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Date : 20091013

Dossier : T-1619-07

Référence : 2009 CF 1025

Ottawa (Ontario), le 13 octobre 2009

En présence de monsieur le juge Boivin

 

 

Entre :

MOKHTAR ALLOU

demandeur

et

 

Le ministre de la citoyenneté et de l’IMMIGRATION

défendeur

 

Motifs du jugement et jugement

 

[1]               Il s'agit d'un appel interjeté par le demandeur, Mokhtar Allou, en application du paragraphe 14(5) de la Loi sur la citoyenneté, L.R.C. 1985, ch. C‑29 (la Loi), pour contester la décision rendue en date du 24 août 2007 par le juge de la citoyenneté George Springate (le juge de la citoyenneté) datée du 24 août 2007, laquelle a rejeté la deuxième demande de citoyenneté du demandeur parce qu'il ne répondait pas au critère de résidence prévu à l'alinéa 5(1)c) de la Loi.

 

[2]               Pour les motifs qui suivent, l'appel sera rejeté.

 

Contexte factuel

[3]               Le demandeur est entré au Canada le 13 janvier 1997 en qualité de réfugié au sens de la Convention et il a obtenu le statut de résident permanent le 7 décembre 1999.

 

[4]               Le demandeur a également obtenu la résidence permanente aux États-Unis le 16 décembre 1999 et ce statut est valide jusqu'au 26 juillet 2010.

 

[5]               Le 8 décembre 2001, le demandeur a déposé sa première demande de citoyenneté à l'égard de laquelle la période pertinente pour l'examen de sa résidence allait du 8 décembre 1997 jusqu'au 8 décembre 2001.

 

[6]               Le 5 juin 2003, la demande du demandeur a été rejetée parce qu'il ne répondait pas au critère de résidence énoncé à l'alinéa 5(1)c) de la Loi. Cette décision n'a pas été contestée devant la Cour fédérale.

 

[7]               Le 23 juin 2003, le demandeur a déposé une deuxième demande de citoyenneté à l'égard de laquelle la période pertinente pour l'examen de sa résidence allait du 23 juin 1999 au 23 juin 2003. Dans cette demande, le demandeur a déclaré trois brèves périodes d'absence du Canada en 1999 et en 2000, au cours desquelles il s'est rendu aux États-Unis pour un total de 35 jours.

 

[8]               Le 12 juin 2007, le demandeur s'est présenté à une entrevue avec le juge de la citoyenneté, à l'occasion de laquelle il a présenté de nombreux documents qui n'avaient pas été déposés auparavant, y compris des déclarations de revenus de 1999 à 2002.

 

[9]               La deuxième demande de citoyenneté du demandeur a été rejetée le 27 juin 2007.

 

Décision contestée

[10]           Il incombe au demandeur d’établir, selon la prépondérance de la preuve, qu'il répond au critère de résidence prévu à l'alinéa 5(1)c) de la Loi (Maharatnam c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (2000), 96 A.C.W.S. (3d) 198, [2000] A.C.F. no 405 (QL)). Pour que sa demande de citoyenneté soit accueillie, le demandeur devait montrer qu'il avait résidé au Canada pendant trois ans (1 095 jours) au cours de la période pertinente de quatre ans commençant le 23 juin 1999 et se terminant le 23 juin 2003.

 

[11]           Le juge de la citoyenneté a rejeté la demande de citoyenneté du demandeur au motif qu'il ne répondait pas au critère de résidence énoncé à l'alinéa 5(1)c) de la Loi parce que des éléments de preuve montraient qu'il avait résidé aux États-Unis de 1999 à 2000 et que le demandeur avait omis de réfuter ces éléments de preuve. Les renseignements fournis par le demandeur n'indiquaient pas avec exactitude le nombre de jours pendant lesquels il avait été absent du Canada.

 

[12]           Dans sa première demande, le demandeur a déclaré qu'il avait été aux États-Unis pendant une journée en 1999 et pendant 34 jours en 2000 et il a insisté sur le fait qu'il n'avait pas voyagé aux États-Unis depuis lors. Le demandeur compte 1 376 jours pertinents et a reconnu avoir été à l'extérieur du Canada pendant 36 jours, ce qui donne un total de 1 340 jours de présence physique au Canada. Toutefois, les documents dans le dossier du demandeur indiquent que le 12 mai 2005, la patrouille frontalière américaine a informé ses homologues canadiens que le demandeur [traduction] « était un résident permanent des États-Unis de 1999 à 2001 », ce qu’a nié le demandeur.

