quantité représentative du produit, de payer les droits et d’invoquer les dispositions de contrôle et d’appel de la Loi sur les douanes. En juin 2003, Advidia a importé pour la forme 1 500 kg de PROMILK 872B.

 

[9]               En juillet 2003, un agent des douanes a classé PROMILK 872B sous le chapitre 4. Les droits ont été payés et la contestation a commencé. Le commissaire a confirmé la décision en octobre 2003. 

 

[10]           Advidia a ensuite interjeté appel auprès du TCCE, la voie de recours prévue par la Loi sur les douanes, et a obtenu gain de cause en mars 2005. Le TCCE a conclu que PROMILK 872B aurait dû être classé sous le chapitre 35, ce qui aurait entraîné l’application de droits de 6,5 %. 

 

[11]           Le commissaire a interjeté appel auprès de la Cour d’appel fédérale, en vertu du paragraphe 68(1) de la Loi sur les douanes. La Cour d’appel fédérale a entendu l’appel le 31 janvier 2006 et l’a rejeté à l’audience. Les parties n’ont pas demandé l’autorisation d’interjeter appel à la Cour suprême.  

 

[12]           En conséquence, les droits excédentaires ont été remboursés, avec intérêts.

 

[13]           Le 24 janvier 2006, une semaine avant l’audience devant la Cour d’appel fédérale, les demanderesses ont déposé leur déclaration, laquelle a été modifiée deux fois.

 

LE FONDEMENT JURIDIQUE DE LA DÉCLARATION

[14]            Le fondement juridique de la responsabilité de la Couronne dans un cas comme en l’espèce se trouve dans la Loi sur la responsabilité civile de l’État et le contentieux administratif. Sans qu’il soit déterminé que l’ensemble des actes allégués des demanderesses se sont produits au Québec, il ne fait aucun doute que les faits en l’espèce sont plus étroitement liés au Québec qu’à toute autre province. À l’article 2 de la Loi, la responsabilité dans la province de Québec est définie comme étant « la responsabilité civile extracontractuelle », par rapport à « la responsabilité délictuelle » dans les autres provinces.

 

[15]           L’alinéa 3a) est rédigé ainsi :

3. En matière de responsabilité, l’État est assimilé à une personne pour :

 

 

a) dans la province de Québec :

 

(i) le dommage causé par la faute de ses préposés,

 

(ii) le dommage causé par le fait des biens qu’il a sous sa garde ou dont il est propriétaire ou par sa faute à l’un ou l’autre de ces titres;

3. The Crown is liable for the damages for which, if it were a person, it would be liable

 

(a) in the Province of

Quebec, in respect of

 

(i) the damage caused by the fault of a servant of the Crown, or

 

(ii) the damage resulting from the act of a thing in the custody of or owned by the Crown or by the fault of the Crown as custodian or owner; and

 

 

[16]           Dans les faits, la responsabilité du fait d’autrui de la Couronne doit trouver son fondement au sous‑alinéa 3a)(i), c’est‑à‑dire le dommage causé par la faute de ses préposés.

 

[17]           Les demanderesses allèguent une multitude de fautes commises par les préposés de la Couronne, soit les agents des douanes. Pour n’en nommer que quelques‑unes : la DND a été modifiée en 2003 sans égard aux directives adoptées ni aux exigences légales et la modification a été faite de mauvaise foi; la décision a été prise sans égard à l’équité procédurale et au droit d’être entendu; il y a eu discrimination dans la mesure où un produit de la Nouvelle‑Zélande, qui serait quasiment identique, a pu être importé sous un autre tarif, au détriment des demanderesses et à l’avantage de leurs concurrents; une importance injustifiée a été accordée à la position des Producteurs laitiers du Canada, qui se sont opposés à la première classification de PROMILK 872B (les Producteurs laitiers du Canada ont obtenu le statut d’intervenant devant le TCCE et la Cour d’appel fédérale); une importance injustifiée a été accordée à la position adoptée par le service des douanes des États‑Unis, le United States Customs Service. 

 

[18]           De son côté, la Couronne nie avoir agi de mauvaise foi ou avoir eu une connaissance particulière des relations contractuelles des demanderesses. La DND a été modifiée en 2003 à la suite d’une vérification légitime effectuée en vertu de l’article 42.01 de la Loi sur les douanes. Le produit de la Nouvelle‑Zélande était différent, mais, de toute façon, il n’y avait certainement aucune intention de le favoriser au détriment de PROMILK 872B. Les défenderesses affirment qu’il n’y a aucun lien de cause à effet entre les fautes alléguées et les dommages. Dans une certaine mesure, les demanderesses auraient pu tirer avantage de certains quotas, mais, plus précisément, elles auraient pu importer le produit, payer les droits puis, après avoir eu gain de cause, obtenir un remboursement avec intérêts. Les défenderesses ne peuvent être tenues responsables de la décision consciente des demanderesses ne pas importer PROMILK 872B durant la procédure de contrôle et d’appel.

