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Date : 20100108

Dossier : IMM-2132-09

Référence : 2010 CF 22

Ottawa (Ontario), le 8 janvier 2010

EN PRÉSENCE DE MONSIEUR LE JUGE RUSSELL

 

 

ENTRE :

SHAUN XENON KHAN

demandeur

et

 

LE MINISTRE DE

LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

défendeur

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

 

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire présentée en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la Loi), à l’égard d’une décision rendue le 1er avril 2009 par la Section d’appel de l’immigration de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (la décision). Par sa décision, la Commission a rejeté l’appel du demandeur à l’encontre de la mesure de renvoi prise contre lui, après avoir procédé à un réexamen oral demandé par l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) en vertu de l’article 26 de la Loi au motif que le demandeur avait enfreint de nombreuses conditions du sursis accordé à sa mesure de renvoi.

 

CONTEXTE

 

[2]               Le demandeur est un citoyen du Royaume-Uni (R.-U.) qui est devenu résident permanent du Canada en 1990. Le demandeur est venu au Canada avec son père, sa mère et ses frères et sœurs.

 

[3]               Le demandeur a été déclaré coupable de vol à main armée en 1999, et une mesure d’expulsion du Canada a été prononcée contre lui. Il a interjeté appel de cette mesure à la Section d’appel de l’immigration (SAI). Il a obtenu un sursis de cinq ans à la mesure d’expulsion, sous réserve de se conformer à certaines conditions. 

 

[4]               Beaucoup plus tard, le demandeur a reçu un appel de la SAI dont le but était de l’aviser qu’un réexamen de son sursis aurait lieu le 26 mars 2009. Le demandeur s’est présenté à l’audience et a été informé, peu après, que son appel avait été rejeté.

 

DÉCISION CONTESTÉE

 

[5]               La Commission a énuméré les conditions du sursis à la mesure de renvoi que le demandeur avait apparemment enfreintes. L’inobservation des conditions comprenait ce qui suit :

a)                  ne pas avoir fourni les éléments de preuve exigés, lorsqu’il le fallait, pour démontrer le respect des conditions du sursis, suivant les conditions 7 et 8;

b)                  ne pas avoir produit une copie d’un passeport valide, comme l’exigeait la condition 2;

c)                  ne pas avoir fourni de preuve attestant qu’il tentait sérieusement de régler l’accusation en instance dont il faisait l’objet en Alberta et de « clarifier la décision relative à l’accusation de défaut de se conformer portée contre lui en Colombie‑Britannique », comme l’exigeait la condition 13; 

d)                  avoir omis de se présenter au Centre de contrôle-cautionnements le 4 avril 2008 et le 3 octobre 2008, comme il devait le faire au titre de la condition 9;

e)                  avoir omis de signaler la nouvelle accusation criminelle portée contre lui et celle en suspens, ce qui constituait une violation de la condition 5;

f)                    ne pas avoir consulté un conseiller pour « résoudre ses problèmes psychologiques et maximiser sa réadaptation », comme l’exigeait la condition 10. 

 

[6]               La Commission a signalé que le demandeur souhaitait obtenir une prolongation du sursis à la mesure de renvoi (pour qu’il puisse en respecter les conditions) ou demandait, subsidiairement, que l’appel soit accueilli. Le ministre demandait le rejet de l’appel.

 

[7]               La Commission a indiqué que la mesure d’expulsion avait été prise contre le demandeur parce qu’il avait volé un véhicule motorisé et cambriolé un dépanneur, armé d’un couteau. Un sursis de cinq ans à la mesure de renvoi avait été accordé au demandeur en 2003, compte tenu de l’intérêt supérieur de l’enfant directement touché.   

 

[8]               La Commission a relevé que le demandeur n’avait occupé aucun emploi à temps plein au cours des cinq années précédentes. Le demandeur réside avec sa mère et l’ami de celle-ci. Sa mère et les membres de sa fratrie subviennent à ses besoins.

 

[9]               Comme le prévoit l’article 68.3 de la Loi, la Commission peut, à tout moment, reprendre l’appel concernant une mesure de renvoi. Pour ce faire, la Commission doit tenir compte des facteurs énoncés dans l’arrêt Chieu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CSC 3, [2002] R.C.S. 84. Ces facteurs incluent notamment :

a)                   la gravité de l’infraction à l’origine de la mesure d’expulsion;

b)                  la possibilité de réadaptation;

c)                  la période passée au Canada et le degré d’établissement de l’appelant;

d)                  la famille de l’appelant au Canada et les bouleversements que l’expulsion de l’appelant occasionnerait pour cette famille;

e)                  le soutien dont bénéficie l’appelant, non seulement au sein de sa famille, mais également de la collectivité;

f)                    l’importance des difficultés que causerait à l’appelant le retour dans le pays où il serait renvoyé.

