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Cour fédérale

Federal Court

Date :  20090508

Dossier :  IMM-3318-08

Référence :  2009 CF 480

Ottawa (Ontario), le 8 mai 2009

En présence de monsieur le juge Beaudry 

 

ENTRE :

HECTOR TREJO HERNANDEZ

demandeur

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

défendeur

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.R., 2001, ch. 27, à l’encontre d’une décision de la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (le tribunal) rendue le 27 juin 2008 selon laquelle le demandeur n’a pas la qualité de réfugié au sens de la Convention ni de personne à protéger.

 

Question en litige

[2]               Est-ce que le tribunal a erré en concluant que le demandeur n’a pas renversé la présomption de la protection de l’État mexicain?

 

[3]               Pour les raisons qui suivent la demande de contrôle judiciaire sera rejetée.

 

Contexte factuel

[4]               Le demandeur, Hector Trejo Hernandez, est un citoyen du Mexique âgé de 35 ans qui a été battu et volé par trois hommes le 7 février 2005 dans le quartier de Colonia Lomas de Casablanca, où il a grandi à Querétaro. Un brigand connu sous le nom de « El Piojo » aurait été à la tête du groupe.

 

[5]               Par la suite, le demandeur est allé à la sécurité sociale et l’institut mexicain pour déposer une plainte contre ses agresseurs pour vol et lésions. Après avoir déposé sa plainte, le demandeur a commencé à recevoir des menaces.

 

[6]               En juin 2005, le demandeur a décidé de déménager avec sa famille à Morelia, dans l’État de Michoacán, croyant qu’ils seraient en sécurité. Il a vécu à cet endroit de juin 2005 à mai 2006 et il est ensuite retourné à Querétaro parce que l’attitude de son épouse avait beaucoup changé.

 

[7]               Le 17 juin 2006, son épouse l’a quitté en amenant avec elle leur fille.

 

[8]               Le 31 décembre 2006, le demandeur a su d'un ami que son épouse fréquentait El Piojo et qu’elle habitait à Michoacán. Dans le cadre des procédures de divorce et voulant obtenir la garde de sa fille, il a voulu présenter le dossier criminel d’El Piojo. Il a toutefois été menacé de mort et découragé d’aller de l’avant avec les procédures.

 

[9]               Le demandeur a porté plainte le 13 janvier 2007, mais suite à une tentative d’enlèvement survenue le 15 janvier 2007 par El Piojo et d’autres brigands, il a décidé de quitter le pays sans attendre le résultat de sa dénonciation.

 

[10]           Le 19 janvier 2007, il arrive au Canada et demande d'asile.

 

Décision contestée

[11]           La décision négative du tribunal repose essentiellement sur la possibilité pour le demandeur d’obtenir la protection de son pays.

 

[12]           Ici, le tribunal estime que le demandeur n’a pas pris tous les moyens raisonnables afin de demander la protection des autorités mexicaines concernant un incident du 15 janvier 2007. Le demandeur connaissait le nom des témoins qui auraient pu corroborer sa plainte et d’ailleurs, il avait déjà initié une plainte le 13 janvier 2007 qui identifiait déjà El Piojo. D'ailleurs, cette personne et son épouse devaient comparaître devant les autorités afin de donner leur version des faits au sujet d’une autre plainte du demandeur datée du 17 janvier 2007.

 

[13]           Le tribunal n'a pas considéré suffisante l'explication du demandeur pour ne pas avoir continué le processus de sa plainte en invoquant la peur. Le demandeur ne peut pas réfuter la présomption de la protection de l’État dans une démocratie qui fonctionne en affirmant seulement une réticence subjective à s’adresser à l’État (Judge c. Canada (ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 1089, 133 A.C.W.S. (3d) 157; Santiago c. Canada (ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 247, 165 A.C.W.S. (3d) 325). Le tribunal a revu ses motifs dans la décision TA6-07453 rendue le 26 novembre 2007 et adopte le même raisonnement en ce qui a trait à la disponibilité de la protection de l’État au Mexique.