 

[13]           Le juge de la citoyenneté a conclu que le récit du demandeur était confus et contradictoire et que les documents à l'appui de sa demande de résidence ne permettaient pas au juge de la citoyenneté de conclure que le demandeur n'était pas au Canada pendant les périodes à l'égard desquelles il allègue l’avoir été et qu'il répond au critère de résidence énoncé à l'alinéa 5(1)c) de la Loi. Le demandeur a donc omis de s'acquitter du fardeau, selon la prépondérance de la preuve, de montrer qu'il résidait au Canada pendant les 1 095 jours prescrits au cours de la période pertinente de quatre ans.

 

Questions en litige

[14]           Le demandeur soumet les questions suivantes à la Cour :

1.         Le juge de la citoyenneté a-t-il commis une erreur en concluant que des éléments de preuve montraient que le demandeur a résidé aux États-Unis de 1999 à 2001, et que ces éléments de preuve n'avaient pas été réfutés?

2.         Le juge de la citoyenneté a-t-il violé le droit du demandeur de connaître la preuve à réfuter, et donc son droit à l'équité procédurale, en omettant de communiquer l'information fournie par la patrouille frontalière américaine et en omettant ainsi de lui fournir la possibilité de répondre à cette information?

 

 

Dispositions législatives pertinentes

[15]           Les conditions de résidence sont énoncées au paragraphe 5(1) de la Loi sur la citoyenneté, L.R.C. 1985, ch. C‑29 :

 

Attribution de la citoyenneté

5. (1) Le ministre attribue la citoyenneté à toute personne qui, à la fois :

 

[…]

 

c) est un résident permanent au sens du paragraphe 2(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés et a, dans les quatre ans qui ont précédé la date de sa demande, résidé au Canada pendant au moins trois ans en tout, la durée de sa résidence étant calculée de la manière suivante :

 

 

(i) un demi-jour pour chaque jour de résidence au Canada avant son admission à titre de résident permanent,

 

 

 

 

 

(ii) un jour pour chaque jour de résidence au Canada après son admission à titre de résident permanent;

Grant of citizenship

5. (1) The Minister shall grant citizenship to any person who

 

 

[…]

 

(c) is a permanent resident within the meaning of subsection 2(1) of the Immigration and Refugee Protection Act, and has, within the four years immediately preceding the date of his or her application, accumulated at least three years of residence in Canada calculated in the following manner:

 

(i) for every day during which the person was resident in Canada before his lawful admission to Canada for permanent residence the person shall be deemed to have accumulated one-half of a day of residence, and

 

(ii) for every day during which the person was resident in Canada after his lawful admission to Canada for permanent residence the person shall be deemed to have accumulated one day of residence;

 

Analyse

Norme de contrôle

[16]           En l'espèce, le juge de la citoyenneté a adopté le critère énoncé dans Pourghasemi (Re) (1993), 62 F.T.R. 122, 39 A.C.W.S. (3d) 251. C'est ce qui ressort de son analyse et de sa conclusion selon laquelle le demandeur ne s'est pas acquitté de son fardeau, selon la prépondérance de la preuve, de montrer qu'il a résidé au Canada pendant les 1 095 jours prescrits au cours de la période pertinente de quatre ans.

 

[17]           En ce qui a trait à la première question, celle de savoir si le demandeur a montré qu'il était physiquement présent au Canada pendant 1 095 jours, il s'agit d'une question de fait. Je suis convaincu, et les parties sont d'accord, que cette question doit être examinée selon la norme de la raisonnabilité, telle que l'a récemment formulée la Cour suprême dans l'arrêt Dunsmuir c. Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 R.C.S. 190.

 

[18]           En ce qui concerne la deuxième question, je conviens que les questions de justice naturelle doivent être tranchées selon la norme de la décision correcte (Arrachch c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2006 CF 999, 299 F.T.R. 1).

 

1.         Le juge de la citoyenneté a-t-il commis une erreur en concluant que des éléments de preuve montraient que le demandeur a résidé aux États-Unis de 1999 à 2001, et que ces éléments de preuve n'avaient pas été réfutés?