 

[10]           La Commission a fait remarquer que son appréciation se fondait notamment sur l’alinéa 3(1)h) de la Loi, qui comprend l’objectif « de protéger la santé des Canadiens et de garantir leur sécurité ». La Commission a aussi expliqué que le tribunal était « réceptif, attentif et sensible » à l’intérêt supérieur de tout enfant directement touché par le renvoi de l’appelant, ainsi que le prescrit l’arrêt Baker c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1999] 2 R.C.S. 817, [1999] A.C.S. no 39 (QL).

 

[11]           La Commission a examiné l’argument du demandeur selon lequel il n’avait pas fourni de lettre attestant le respect des conditions parce qu’il n’avait reçu aucune demande de cette nature. La Commission a signalé que l’avis envoyé au demandeur avait été renvoyé à l’expéditeur. Elle a conclu que le demandeur avait déménagé au cours du sursis de cinq ans mais n’avait pas informé les autorités compétentes de son changement d’adresse. Par conséquent, le demandeur avait enfreint les conditions 7 et 8 du sursis à sa mesure de renvoi.

 

[12]           De plus, le demandeur n’avait pas apporté son passeport à l’audience pour démontrer qu’il en avait demandé la prolongation. Le demandeur a affirmé qu’il avait remis des copies de son passeport à l’ASFC et à la SAI. Toutefois, il n’y avait aucune copie du passeport dans le dossier du demandeur, et le ministre n’en avait pas copie non plus. La Commission a mis en doute l’assertion du demandeur selon laquelle il avait fourni des copies de son passeport, parce qu’il n’a pu préciser quand ni où ces copies avaient été présentées. De ce fait, la Commission a douté de la crédibilité de cette partie du témoignage du demandeur et a conclu que le demandeur avait enfreint la condition 2 du sursis à sa mesure de renvoi.

 

[13]           Le demandeur a déclaré dans son témoignage qu’il avait remis à son ancien avocat les documents qui démontraient que les causes pendantes en Colombie-Britannique et en Alberta avaient été suspendues. Son avocat avait ensuite transmis ces documents à la SAI et à l’ASFC. Cependant, le demandeur n’avait lui-même conservé aucune copie de ces documents.

 

[14]           Une fois de plus, la Commission n’a pu trouver au dossier du demandeur aucune copie de ces documents, qui n’étaient pas non plus en possession de l’avocat du défendeur. La Commission a estimé que le témoignage du demandeur n’était pas crédible, parce qu’il n’avait pas été en mesure de décrire le contenu de ces documents et n’avait pas pris la peine d’obtenir une copie des documents pour l’audience.

 

[15]           En ce qui touche le mandat non exécuté en Alberta, le demandeur a admis qu’il n’avait rien fait, à part communiquer avec un avocat qui exigeait 5 000 $ pour s’occuper de l’affaire. Aussi la Commission a-t-elle conclu que le demandeur n’avait pas respecté la condition 13 du sursis à son renvoi.

 

[16]           La Commission a estimé que « l’inaction de l’appelant et son inobservation » de cette condition de son sursis constituaient le manquement qui « nuit le plus » à sa demande de prolonger le sursis ou de faire droit à son appel, étant donné particulièrement qu’il avait eu « cinq ans pour résoudre cette question et fournir des éléments de preuve à cet égard » (caractères gras dans l’original). 

 

[17]           La Commission a fait remarquer qu’aucun élément de preuve n’étayait la prétention du demandeur selon laquelle il avait rendu compte par écrit les 4 avril 2008 et 3 octobre 2008. La Commission n’était pas convaincue que le demandeur avait bien rendu des comptes, parce que celui-ci n’avait fourni aucun document à l’appui et que la Commission était d’avis que d’autres parties de son témoignage manquaient de crédibilité. En conséquence, la Commission a conclu que le demandeur avait enfreint la condition 9 de son sursis.

 

[18]           Le demandeur a reconnu qu’il n’avait pas signalé à l’ASFC les nouvelles accusations criminelles portées contre lui, parce qu’il ne savait pas qu’il devait le faire. Or, la Commission a fait observer que le demandeur avait déclaré avoir « lu à de nombreuses reprises les conditions de son sursis ». Par conséquent, la Commission a estimé que le demandeur n’avait pas respecté la condition 5 de son sursis.

 

[19]           Le demandeur a affirmé qu’il s’était rendu à quelques séances de counseling mais qu’il avait cessé d’y aller parce que les séances ne lui étaient pas « utiles ». Le demandeur n’a pu fournir aucune preuve documentaire attestant sa participation à des séances de counseling. En outre, il a été incapable de fournir le nom ou l’adresse de la personne qu’il aurait consultée. La Commission a conclu que le demandeur avait enfreint la condition 10 de son sursis.