 

[19]           Enfin, l’action est frappée de prescription selon l’article 106 de la Loi sur les douanes, qui prévoit un délai de trois mois pour l’introduction d’actions contre les personnes des faits de qui la Couronne est responsable. Il est en outre soutenu que, selon les articles 10 et 24 de la Loi sur la responsabilité civile de l’État et le contentieux administratif, la Couronne n’est pas responsable à moins que son préposé puisse être responsable et qu’elle peut faire valoir tout moyen de défense qui pourrait être invoqué dans une action contre cette personne, y compris la prescription.

 

[20]            La déclaration a été déposée le 24 janvier 2006. Selon la couronne, le fait générateur se serait produit avant le 24 octobre 2003.

 

LES PRINCIPES APPLICABLES AUX JUGEMENTS SOMMAIRES

[21]           Les requêtes visant l’obtention d’un jugement sommaire sont régies par les articles 13 et suivants des Règles des Cours fédérales. Si la Cour est convaincue qu’il n’y a aucune véritable question litigieuse, elle rend un jugement sommaire en conséquence. Si elle est convaincue que la seule véritable question litigieuse est une question de droit, elle peut trancher cette question. L’élément essentiel de la requête des défenderesses est que, en droit, il n’y a pas matière à poursuite. Cependant, il existe certaines questions de fait et de crédibilité, comme celles portant sur les allégations de mauvaise foi et d’influence injustifiée. Je ne suis pas en mesure de tirer les conclusions appropriées à partir du dossier devant moi.

 

[22]           Si l’on met de côté la question de la prescription, les chances de succès des demanderesses, bien que douteuses, ne sont pas si douteuses que la cause ne mérite pas d’être examinée (Granville Shipping Co. c. Pegagus Lines Ltd. (T.D.), [1996] 2 C.F. 853, 111 F.T.R.189).

[23]           Pour ce qui est de l’allégation d’interférence délictueuse dans des relations contractuelles, comme l’a fait remarqué la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Kanematsu GmbH. c. Acadia Shipbrokers Ltd. (2000), 259 N.R. 201, [2000] A.C.F. n978 (QL), au paragraphe 18, il s’agit d’une question de fait sérieuse qui doit être résolue.

 

[24]           Bien que les allégations de mauvaise foi soient faciles à soulever et difficiles à prouver, le fait demeure que des actes outrepassant la portée de la loi peuvent entraîner une responsabilité (Roncarelli c. Duplessis, [1959] S.C.R. 121, 16 D.L.R. (2d) 689).

 

[25]           En dernière analyse, la classification de PROMILK 872B sous le chapitre 4 était une erreur. Il ne s’ensuit en aucune façon que l’agent ayant pris la décision originale s’est montré négligent. En effet, comme l’a fait observer la Cour d’appel fédérale, la question qu’elle devait trancher était de savoir si le TCCE avait commis une erreur en concluant que le numéro tarifaire 35.04 décrivait plus précisément les biens en cause que le numéro tarifaire 04.04 (Le Commissaire de l’Agence des douanes et du revenu du Canada et les Producteurs laitiers du Canada c. Les Produits laitiers Advidia inc., 2006 CAF 41, 346 N.R. 309,  au paragraphe 4).

 

[26]           En ce qui concerne l’obligation de diligence découlant de l’administration d’une loi, et les dommages causés par une négligence dans ce contexte, voir l’arrêt de la Cour d’appel fédérale dans Brewer Bros. c. Canada (Procureur général) (C.A.), [1992] 1 C.F. 25, 129 N.R. 3. Les demanderesses de ne devraient pas être privées d’un jugement à cette étape‑ci.

 

[27]           Bien qu’un avocat de common law puisse caractériser la présente action comme une action en responsabilité délictuelle pour pertes purement financières, ce qui serait un dommage trop indirect, l’action prend sa source au Québec où l’accent est placé sur la causalité plutôt que sur des décisions de politiques fondées sur l’éloignement (Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada c. Norsk Pacific Steamship Co., [1992] 1 R.C.S. 1021, 137 N.R. 241).