 

[19]           Le demandeur affirme que le juge de la citoyenneté n'a pas correctement tenu compte des éléments de preuve qui montraient qu'il résidait au Canada au cours de la période pertinente. Plus particulièrement, bien que la décision du juge de la citoyenneté révèle qu'il avait de la correspondance provenant de la patrouille frontalière américaine qui, à son avis, indique que le demandeur a résidé aux États-Unis de 1999 à 2001, le demandeur soutient que le juge de la citoyenneté ne l'a jamais confronté à cette information et n'a pas communiqué la correspondance en question.

 

[20]           Le demandeur prétend que le dossier contenait une preuve considérable montrant qu'il a résidé au Canada pendant la période pertinente et, compte tenu de l'absence d'une preuve contraire, le juge de la citoyenneté a commis une erreur en concluant que le demandeur n'avait pas satisfait au critère de résidence.

 

[21]           Le défendeur indique que le juge de la citoyenneté s'est appuyé sur de nombreux éléments factuels pour conclure que le demandeur a été non seulement absent pendant 36 jours au cours de la période pertinente, mais qu’il était raisonnable pour le juge de la citoyenneté d’estimer que trop peu de documents avaient été déposés à l'appui de l'allégation du demandeur pour lui permettre de conclure, selon la prépondérance de la preuve, qu'il satisfaisait au critère de résidence.

 

[22]           Le juge de la citoyenneté a la prérogative d'adopter l'approche qui lui convient au moment de déterminer si un demandeur satisfait aux conditions de la Loi en matière de résidence (Rizvi c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2005 CF 1641, 144 A.C.W.S. (3d) 608, au paragraphe 12; voir aussi Wang c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2008 CF 390, au paragraphe 18; 166 A.C.W.S. (3d) 220).

 

[23]           Tel qu'il a été indiqué ci-dessus, le juge de la citoyenneté a utilisé en l'espèce l’exigence de la présence effective énoncée dans Pourghasemi (Re). La Cour a reconnu, à l'instar du juge de la citoyenneté, que la jurisprudence crée une forte inférence que la présence au Canada au cours de trois des quatre années doit être prolongée (Rizvi, précitée, au paragraphe 12; Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) c. Lu, 2001 CFPI 640, 106 A.C.W.S. (3d) 786, au paragraphe 7; Zhang c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (2000), 197 F.T.R. 225, au paragraphe 9; 101 A.C.W.S. (3d) 691). Il incombait au demandeur de fournir des éléments de preuve suffisants pour montrer qu'il satisfaisait au critère de résidence prévu dans la Loi (Rizvi, précitée, au paragraphe 21).

 

[24]           Le demandeur a omis de présenter suffisamment d'éléments de preuve montrant sa présence au Canada pendant la période pertinente, comme l'a souligné le juge de la citoyenneté dans ses motifs :

 

[traduction]

Une lettre du 26 juin 2003 énonce que le demandeur est locataire de l'appartement 804, au 3505, rue Ste‑Famille, depuis le 1er février 1997. Le demandeur a toutefois omis de présenter des reçus de loyer ou des relevés mensuels de services publics.

 

Une lettre de la Banque Royale, datée du 11 juin 2003, indique que le demandeur est client de la banque depuis le 8 septembre 1997. Toutefois, le demandeur n'a présenté aucun relevé bancaire ni aucun relevé de carte de crédit mensuels.

 

Le demandeur n'a présenté aucun document montrant qu'il a rendu visite à un médecin, à un dentiste ou à un autre professionnel de la santé pendant la période visée. Il n'a pas non plus présenté de reçus montrant qu'il a fait des achats dans une pharmacie au cours de la période visée de quatre ans.

 

Le demandeur n'a pas présenté de lettres d'appui provenant d'amis, de voisins, d'associés ou d'employeurs. De plus, outre le paiement d’une adhésion au Club La Cité, le demandeur n'a présenté aucune lettre ni aucune preuve d’adhésion à un club, à une organisation, à un groupe ou à une association communautaire, culturel, religieu ou social.

 

[25]           Le demandeur ne conteste pas ces faits.

 

[26]           Le juge de la citoyenneté n'est pas tenu de mentionner chacun des éléments de preuve que lui présente le demandeur (Cheng c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (2000), 97 A.C.W.S. (3d) 393, [2000] A.C.F. no 614 (QL); Kwan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2001 CFPI 738, 107 A.C.W.S. (3d) 21; Bakht c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2008 CF 1193, [2008] A.C.F. no 1510 (QL)). Il y a cependant un élément de preuve que mentionne le juge de la citoyenneté et qui soulève des questions en l’espèce, à savoir l'élément de preuve concernant la correspondance des 11 et 12 mai 2005 entre l'Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) et la patrouille frontalière américaine.