 

[20]           La Commission a souligné que le demandeur n’avait présenté aucune explication plausible pour justifier bon nombre des manquements aux conditions de son sursis, et que dans certains cas, il avait tenté de nier sa responsabilité.

 

[21]           Le demandeur a prié la Commission de faire droit à son appel parce qu’il n’avait pas fait l’objet de nouvelles déclarations de culpabilité. Toutefois, a expliqué la Commission, le demandeur n’a pas compris qu’en ne se souciant pas des conditions de son sursis, il avait fait en sorte de rendre le sursis sans effet. Selon la Commission, le demandeur n’a pas démontré qu’« au cours des cinq dernières années, il a changé ou s’est réadapté ». La Commission a aussi conclu : « En faisant si peu de cas de la générosité du tribunal, [le demandeur] a indiqué qu’il est une personne qui ne respecte pas l’autorité. À mon avis, une prolongation de son sursis serait tout à fait inutile. »

 

[22]           La Commission a tenu compte de la période que le demandeur a passée au Canada, de sa famille et de son établissement au Canada, ainsi que des difficultés que lui et sa famille éprouveraient s’il était renvoyé. Néanmoins, la Commission a estimé que les motifs d’ordre humanitaire étaient insuffisants pour justifier qu’il soit fait droit à l’appel ou que le sursis à la mesure de renvoi soit prolongé.

 

[23]           La Commission a relevé que le demandeur n’avait « jamais occupé d’emploi à long terme » et qu’il était sans emploi depuis cinq ans. La Commission a mentionné l’intérêt manifesté par le demandeur pour lancer une entreprise familiale, mais a fait remarquer que « les actes sont plus éloquents que tous les discours ». La Commission a statué que le demandeur n’avait pas profité du sursis de cinq ans qui lui avait été accordé pour s’établir et devenir un membre utile de la société. 

 

[24]           La Commission a aussi tenu compte de la dette du demandeur au titre d’un prêt étudiant et de sa dette envers son avocat. Elle a aussi mentionné que le demandeur faisait l’objet d’une vérification de Revenu Canada en raison d’irrégularités décelées dans sa déclaration de revenus. La Commission a conclu que l’« incapacité d’assumer ses responsabilités financières [...] prouve que l’appelant n’a pas démontré qu’il est un bon citoyen ».

 

[25]           La Commission a fait référence aux membres de la famille du demandeur au Canada, et a jugé « révélatrice » leur absence au réexamen du sursis et le fait qu’ils n’avaient soumis aucun document pour soutenir le demandeur comme ils l’avaient fait dans le passé. La Commission a donc déduit que le demandeur n’était pas aussi proche de sa famille qu’il voulait le faire croire. Elle a reconnu que le renvoi du demandeur pourrait occasionner certaines difficultés à sa famille sur le plan émotif, mais elle a observé qu’aucun élément de preuve ne donnait à penser que la famille du demandeur ne pourrait pas rendre visite à ce dernier au Royaume-Uni.

 

[26]           La Commission a conclu qu’il serait difficile au demandeur d’être séparé de sa famille, mais a jugé que ce facteur ne pouvait contrebalancer le fait qu’il n’avait pas respecté les conditions de son sursis et qu’il n’était pas réadapté. De surcroît, le demandeur n’avait pas d’enfants et n’entretenait pas de relation amoureuse. Il n’y avait donc aucun enfant dont l’intérêt supérieur pourrait être directement touché par la décision de la Commission. 

 

QUESTIONS EN LITIGE

 

[27]           Le demandeur prie la Cour d’examiner la question suivante au regard de la présente demande :

1.                  La Commission a-t-elle contrevenu aux principes d’équité procédurale en tenant l’audience sans en avoir donné un avis suffisant au demandeur?

 

DISPOSITIONS LÉGISLATIVES

 

[28]           La disposition suivante de la Loi s’applique en l’espèce :

 

Séjour pour motif d’ordre humanitaire

 

 

25. (1) Le ministre doit, sur demande d’un étranger se trouvant au Canada qui est interdit de territoire ou qui ne se conforme pas à la présente loi, et peut, de sa propre initiative ou sur demande d’un étranger se trouvant hors du Canada, étudier le cas de cet étranger et peut lui octroyer le statut de résident permanent ou lever tout ou partie des critères et obligations applicables, s’il estime que des circonstances d’ordre humanitaire relatives à l’étranger — compte tenu de l’intérêt supérieur de l’enfant directement touché — ou l’intérêt public le justifient.