 

[28]            Cela mène à l’allégation selon laquelle il n’y a pas de lien de cause à effet entre la perte alléguée et la faute alléguée. Si les demanderesses avaient continué à importer et à payer les droits de 270 %, elles auraient obtenu un remboursement avec intérêts des sommes excédentaires. Les demanderesses affirment que cela n’a aucun sens en affaires. Un arrêt ayant une certaine pertinence est celui rendu par la Chambre des lords dans Liesbosch Dredger c. Edison, S.S. (Owners of), [1933] A.C. 449, qui portait sur l’évaluation des dommages à la suite du naufrage du Liesbosch, causé par une négligence. Si les appelants en avaient eu les moyens, ils auraient pu acheter une drague supplémentaire. Cependant, ils ont dû affréter plus de tonnage, ce qui, au fil du temps, a entraîné une plus grande perte. Lord Wright a conclu qu’ils ne pouvaient pas s’appuyer sur la triste situation dans laquelle leurs difficultés financières les avaient placées. Il a affirmé à la page 460 :                             [traduction]

À mon sens, les appelants n’ont pas droit à des dommages‑intérêts pour ce motif. L’acte délictueux des intimés a entraîné la perte concrète de la drague; cette perte doit d’une façon ou d’une autre se traduire en termes pécuniaires. Mais la perte réelle des appelants, dans la mesure où elle était due à leur propre impécuniosité, a découlé de cette impécuniosité, qui est une cause distincte et concurrente, extérieure à l’acte délictueux et de nature différente de l’acte délictueux; l’impécuniosité ne peut être attribuée aux actes des intimés et, à mon avis, ne fait pas partie des conséquences juridiques de ces actes. Le droit ne peut tenir compte de tout ce qui suit un acte délictueux; il considère certaines questions comme extérieures à son objet, car « le droit n’en finirait plus de juger les causes des causes » ou les conséquences des conséquences.

 

[29]           Toutefois, hormis la causalité, on pourrait également affirmer que cette affaire porte sur l’omission d’atténuer ses pertes. Parce qu’il incombe aux défenderesses de montrer que les demanderesses n’ont pas atténué leurs pertes, je ne suis pas convaincu pour le moment que leur décision de ne pas importer le produit pendant que la procédure de contrôle était en cours entraîne le rejet de leur action.

 

[30]           Les défenderesses soutiennent également que certains des arguments invoqués pour établir la responsabilité délictuelle sont nouveaux et n’ont pas été reconnus en droit. Il ne s’ensuit pas qu’ils doivent être rejetés du revers de la main. Voir l’arrêt de la Cour d’appel de l’Ontario dans Law Society of Upper Canada c. Ernst & Young (2003), 65 O.R. (3d) 577, 227 D.L.R. (4th) 577.

 

LA PRESCRIPTION

[31]           Le point de départ pour la prescription est l’article 39 de la Loi sur les Cours fédérales, qui est rédigé ainsi :

39. (1) Sauf disposition contraire d’une autre loi, les règles de droit en matière de prescription qui, dans une province, régissent les rapports entre particuliers s’appliquent à toute instance devant la Cour d’appel fédérale ou la Cour fédérale dont le fait générateur est survenu dans cette province.

 

 (2) Le délai de prescription est de six ans à compter du fait générateur lorsque celui-ci n’est pas survenu dans une province.

 

 

 

[Non souligné dans l’original.]

39. (1) Except as expressly provided by any other Act, the laws relating to prescription and the limitation of actions in force in a province between subject and subject apply to any proceedings in the Federal Court of Appeal or the Federal Court in respect of any cause of action arising in that province.

 

 (2) A proceeding in the Federal Court of Appeal or the Federal Court in respect of a cause of action arising otherwise than in a province shall be taken within six years after the cause of action arose.

 

[Emphasis added.]

 

 

[32]           Comme le dispose expressément l’article 106 de la Loi sur les douanes :

 

106. (1) Les actions contre l’agent, pour tout acte accompli dans l’exercice des fonctions que lui confère la présente loi ou toute autre loi fédérale, ou contre une personne requise de l’assister dans l’exercice de ces fonctions, se prescrivent par trois mois à compter du fait générateur du litige.

 

 

 

(2) Les actions en recouvrement de biens saisis, retenus ou placés sous garde ou en dépôt conformément à la présente loi, contre la Couronne, l’agent ou le détenteur de marchandises que l’agent lui a confiées, se prescrivent par trois mois à compter de celle des dates suivantes qui est postérieure à l’autre :

a) la date du fait générateur du litige;

 

 

 

b) la date du règlement définitif de toute instance introduite en vertu de la présente loi au sujet des biens en cause.

