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Date : 20090914

Dossier : IMM‑4558‑08

Référence : 2009 FC 904

Ottawa (Ontario), le 14 septembre 2009

En présence de monsieur le juge Louis S. Tannenbaum

 

 

ENTRE :

Heather Lafleur TONEY

Aalyah Akeyba TONEY

demanderesses

et

MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE

ET DE LA PROTECTION CIVILE

 et

MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

défendeurs

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire visant la décision par laquelle Carline Médée, agente d’immigration (agente), a rejeté la demande de résidence permanente des demanderesses fondée sur des considérations humanitaires (CH). La décision a été rendue le 12 septembre 2008.

 

[2]               L’autorisation d’introduire la demande de contrôle judiciaire a été accordée par la juge Hansen le 8 avril 2009.

 

Les faits

[3]               La demanderesse principale, Heather Toney (la demanderesse) et sa fille, Aalyah, sont des citoyennes de Saint‑Vincent.

 

[4]               En 1992, à la suite du décès de sa grand‑mère qui l’élevait, la demanderesse, alors âgée de 13 ans, est venue vivre au Canada avec sa tante.

 

[5]               La demanderesse n’est pas proche de sa mère, qui fait de nombreux voyages entre les îles Vierges britanniques et Saint‑Vincent. Elle est toutefois très proche de son père qui vit à Boston.

 

[6]               Dans son affidavit, la demanderesse déclare que, lorsqu’elle vivait avec sa tante à Kitchener (Ontario), son oncle lui faisait subir de mauvais traitement, ce qui l’a contrainte à déménager à Montréal. La demanderesse a vécu à Montréal de 1994 à 1999, où elle effectuait des travaux ménagers.

 

[7]               La demanderesse a fréquenté Kelly Moses, le père d’Aalyah, pendant deux ans. Ils ont rompu au moment de la grossesse de la demanderesse. M. Moses voulait que la demanderesse se fasse avorter et, devant son refus, il a quitté Montréal et est allé vivre à Toronto.

 

[8]               En novembre 1999, alors qu’elle était enceinte de quatre mois, la demanderesse a été expulsée vers Saint‑Vincent. Elle y a donné naissance à Aalyah le 10 avril 2000.

 

[9]               En septembre 2002, la demanderesse a essayé d’entrer à nouveau au Canada, mais elle a été renvoyée à Saint‑Vincent.

 

[10]           La demanderesse déclare qu’elle avait une relation violente avec son petit ami à Saint‑Vincent. Pour protéger Aalyah, elle l’a envoyée en juin 2005 à Montréal vivre avec sa sœur, qui est une résidente permanente du Canada.

 

[11]           La demanderesse a légalement changé son nom à Saint‑Vincent et, en décembre 2005, elle est revenue au Canada avec un passeport au nom de Wendy Laverne Adams. Un visa de visiteur de six mois lui a été délivré.

 

[12]           Selon la demanderesse, elle est revenue à Montréal parce qu’elle voulait qu’Aalyah connaisse son père, obtenir une pension alimentaire pour enfant de celui‑ci et fuir sa relation de violence à Saint‑Vincent.

 

[13]           La demanderesse note qu’elle a visité Toronto plusieurs fois, mais M. Moses a refusé de rencontrer sa fille. Cependant, [traduction] « toute sa famille la connaît et l’aime ».

 

[14]           Le 20 septembre 2006, une mesure de renvoi a été prononcée contre la demanderesse et sa fille.

 

[15]           Un examen des risques avant renvoi (ERAR) a été effectué et, le 15 février 2007, une décision négative a été rendue. La demanderesse a présenté une demande d’autorisation de contrôle judiciaire visant la décision d’ERAR, mais l’autorisation a été refusée le 8 juin 2007 (IMM‑1437‑07).

 

[16]           Le 12 octobre 2007, la demanderesse a eu gain de cause contre M. Moses dans un jugement définitif de la Cour supérieure du Québec qui reconnaissait la paternité de celui‑ci et son obligation de payer une pension alimentaire pour enfant.

 

[17]           En octobre 2007, la demanderesse a présenté une demande fondée sur des considérations humanitaires (demande CH).

 

[18]           Le 15 mai 2008, M. Jean Bellavance a refusé de reporter le renvoi des demanderesses. La demanderesse a présenté une demande de contrôle judiciaire visant la décision de M. Bellavance.

 

[19]           Le 24 mai 2008, le juge de Montigny lui a accordé un sursis d’exécution jusqu’à ce qu’une décision soit rendue au fond sur la demande de contrôle judiciaire.

 

[20]           Le 10 septembre 2008, la demanderesse a abandonné sa demande de contrôle judiciaire à l’encontre de la décision de M. Bellavance. L’ASFC s’est engagée à ne pas renvoyer la demanderesse jusqu’à ce qu’une décision soit rendue relativement à la demande CH.

 

[21]           Le 12 septembre 2008, la décision relative à la demande CH qui fait l’objet du présent contrôle judiciaire a été rendue.

 

[22]           Le 18 décembre 2008, la juge Hansen a accordé aux demanderesses un sursis d’exécution jusqu’à l’issue de la demande d’autorisation et de contrôle judiciaire.

