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Federal Court

Cour fédérale


Date : 20091130

Dossier : T-232-08

Référence : 2009 CF 1222

ENTRE :

GABRIEL AZOUZ

 

demandeur

et

 

 

LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE

ET DE LA PROTECTION CIVILE

 

défendeur

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT SUR LE FOND

ET ORDONNANCE SUR LES DÉPENS

 

LE JUGE LEMIEUX

 

Introduction et faits

[1]               À Montréal, le 26 octobre 2009, après avoir entendu les parties, j’ai rejeté l’appel de Monsieur Azouz, déposé en vertu de l’article 30 de la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes, 2000, ch. 17 (la Loi). Les motifs qui suivent sont à l’appui de ma décision. La seule question devant la Cour était de savoir si Monsieur Azouz a contrevenu au paragraphe 12(1) de la Loi.

 

[2]               Je reproduis en annexe à ces motifs les dispositions pertinentes de la Loi et son Règlement d’application – Le Règlement sur la déclaration des mouvements transfrontaliers d’espèces et d’effets, DORS/2002-412 (le Règlement).

 

[3]               L’appel de Monsieur Azouz, par voie d’action, vise la décision de la déléguée du Ministre rendue, selon l’article 27 de la Loi, le 14 novembre 2007, dans laquelle elle a conclu que le demandeur avait contrevenu le paragraphe 12(1) de la Loi à l’égard des devises en sa possession  saisies le 6 juin 2007 à l’Aéroport international Trudeau.

 

[4]               Les circonstances entourant cette saisie des devises et la remise de celles-ci ont été établies dans un exposé conjoint des faits et des admissions déposé, suite à l’ordonnance du Protonotaire Morneau du 1er avril 2009. Cet exposé se lit :

 

1.         Le 6 juin 2007, le demandeur et son épouse s’apprêtaient à quitter le pays à destination de Paris à l’Aéroport international de Montréal-Trudeau.

 

2.         Dès après que le demandeur et son épouse eurent passé le point de contrôle pré-embarquement, ils ont été approchés par un agent des douanes principal.

 

3.         L’agent des douanes principal a posé au demandeur et à son épouse la première question suivante :

 

Avez-vous en votre possession des devises ou instruments monétaires d’une valeur égale ou supérieure à 10 000.00 dollars canadiens?

 

4.         Le demandeur et son épouse ont répondu NON.

 

5.         L’agent des douanes principal leur a demandé combien de devises ou instruments monétaires ils avaient en leur possession.

 

6.         L’épouse du demandeur a répondu notamment à l’agent qu’elle n’avait rien en sa possession.

 

7.         Le demandeur a de son côté répondu qu’il avait seulement quelques milliers (only a few thousands).

 

8.         À la demande de l’agent des douanes principal, le demandeur a précisé qu’il avait

       7 000 (seven thousands), puis a précisé qu’il avait en sa possession 4 000 euros et

       2 000 dollars canadiens.

 

9.         L’agent des douanes principal a demandé au demandeur et à son épouse de la suivre afin qu’elle puisse vérifier leurs affirmations, et les a précédés en direction d’une salle d’entrevue. Néanmoins, un autre agent des douanes assistant, les suivait à une distance d’environ 8 pieds.

 

10.     Durant la marche entre le point de contrôle pré-embarquement et la salle d’entrevue, le demandeur a remis à son épouse une somme de 700 euros.

 

11.     L’agent des douanes principal a demandé à l’épouse du demandeur de lui remettre la somme que son mari venait tout juste de lui donner, ce qui fut fait.

 

12.     Le demandeur et son épouse sont alors entrés dans la salle d’entrevue.

 

13.     L’examen des effets du demandeur a révélé que le demandeur était en possession de diverses espèces d’une valeur de 11 097.78$ canadiens réparties comme suit :

 

·      5 000 euros;

·      3 041 dollars US; et,

 

·      700 dollars canadiens.

 

14.     Aucune somme d’argent ne fut trouvée en possession de l’épouse du demandeur, Madame Peggy Azouz.

 

15.     L’agent des douanes principal a alors saisi à titre de confiscation cette somme de

       11 097.78$ en application du paragraphe 18(1) de la Loi sur le recyclage des produits de

     de la criminalité et le financement des activités terroristes, L.C. 2000, ch. 17, (ci-après

     « la Loi »).

 

16.     L’agent des douanes a restitué au demandeur les devises saisies (11 097.78$) sur paiement par le demandeur d’une pénalité de 2 500$ prévue à l’alinéa 18b) du Règlement sur la déclaration des mouvements transfrontaliers d’espèces ou d’effets, DORS/2002-412.