 

 

 

 (3) Lorsque dans deux actions distinctes, l’une intentée en vertu de la présente loi, l’autre non, des faits sensiblement identiques sont en cause, il y a suspension d’instance dans la seconde action, sur demande du ministre présentée à la juridiction saisie, jusqu’au règlement définitif de la première action.

 

106. (1) No action or judicial proceeding shall be commenced against an officer for anything done in the performance of his duties under this or any other Act of Parliament or a person called on to assist an officer in the performance of such duties more than three months after the time when the cause of action or the subject-matter of the proceeding arose.

 

 (2) No action or judicial proceeding shall be commenced against the Crown, an officer or any person in possession of goods under the authority of an officer for the recovery of anything seized, detained or held in custody or safe-keeping under this Act more than three months after the later of

(a) the time when the cause of action or the subject-matter of the proceeding arose, and

 

(b) the final determination of the outcome of any action or proceeding taken under this Act in respect of the thing seized, detained or held in custody or safe-keeping.

 

 (3) Where, in any action or judicial proceeding taken otherwise than under this Act, substantially the same facts are at issue as those that are at issue in an action or proceeding under this Act, the Minister may file a stay of proceedings with the body before whom that action or judicial proceeding is taken, and thereupon the proceedings before that body are stayed pending final determination of the outcome of the action or proceeding under this Act.

 

[33]           Si une loi fédérale en particulier s’applique, comme l’article 106 de la Loi sur les douanes, le litige prend fin. Si ce n’est pas le cas, on doit examiner si le fait générateur a eu lieu dans une province. Le cas échéant, le délai de prescription concerné de cette province s’appliquera. Si le fait générateur ne s’est pas produit dans une province, alors la prescription est de six ans. Voir Nicholson c. Canada, [2000] 3 C.F. 225, 181 F.T.R. 200.

 

[34]           En l’espèce, si le fait générateur s’est produit dans une province, cette province serait le Québec et la prescription serait de trois ans, comme le prévoit l’article 2925 du Code civil du Québec. Bien que j’aie tendance à considérer que l’ensemble du fait générateur s’est produit au Québec (l’endroit où se situe le siège des douanes n’ayant aucune importance (Pearson c. Canada, 2006 CF 931, 297 F.T.R. 121, au paragraphe 28, conf. pour d’autres motifs par 2007 CAF 380, (2007), 371 N.R. 187)), il n’est pas nécessaire de trancher cette question parce que l’action a été introduite dans le délai de trois ans. Si l’article 106 de la Loi sur les douanes ne s’applique pas, l’action n’est pas frappée de prescription. Cela soulève trois questions :

a)                  Si la présente action avait été introduite contre les agents qui ont mal interprété le Tarif des douanes, auraient‑ils pu invoquer la prescription de trois mois?

b)                  Le cas échéant, la Couronne peut‑elle aussi invoquer la prescription?

c)                  Le cas échéant, quand le délai de trois mois a‑t‑il commencé à courir?

 

[35]           Les demanderesses soutiennent également que, de toute façon, j’aurais le pouvoir de proroger le délai. Je ne suis pas d’accord. Bien que la Loi sur les douanes comporte un certain nombre de dispositions qui permettent la prorogation de délais dans le cadre de la procédure de contrôle, l’article 106 n’en comporte pas. En outre, il s’agit d’une action et non d’une demande de contrôle judiciaire. Les pouvoirs de prorogation de délais conférés à la Cour par le paragraphe 18.1(2) de la Loi sur les Cours fédérales et par l’article 8 des Règles des Cours fédérales  ne s’appliquent pas. Voir Liu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2007 CAF 94, 362 N.R. 81.

 

LA PRESCRIPTION DE TROIS MOIS S’APPLIQUE-T-ELLE AUX PRÉPOSÉS DE LA COURONNE?

[36]           Les demanderesses soutiennent que la négligence des préposés de la Couronne résulte en partie, si ce n’est en entier, de la modification négligente de la DND, et que cet acte n’est pas visé par l’article 106. Il s’agit d’une question hypothétique à laquelle il n’est pas nécessaire de répondre. Si la DND était une décision d’un office fédéral auquel ne s’appliquaient pas les mécanismes de contrôle prévus dans la Loi sur les douanes en tant que telle, alors la demande de contrôle judiciaire devant la Cour aurait dû être présentée dans les 30 jours, comme l’exige l’article 18.1 de la Loi sur les Cours fédérales (bien que la Cour puisse accorder une prorogation).