 

Dispositions législatives pertinentes

[23]           La Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27, stipule :

                        Séjour pour motif d’ordre humanitaire

25. (1) Le ministre doit, sur demande d’un étranger se trouvant au Canada qui est interdit de territoire ou qui ne se conforme pas à la présente loi, et peut, de sa propre initiative ou sur demande d’un étranger se trouvant hors du Canada, étudier le cas de cet étranger et peut lui octroyer le statut de résident permanent ou lever tout ou partie des critères et obligations applicables, s’il estime que des circonstances d’ordre humanitaire relatives à l’étranger — compte tenu de l’intérêt supérieur de l’enfant directement touché — ou l’intérêt public le justifient.

25. (1) The Minister shall, upon request of a foreign national in Canada who is inadmissible or who does not meet the requirements of this Act, and may, on the Minister’s own initiative or on request of a foreign national outside Canada, examine the circumstances concerning the foreign national and may grant the foreign national permanent resident status or an exemption from any applicable criteria or obligation of this Act if the Minister is of the opinion that it is justified by humanitarian and compassionate considerations relating to them, taking into account the best interests of a child directly affected, or by public policy considerations.

 

 

Décision faisant l’objet du contrôle

[24]           Il est, dès le début, noté dans la décision qu’il incombe à la demanderesse de démontrer que l’exigence de faire une demande de résidence permanente de l’extérieur du Canada lui causerait un préjudice indu. L’agente a indiqué que la décision est fondée sur l’intérêt supérieur de l’enfant qui est née à Saint‑Vincent.

 

[25]           L’agente a noté que la demanderesse a déclaré que le père de sa fille était un citoyen canadien; cependant, le dossier indique que M. Moses n’était pas un citoyen canadien à l’époque de la naissance d’Aalyah et qu’il ne l’était toujours pas.

 

[26]           L’agente a mentionné que la demanderesse prétendait souhaiter réunir sa fille et M. Moses et insistait sur l’importance qu’elles demeurent toutes deux au Canada pour que la demanderesse puisse faire exécuter l’ordonnance de pension alimentaire à l’encontre de M. Moses. L’agente a noté qu’un test d’empreintes génétiques avait été fait pour démontrer la paternité.

 

[27]           L’agente a conclu que, bien que la présence du père puisse être importante pour un enfant, aucun élément de preuve n’avait été présenté en l’espèce pour démontrer l’existence d’une relation significative et importante entre le père et la fille. Il n’avait été mentionné aucune rencontre entre les deux.

 

[28]           L’agente a accordé peu d’importance aux documents présentés par la demanderesse qui faisaient état des mesures qu’elle avait prises pour démontrer la paternité et contraindre le père à assumer une responsabilité financière relativement à Aalyah. Le seul document signé par le père était sa demande formelle d’arrêter les paiements de pension alimentaire pour enfant. Par conséquent, l’agente a conclu que l’intérêt supérieur de l’enfant ne constituait pas une question déterminante en l’espèce.

 

[29]           L’agente a alors fait l’historique du dossier d’immigration de la demanderesse.

 

[30]           L’agente a conclu que le fait que la demanderesse ait changé son nom afin d’être autorisée à entrer au Canada et que le fait qu’elle n’avait pas cessé de travailler durant son séjour au Canada démontraient qu’elle voulait s’établir au Canada.

 

[31]           L’agente a noté que la demanderesse s’était efforcée de devenir financièrement indépendante, mais qu’elle n’avait pas fait preuve de respect envers la loi. Elle n’avait pas obtenu les documents nécessaires – un permis de travail et une autorisation écrite – pour revenir au Canada après son expulsion. De plus, elle n’a eu qu’un seul permis de travail, lequel visait la période allant de septembre 1998 à janvier 2000, quoiqu’elle ait travaillé plusieurs années au Canada.

 

[32]           Étant donné tout cela, l’agente a conclu que le cas ne justifiait pas une exception aux exigences imposées à tous les immigrants. L’agente n’était pas convaincue que la demanderesse avait montré que l’intérêt supérieur de l’enfant était déterminant en l’espèce et que lui imposer de quitter le Canada afin de présenter une demande de résidence permanente de l’étranger, comme la loi l’exige, lui causerait un préjudice indu et excessif.

 

Questions en litige

[33]           La demanderesse formule les questions de la façon suivante :

[traduction]

1.                  Le délégué du ministre a‑t‑il commis une erreur en ne prenant pas en considération l’intérêt supérieur de l’enfant?

2.         Le délégué du ministre a‑t‑il commis une erreur en ne prenant pas en considération l’établissement de Mme Toney au Canada?

3.         Le délégué du ministre a‑t‑il commis une erreur en ne donnant pas aux demanderesses une possibilité raisonnable de mettre leur dossier à jour?

4.         L’expulsion des demanderesses violerait‑elle les obligations nationales et internationales du Canada en matière de droits de la personne?

 

[34]           Le défendeur n’énumère pas de questions, mais il traite des questions soulevées par la demanderesse. Le défendeur soulève aussi une objection préliminaire relativement à certains éléments de preuve figurant dans l’affidavit de la demanderesse qui, selon le défendeur, n’ont pas été présentés à l’agente.

 

[35]           Je reformulerai comme suit les questions :

1.         Les pages 30 et 31 ainsi que 35 à 52 du dossier de la demanderesse sont‑elles inadmissibles parce qu’elles n’ont pas été présentées au décideur?

2.         Quelle est la norme de contrôle applicable?

3.         La décision de l’agente sur l’intérêt supérieur de l’enfant était‑elle raisonnable?

4.         La décision de l’agente sur la question de l’établissement était‑elle raisonnable?

5.         L’agente a‑t‑elle commis une erreur en n’accordant pas aux demanderesses un délai raisonnable pour mettre leur dossier à jour?