 

17.     L’agent des douanes a émis à cet effet un avis écrit de la saisie au nom du demandeur et de son épouse, Madame Peggy Azouz. Cet avis indique notamment le montant des espèces saisies, le montant de la pénalité imposée, ainsi que le droit d’appel du demandeur.

 

18.     Le 6 juin 2007, l’agent des douanes principal a rédigé le rapport narratif prévu à l’article 20 de la Loi. L’agent des douanes assistant a également rédigé un rapport narratif à cette date. Ces rapports narratifs ont été communiqués une première fois au procureur du demandeur, Me Sami Iskandar, le ou avant le 3 juillet 2007.

 

[5]               Suite à ces événements, conformément aux articles 25 et 27 de la Loi, Monsieur Azouz a demandé au Ministre de décider s’il y a eu contravention au paragraphe 12(1) de la Loi. Le procureur du demandeur a fait valoir ses moyens de preuve à l’encontre de la saisie. Un rapport rédigé par un agent de l’Agence des Services frontaliers du Canada (l’Agence) décrit les faits et circonstances de la saisie basés sur les deux déclarations narratives de l’agent des douanes principal et son assistant. La déléguée du Ministre a rendu sa décision, selon l’article 27 de la Loi, le 14 novembre 2007.

 

[6]               La déléguée du Ministre conclut :

 

1.    Qu’il y a eu contravention au paragraphe 12(1) de la Loi : “as the currency in your possession was of a value greater than $10 000.00 CAD and you failed to declare it to Canada Border Services Agency, a contravention of subsection 12(1) of the Act did occur. The currency was lawfully subject to seizure under subsection 18(1) of this Act.”

 

2.    L’épouse du demandeur, Peggy Azouz, n’a pas commis de contravention au paragraphe 12(1) de la Loi et son nom a été retiré des registres de l’Agence des services frontaliers du Canada.

 

3.    La pénalité pour la mainlevée de la saisie des devises devait être de 250$ plutôt que 2 500$ : “because, although the currency was not reported, it was not concealed, a full disclosure of the facts was made upon discovery and you were not subject to a previous seizure under this Act. The prescribed penalty for a Level 1 infraction is $250.”

 

[7]               Par lettre du 28 novembre 2007, Monsieur Azouz a demandé à la déléguée du Ministre s’il était  possible de retirer le nom du demandeur de la banque de donnés des douanes et ce, afin que le demandeur puisse ne pas subir lors de passages aux douanes les inconvénients résultant de la saisie du 6 juin 2007.

 

[8]               Le 24 décembre 2007, une arbitre de l’Agence a répondu au procureur du demandeur que le nom du demandeur demeurait dans le système de l’Agence pour une période de 6 ans à compter de la contravention, et qu’en conséquence le demandeur pourrait être sujet à de plus grandes vérifications lors de ses prochains passages aux douanes.

 

[9]               Dans l’intervalle, le ou vers le 28 novembre 2007, le demandeur avait reçu une lettre de l’Agence lui indiquant que sa demande de participation au régime NEXUS était refusée en raison d’une contravention antérieure à la législation douanière. Ce programme NEXUS est destiné aux gens d’affaires canadiens et américains qui voyagent fréquemment, et vise à faciliter les procédures douanières lors des départs et arrivées aux frontières communes des deux (2) pays.

 

[10]           Le 12 février 2008, le demandeur a déposé une action en l’instance en vertu de l’article 30 de la Loi.

 

Remarques préliminaires

[11]           Tel que mentionné dans son ordonnance du 1er avril 2009 relative à la conférence préparatoire et à la conduite de l’action, le protonotaire Morneau ordonnait que la seule question à trancher était de savoir si le demandeur a contrevenu au paragraphe 12(1) de la Loi. Il a aussi ordonné qu’il n’y aura aucun témoin expert produit par les parties à l’instruction et, tel que mentionné, a ordonné le dépôt d’un exposé conjoint de faits et d’admissions le plus complet possible.

 

[12]           Au début de l’audience du 26 octobre 2009, le procureur de Monsieur Azouz a avisé la Cour que Monsieur et Madame Azouz voulaient témoigner ce qui a pris celle-ci un peu par surprise considérant l’ampleur des faits et des admissions dans l’exposé ainsi que le principe reconnu que leurs témoignages ne pourraient contredire ce qui avait été admis dans l’exposé ou plaidé dans la déclaration recherchée devant la Cour sous l’article 30 de la Loi.