 

[27]           Comme l'a indiqué le juge de la citoyenneté dans ses motifs, ces éléments de preuve renvoient à la correspondance entre la patrouille frontalière américaine et l’ASFC qui indique que le demandeur [traduction] « était un résident permanent des États-Unis de 1999 à 2001 ».

 

[28]           L'avocat du demandeur a soutenu que la correspondance en cause concernait le statut juridique du demandeur aux États-Unis de 1999 à 2001, par opposition à sa présence effective.

 

[29]           Le demandeur a de plus prétendu que le juge de la citoyenneté avait mal interprété la correspondance en question et sa signification véritable et qu'elle était tout au plus [traduction] « ambiguë ».

 

[30]           Selon le demandeur, la note de service datée du 5 avril 2005 et envoyée par un [traduction] « conseiller en citoyenneté » au [traduction] « juge de la citoyenneté » énonçant que le demandeur est [traduction] « aux États-Unis depuis décembre 1999. Il y vit toujours en 2000. » [Non souligné dans l'original.] confirme davantage cette présumée mauvaise interprétation de la correspondance en cause.

 

[31]           Compte tenu de cet élément de preuve, il semble possible que le juge de la citoyenneté ait  mal interprété la correspondance entre la patrouille frontalière américaine et l’ASFC en concluant que le demandeur était un résident des États-Unis de 1999 à 2001, parce que cela consiste en une correspondance concernant le statut juridique du demandeur aux États-Unis, par opposition à sa présence physique aux États-Unis ou au Canada.

 

[32]           Cela pourrait avoir en effet amené le juge de la citoyenneté à conclure que la correspondance en cause montrait que le demandeur n'était pas au Canada pendant la période en question (de 1999 à 2001). Cette correspondance est le seul élément de preuve au dossier qui aurait pu indiquer que le demandeur était absent du Canada pendant la période pertinente.

 

[33]           Nonobstant ce qui précède, à la suite d’un examen du dossier complet, la Cour est d'avis que la preuve dans son ensemble, y compris la portion de 1999 à 2001 de la période pertinente, demeure insuffisante, inadéquate et très incomplète pour ce qui est d'établir une présence physique importante au Canada pendant la période pertinente.

 

[34]           À titre d'exemple, le demandeur a présenté des certificats de formation à l'appui de sa demande. Ces certificats n'indiquent cependant pas la période pendant laquelle les cours de formation ont été suivis. Une simple date confirmant l'achèvement de ces cours en 2000 est insuffisante à cet égard, car elle ne fournit aucun renseignement à propos des dates au cours desquelles le demandeur a suivi les cours. Ces cours auraient pu avoir été suivis à l'extérieur de la période en cause.

 

[35]           De plus, au cours de son entrevue avec le juge de la citoyenneté en juin 2007, le demandeur n'a fourni aucun renseignement à propos de ses revenus ou autres formes d'avantages reçus en 2003.

 

[36]           La jurisprudence de la Cour a continué d'insister sur la nécessité d'une présence physique importante au Canada pendant la période pertinente (Pourghasemi (Re); Chen; Ghahremani c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2009 CF 411, [2009] A.C.F. no 524 (QL); Huan c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2006 CF 448, 147 A.C.W.S. (3d) 746; Rizvi c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2005 CF 1641, 144 A.C.W.S. (3d) 608; Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) c. Lu, 2001 CFPI 640, 106 A.C.W.S. (3d) 786, aux paragraphes 6 et 7). En l'espèce, le demandeur a omis de s'acquitter de son fardeau de preuve.

 

[37]           En conséquence, la Cour conclut que la présumée mauvaise interprétation de la correspondance entre la patrouille frontalière américaine et l’ASFC par le juge de la citoyenneté n'a pas pu se produire et n'est pas importante à l'égard du résultat final (Patel c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2002 CAF 55, 288 N.R. 48; Goudimenko c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2002 CFPI 447, 113 A.C.W.S. (3d) 766, aux paragraphes 17 et 18). La Cour n'est pas convaincue, selon la prépondérance de la preuve, que le demandeur a répondu au critère de résidence prévu à l'alinéa 5(1)c) de la Loi. La conclusion du juge de la citoyenneté est raisonnable et ne justifie pas l'intervention de la Cour.