6.         L’expulsion des demanderesses violerait‑elle les obligations nationales et internationales du Canada en matière de droits de la personne?

 

Position de la demanderesse

[36]           La demanderesse n’a pas répondu à l’objection préliminaire du défendeur relativement aux éléments de preuve figurant dans l’affidavit et n’elle pas non plus traité de la norme de contrôle applicable.

 

La décision de l’agente sur l’intérêt supérieur de l’enfant était‑elle raisonnable?

 

[37]           La demanderesse déclare qu’Aalyah a été élevée à Montréal et que toute sa vie est à Montréal. Elle fréquente l’école et a plusieurs amis et une grande famille ici. La demanderesse déclare que le père d’Aalyah est un citoyen canadien. Si elle était expulsée du Canada, Aalyah devrait vivre dans la pauvreté et sans le soutien de sa famille et des amis.

 

[38]           La demanderesse allègue que l’intérêt supérieur d’Aalyah n’a pas été pris en considération comme le requiert l’arrêt Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] 2 R.C.S. 817. La demanderesse fait également remarquer que la Convention relative aux droits de l’enfant des Nations‑Unies et la décision Arulraj c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 529, aident à déterminer quels sont les paramètres de l’intérêt supérieur de l’enfant et quelles sont les obligations du Canada.

 

[39]           Dans Arulraj, la Cour écrit que l’ajout d’une obligation de prouver un préjudice irréparable dans la prise en compte de l’intérêt supérieur des enfants ne repose sur aucun fondement juridique.

 

[40]           La demanderesse fait valoir que l’intérêt supérieur d’Aalyah est [traduction] « de la plus haute importance » en l’espèce et que l’expulsion d’Aalyah aurait un effet dévastateur sur celle‑ci. Selon la demanderesse, si elle ainsi qu’Aalyah sont expulsées du Canada, Aalyah ne pourra pas recevoir de pension alimentaire de son père.

 

[41]           La demanderesse fait valoir qu’Aalyah a le droit, en vertu du droit international, d’être avec sa famille : Pacte international relatif aux droits civils et politiques de l’ONU, articles 23 et 24, et Déclaration universelle des droits de l’homme, paragraphe 3 de l’article 16. Selon la demanderesse, la seule famille qu’Aalyah a et a jamais connue se trouve au Canada.

 

[42]           La demanderesse cite également le State Country Report de 2007 sur Saint‑Vincent‑et‑les‑Grenadines, publié par le Département d’État des États‑Unis, qui traite du problème de la maltraitance des enfants, ainsi qu’une étude de l’UNICEF de novembre 2006 intitulée « A Study of Child Vulnerability in Barbados, St‑Lucia and Saint‑Vincent and the Grenadines » sur certains aspects de la vie des enfants tels que la pauvreté, l’éducation et les soins de santé.

 

[43]           Dans ses observations écrites, la demanderesse inclut l’extrait suivant de l’ordonnance du juge de Montigny sursoyant à l’expulsion des demanderesses dans le dossier IMM‑2365‑08 :

[traduction] La fille de Mme Toney connaît une vie relativement stable au Canada, elle fréquente l’école et jouit d’un réseau social et familial étendu. Mme Toney elle‑même est davantage capable de subvenir à ses besoins en raison de l’ordonnance de pension alimentaire pour enfant de la Cour supérieure du Québec enjoignant le père de contribuer financièrement à l’éducation de sa fille. Tout cela serait certainement perdu si les demanderesses étaient expulsées à Saint‑Vincent. Je suis d’avis que cela constituerait un préjudice irréparable.

 

La décision de l’agente sur la question de l’établissement était‑elle raisonnable?

[44]           La demanderesse fait valoir ce qui suit à l’appui de sa prétention qu’elle est établie au Canada : elle a vécu au Canada pendant dix ans, sa sœur est au Canada et elle n’est pas proche de sa mère qui vit à Saint‑Vincent, elle est capable de subvenir à ses besoins ainsi qu’à ceux de sa fille, elle n’a pas de casier judiciaire et elle a contribué à la société canadienne. Elle a produit des lettres de soutien d’amis et d’employeurs. La demanderesse a fait du bénévolat à l’église pendant les deux dernières années et elle fréquente fidèlement l’église avec sa fille.

 

L’agente a‑t‑elle commis une erreur en ne donnant pas aux demanderesses une possibilité raisonnable de mettre à jour leur dossier?

[45]           Les demanderesses ont présenté une demande d’autorisation et de contrôle judiciaire le 23 mai 2008 dans le dossier IMM‑2365‑08 pour contester la décision de l’agent d’exécution de ne pas différer leur expulsion. Le 24 mai 2008, le juge de Montigny a ordonné de surseoir à l’exécution de leur expulsion jusqu’à ce qu’une décision soit prise relativement à leur demande d’autorisation et de contrôle judiciaire. La demanderesse s’est désistée de sa demande le 10 septembre 2008 à la condition qu’une décision soit rendue relativement à leur demande CH en instance avant que toute expulsion ne soit envisagée.