 

[13]           La Cour a demandé que cette situation soit clarifiée et après avoir obtenu deux admissions de la part du Ministre, le procureur de Monsieur Azouz a reconnu qu’il n’y avait aucune utilité et la Cour a conclu à aucune pertinence de faire témoigner ses clients. Les admissions étaient celles-ci :

 

1.    Il est admis par le Ministre pour les fins du dossier que 700 sur les 5 000 euros que Monsieur Azouz possédait au moment de la saisie étaient la propriété de Madame Azouz mais il n’était pas admis que les 700 dollars canadiens en possession de Monsieur Azouz étaient la propriété de son épouse.

 

2.    Il a été aussi admis par le Ministre que Monsieur Azouz subjectivement ne croyait pas qu’il était en possession de plus de 10 000 dollars canadiens en euros, dollars américains et dollars canadiens.

 

[14]           Je n’ai pas permis à Madame Azouz de témoigner que les 700 dollars canadiens étaient sa propriété. J’étais d’avis qu’un témoignage à cet effet allait contredire soit l’exposé ou soit la déclaration déposée devant cette Cour où il n’avait jamais été question que les dollars canadiens appartenaient à Madame. En effet la déclaration recherchée par Monsieur Azouz indiquait au paragraphe de celle-ci que les sept cents dollars canadiens étaient sa propriété.

 

[15]           Finalement, à la fin des plaidoiries, Monsieur Azouz m’a demandé s’il pouvait adresser la Cour. J’ai maintenu l’objection du Ministre sur ce point au motif que son procureur qui le représentait était en réplique.

 

[16]           Les parties ont reconnu que la procédure d’appel devant moi n’était pas un contrôle judiciaire mais un procès de novo dans lequel les parties pouvaient témoigner et plaider des faits qui n’étaient pas devant le Ministre.

 

Analyse

(1) La Loi et son Règlement

[17]           Tout ce qui concerne l’obligation de déclarer l’importation ou l’exportation des espèces est clair et sans ambiguïté dans la Loi et le Règlement. Elles énoncent à qui, par qui, quand, comment, pourquoi, dans quelles circonstances une déclaration doit être présentée et les conséquences d’une contravention. Ces éléments sont prévus aux articles 12 et 18 de la Loi et aux articles 2, 3 et 11 du Règlement.

 

[18]           Une personne qui quitte le pays ayant en sa possession effective ou parmi ses bagages des espèces d’une valeur égale ou supérieure à 10 000$ est tenue de dévoiler cette somme par moyen d’une déclaration écrite présentée, sans délai, par cette personne à un agent au bureau de douane situé au lieu de l’exportation ou, si ce bureau est fermé, au moment de l’exportation, au bureau de douane le plus proche qui est ouvert.

 

[19]           L’application de la Loi est visée par l’article 18 qui prévoit que si l’agent a des motifs raisonnables de croire qu’il y a eu contravention à l’article 12(1), « l’agent peut saisir à titre de confiscation des espèces » mais doit restituer sur réception de la pénalité réglementaire au saisi ou au propriétaire légitime les espèces saisies sauf s’il soupçonne pour des motifs raisonnables qu’il s’agit de produits de la criminalité au sens du paragraphe 462.3(1) du Code criminel ou de fonds destinés au financement des activités terroristes. Les pénalités règlementaires sont prescrites à l’article 18 du Règlement. Le montant : (1) de 250$ est prescrit pour une personne qui n’a pas dissimulé les espèces; (2) de 2 500$ pour celle qui a dissimulé les espèces; et, (3) un montant maximum de 5 000$ pour une personne qui a dissimulé les espèces en se servant de faux compartiments. Je note, encore une fois, que le demandeur a été frappé de la pénalité minimale suite à son appel au Ministre en vertu de l’article 27 de la Loi.

 

[20]           Un des objectifs de la Loi énoncé à l’article 3a)(ii) est « d’établir un régime de déclaration obligatoire des opérations financières douteuses et des mouvements transfrontaliers d’espèces et d’effets. »

 

(2) La plaidoirie de Monsieur Azouz

[21]           Durant sa plaidoirie, le procureur de Monsieur Azouz a admis, qu’avant de prendre son envolée vers Paris le soir du 6 juin 2007 : il (1) avait en sa possession plus de 10 000 dollars en équivalence canadienne (notes sténographiques, page 55); et, (2) n’avait pas présenté la déclaration écrite requise (notes sténographiques, page 148, ligne 22). Il l’avait déclaré oralement seulement après avoir passé la sécurité lorsque confronté par un agent.