 

Norme de contrôle

[14]           Depuis Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 R.C.S. 190, les conclusions du tribunal relatives à la protection de l’État sont sujettes à révision en vertu de la norme de la décision raisonnable (Hinzman c. Canada (ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2007 CAF 171, 362 N.R. 1 au par. 38; Huerta c. Canada (ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 586, 167 A.C.W.S. (3d) 968 au par. 14; Chagoya c. Canada (ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 721, [2008] A.C.F. no 908 (QL) au par. 3; Dunsmuir, ci-dessus aux par. 55, 57, 62 et 64).

 

[15]           Selon la Cour suprême, les éléments à considérer sont la justification de la décision, sa transparence et son intelligibilité. Les solutions retenues doivent se justifier eu égard aux faits et au droit (Dunsmuir, au par. 47).

Analyse

[16]           Les éléments de la revendication ressortent de la réponse à la question 31 du Formulaire de renseignements personnels (FRP) du demandeur ainsi que de son témoignage lors de l’audience. Le tribunal a conclu que le demandeur aurait pu pousser ses démarches plus loin auprès des autorités policières afin de satisfaire le fardeau de preuve à savoir qu’il a pris toutes les mesures raisonnables, compte tenu de sa situation, pour obtenir la protection de son pays.

 

[17]           Le demandeur a reconnu avoir quitté le Mexique le 19 janvier 2007, même s’il avait porté plainte contre El Piojo moins d’une semaine auparavant et que les autorités avaient convoqué ce dernier, ainsi que la femme à une rencontre qui devait se tenir le 17 janvier 2007. Par son départ, le demandeur a laissé tomber sa dénonciation, rendant vains les efforts des autorités mexicaines pour le protéger. Pourtant, plusieurs témoins ont assisté à la tentative de kidnapping du 15 janvier 2007 et auraient pu témoigner pour le compte du demandeur.

 

[18]           La conclusion du tribunal était tout à fait raisonnable. À deux reprises, le demandeur a logé des plaintes à la police et au Bureau du Procureur et toutes les deux ont été traitées. Malgré l’insuccès de la première plainte, il n’en reste pas moins que les autorités ont fait ce qu’ils ont jugé possible de faire vu la preuve recueillie.

 

[19]           Il ressort des faits de cette cause, tel qu’admis par le demandeur, que les autorités du Mexique ont reçu et considéré les plaintes du demandeur sérieusement et que les autorités ont réagi de façon adéquate lorsque le demandeur a porté plainte. Il était raisonnable pour le tribunal de conclure que le demandeur n’avait pas démontré par une preuve claire et convaincante que le Mexique était incapable de le protéger.

 

[20]           Le tribunal n’a pas commis d’erreur susceptible de révision. La décision est justifiée et intelligible et la solution retenue se justifie eu égard aux faits et au droit.

 

[21]           Aucune question à certifier n’a été proposée et ce dossier n’en contient pas.

 

 


JUGEMENT

LA COUR ORDONNE que la demande de contrôle judiciaire soit rejetée. Aucune question n’est certifiée.

 

« Michel Beaudry »

Juge

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM-3318-08

 

INTITULÉ :                                       HECTOR TREJO HERNANDEZ

                                                            et LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L'IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               le 6 mai 2009

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              Le juge Beaudry

 

DATE DES MOTIFS :                      le 8 mai 2009

 

 

COMPARUTIONS :

 

Me Chantal Ianniciello

 

POUR LA PARTIE DEMANDERESSE

Me Alain Langlois

 

POUR LA PARTIE DÉFENDERESSE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Me Chantal Ianniciello

Montréal (Québec)

 

POUR LA PARTIE DEMANDERESSE

John H. Sims

Sous-procureur général du Canada

Montréal (Québec)

POUR LA PARTIE DÉFENDERESSE

 

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