 

[46]           Selon la demanderesse, son désistement reposait sur la supposition qu’un délai raisonnable serait accordé aux demanderesses pour qu’elles mettent à jour leur dossier de demande CH. Cependant, aucun délai n’a été accordé et une décision a été rendue relativement à leur demande deux jours plus tard, le 12 septembre 2008. La demanderesse fait valoir qu’elle avait des possibilités raisonnables d’avoir gain de cause dans sa demande dans le dossier IMM‑2365‑08 étant donné qu’un sursis avait été accordé et qu’elle ne se serait jamais désistée de cette demande si les demanderesses avaient su qu’une décision serait prise si rapidement.

 

L’expulsion des demanderesses violerait‑elle les obligations nationales et internationales du Canada en matière de droits de la personne?

[47]           Les demanderesses font valoir que la décision de l’agente et l’expulsion consécutive des demanderesses violeraient leurs droits en vertu des articles 7 et 12 de la Charte. Elles soutiennent que la décision ne tient pas compte des obligations du Canada de ne pas les expulser dans un pays où elles seraient pauvres et aux prises avec des difficultés.

 

[48]           La demanderesse cite également le State Country Report de 2007 sur la problématique de la violence contre les femmes à Saint‑Vincent et fait valoir qu’elle ne serait pas protégée si elle devait retourner à Saint‑Vincent.

 

[49]           La demanderesse fait également valoir que la décision porte atteinte aux droits suivants qui sont protégés par le droit international :

‑           Le droit d’un réfugié de ne pas être renvoyé dans un territoire où sa vie ou sa liberté serait menacée en raison de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social particulier ou d’une opinion politique, comme l’énonce la Convention relative au statut des réfugiés;

‑           Le droit, garanti à l’article 18 de la Déclaration américaine des droits et des devoirs de l’homme, à une procédure simple et brève par laquelle les tribunaux protègent le demandeur des actes des autorités qui, à son détriment, porteraient atteinte à ses droits constitutionnels fondamentaux;

‑           Le droit, garanti à l’article 13 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, de ne pas être expulsé sauf en vertu d’une décision rendue conformément au droit.

 

Position du défendeur

[50]           Le défendeur fait valoir que l’intitulé de l’appel devrait être modifié de manière à y ajouter le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration comme défendeur.

 

Les pages 30 et 31 ainsi que 35 à 52 du dossier de la demanderesse sont‑elles inadmissibles parce qu’elles n’ont pas été présentées au décideur?

[51]           Selon le défendeur, les demanderesses ont déposé de nouveaux éléments de preuve qui n’avaient pas été auparavant présentés à l’agente lorsque la décision a été rendue, à savoir les pages 30 et 31 de la pièce A et les pages 35 à 52 de la pièce B. De tels éléments de preuve additionnels ne peuvent être pris en considération lors d’un contrôle judiciaire. Voir par exemple : Asafov c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1994] A.C.F. no 713, et Franz c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1994] A.C.F. no 862. Ainsi, ces pages ne devraient pas être prises en considération par la Cour.

 

Quelle est la norme de contrôle judiciaire applicable?

 

La décision de l’agente sur l’intérêt supérieur de l’enfant était‑elle raisonnable?

 

[52]           Le défendeur fait valoir que la Cour ne devrait pas s’ingérer dans la décision d’un agent relativement à une demande CH sauf si la décision est déraisonnable. Dans une demande CH, le demandeur a le fardeau d’établir que le préjudice que lui causerait l’obligation d’avoir à obtenir la résidence permanence de l’extérieur du Canada serait inhabituel, injustifié ou excessif.

 

[53]           Le défendeur déclare qu’il est inexact d’affirmer que l’agente n’a pas pris en considération l’intérêt de l’enfant. Il est également inexact d’affirmer que le père d’Aalyah est canadien puisqu’il n’a pas ce statut et aucun élément de preuve n’appuie l’allégation de la demanderesse à cet égard.

 

[54]           La preuve relative à la pension alimentaire pour enfant et à l’exécution de l’ordonnance de pension alimentaire a été prise en compte par l’agente et elle en a fait état dans sa décision. En ce qui a trait au paragraphe 20 des observations de la demanderesse, le défendeur déclare qu’il convient de noter qu’aucun paiement de pension alimentaire n’a été fait depuis le jugement rendu en 2007. Ainsi, la croyance de la demanderesse relativement à une contribution financière éventuelle du père d’Aalyah est purement spéculative.

 

[55]           Contrairement aux affirmations de la demanderesse, Aalyah n’a pas grandi au Canada. Elle est venue au Canada lorsqu’elle avait cinq ans munie d’un permis de visiteur. De plus, l’agente a traité de la relation entre le père et l’enfant, et la demanderesse n’a présenté aucun élément de preuve à l’appui de l’existence de cette relation. Aucun élément de preuve n’a non plus été présenté sur les relations d’Aalyah avec d’autres membres de sa famille du côté de sa mère ou de son père, contrairement à ce qui est allégué aux paragraphes 9, 10, 15, 21 et 29 des observations de la demanderesse.

 

[56]           Le défendeur fait valoir que, quoique l’intérêt supérieur de l’enfant soit un facteur important à prendre en compte dans le cadre des demandes CH, il ne s’agit pas d’un facteur décisif : Legault c. Canada (Ministre de la Citoyenneté de l’Immigration), 2002 CAF 125; Bolanos c. Canada (Ministre de la Citoyenneté de l’Immigration), 2003 CF 1032; et Hawthorne c. Canada (Ministre de la Citoyenneté de l’Immigration), [2003] 2 C.F. 555 (C.A.F.).

 

La décision de l’agente sur la question de l’établissement était‑elle raisonnable?