 

Humanitarian and compassionate considerations

 

25. (1) The Minister shall, upon request of a foreign national in Canada who is inadmissible or who does not meet the requirements of this Act, and may, on the Minister’s own initiative or on request of a foreign national outside Canada, examine the circumstances concerning the foreign national and may grant the foreign national permanent resident status or an exemption from any applicable criteria or obligation of this Act if the Minister is of the opinion that it is justified by humanitarian and compassionate considerations relating to them, taking into account the best interests of a child directly affected, or by public policy considerations.

 

 

NORME DE CONTRÔLE 

 

[29]           La norme de contrôle appropriée pour l’examen de questions concernant l’équité procédurale et la justice naturelle est celle de la décision correcte. Voir les arrêts Sketchley c. Canada (Procureur général), 2005 CAF 404, 263 D.L.R. (4th) 113, au paragraphe 46; Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 R.C.S. 190, aux paragraphes 126 et 129. Partant, la norme de la décision correcte s’applique pour décider si la Commission a contrevenu aux règles d’équité procédurale : a) en ne donnant pas un avis équitable et raisonnable au demandeur; b) en privant le demandeur de la possibilité de répondre; c) en ne donnant pas au demandeur la chance d’être représenté par un avocat.

 

ARGUMENTS

Le demandeur

                        Équité procédurale    

 

[30]           Le demandeur soutient qu’on lui a remis une copie de la lettre de l’ASFC au début de l’audience. Il n’avait jamais vu cette lettre auparavant, ce dont il a informé l’agent d’audience. À la lettre était jointe une enveloppe adressée au demandeur et qui portait l’estampille « Envoi retourné »; l’enveloppe avait été reçue par l’ASFC. Le demandeur explique que comme il n’avait pas reçu cette lettre, il n’a été informé de l’audience qu’au moment où il a téléphoné à l’agent préposé à son cas.

 

[31]           Le demandeur prétend qu’il a informé l’ASFC de son changement d’adresse, mais qu’il ignorait qu’il devait aussi en informer la SAI. Par conséquent, dit-il, il ne connaissait pas la nature de la procédure à laquelle il était assujetti. Le demandeur a déclaré qu’il ne savait pas en quoi consistait un « Statement of Compliance » [ou déclaration écrite portant sur le respect des conditions] et que dès le début de l’audience, il ne comprenait pas ce à quoi le commissaire faisait référence.

 

[32]           Le demandeur dit que son manque de compréhension est devenu évident au cours de son témoignage. Il prétend que l’absence de soutien de sa famille dans le cadre de l’audience et l’absence de documentation pour étayer sa demande prouvent qu’il n’avait pas compris l’importance et la formalité de l’audience.

 

[33]           Après que le demandeur eut informé la Commission du fait qu’il n’avait pas reçu l’avis d’audience, la Commission lui a remis une copie du document et lui a donné [traduction] « quelques minutes » pour l’examiner. Puis, on lui a dit qu’on lui donnerait l’occasion de répondre à ce que la Commission avait écrit.

 

[34]           Le demandeur prétend qu’il y a eu manquement à l’équité procédurale, car on ne lui a pas donné un avis convenable ou raisonnable de la raison d’être de l’audience. Le demandeur avance en outre qu’en ne l’avertissant pas de son intention, la Commission l’a privé de la possibilité de répondre aux préoccupations du ministre.

 

[35]           Le demandeur soutient que son cas est semblable à celui de Stocking c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (1998), 153 F.T.R. 198, 47 Imm. L.R. (2d) 104, dans lequel il a été décidé que :

Si la Commission désire réexaminer le sursis initial, elle a compétence pour le faire, mais les règles de justice naturelle exigent que le demandeur soit avisé de l’intention de la Commission et ait la possibilité d’être entendu.

 

 

 

[36]           Le demandeur admet que les faits de l’affaire Stocking sont différents dans une certaine mesure de ceux de l’espèce, mais il est d’avis que le principe énoncé dans Stocking s’applique aussi à son cas. Comme dans Stocking, le fait que le demandeur ne s’est pas opposé à la tenue du réexamen au moment de l’audience ne le prive pas de son droit de soulever des questions d’équité procédurale et de justice naturelle dans sa demande de contrôle judiciaire. Le demandeur allègue que cette situation est d’autant plus préoccupante qu’il n’était pas représenté par avocat à l’audience et qu’il n’avait aucune idée des attentes de la Commission à son égard dans le cadre du réexamen.

 

[37]           Le demandeur soutient que la Commission aurait dû ajourner l’audience après qu’il a indiqué qu’il n’était pas représenté par un avocat. Le demandeur invoque la décision rendue dans Mallette c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 1400, 51 Imm. L.R. (3d) 267, qui permet d’affirmer, dit-il, que même si le droit à l’avocat n’est pas absolu, le refus d’accorder une remise d’audience peut constituer une erreur susceptible de révision si certains facteurs sont en jeu, notamment : a) il s’agit d’une affaire complexe; b) l’affaire comporte des conséquences sérieuses; et c) le demandeur n’a pas les ressources – qu’il s’agisse de capacité intellectuelle ou de connaissances juridiques – pour bien se représenter lui-même.