 

[22]           En défense, il plaide :

 

(1)   que dans les circonstances, Monsieur Azouz n’avait pas l’obligation de présenter une déclaration au bureau de douane en conformité avec l’article 11 du Règlement parce qu’il ne croyait pas qu’il avait plus que 10 000$ sur lui puisqu’une somme importante appartenait à son épouse; il était convaincu qu’il aurait moins de 10 000$ dans ses poches avant de prendre l’avion puisqu’il avait l’intention d’acheter des cadeaux hors taxes et de prendre avec Madame Azouz un repas à l’aéroport.

 

(2)   La saisie sous l’article 18 était illégale, d’une part, parce que l’agent n’avait pas de motifs raisonnables qu’il y avait contravention à l’article 12 de la Loi et, d’autre part, l’agent a mal exercé sa discrétion dans les circonstances vu que l’objectif de la Loi est de viser le blanchissement de l’argent ou le financement du terrorisme mais pas « pour pincer quelqu’un avec quelques dollars de plus » (notes sténographiques, page 60, ligne 14). Selon le procureur, l’agent, en effectuant la saisie, n’a pas reconnu que sa discrétion était de promouvoir ces objectifs de la Loi.

 

(3)   Le Ministre devait démontrer qu’il avait en sa possession plus que 20 000$ parce que son épouse était impliquée dans les procédures comme « co-offender »; on l’a inclus dans la saisie.

 

(4)   Il y a eu violence verbale de la part de l’agent à l’encontre de Monsieur et Madame Azouz ce qui a donné lieu à l’accusation contre Monsieur et Madame Azouz et, comme suite, la saisie. Il prétend que la Loi est une loi à caractère pénal et que l’agent a agi de mauvaise foi.

 

Conclusions

[23]           Je ne peux souscrire à aucune des prétentions du procureur de Monsieur Azouz. Ses prétentions vont, d’une part, à l’encontre de l’économie de la Loi et la jurisprudence qui a interprété celle-ci et les lois connexes du Parlement et, d’autre part, sont des éléments évoqués pour la première fois en appel devant cette Cour. Les arrêts suivants sont pertinents sur l’interprétation de la Loi et de son règlement d’application :

 

(1)      L’arrêt Tourki c. le ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, 2006 CF 50 (C.F.), maintenu en appel 2007 CAF 186 (Tourki);

 

(2)      L’arrêt Zeid c. le Ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, 2008 CF 539 (Zeid); et,

 

(3)      L’arrêt Hoang c. le ministre du Revenu national et al, 2006 CF 182 (Hoang).

 

[24]           Je cite aussi le jugement de la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Martineau c. Ministre du Revenu national, 2004 CSC 81 et une décision de cette Cour, dans : Sarji c. Canada (Ministre du Revenu national (Douanes et Accise – M.R.N.)), [1999] A.C.F. no 1401 rendue sous la Loi sur les douanes.

 

[25]           Les principes suivants se dégagent de cette jurisprudence :

 

(1)      Le processus relatif à la saisie et la confiscation dans la Loi est un mécanisme de recouvrement civil qui ne vise pas à punir l’individu; la personne visée n’est pas un inculpé; elle n’est accusée d’aucune infraction criminelle, quasi criminelle ou de nature réglementaire (voir : Tourki, 2007 CAF 186, aux paragraphes 42 à 46). J’ajoute que l’article 73.11 de la Loi exige, sous les conditions applicables en l’espèce, que le montant des pénalités exigées prennent en considération que leur but n’est pas de punir mais d’encourager le respect de la Loi et de son Règlement.

 

(2)      « Si le voyageur ne fait pas de déclaration, l’agent des douanes peut confisquer ce qui aurait dû être déclaré. C’est aussi simple que cela. » (voir la décision de mon collègue le juge Harrington dans Tourki, 2006 CF 50, au paragraphe 56.)

 

(3)      La Loi sur les douanes (LD) a pour objectifs de régir, d’encadrer et de contrôler la circulation transfrontalière des personnes et des marchandises. La réalisation de ces objectifs dépend de l’efficacité du système d’auto-déclaration ou de déclaration volontaire. Pour assurer le respect de la LD, le législateur a mis en place des mécanismes civils et pénaux (voir : Martineau, précité, aux paragraphes 26, 27 et 28 et voir aussi : Tourki, décision rendue par le juge Harrington, 2006 CF 50, au paragraphe 54).