[57]           Selon le défendeur, l’agente a dûment pris en compte l’historique du dossier d’immigration de la demanderesse et de la présence de celle‑ci au Canada. La demanderesse a constamment fait preuve de mépris à l’égard de la législation canadienne en matière d’immigration et l’agente a eu raison de conclure que la demanderesse ne devrait pas tirer profit d’une telle conduite : Buio c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2007] A.C.F. no 205.

 

[58]           Le défendeur soutient que le critère ne consiste pas à savoir si la demanderesse serait dans un meilleur environnement au Canada, mais si le fait d’exiger de la demanderesse qu’elle présente sa demande de résidence permanente de l’extérieur du Canada constituerait un préjudice indu, injustifié ou excessif.

 

L’agente a‑t‑elle commis une erreur en n’accordant pas aux demanderesses un délai raisonnable pour mettre leur dossier à jour?

[59]           Le défendeur fait valoir que les allégations aux paragraphes 31 à 14 des observations de la demanderesse sont sans fondement. De plus, comme le montre le dossier de la demanderesse, aucun élément de preuve ou renseignement supplémentaire n’a été présenté par elles pour démontrer que leur demande d’établissement aurait pu être mise à jour de manière significative. De plus, le désistement de la demande des demanderesses n’était assorti d’aucune condition puisque le défendeur représentait l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC), qui n’est pas responsable du traitement des demandes de résidence permanente. Enfin, la demanderesse a eu amplement de temps pour produire d’autres éléments de preuve parce qu’elle a présenté sa demande CH en octobre 2007 et que la décision n’a été rendue qu’en septembre 2008.

 

[60]           Selon le défendeur, contrairement à la prétention de la demanderesse, l’agente n’avait pas l’obligation de lui donner une possibilité de mettre à jour son dossier : Rodriguez Zambrano c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (2008), 326 F.T.R. 174. Par conséquent, il n’y a pas eu de violation de l’équité procédurale en l’espèce.

 

L’expulsion des demanderesses violerait‑elle les obligations nationales et internationales du Canada en matière de droits de la personne?

[61]           Le défendeur fait valoir que la Cour suprême du Canada a clairement établi qu’une expulsion après un examen des risques avant renvoi ne viole pas les articles 7 et 12 de la Charte : Chieu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté de l’Immigration), [2002] 1 R.C.S. 84, Al Sagban c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2002] 1 R.C.S. 133. En l’espèce, il y a eu une décision d’ERAR négative et la décision a été maintenue par la Cour.

 

Analyse

1.         Les pages 30 et 31 ainsi que 35 à 52 du dossier de la demanderesse sont‑elles inadmissibles parce qu’elles n’ont pas été présentées au décideur?

 

[62]           Le défendeur affirme que les pages 30 et 31 du dossier des demanderesses dans la pièce A et toutes les pages de la pièce B relatives à l’affidavit de Heather Toney n’ont pas été présentées à l’agente et ne devraient donc pas être prises en considération aux fins du contrôle judiciaire. Cependant, la plupart des pages contestées se trouvent dans le dossier du tribunal et ont dûment été présentées à la Cour. Le tableau ci‑dessous indique les pages contestées, dans la colonne de gauche ainsi que les pages du dossier du tribunal où on peut les trouver.

 

Pages de l’affidavit

Pages du dossier du tribunal

30 et 31

18 et 19

36

85

37

Pas dans le dossier du tribunal.

38, 39

86, 87

40

116

41, 42, 43, 44

69, 76, 75, 70

45

125

46

Pas dans le dossier du tribunal, mais il y a une lettre dont le contenu est identique à la page 81. La lettre dans le dossier du tribunal a été envoyée à Immigration Canada tandis que celle dans le dossier des demanderesses a été envoyée à Daniel Fougère à Immigration Québec.

47, 48

111, 106

49

Pas dans le dossier du tribunal.

50

17

51 et 52

8 et 9

 

[63]           Le défendeur énonce le droit correctement. C’est un principe bien établi que seuls les éléments de preuve qui ont été présentés au décideur sont pertinents lors d’un contrôle judiciaire. Dans l’une des causes citées par le défendeur, Asafov c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1994] A.C.F. no 713, au paragraphe 2 (1re inst.), le juge Nadon a déclaré relativement aux éléments de preuve qui n’avaient pas été présentés au décideur que le demandeur voulait faire valoir :

Le contrôle judiciaire permet d’examiner la décision rendue par la Section, à la lumière des preuves dont celle‑ci disposait à l’audience, et de décider s’il existe des raisons justifiant la révision de la décision initiale. Cela étant, les preuves que, les requérants entendent maintenant produire sont dénuées de pertinence. En accueillant la demande, je ferais de la procédure de contrôle judiciaire, une procédure d’appel.

 

[64]           Dans plusieurs décisions subséquentes, notamment dans la décision récente Jessamy c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2009] A.C.F. no 47, au paragraphe 55 (C.F.), la Cour a expressément souscrit à Asafov.

 

[65]           Par conséquent, les pages 37, 46 et 49 du dossier des demanderesses ne devraient pas être prises en considération dans la présente demande de contrôle judiciaire.

 

2.         Quelle est la norme de contrôle judiciaire applicable?

 

[66]           Les décisions des agents d’immigration sur les demandes CH sont assujetties à la norme de contrôle du caractère raisonnable. Voir par exemple : Ahmad c. Canada (M.C.I.), [2008] A.C.F. no 814, au paragraphe 11 (C.F.), et Hansra c. Canada (Ministre de la Citoyenneté de l’Immigration), [2009] A.C.F. no 297, au paragraphe 11 (C.F.).