 

[38]           Le demandeur estime que ces facteurs existent dans son cas, tout comme ils existaient dans Mallette. Il dit que son cas est complexe et inclut la question des accusations en instance et des mandats qui pèsent contre lui en Alberta et en Colombie-Britannique. De plus, les conséquences de son audience sont manifestement sérieuses, étant donné qu’une décision négative entraînerait vraisemblablement son expulsion. Enfin, le demandeur fait valoir qu’il ne possédait pas les connaissances juridiques requises pour se représenter seul. Cet état de choses est illustré par le fait qu’il n’a présenté aucune preuve documentaire à l’audience et qu’il a recommandé à sa famille de ne pas assister à l’audience.

 

[39]           Le demandeur estime que le défaut de la Commission d’ajourner l’audience pour qu’il puisse se constituer un avocat l’a privé d’une audience équitable. Le tribunal, selon le demandeur, peut tirer cette conclusion même dans un cas où le demandeur n’a pas demandé le report de l’audience, comme dans Mallette. Aussi la Commission aurait-elle dû lui offrir cette option quand elle a constaté qu’il n’avait pas reçu avis écrit de l’audience et qu’il n’était pas représenté par avocat.

 

[40]           Ces manquements à la procédure se sont répercutés sur l’issue de l’audience. Le demandeur affirme qu’il a effectué plusieurs démarches pour se conformer aux conditions de son sursis, notamment : a) faire prolonger la validité de son passeport; b) fournir des documents à son ancien avocat; c) rendre compte en avril et en octobre, comme l’exigeaient les conditions; d) participer à des séances de counseling. Néanmoins, la Commission a rejeté les affirmations du demandeur parce que celui-ci ne pouvait fournir des documents pour étayer ses prétentions et qu’il a été incapable de donner des détails. Le demandeur avance que la Commission a mis son témoignage en doute parce qu’il n’a pas présenté de documents concernant son respect des conditions du sursis.

 

[41]           De l’avis du demandeur, l’issue de l’audience aurait vraisemblablement été différente si la Commission avait respecté les règles d’équité procédurale et si le demandeur : 1) avait reçu un avis raisonnable de la raison d’être de l’audience; 2) s’était vu donner la possibilité de répondre aux préoccupations du ministre; 3) avait été représenté par un avocat.

 

Le défendeur

 

[42]           Le défendeur souligne que le demandeur ne conteste pas la conclusion de la Commission selon laquelle il a enfreint les conditions de son sursis. Le demandeur a tenté de fournir certaines explications pour justifier ces manquements, mais la Commission n’a pas ajouté foi à ces explications, vu l’absence de preuve documentaire.

 

[43]           Si le demandeur n’a pas reçu la lettre exposant la raison d’être de l’audience, c’est parce qu’il n’avait pas respecté les conditions de son sursis et n’avait pas informé les autorités de sa nouvelle adresse. Le défendeur soutient que l’inobservation de cette condition par le demandeur empêche maintenant celui-ci d’invoquer l’absence d’un avis écrit formel.

 

[44]           Le défendeur signale également que le demandeur connaissait, ou aurait dû connaître, le but de l’audience. Le demandeur admet avoir reçu un appel téléphonique lors duquel on l’a informé qu’il [traduction] « devait [s]e présenter devant la SAI pour un réexamen de [s]on sursis ». Qui plus est, le demandeur déclare sous serment dans son affidavit que la veille de son audience à la SAI, il a rencontré un avocat pour discuter des nouvelles accusations portées contre lui au criminel.

 

[45]           Par ailleurs, aucun élément de preuve n’indique que le demandeur a demandé à la SAI d’ajourner l’audience ou qu’il n’avait pas la capacité intellectuelle nécessaire pour se représenter lui-même.

 

[46]           Par conséquent, plaide le défendeur, le demandeur savait ou aurait dû savoir que l’audience pouvait déboucher sur le rejet de son appel. Il n’y a pas lieu maintenant de faire droit à sa demande de revoir la décision parce qu’il n’a pas exercé la diligence requise ou, subsidiairement, qu’il a fait preuve d’aveuglement volontaire. Le défendeur estime que faire droit à la demande encouragerait les demandeurs à ne pas prendre au sérieux les audiences de la CISR.

 

ANALYSE

 

[47]           Comme la juge Tremblay-Lamer l’a fait remarquer dans la décision Mallette, au paragraphe 14, le droit d’être représenté par un avocat n’est pas absolu, et la jurisprudence sur ce point indique que la décision rendue n’est invalide que si l’absence d’avocat a privé le demandeur de son droit à une audience équitable.