 

2.         Le juge de la citoyenneté a-t-il violé le droit du demandeur de connaître la preuve à réfuter, et donc son droit à l'équité procédurale, en omettant de communiquer l'information fournie par la patrouille frontalière américaine et en omettant ainsi de lui fournir la possibilité de répondre à cette information?

 

[38]           Selon le demandeur, la Cour a déclaré que l'obligation d'équité envers une personne sollicitant la citoyenneté est [traduction] « relativement élevée » et que le pouvoir discrétionnaire du juge de la citoyenneté est assez vaste (Sadykbaeva c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration), 2008 CF 1018, 336 F.T.R. 51, aux paragraphes 14 à 16).

 

[39]           En l'espèce, le demandeur soutient qu'il y a eu manquement à l'équité procédurale lorsque le juge de la citoyenneté a omis de lui communiquer la correspondance entre l’ASFC et la patrouille frontalière américaine.

 

[40]           Le défendeur fait valoir que la présente affaire est l'un de ces cas où, même s'il y avait une erreur, elle n'aurait pas d'incidence sur l'issue de l'affaire et ne justifierait pas l'intervention de la Cour.

 

[41]           La validité du statut de résident permanent du demandeur aux États-Unis jusqu'au 26 juillet 2010 est un fait connu et le demandeur n'a pas nié cette information. En conséquence, l'information fournie par la patrouille frontalière américaine le 12 mai 2005 selon laquelle le demandeur était un résident permanent des États-Unis de 1999 à 2001 ne constitue pas une nouvelle information.

 

[42]           Cette information n'a pas créé le risque que le demandeur subisse un préjudice (Kane c. Cons. d’administration de l’Université de la Colombie-Britannique, [1980] 1 R.C.S. 1105, 31 N.R. 214; Syndicat international des travailleurs du bois d’Amérique, section locale 2-69 c. Consolidated-Bathurst Packaging Ltd., [1990] 1 R.C.S. 282, à la page 339, 105 N.R. 161). Comme il est indiqué dans l'arrêt Ass. canadienne de télévision par câble c. American College Sports Collective of Canada, Inc., [1991] 3 C.F. 626, 129 N.R. 296 (C.A.F.) : « Il semble donc que le fait pour un organisme d'utiliser des documents provenant de sources gouvernementales connues du public qui complètent, vu leur nature, les documents que les parties elles-mêmes ont fournis à l'organisme ne constitue pas en soi une violation des règles de justice naturelle. » Le demandeur connaissait l'information gouvernementale à propos de son statut de résident permanent aux États-Unis et il a même avoué dans son témoignage qu'il avait obtenu ce statut en 1999 et qu'il est valide jusqu'en juillet 2010. Compte tenu des faits de l'espèce, le juge de la citoyenneté a agi avec équité envers le demandeur.

 

[43]           L'information concernant la résidence permanente du demandeur ne constitue pas des renseignements fournis par des tiers que ne connaissait pas le demandeur. Ainsi, le juge de la citoyenneté n'avait aucunement l'obligation de divulguer un fait connu au demandeur (Yassine c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration) (1994), 172 N.R. 308, 48 A.C.W.S. (3d) 1434, aux paragraphes 9 et 10 (C.A.F.); Mobil Oil Canada Ltd. c. Office Canada‑Terre‑Neuve des hydrocarbures extracôtiers, [1994] 1 R.C.S. 202, à la page 228, 163 N.R. 27; Cartier c. Canada (Procureur général), [2003] 2 C.F. 317, 300 N.R. 362, aux paragraphes 32 et 33 (C.A.F.)). L'intervention de la Cour n'est donc pas justifiée.


 

JUGEMENT

 

LA COUR STATUE que l'appel est rejeté.

 

 

« Richard Boivin »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

David Aubry, LL.B.

 


cour fédérale

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        T-1619-07

 

Intitulé :                                       Mokhtar ALLOU c.

                                                            Le ministre de la citoyenneté

                                                            et de l’Immigration

 

LIEU DE L'AUDIENCE :                 Montréal (Québec)

 

DATE DE L'AUDIENCE :               le 6 octobre 2009

 

Motifs du jugement

et jugement :                              le juge Boivin

 

DATE DES MOTIFS

ET DU JUGEMENT :                       le 13 octobre 2009

 

 

 

Comparutions :

 

Jared Will

 

Pour le demandeur

Thi My Dung Tran

 

Pour le défendeur

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Jared Will

400, avenue McGill, 2e étage

Montréal (Québec)

 

Pour le demandeur

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

 

Pour le défendeur

 

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