 

[67]           Le contrôle judiciaire fondé sur le caractère raisonnable « tient principalement à la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel, ainsi qu’à l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit ». Voir Dunsmuir c. Nouveau‑Brunswick, [2008] 1 R.C.S. 190, au paragraphe 47.

 

[68]           La norme du caractère raisonnable s’applique aux questions 3 et 4, mais la question 5 concerne l’équité procédurale et l’analyse de la norme de contrôle judiciaire ne s’applique pas à de telles questions. Voir Syndicat canadien de la fonction publique (S.C.F.F.) c. Ontario (Ministre du Travail), [2003] 1 R.C.S. 539, au paragraphe 100.

 

3.         La décision de l’agente sur l’intérêt supérieur de l’enfant était‑elle raisonnable?

 

[69]           Le défendeur a raison de dire qu’il incombe à l’auteur de la demande CH de convaincre l’agent d’immigration qu’il subira un préjudice inhabituel, injustifié ou excessif s’il doit faire sa demande de résidence permanence de l’extérieur du Canada. Pour les raisons exposées par le défendeur, j’estime raisonnable la conclusion de l’agente selon laquelle la demanderesse ne s’est pas acquittée du fardeau qui lui incombait.

 

[70]           La demanderesse déclare que l’intérêt supérieur de l’enfant n’a pas été pris en compte par l’agente. Cependant, l’agente a analysé l’intérêt supérieur d’Aalyah et a conclu qu’il n’était pas déterminant. L’agente a conclu que la preuve présentée n’établissait pas l’existence d’une relation significative entre Aalyah et M. Moses. Cette conclusion est étayée par les éléments de preuve fournis par la demanderesse qui se trouvent un peu partout dans son dossier d’immigration, selon lesquels le père n’a pas tenté de voir Aalyah. En outre, selon la preuve, M. Moses cherchait à être libéré du paiement de la pension alimentaire pour enfant ordonnée par la cour.

 

[71]           La demanderesse invoque Arulraj à l’appui de sa prétention que l’agente d’immigration a commis une erreur en requérant d’une personne qui présente une demande CH qu’elle démontre un préjudice irréparable en ce qui concerne l’intérêt supérieur de l’enfant. L’agente n’a toutefois pas imposé, à mon avis, une telle charge à la demanderesse et celle‑ci est incapable d’indiquer où, dans la décision, l’agente aurait posé une telle exigence.

 

[72]           Dans ses observations écrites, la demanderesse affirme également que le père d’Aalyah est citoyen canadien, mais l’agente a déterminé qu’il ne l’était pas à la naissance de l’enfant et ne l’était toujours pas lorsqu’elle a rendu sa décision. La demanderesse n’a pas contesté explicitement cette conclusion de l’agente et ne présente aucun élément de preuve pour étayer sa prétention qu’il est citoyen.

 

[73]           La demanderesse affirme également qu’Aalyah a grandi au Canada alors qu’elle a passé les cinq premières années de sa vie à Saint‑Vincent.

 

[74]           La demanderesse fait valoir que, si elle et sa fille sont expulsées à Saint‑Vincent, elles ne seront pas capables de faire exécuter l’ordonnance de la cour et qu’elles ne recevront donc pas les paiements de pension alimentaire qui sont [traduction] « cruciaux pour son bien‑être ». Cependant, la preuve qui a été présentée à l’agente était que M. Moses ne faisait pas les paiements requis.

 

[75]           De plus, rien dans le dossier du tribunal n’appuie la prétention de la demanderesse qu’Aalyah est proche de sa famille à Montréal.

 

[76]           La demanderesse cite le State Country Report de 2007 sur Saint‑Vincent‑et-les‑Grenadines, publié par le Département d’État des États‑Unis, concernant la maltraitance et la vulnérabilité des enfants, mais ce document n’a pas été versé au dossier du tribunal. Quoi qu’il en soit, aucun élément de preuve n’appuie la prétention selon laquelle Aalyah aurait plus de probabilités d’être maltraitée si sa mère et elle étaient expulsées à Saint‑Vincent. Aalyah vivrait encore avec la demanderesse qui prendrait soin d’elle, puisqu’elle est, selon la preuve présentée à l’agente, une mère aimante et attentionnée. De plus, aucun élément de preuve n’a été présenté à l’agente qui donnerait à penser que les demanderesses souffriraient de pauvreté si elles étaient expulsées du Canada. Selon l’ensemble de la preuve, la demanderesse était une grande travailleuse qui n’avait pas de difficulté à joindre les deux bouts. Parmi les documents présentés à l’agente, certains provenaient de son ancien employeur à Saint‑Vincent.

 

[77]           Les motifs du juge de Montigny dans le dossier IMM‑2365‑08, datés du 24 mai 2008, n’ont pas été présentés à l’agente.

 

[78]           Les motifs de l’agente sur l’intérêt supérieur de l’enfant sont étayés par la preuve qui lui a été présentée. La décision de l’agente sur cette question est justifiable, transparente et intelligible. L’agente n’a pas commis d’erreur, contrairement aux allégations de la demanderesse.

 

4.         La décision de l’agente sur la question de l’établissement était‑elle raisonnable? 

 

[79]           La demanderesse ne mentionne aucune erreur particulière de la part de l’agente, mais elle énonce les raisons pour lesquelles on aurait dû la considérer comme établie au Canada.