 

[48]           En l’espèce, le demandeur dit qu’il n’a pas reçu avis de ce qui l’attendait à l’audience et que, s’il comprenait qu’il était convoqué à un réexamen de son sursis, il n’a compris ni le processus de l’audience ni les conséquences graves qui pouvaient en découler. Il affirme aussi maintenant qu’il n’avait pas compris qu’il pourrait devoir présenter des éléments de preuve pour démontrer son respect des conditions du sursis, et déclare :

[traduction]

Si j’avais été conscient de la gravité de la procédure, j’aurais certainement demandé un ajournement pour retenir les services d’un avocat ou pour me procurer des documents prouvant toutes les démarches que j’ai effectuées pour me conformer aux conditions du sursis.

 

 

[49]           Il appert clairement que la demande présentée par le ministre en octobre 2008 pour que le demandeur soit convoqué à une audience a été envoyée au demandeur, même si ce dernier affirme ne l’avoir pas reçue. Une copie a été transmise à l’adresse du demandeur, mais celui-ci, en violation d’une des conditions auxquelles était assujetti son sursis, avait omis d’informer la SAI de son changement d’adresse. La lettre a été renvoyée. Il semble que si le demandeur n’a pas reçu cet avis d’audience et les renseignements concernant le but de l’audience, c’est parce qu’il avait enfreint une des conditions d’octroi de son sursis.

 

[50]           Cela dit, outre cette tentative de communiquer avec le demandeur, divers autres éléments pouvaient renseigner celui-ci sur les questions qui seraient abordées à l’audience de réexamen du sursis :

a)                  les conditions mêmes du sursis avisaient le demandeur que la SAI réexaminerait son cas et [traduction] « pourrait alors modifier ou annuler toute condition non réglementaire qui aura été imposée ou annuler le sursis et, ensuite, accueillir ou rejeter l’appel »;

b)             un nouvel avis signé et daté du 27 octobre 2008 porte l’adresse de la résidence actuelle du demandeur, mais l’avis de communication du document indique seulement que le document a été remis en main propre au conseil du ministre. La preuve est insuffisante pour permettre à la Cour de décider si le demandeur a bien reçu l’avis ou si l’avis lui a même été envoyé;

c)             le demandeur a eu deux conversations téléphoniques avec des agents qui l’ont informé de la tenue de la rencontre, bien qu’aucun élément de preuve ne nous permette de savoir s’il a été informé de ce qui se passerait, ou pourrait se passer, à l’audience;

d)             le demandeur a également fourni des éléments de preuve sur ce qu’il a compris de l’audience. À l’audience même, divers échanges ont porté sur la nature de la procédure en cours.

 

[51]           En l’espèce, la question de l’avis est compliquée du fait que le demandeur n’a pas reçu l’avis d’audience formel parce qu’il a changé d’adresse et, en violation des conditions de son sursis, a omis d’en informer la SAI. Certains éléments de preuve indiquent qu’il a informé le Centre d’exécution de la Loi du Toronto métropolitain de son changement d’adresse mais n’a pas compris qu’il devait avertir les deux organismes de ce changement.

 

[52]           Le demandeur déclare dans son affidavit qu’il n’avait pas compris qu’il devait être muni d’une preuve documentaire à l’audience, et qu’il croyait qu’il devait simplement informer la Commission des derniers développements. Il explique qu’à un certain moment, durant l’audience, [traduction], « il est devenu évident à mes yeux que je ne m’étais pas rendu compte de l’importance du réexamen », ajoutant : [traduction] « à ce stade de la procédure, je suis devenu extrêmement nerveux, parce que je commençais à comprendre que cette procédure ne correspondait pas du tout à ce que j’avais imaginé ».  

 

[53]           Ces assertions postérieures à l’audience ne sont appuyées par aucune demande d’ajournement présentée durant l’audience pour permettre au demandeur de fournir des documents et d’obtenir l’assistance d’un conseiller juridique. Le demandeur prétend néanmoins qu’il aurait dû être évident pour la SAI qu’il était dépassé par les événements et qu’il était incapable de se représenter lui-même. 

 

[54]           La preuve n’établit certes pas clairement cette affirmation, et il est difficile d’évaluer si le demandeur avait besoin d’un conseiller juridique à ce moment ou si cette affirmation fait tout simplement suite à la décision d’annuler le sursis.