 

(4)      L’objet de la Loi vise plus qu’une lutte contre le recyclage de l’argent à l’échelle internationale. La Loi exige la déclaration des importations d’espèces et d’effets. Un système de dépistage est nécessaire à cette fin (voir : Hoang, précité, au paragraphe 29).

 

(5)      L’intention subjective du passager qui a omis de faire une déclaration n’est pas un facteur pertinent …, ceux qui omettent de faire cette déclaration sont assujettis à une responsabilité absolue (voir : Zeid, précité, au paragraphe 53).

 

[26]           Qui plus est, à mon avis, pour les raisons suivantes il n’y a aucun mérite à l’argument soulevé par le procureur du demandeur sur la légalité de la saisie au motif qu’il s’agissait d’une fouille ou une saisie sans motifs raisonnables ou, de toute façon que l’agent a mal exercé sa discrétion.

 

[27]           Cette question n’était pas pertinente dans le contexte d’un appel sous l’article 30 de la Loi qui est à l’encontre de la décision de la déléguée du Ministre rendue sous l’article 27 de la Loi. Elle n’a pas été soulevée comme question en litige devant le Protonotaire Morneau et, au mérite, l’agent avait des motifs raisonnables de saisir vu les réponses données par le demandeur et son épouse. À mon avis, sa discrétion de saisir était tout à fait conforme aux objectifs de la Loi et a été exercée en conformité avec la Loi et son Règlement.

 

[28]           Selon la preuve, il est évident qu’un des motifs principaux exprimés par Monsieur Azouz d’en avoir appelé à cette Cour n’était pas parce qu’il a été frappé d’une pénalité de 250$ mais que son nom a été maintenu sur une liste de vérification à l’avenir et au motif que subjectivement, il ne pensait pas d’avoir contrevenu à la loi. Quant au premier motif, il n’est pas pertinent dans un appel sous l’article 30 de la Loi; s’il se croit lésé sur ce point, d’autres moyens de recours sont à sa disposition; sur le second point, sa croyance subjective, qui n’est pas mise en doute, n’a aucune pertinence sous la Loi et le Règlement.

 

[29]           A la fin de la plaidoirie, le procureur du Ministre m’a informé que le Ministre avait offert au demandeur un règlement – son désistement sans frais. Si le Ministre avait en vue les dispositions des articles 420 et 421 des Règles de la Cour fédérale, je ne crois pas que l’exigence qu’il y ait un compromis dans l’offre du Ministre soit rencontrée (voir : Canadian Olympic Association c. Olymel, Société en commandite, 195 F.T.R. 216). J’estime donc que le Ministre n’a pas droit à double dépens mais étant de la partie gagnante, il a droit aux dépens ordinaires. J’ordonne donc que Monsieur Azouz paie les dépens du Ministre selon l’échelle des dépens prescrits au tarif des règles, c’est-à-dire au niveau 3.

 

 

              « François Lemieux »

________________________________

                             Juge

 

Ottawa (Ontario)

Le 30 novembre 2009

 

 

 

 

 

 

ANNEXE A

1. La Loi

L’article 12 de la Loi oblige une déclaration à l’agent lors d’une exportation des espèces :

 

 

Déclaration

 

12. (1) Les personnes ou entités visées au paragraphe (3) sont tenues de déclarer à l'agent, conformément aux règlements, l'importation ou l'exportation des espèces ou effets d'une valeur égale ou supérieure au montant réglementaire.

 

Exception

 

(2) Une personne ou une entité n’est pas tenue de faire une déclaration en vertu du paragraphe (1) à l’égard d’une importation ou d’une exportation si les conditions réglementaires sont réunies à l’égard de la personne, de l’entité, de l’importation ou de l’exportation et si la personne ou l’entité convainc un agent de ce fait.

 

Déclarant

 

(3) Le déclarant est, selon le cas :

 

 

a) la personne ayant en sa possession effective ou parmi ses bagages les espèces ou effets se trouvant à bord du moyen de transport par lequel elle arrive au Canada ou quitte le pays ou la personne qui, dans les circonstances réglementaires, est responsable du moyen de transport;

 

 

b) s’agissant d’espèces ou d’effets importés par messager ou par courrier, l’exportateur étranger ou, sur notification aux termes du paragraphe 14(2), l’importateur;

 

 

c) l’exportateur des espèces ou effets exportés par messager ou par courrier;

 

 

 

d) le responsable du moyen de transport arrivé au Canada ou qui a quitté le pays et à bord duquel se trouvent des espèces ou effets autres que ceux visés à l’alinéa a) ou importés ou exportés par courrier;

 

 

 

e) dans les autres cas, la personne pour le compte de laquelle les espèces ou effets sont importés ou exportés.