 

[80]           L’agente reconnaît que la demanderesse veut réellement s’établir au Canada et que le fait qu’elle ait changé son nom et qu’elle a toujours travaillé quand elle était au Canada en fait foi. Quoique la demanderesse fasse valoir qu’elle n’a pas de casier judiciaire, la preuve montre clairement qu’elle a de façon constante manqué de respect envers les lois canadiennes en matière d’immigration. La demanderesse était très au fait qu’elle devait avoir un permis de travail et une approbation écrite pour revenir au Canada après son expulsion en 1999. Elle a essayé de revenir en 2002 et on l’a refusée parce qu’elle n’avait pas les documents appropriés. Au lieu d’obtenir les documents requis avant de revenir au Canada, la demanderesse a légalement fait changer son nom à Saint‑Vincent pour obtenir un passeport sous un nom différent. Elle a également travaillé pendant ses deux séjours au Canada, mais elle n’avait de permis de travail valide que de septembre 1998 à janvier 2000.

 

[81]           Il importe de garder à l’esprit que la prise en considération de la question de l’établissement vise à déterminer si le demandeur est établi à un tel point que son expulsion constituerait un préjudice excessif. La demanderesse affirme qu’elle est proche de sa sœur à Montréal, mais elle n’a présenté aucun élément de preuve de sa sœur ou d’amis. Elle a cependant présenté des éléments de preuve de plusieurs employeurs et des éléments de preuve relatifs à son travail à titre de bénévole à son église. L’agente a néanmoins pris note de ses efforts et a conclu que l’ensemble de la demande, en tenant compte de ces efforts, ne justifiait pas qu’il soit fait exception aux règles en matière d’immigration.

 

[82]           La demanderesse a tenté de s’établir tout en sachant que son statut d’immigration n’était pas positif. De cette manière, elle a pris le risque de se retrouver dans l’obligation de retourner à Saint‑Vincent et de faire une demande de résidence permanente de l’étranger. Comme elle a pris ce risque, les difficultés qu’elle connaîtra en conséquence de ses actes ne sont ni inhabituelles ni injustifiées ou excessives au regard de celles de quiconque fait une demande de l’étranger. Voir par exemple : Obeng c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2009] A.C.F. no 57, au paragraphe 45 (C.F.).

 

5.         L’agente a‑t‑elle commis une erreur en n’accordant pas aux demanderesses un délai raisonnable pour mettre leur dossier à jour?

 

[83]           La demanderesse prétend qu’elle a abandonné sa demande dans le dossier IMM‑2365‑08 à la condition qu’on lui permette de mettre à jour sa demande CH. Cependant, comme le défendeur le fait remarquer, aucun élément de preuve ne corrobore l’existence d’une telle condition et le défendeur dans le dossier IMM‑2365‑08 était l’ASFC alors que le défendeur dans la présente demande devrait être le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration. L’ASFC n’est pas responsable des demandes de résidence permanente et il est donc invraisemblable que l’ASFC garantisse quelque chose dont elle n’est pas responsable. Enfin, la demande CH a été présentée en octobre 2007 et la décision n’a été rendue qu’en septembre 2008. Si la demanderesse voulait mettre son dossier à jour, elle a eu la possibilité de le faire.

 

[84]           Dans Zambrano, la juge Dawson a conclu qu’il n’y a aucune obligation de demander à un demandeur d’ERAR s’il désire présenter d’autres observations et qu’il incombe au demandeur de fournir toute la documentation à l’appui de sa revendication. La juge Dawson a conclu que, même s’il y avait une obligation, le demandeur n’avait pas apporté la preuve qu’il pourrait fournir une information substantielle et nouvelle qui serait importante pour la décision. Comme dans Zambrano, la demanderesse n’a présenté aucun élément de preuve pour étayer la position que la décision aurait été différente si on lui avait donné la possibilité de mettre à jour ses observations. Par conséquent, il n’y a pas eu de violation de l’équité procédurale.

 

6.         L’expulsion des demanderesses violerait‑elle les obligations nationales et internationales du Canada en matière de droits de la personne?

 

[85]           La demanderesse fait valoir que la décision de l’agente n’a pas pris en compte l’obligation du Canada de ne pas expulser les demandeurs dans un pays où ils vivront dans la pauvreté et seraient aux prises avec des difficultés. La demanderesse cite le State Country Report de 2007 du Département d’État des États‑Unis sur la question de la violence conjugale à Saint‑Vincent. À mon avis, ces arguments conviendraient davantage au contrôle d’une décision d’ERAR.

 

[86]           Beaucoup d’observations de la demanderesse sur cette question ne sont pas pertinentes. Elle ne mentionne pas, dans sa demande CH, de violence conjugale. Il ne s’agissait pas d’une demande d’asile et l’insistance sur les obligations du Canada de ne pas expulser des réfugiés dans un endroit où leur vie ou liberté est menacée n’est pas pertinente.

 

[87]           Il a été procédé à un examen des risques avant renvoi pour les demanderesses et le résultat a été négatif. La demande d’autorisation de contrôle judiciaire de cette décision a été rejetée. Il n’est pas contraire à la Charte d’expulser les demanderesses à Saint‑Vincent. Dans Choudhary c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2008] A.C.F. no 583, le juge Lagacé a écrit, au paragraphe 25 :

Il est de jurisprudence constante qu’une mesure d’expulsion visant une personne qui n’est pas citoyen canadien ne transgresse pas les principes de justice fondamentale et que l’exécution d’une telle mesure ne contrevient pas aux articles 7 et 12 de la Charte (Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration  c. Chiarelli, [1992] 1 R.C.S. 711).