 

[55]           Le juge Harrington a résumé la jurisprudence pertinente dans la décision Mervilus c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) 2004 CF 1206, 262 F.T.R. 186, aux paragraphes 20 à 25 :

20     Le droit à l’avocat n’est pas absolu; ce qui l’est par contre, c’est le droit à une audience équitable. Le juge Le Dain parle dans les termes suivants de l’importance de l’audition équitable dans l’arrêt Cardinal c. Directeur de l’Établissement Kent, [1985] 2 R.C.S. 643 :

 

[...] la négation du droit à une audition équitable doit toujours rendre une décision invalide, que la cour qui exerce le contrôle considère ou non que l’audition aurait vraisemblablement amené une décision différente. Il faut considérer le droit à une audition équitable comme un droit distinct et absolu qui trouve sa justification essentielle dans le sens de la justice en matière de procédure à laquelle toute personne touchée par une décision administrative a droit. Il n’appartient pas aux tribunaux de refuser ce droit et ce sens de la justice en fonction d’hypothèses sur ce qu’aurait pu être le résultat de l’audition. [page 661 ]

 

21     La jurisprudence de notre Cour et de la Cour d’appel fédérale en matière d’immigration est à l’effet que lorsque l’absence de l’avocat a pour effet de priver le justiciable de son droit à une audience équitable, la décision rendue est invalide (voir Castroman c. Canada (Secrétaire d’État), [1994] A.C.F. no 962 (1ère inst.); Nemeth, supra; McCarthy c. M.E.I., [1979] 1 F.C. 121 (C.A.F.); Gargano c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1994] A.C.F. no 1385 (1ère inst.); De Sousa v. Canada (Minister of Employment and Immigration), [1988] F.C.J. No. 569 (F.C.A.)).

 

22     Dans l’affaire Gargano, précité, le requérant, toxicomane, avait un casier judiciaire fort lourd. On avait prononcé une mesure d’expulsion contre lui; à l’audience d’appel, il a demandé encore un autre ajournement (le deuxième) pour se constituer un avocat. La Commission a refusé. Le juge Cullen a jugé que compte tenu de l’incapacité du requérant à se représenter lui-même, et compte tenu de la gravité d’une mesure d’expulsion, il était inéquitable de lui refuser l’ajournement pour se constituer un avocat.

 

23     L’arrêt Glen Howard c. Président du tribunal disciplinaire des détenus de l’établissement de Stony Mountain, [1984] 2 C.F. 642 (C.A.F.) est une affaire en droit carcéral qui est citée dans bon nombre de décisions en matière d’immigration. Le juge Thurlow dans cet arrêt énonce les éléments dont il faut tenir compte pour décider si l’absence d’avocat donne lieu à une procédure inéquitable :

 

[...] il me semble que la question de savoir si oui ou non une personne a le droit d’être représentée par avocat dépendra des circonstances de l’espèce, de sa nature, de sa gravité, de sa complexité, de l’aptitude du détenu lui-même à comprendre la cause et à présenter sa défense. Cette liste n’est pas exhaustive. Il s’ensuit donc, à mon avis, que la question de savoir si la requête d’un détenu en vue d’être représenté par avocat peut être légalement refusée ne peut être considérée comme une question de discrétion, car il s’agit d’un droit qui existe lorsque les circonstances sont telles que la possibilité d’exposer adéquatement la cause du détenu exige la représentation par avocat.

 

24     Le droit à l’avocat peut, dans certains cas, s’assimiler au droit d’être entendu. Toujours dans l’arrêt Glen Howard, supra, le juge Thurlow écrit :

 

Dans ce contexte, le droit d’une personne à l’assistance d’un avocat découle de l’obligation d’accorder à cette personne l’occasion d’exposer adéquatement sa cause. Le juge Goodridge, dans l’affaire In re Prisons Act et in re Pollard et al. [Cour suprême de Terre-Neuve, 20 février 1980, non publiée.], a signalé ce point précis lorsqu’il a fait observer, entre parenthèses : [traduction] « Bien sûr, le danger n’est pas le seul et unique critère; en réalité, dans un sens plus étendu, il s’agit d’une personne ayant le droit de se faire entendre par un tribunal ».

 

25     On peut donc dégager les principes suivants de la jurisprudence : bien que le droit à l’avocat ne soit pas absolu dans une procédure administrative, le fait de refuser au justiciable la possibilité de se constituer un avocat en n’accordant pas une remise est susceptible de contrôle judiciaire si les facteurs suivants sont en jeu : la cause est complexe, les conséquences de la décision sont graves, le justiciable n’a pas les ressources, qu’il s’agisse de capacité intellectuelle ou de connaissances juridiques, pour bien représenter ses intérêts.

 

[56]           Je suis conscient du fait qu’il s’agissait en l’espèce du premier réexamen des conditions de sursis auquel le demandeur était convoqué. Dans Mallette, la juge Tremblay-Lamer a fait droit à une demande de contrôle judiciaire dans une situation où le demandeur avait déjà été soumis à une audition de réexamen lors de laquelle le ministre avait clairement établi que certaines conditions avaient été enfreintes, et la Commission a conclu que l’annulation du sursis aurait constitué une sanction trop lourde.