 

Obligation du déclarant

 

 

(4) Une fois la déclaration faite, la personne qui entre au Canada ou quitte le pays avec les espèces ou effets doit :

 

 

 

a) répondre véridiquement aux questions que lui pose l’agent à l’égard des renseignements à déclarer en application du paragraphe (1);

 

b) à la demande de l’agent, lui présenter les espèces ou effets qu’elle transporte, décharger les moyens de transport et en ouvrir les parties et ouvrir ou défaire les colis et autres contenants que l’agent veut examiner.

 

 

Transmission au Centre

 

(5) L’agent fait parvenir au Centre les déclarations recueillies en application du paragraphe (1).

 

[Je souligne.]

 

Currency and monetary instruments

 

12. (1) Every person or entity referred to in subsection (3) shall report to an officer, in accordance with the regulations, the importation or exportation of currency or monetary instruments of a value equal to or greater than the prescribed amount.

 

Limitation

 

(2) A person or entity is not required to make a report under subsection (1) in respect of an activity if the prescribed conditions are met in respect of the person, entity or activity, and if the person or entity satisfies an officer that those conditions have been met.

 

 

Who must report

 

(3) Currency or monetary instruments shall be reported under subsection (1)

 

(a) in the case of currency or monetary instruments in the actual possession of a person arriving in or departing from Canada, or that form part of their baggage if they and their baggage are being carried on board the same conveyance, by that person or, in prescribed circumstances, by the person in charge of the conveyance;

 

(b) in the case of currency or monetary instruments imported into Canada by courier or as mail, by the exporter of the currency or monetary instruments or, on receiving notice under subsection 14(2), by the importer;

 

(c) in the case of currency or monetary instruments exported from Canada by courier or as mail, by the exporter of the currency or monetary instruments;

 

(d) in the case of currency or monetary instruments, other than those referred to in paragraph (a) or imported or exported as mail, that are on board a conveyance arriving in or departing from Canada, by the person in charge of the conveyance; and

 

(e) in any other case, by the person on whose behalf the currency or monetary instruments are imported or exported.

 

Duty to answer and comply with the request of an officer

 

(4) If a report is made in respect of currency or monetary instruments, the person arriving in or departing from Canada with the currency or monetary instruments shall

 

(a) answer truthfully any questions that the officer asks with respect to the information required to be contained in the report; and

 

 

(b) on request of an officer, present the currency or monetary instruments that they are carrying or transporting, unload any conveyance or part of a conveyance or baggage and open or unpack any package or container that the officer wishes to examine.

 

Sending reports to Centre

 

(5) Officers shall send the reports they receive under subsection (1) to the Centre.

 

 

[Emphasis mine.]

 

 

 

            Une demande de révision et une décision du Ministre sont prévues aux articles 25 et 27 :

 

25. La personne entre les mains de qui ont été saisis des espèces ou effets en vertu de l'article 18 ou leur propriétaire légitime peut, dans les quatre-vingt-dix jours suivant la saisie, demander au ministre de décider s'il y a eu contravention au paragraphe 12(1) en donnant un avis écrit à l'agent qui les a saisis ou à un agent du bureau de douane le plus proche du lieu de la saisie.

 

 

 

 

27. (1) Dans les quatre-vingt-dix jours qui suivent l’expiration du délai mentionné au paragraphe 26(2), le ministre décide s’il y a eu contravention au paragraphe 12(1).

Report de la décision

 

(2) Dans le cas où des poursuites pour infraction de recyclage des produits de la criminalité ou pour infraction de financement des activités terroristes ont été intentées relativement aux espèces ou effets saisis, le ministre peut reporter la décision, mais celle-ci doit être prise dans les trente jours suivant l'issue des poursuites.

 

Avis de la décision

 

(3) Le ministre signifie sans délai par écrit à la personne qui a fait la demande un avis de la décision, motifs à l’appui.

 

 

[Je souligne.]

 

25. A person from whom currency or monetary instruments were seized under section 18, or the lawful owner of the currency or monetary instruments, may within 90 days after the date of the seizure request a decision of the Minister as to whether subsection 12(1) was contravened, by giving notice in writing to the officer who seized the currency or monetary instruments or to an officer at the customs office closest to the place where the seizure took place.

 

 

27. (1) Within 90 days after the expiry of the period referred to in subsection 26(2), the Minister shall decide whether subsection 12(1) was contravened.