 

[88]           La jurisprudence ne soutient pas les accusations de portée générale que fait la demanderesse relativement aux obligations du Canada en matière de droits de la personne.

 

 

 


JUGEMENT

 

            LA COUR STATUE que, pour les motifs exposés ci‑dessus, la présente demande de contrôle judiciaire est rejetée. Aucune question d’importance générale n’a été présentée aux fins de certification.

 

            L’intitulé de la cause est par la présente modifié de manière à y ajouter le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration comme défendeur.

 

                                                                                                          « Louis S. Tannenbaum »

Juge suppléant

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Sandra de Azevedo, LL.B.

 

 


JURISPRUDENCE CONSULTÉE PAR LA COUR

 

1.                  Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] 2 R.C.S. 817

2.                  Centre hospitalier Mont‑Sinaï c. Québec (Ministre de la Santé et des Services sociaux), [2001] 2 R.C.S. 281, 2001 CSC 41

3.                  Del Cid c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 326

4.                  Mughrabi c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2008 CF 900

5.                  Griffith c. M.C.I., IMM‑4543‑98

6.                  Franklyn c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 1249

7.                  Fraser c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 1154

8.                  Okoye c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2008 CF 1133

9.                  De Sousa c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2008 CF 1171

10.              Kolosovs c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2008 CF 165

11.              Arulraj c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 529

12.              Simoes c. Canada (M.C.I) (2000), 187 F.T.R. 219

13.              Toney et al c. Canada (Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile), IMM‑2365‑08

 

14.              Rodriguez Zambrano c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2008 CF 481

 

15.              Rodriguez Zambrano c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (2008), 326 F.T.R. 174

 

16.              Chieu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 RCS 3

 

17.              Al Sagban c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CSC 4

 

18.              Idahosa c. Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, 2008 CAF 418

 

19.              Asafov c. M.E.I., (18 mai 1994) Imm‑7425‑93 (C.F.)

 

20.              Franz c. M.E.I. (1994), [1994] A.C.F. no 862

 

21.              César c. M.E.I., A‑72‑93, 8 octobre 1993 (C.F.)

 

22.              Ferreya c. M.E.I. (1993), 56 F.T.R. 270

 

23.              Quintero c. M.C.I., IMM‑3334‑94, 7 février 1995 (C.F.)

 

24.              Quito c. M.E.I. (1990), 32 F.T.R. 222

 

25.              Owusu c. M.C.I. 2003 CFPI 94

 

26.              Owusu c. M.C.I., A‑114‑03, 26 janvier 2004 (CAF)

 

27.              Barreau du Nouveau‑Brunswick c. Ryan, 2003 CSC 20

 

28.              M.C.I. c. Legault, 2002 CAF 125

 

29.              Legault c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 212 D.L.R. (4th) 139, 2002 CAF 125

 

30.              Legault c. Canada (M.C.I.), [2002] 4 C.F 358 (C.A.)

 

31.              Bolanos c. M.C.I., 2003 CF 1032

 

32.              Hawthorne c. M.C.I., [2003] 2 C.F 555 (C.A.F.)

 

33.              Buio c. M.C.I., [2007] A.C.F. no 205

 

34.              Kawtharani c. Canada (M.C.I.), 2006 CF 162

 

35.              Monteiro c. Canada (M.C.I.), 2006 CF 1322

 

36.              Samsonov c. Canada (M.C.I.), 2006 CF 1158

 

37.              Hamzai c. Canada (M.C.I.), 2006 CF 1108

 

38.              Liniewska c. Canada (M.C.I.) 2006 CF 591

 

39.              Ruiz c. Canada (M.C.I.), 2006 CF 465

 

40.              Pashulya c. Canada (M.C.I.), 2004 CF 1275

 

41.              Asafov c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1994] A.C.F. no 713

 

42.              Franz c. Canada (Ministre de  l’Emploi et de l’Immigration), (1994), 80 F.T.R. 79 (C.F.)

 

43.              Jessamy c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2009] A.C.F. no 47

 

44.              Ahmad c. Canada (M.C.I.), [2008] A.C.F. no 814

 

45.              Hansra c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2009] A.C.F. no 297

 

46.              Dunsmuir c. Nouveau‑Brunswick, [2008] 1 R.C.S. 190

 

47.              Syndicat canadien de la fonction publique (S.C.F.P.) c. Ontario (Ministre du Travail), [2003] 1 R.C.S. 539

 

48.              Obeng c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2009] A.C.F. no 57

 

49.              Choudhary c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [2008] A.C.F. no 583

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                    IMM‑4558‑08

 

INTITULÉ :                                                  Heather Lafleur TONEY et Aalyah Akeyba TONEY c.

                                                                        MSPPC et MCI

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                          Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                         Le 7 juillet 2009

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                       LE JUGE TANNENBAUM

 

DATE DU JUGEMENT :                           Le 14 septembre 2009

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

M. Stewart Istvanffy

 

POUR LA DEMANDERESSE

Mme Sylvianne Roy

 

POUR LES DÉFENDEURS

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

M. Stewart Istvanffy

 

POUR LA DEMANDERESSE

John H. Sims, c.r.

Sous‑procureur général du Canada

 

POUR LES DÉFENDEURS

 

 

 

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