 

[37]           En l’espèce, le fait générateur résulte de la décision prise par l’agent des douanes en juillet 2003 de classer une certaine importation de PROMILK 872B sous le chapitre 4 plutôt que sous le chapitre 35. La Loi sur les douanes est divisée en plusieurs parties. L’article 106 se trouve dans la partie VI intitulée Contrôle d’application. En plus de la prescription applicable aux actions, cette partie porte sur les pouvoirs des agents, la communication de renseignements, les enquêtes, les pénalités et intérêts, les saisies, la restitution des marchandises saisies, la confiscation, la destination des objets abandonnés ou confisqués, la perception des droits sur le courrier, la preuve ainsi que les interdictions, infractions et peines. Par contre, le calcul des droits se trouve dans une toute autre partie, la partie III, qui porte sur des questions comme la détermination du classement tarifaire et le droit de demander une révision.

 

[38]           Les demanderesses soutiennent par conséquent que leur cause d’action contre la Couronne pour responsabilité du fait d’autrui découle de la détermination négligente du tarif applicable en vertu de la partie III. Si elles avaient poursuivi l’agent ou les agents négligents, ceux‑ci n’auraient pas pu invoquer l’article 106, qui appartient à la partie VI. Je ne suis pas d’accord. Si les demanderesses n’avaient pas respecté la loi à la lettre, mais avaient plutôt tenté d’importer du PROMILK 872B sous le chapitre 35 plutôt que sous le chapitre 4, le produit aurait pu, et aurait dû, être saisi. Une action résultant de cette saisie aurait sans aucun doute été visée par l’article 106. La saisie aurait été inextricablement liée à l’application du mauvais tarif. La situation aurait ressemblé quelque peu à celle de l’affaire Kearns and McMurchy Inc. c. Canada et al., 2003 CFPI 814, 236 F.T.R. 279. Dans cette affaire, la demanderesse avait introduit une action contre Sa Majesté pour des dommages résultant de la retenue de certaines pièces de mitrailleuses. Non seulement la protonotaire Aronovitch a conclu que l’action, tant contre la Couronne que contre ses préposés, était frappée de prescription, mais elle a également conclu qu’une simple classification incorrecte de biens ne pouvait donner lieu à une action en responsabilité délictuelle, car la Loi sur les douanes prévoit une voie de recours.

 

[39]           En outre, bien que les titres des lois soient un sujet controversé, (voir Sullivan on the Construction of Statutes, 5e édition, pages 392 et suivantes), l’article 106 s’applique pour tout acte que l’agent accomplit dans l’exercice des fonctions « que lui confère la présente loi ou toute autre loi fédérale ». Selon mon interprétation de l’article 106, celui‑ci ne s’applique pas à la responsabilité pouvant découler de l’application négligente du mauvais tarif.

 

L’ARTICLE 106 S’APPLIQUE-T-IL À LA COURONNE?

[40]           La prochaine question est de savoir si la Couronne peut invoquer le paragraphe 106(1). Les demanderesses établissent une distinction entre le paragraphe 106(1) et 106(2), car seul ce dernier mentionne expressément la Couronne. Cependant, cette distinction porte d’une part sur le dommage causé par la faute d’un préposé et d’autre part sur le dommage causé par le fait des biens que le préposé a sous sa garde ou dont il est propriétaire ou par sa faute à l’un ou à l’autre de ces titres, aux termes du sous‑alinéa 3a)(i) de la Loi sur la responsabilité civile de l’État et le contentieux administratif, cité précédemment. La responsabilité du fait d’autrui pour la faute d’un préposé est prévue à l’article 1463 du Code civil du Québec, alors que la responsabilité du gardien d’un bien pour le préjudice résultant du fait autonome de celui-ci ou pour le préjudice causé par la ruine d’un immeuble se trouve aux articles 1465 et suivants.