Deferral of decision

 

(2) If charges are laid with respect to a money laundering offence or a terrorist activity financing offence in respect of the currency or monetary instruments seized, the Minister may defer making a decision but shall make it in any case no later than 30 days after the conclusion of all court proceedings in respect of those charges.

 

 

Notice of decision

 

(3) The Minister shall, without delay after making a decision, serve on the person who requested it a written notice of the decision together with the reasons for it.

 

[Emphasis mine.]

 

 

          L’article 30 de la Loi permet une personne qui a demandé que soit rendue une décision en

vertu de l’article 27 d’appeler de cette décision par voie d’action à la Cour fédérale à titre

de demande :

 

Cour fédérale

 

30. (1) La personne qui a demandé que soit rendue une décision en vertu de l’article 27 peut, dans les quatre-vingt-dix jours suivant la communication de cette décision, en appeler par voie d’action à la Cour fédérale à titre de demandeur, le ministre étant le défendeur.

 

Action ordinaire

 

(2) La Loi sur les Cours fédérales et les règles prises aux termes de cette loi applicables aux actions ordinaires s'appliquent aux actions intentées en vertu du paragraphe (1), avec les adaptations nécessaires occasionnées par les règles propres à ces actions.

 

Restitution au requérant

 

(3) Le ministre des Travaux publics et des Services gouvernementaux, dès qu’il en a été informé, prend les mesures nécessaires pour donner effet à la décision de la Cour.

 

Limitation du montant versé

 

(4) En cas de vente ou autre forme d’aliénation des espèces ou effets en vertu de la Loi sur l’administration des biens saisis, le montant de la somme qui peut être versée en vertu du paragraphe (3) ne peut être supérieur au produit éventuel de la vente ou de l’aliénation, duquel sont soustraits les frais afférents exposés par Sa Majesté; à défaut de produit de l’aliénation, aucun paiement n’est effectué.

 

[Je souligne.]

 

Appeal to Federal Court

 

30. (1) A person who requests a decision of the Minister under section 27 may, within 90 days after being notified of the decision, appeal the decision by way of an action in the Federal Court in which the person is the plaintiff and the Minister is the defendant.

 

Ordinary action

 

(2) The Federal Courts Act and the rules made under that Act that apply to ordinary actions apply to actions instituted under subsection (1) except as varied by special rules made in respect of such actions.

 

 

 

Delivery after final order

 

(3) The Minister of Public Works and Government Services shall give effect to the decision of the Court on being informed of it.

 

Limit on amount paid

 

(4) If the currency or monetary instruments were sold or otherwise disposed of under the Seized Property Management Act, the total amount that can be paid under subsection (3) shall not exceed the proceeds of the sale or disposition, if any, less any costs incurred by Her Majesty in respect of the currency or monetary instruments.

 

 

[Emphasis mine.]

 

 

 

2. Le Règlement d’application

 

          Les articles 2 et 3 du Règlement établissent, pour l’application du paragraphe 12(1) de la Loi, la valeur des espèces à déclarer ainsi que la forme de cette déclaration :

 

DÉCLARATION DES IMPORTATIONS ET EXPORTATIONS

 

Valeur minimale des espèces ou effets

 

 

2. (1) Pour l'application du paragraphe 12(1) de la Loi, les espèces ou effets dont l'importation ou l'exportation doit être déclarée doivent avoir une valeur égale ou supérieure à 10 000 $.

 

(2) La valeur de 10 000 $ est exprimée en dollars canadiens ou en son équivalent en devises selon :

 

a) le taux de conversion officiel de la Banque du Canada publié dans son Bulletin quotidien des taux de change en vigueur à la date de l'importation ou de l'exportation;

 

 

b) dans le cas où la devise ne figure pas dans ce bulletin, le taux de conversion que le déclarant utiliserait dans le cours normal de ses activités à cette date.

 

 

 

Forme de la déclaration

 

3. Sous réserve des paragraphes 4(3) et (3.1) et de l'article 8, la déclaration de l'importation ou de l'exportation d'espèces ou d'effets doit :

 

a) être faite par écrit;

 

b) comporter les renseignements prévus à :

 

(i) à l'annexe 1, dans le cas d'une déclaration faite par la personne visée à l'alinéa 12(3)a) de la Loi, si elle transporte les espèces ou les effets pour son propre compte,

 

(ii) à l'annexe 2, dans le cas d'une déclaration faite par la personne visée à l'alinéa 12(3)a) de la Loi, si elle transporte les espèces ou les effets pour le compte d'une entité ou d'une autre personne,

 

(iii) à l'annexe 2, dans le cas d'une déclaration faite par la personne ou l'entité visée aux alinéas 12(3)b), c) ou e) de la Loi,

 

(iv) à l'annexe 3, dans le cas d'une déclaration faite par la personne visée à l'alinéa 12(3)d) de la Loi;

c) porter une mention selon laquelle les renseignements fournis sont véridiques, exacts et complets;

 

d) être signée et datée par la personne ou l'entité visée aux alinéas 12(3)a), b), c), d) ou e) de la Loi, selon le cas.