 

[41]           En plus de la décision Kearns and McMurchy, précitée, il a été question de l’arrêt rendu par la Cour d’appel de l’Ontario dans 144096 Canada Ltd. (USA) c. Canada (Attorney General), (2003), 63 O.R. (3d) 172, 222 D.L.R. (4th) 577, dans lequel la Couronne, l’intimée, et ses préposés ont déposé une requête pour obtenir un jugement sommaire qui rejetterait l’action en dommages‑intérêts de la demanderesse pour la saisie et l’entreposage fautifs d’un avion au motif que l’action était frappée de prescription selon l’article 106 de la Loi sur les douanes. Le jugement sommaire a été accordé en première instance. Cependant, en appel, le juge Morden, tout en faisant observer que, en principe, il était logique que la prescription régissant les actions contre les employés s’applique aussi aux actions en responsabilité du fait d’autrui contre l’employeur, s’est demandé si invoquer la prescription était en fait un moyen de défense, comparativement à un moyen au fond qui permettrait de rejeter l’action sur le fond. La Cour d’appel a appliqué l’article 106 de la Loi sur les douanes aux préposés de la Couronne. Cependant, l’action a également été rejetée contre la Couronne au motif qu’elle pouvait invoquer la Loi sur l’immunité des personnes exerçant des attributions de l’ordre public de l’Ontario, laquelle prévoyait un délai de prescription de six mois. La Cour d’appel de l’Ontario a formulé ses observations expressément à titre de remarques incidentes.    

 

[42]           Bien que peu de décisions concernent l’article 106, une disposition semblable se trouve à l’article 269 de la Loi sur la défense nationale. Dans le cadre d’une requête en jugement sommaire dans la décision Baron c. Canada, [2000] A.C.F. n263 (QL), la juge Dawson a accordé le jugement sommaire à la demande de la Couronne au motif qu’il y avait prescription. Sa décision a été confirmée en appel, 2001 CAF 38, [2001] A.C.F. n317 (QL).

 

[43]           À mon avis, la prescription fait partie des moyens de défense et, en m’appuyant sur la décision Baron, précitée, je conclus que la Couronne peut invoquer l’article 106(1) de la Loi sur les douanes.

 

QUAND LE DÉLAI DE PRESCRIPTION A-T-IL COMMENCÉ À COURIR?

[44]           La question suivante est de savoir quand le délai de trois mois a commencé à courir. En l’espèce, il n’est pas important d’établir si le temps a commencé à courir à partir de la modification de la DND ou à partir de l’imposition du mauvais tarif. Dans l’un ou l’autre cas, la déclaration aurait été déposée avec plus de deux ans de retard. Il ne s’agit pas non plus d’une action découlant d’une saisie illégale et visée par le paragraphe 106(2) de la Loi sur les douanes. Il s’agit plutôt d’une action introduite relativement à des biens qui n’ont pas été importés du tout. Il s’agit d’une action en responsabilité civile délictuelle introduite en vertu de la Loi sur la responsabilité civile de l’État et le contentieux administratif. Le paragraphe 106(3) prévoit le cas de figure où de telles actions auraient vraisemblablement été suspendues par la Cour en attendant l’issue de la procédure de contrôle visant le tarif, si la Couronne elle‑même n’avait pas demandé un sursis prévu par la loi.

 

[45]           Les demanderesses soutiennent qu’un élément constitutif de leur action est les dommages, que les dommages étaient en cours et ne pouvaient être quantifiés plus tôt. Par conséquent, les éléments importants n’étaient pas tous établis quand elles ont intenté la poursuite (Central Trust Co. c. Rafuse, [1986] 2 R.C.S. 147, 69 N.R. 321). Je rejette cet argument, car les demanderesses savaient parfaitement qu’elles avaient subi ce qu’elles considèrent comme des dommages et avaient fait des calculs précis à cet égard bien avant d’intenter la poursuite. Les dommages étaient indéterminés et n’auraient été déterminés qu’au procès.

 

[46]           Un autre argument veut que les demanderesses aient appris au plus tôt qu’elles avaient une cause d’action quand la Cour d’appel fédérale a prononcé son jugement, ce qui ferait que leur action serait en fait prématurée. Bien qu’il soit concevable que leurs chances de succès dans la présente action auraient été nulles si la Cour d’appel fédérale n’avait pas confirmé la décision du TCCE, cette procédure n’est pas une excuse pour ne pas introduire d’action. Si les demanderesses avaient continué l’importation, elles auraient eu à passer par la procédure de contrôle à chaque importation, même si la procédure concernant ces importations subséquentes aurait sans doute été administrativement suspendue.

 

[47]           Selon un argument qui se rapporte sensiblement au précédent, la procédure de contrôle judiciaire, dont le point culminant a été l’arrêt de la Cour d’appel fédérale, et qui aurait pu se rendre jusqu’à la Cour suprême, devait être terminée avant que les demanderesses puissent introduire une action en dommages‑intérêts.  