 

 

[Je souligne.]

 

 

REPORTING OF IMPORTATIONS AND EXPORTATIONS

 

Minimum Value of Currency or Monetary Instruments

 

2. (1) For the purposes of reporting the importation or exportation of currency or monetary instruments of a certain value under subsection 12(1) of the Act, the prescribed amount is $10,000.

 

(2) The prescribed amount is in Canadian dollars or its equivalent in a foreign currency, based on

 

(a) the official conversion rate of the Bank of Canada as published in the Bank of Canada's Daily Memorandum of Exchange Rates that is in effect at the time of importation or exportation; or

 

(b) if no official conversion rate is set out in that publication for that currency, the conversion rate that the person or entity would use for that currency in the normal course of business at the time of the importation or exportation.

 

General Manner of Reporting

 

3. Subject to subsections 4(3) and (3.1) and section 8, a report with respect to the importation or exportation of currency or monetary instruments shall

 

(a) be made in writing;

 

(b) contain the information referred to

 

 

(i) in Schedule 1, in the case of a report made by the person described in paragraph 12(3)(a) of the Act, if that person is not transporting on behalf of an entity or other person,

 

(ii) in Schedule 2, in the case of a report made by the person described in paragraph 12(3)(a) of the Act, if that person is transporting on behalf of an entity or other person,

 

 

(iii) in Schedule 2, in the case of a report made by the person or entity described in paragraph 12(3)(b), (c) or (e) of the Act, and

 

(iv) in Schedule 3, in the case of a report made by the person described in paragraph 12(3)(d) of the Act;

(c) contain a declaration that the statements made in the report are true, accurate and complete; and

 

(d) be signed and dated by the person or entity described in paragraph 12(3)(a), (b), (c), (d) or (e) of the Act, as applicable.

 

[Emphasis mine.]

 

 

          L’article 11 du Règlement prescrit à l’endroit où une déclaration relative à des espèces doit être présentée et par qui. L’article 15 établit une seule exception pour les espèces importées ou exportées :

 

11. La déclaration relative à des espèces ou effets transportés par une personne quittant le Canada doit être présentée sans délai par cette personne au bureau de douane situé au lieu de l'exportation ou, si ce bureau est fermé au moment de l'exportation, au bureau de douane le plus proche qui est ouvert.

 

 

 

EXCEPTION RELATIVE À LA BANQUE DU CANADA

 

15. Les espèces qui sont importées ou exportées par la Banque du Canada ou en son nom en vue de la distribution, du traitement ou de la mise à l'essai de billets de banque destinés à circuler au Canada n'ont pas à être déclarées en application du paragraphe 12(1) de la Loi.

 

[Je souligne.]

 

11. A report with respect to currency or monetary instruments transported by a person departing from Canada shall be submitted without delay by the person at the customs office located at the place of exportation or, if it is not open for business at the time of exportation, at the nearest customs office that is open for business at that time.

 

 

EXCEPTION RELATIVE À LA BANQUE DU CANADA

 

15. Les espèces qui sont importées ou exportées par la Banque du Canada ou en son nom en vue de la distribution, du traitement ou de la mise à l'essai de billets de banque destinés à circuler au Canada n'ont pas à être déclarées en application du paragraphe 12(1) de la Loi.

 

[Emphasis mine.]

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        T-232-08

 

INTITULÉ :                                       GABRIEL AZOUZ c. LE MINISTRE DE LA

                                                            SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 26 octobre 2009

 

MOTIFS  DU JUGEMENT SUR

LE FOND ET ORDONNANCE 

SUR LES DÉPENS :                         Le juge Lemieux          

 

DATE DES MOTIFS :                      Le 30 novembre 2009

 

 

COMPARUTIONS :

 

Me Sami Iskandar

 

POUR LE DEMANDEUR

 

 

Me Jacques Minar

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Me Sami Iskandar, Avocat

St-Laurent (Québec)

 

POUR LE DEMANDEUR

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

 

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

 

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