 

[48]           Une différence des plus importantes doit être établie entre l’action en dommages‑intérêts contre la Couronne, sur laquelle la Cour fédérale et les cours provinciales ont compétence concurrente conformément à l’article 17 de la Loi sur les Cours fédérales, et le contrôle judiciaire visant la décision d’un office fédéral. Dans ce dernier cas, la Cour fédérale a compétence exclusive par défaut, sauf disposition contraire de la loi en question. La Loi sur les douanes prévoit qu’une personne peut demander une révision au commissaire (aujourd’hui le président) dans les 90 jours (article 60), qu’elle peut interjeter appel de cette décision auprès du TCCE dans les 90 jours (article 67) et que l’appel à la Cour fédérale ne peut se faire que sur une question de droit (article 68). En outre, à titre exceptionnel, la Cour d’appel fédérale a compétence pour connaître des demandes de contrôle judiciaire visant les décisions du TCCE, en vertu de l’article 28 de la Loi sur les Cours fédérales.  

 

[49]           Le délai normal pour déposer une demande de contrôle judiciaire à la Cour fédérale, c’est‑à‑dire la disposition applicable par défaut, est de 30 jours, comme le prévoit le paragraphe 18.1(2) de la Loi sur les Cours fédérales. Dans l’arrêt Budisukma Puncak Sendirian Berhad c. Canada, 2005 CAF 267, 338 N.R. 75, le juge Létourneau, au nom de la Cour d’appel fédérale, a affirmé ceci :

[60]      À mon avis, la raison primordiale pour laquelle un armateur qui s'estime lésé par les conclusions d'une inspection de sécurité de son navire doit épuiser les recours prévus par la loi avant d'intenter une action en responsabilité civile est l'intérêt public dans le caractère définitif des décisions qui font suite aux inspections. L'importance de cet intérêt public est reflétée dans les délais relativement brefs qui sont imposés à quiconque veut contester une décision administrative – un délai de 30 jours à compter de la date à laquelle la décision est communiquée, ou tel autre délai que la Cour peut accorder sur requête en prorogation de délai. Ce délai n'est pas capricieux. Il existe dans l'intérêt public, afin que les décisions administratives acquièrent leur caractère définitif et puissent aussi être exécutées sans délai, apportant la tranquillité d'esprit à ceux qui observent la décision ou qui veillent à ce qu'elle soit observée, souvent à grands frais. En l'espèce, la décision du président n'a été contestée qu'un an et demi après qu'elle a été rendue, lorsque les intimées ont déposé leur action en dommages-intérêts.

 

 

[50]           Bien que les observations formulées dans l’arrêt Berhad étaient des remarques incidentes, elles ont été intégrées aux motifs de l’arrêt Grenier c. Canada, 2005 CAF 348, [2006] 2 R.C.F. 287. L’arrêt Grenier est très important. Pendant que M. Grenier était incarcéré, une décision a été rendue à son sujet, décision qu’il considérait comme lui étant défavorable. Plutôt que de demander le contrôle judiciaire dans les 30 jours, comme l’exigeait la Loi sur les Cours fédérales, il a introduit une action avant l’échéance du délai de prescription, lequel était de trois ans, par adoption par renvoi de la loi québécoise.

 

[51]           Au nom de la Cour, le juge Létourneau a fait remarquer que, si une décision administrative était au cœur de l’action en dommages‑intérêts, l’intéressé devait commencer d’abord par le contrôle judiciaire. Cependant, je ne crois pas qu’il s’ensuive que le délai pour déposer une action en dommages‑intérêts découlant de cette même décision administrative commence à courir à la fin de l’ensemble de la procédure de contrôle judiciaire, qui a duré deux ans et demi en l’espèce. Le législateur ne pouvait pas avoir l’intention de faire commencer le délai de prescription seulement des années plus tard. La Cour d’appel fédérale a plus tard statué, dans Hinton c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2008 CAF 215, 379 N.R. 336, que l’arrêt Grenier ne faisait qu’exiger que la première étape soit une demande de contrôle judiciaire. Il n’étaye pas la proposition voulant que la procédure doive être parvenue à son issue avant que l’action en dommages‑intérêts soit déposée. Voir également Agustawestland International Ltd. c. Canada (Ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux), 2006 CF 1371, 303 F.T.R. 209.

 

[52]           Une difficulté découle du fait que les dommages‑intérêts ne font pas partie des réparations pouvant être obtenues par contrôle judiciaire (arrêt Hinton, précité, et Al‑Mhamad c. Canada (Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes), 2003 CAF 45, [2003] A.C.F. n145). Dans l’arrêt TeleZone Inc. c. Canada (Attorney General), 2008 ONCA 892, [2008] O.J. No. 5291 (QL), la Cour d’appel de l’Ontario a refusé de suivre l’arrêt Grenier. L’arrêt TeleZone regroupe quatre appels entendus conjointement à l’audience. Un de ceux‑ci, McArthur c. Canada, ressemble beaucoup à Grenier. M. McArthur a déposé une action en dommages‑intérêts devant la Cour supérieure de justice de l’Ontario pour détention injustifiée ou emprisonnement illégal découlant d’une ségrégation administrative, une décision d’un office fédéral, soit les Services correctionnels du Canada. La Couronne a contesté la compétence de la Cour supérieure de justice de l’Ontario. Au nom de la Cour d’appel de l’Ontario, le juge Borins a affirmé, au sujet de la Loi sur les Cours fédérales, au paragraphe 95 :

[traduction]

Il apparaît clairement que l’article 18 ne constitue pas un obstacle, ni une condition préalable, à la compétence de la Cour supérieure sur une demande en dommages‑intérêts en responsabilité civile contractuelle ou délictuelle. Les causes d’action en responsabilité contractuelle ou délictuelle ne sont pas les mêmes que celles des brefs de prérogatives et autres réparations extraordinaires visées à l’article 18. En bref, une réparation sous forme de dommages‑intérêts n’est pas un des redressements prévus à l’article 18.

 

Ces propos ont amené une réponse virulente de la part du juge Létourneau, qui s’exprimait au nom de la Cour d’appel fédérale, dans Manuge c. Canada, 2009 CAF 29, [2009] A.C.F. n73 (QL).

 

[53]           À l’heure actuelle, pour les deux arrêts, des demandes d’autorisation d’appel ont été déposées à la Cour suprême.

 

[54]           L’élément important est que, si le point de vue exposé dans l’arrêt TeleZone, précité, l’emporte, alors il n’y a absolument aucun fondement à l’argument selon lequel la procédure de contrôle judiciaire interrompt l’écoulement du délai pour une action en dommages‑intérêts.   

 

[55]           Il vaut la peine de mentionner que le moyen de défense de la prescription n’a pas été soulevé lorsque la défense a été originalement déposée en juillet 2006, mais seulement dans une défense modifiée qui a été déposée à la Cour, avec consentement de l’autre partie, en octobre 2008. À mon avis, que la Couronne n’ait pas invoqué la prescription dans sa première défense ne signifie pas qu’elle y avait renoncé. En l’espèce, la défense modifiée, invoquant le délai de prescription, a été déposée avec le consentement de l’autre partie. Le seul recours dont pourraient disposer les demanderesses serait lié aux frais engagés pour rien. En outre, dans la mesure où la loi québécoise pourrait s’appliquer, l’article 2881 du Code civil du Québec dispose que la prescription peut être opposée en tout temps, même en appel, à moins que la partie qui n’ait pas opposé le moyen n’ait manifesté son intention d’y renoncer. Aucune intention de ce genre n’a été manifestée en l’espèce.

 

[56]           Pour ces motifs, la requête en jugement sommaire est accueillie et l’action rejetée. Des observations au sujet des dépens peuvent être formulées d’ici 20 jours.

 

 

 

 

« Sean Harrington »

Juge

 

Ottawa (Ontario)

Le 24 avril 2009

 

 

Traduction certifiée conforme

Elisabeth Ross, traductrice


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                    T-128-06

 

INTITULÉ :                                                   INGEDIA SA ET. AL.

c.

SMR, ADRC et ASFC

 

LIEU DE L'AUDIENCE :                             MONTRÉAL (QUÉBEC)

 

DATE DE L'AUDIENCE :                           LE 25 MARS 2009

 

MOTIFS CONFIDENTIELS DU JUGEMENT RENDUS LE 20 AVRIL 2009, PUIS RENDUS PUBLIQUEMENT :

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                        LE JUGE HARRINGTON

 

DATE DES MOTIFS :                                  LE 24 AVRIL 2009

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Richard S. Gottlieb

Laurier W. Beauchamp

 

POUR LES DEMANDERESSES

Jean-Robert Noiseux

Andrew Gibbs

POUR LES DÉFENDERESSES

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Gottlieb & Associates

Avocats

 

POUR LES DEMANDERESSES

 

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

POUR LES DÉFENDERESSES

 

 

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