 

[57]           En l’espèce, cependant, le demandeur n’a pas été en mesure d’établir tous les facteurs dont Mme Mallette avait démontré l’existence devant la juge Tremblay-Lamer :

16     Elle a officiellement reçu deux avis l’informant que la Commission avait l’intention de vérifier si la demanderesse avait respecté les conditions assortissant le sursis d’exécution de l’ordonnance d’expulsion la visant; cependant, il est évident qu’elle a cru qu’il s’agissait de l’examen annuel de son état et de ses progrès, semblables à ses entrevues mensuelles relatives à son sursis. C’est pour cette raison, dit-elle, qu’elle ne s’est pas fait accompagner par un avocat pour la représenter.

 

17     Dans son affidavit, la demanderesse déclare que, environ 10 minutes après le début de l’audience, elle a commencé à se sentir nerveuse et confuse. Elle n’a pas compris plusieurs des questions qui lui ont été posées et elle a été surprise de se voir poser des questions au sujet de ses condamnations antérieures et des audiences d’immigration précédentes.

 

18     Environ 27 minutes après le début de l’audience, le dialogue suivant a eu lieu entre Mme Julie Ryan, avocate du Ministre, et la demanderesse :

 

[traduction]

Mme Ryan :       À la page 5, nous avons le certificat de déclaration de culpabilité relativement à cette accusation. Avez-vous obtenu cette pièce, le dossier? Elle a été envoyée à votre ancienne adresse.

 

La demandeure :           Non, je ne l’ai pas obtenue. Si j’avais su, j’aurais emmené un avocat.

 

19     En outre, l’examen de la transcription montre qu’elle a eu des troubles de mémoire, qu’elle n’a pas compris des questions simples qui lui ont été posées et qu’elle s’est effondrée à plusieurs reprises. Elle a été totalement incapable de défendre sa cause. Les conséquences de cette décision sont très graves. Si elle est expulsée, la demanderesse, après avoir vécu au Canada pendant presque 20 ans, sera expulsée vers l’Écosse, où elle n’a apparemment pas de famille, à l’âge de 61 ans. Cela réduira à néant les progrès qu’elle a fait [sic] relativement à sa désintoxication et à sa réadaptation en général.

 

20     Le fait que la Commission n’a pas ordonné l’ajournement de l’audience afin de donner à la demanderesse la possibilité de trouver un avocat l’a privée de son droit à une audience équitable.

 

                        [Passages non soulignés dans l’original.]

Je ne crois pas que le demandeur ait éprouvé des difficultés semblables à celles que la demanderesse a connues dans l’affaire Mallette.

 

[58]           Appliquant aux faits de l’espèce les principes exposés par le juge Harrington dans Mervilus, je conclus ce qui suit :

1.                  les conséquences de la décision sont graves, parce que le demandeur risque l’expulsion;

2.                  la preuve qui incombait au demandeur devant la SAI n’était pas complexe. Comme il appert de la transcription, il n’avait qu’à répondre à des questions sur ce qu’il avait fait pour se conformer aux conditions de son sursis, et dans l’ensemble, il a été capable de répondre aux questions qui lui ont été posées au cours de l’audience devant la SAI;

3.                  rien n’indique que le demandeur n’avait pas la capacité de se représenter lui-même pour ce qui est de répondre aux questions et de discuter du respect des conditions de son sursis, ou qu’il n’a pas compris ce qu’on lui demandait ou l’importance de ces questions;

4.                  le demandeur n’a pas demandé que l’audience soit ajournée pour qu’il puisse se constituer un avocat. Il a simplement affirmé, après que la décision a été rendue, que s’il avait été conscient de la gravité de la procédure, il aurait demandé un ajournement pour retenir les services d’un avocat et se procurer des éléments de preuve documentaire. Dans le contexte global de la présente instance, je ne peux accepter que le demandeur puisse n’avoir pas compris ce qui pourrait se passer à la suite d’un réexamen des conditions de son sursis. Les conditions mêmes du sursis précisent clairement que le sursis peut être annulé et l’appel, rejeté;

5.                  Aucun élément de preuve au dossier de la Cour n’indique que le demandeur bénéficie de quelque soutien que ce soit de sa famille;

6.                  Compte tenu de ce que le demandeur devait nécessairement savoir au sujet de son cas, je ne peux accepter qu’il ne disposait pas de suffisamment d’éléments pour demander un ajournement afin de se constituer un avocat, lors de l’audience. Dans son affidavit, le demandeur semble avant tout préoccupé de retenir les services d’un avocat afin de tenter d’éviter les conséquences de faits qui sont clairement établis. De plus, étant donné la façon dont le demandeur s’est comporté à l’audience (comme le montrent les réponses qu’il a données, consignées dans la transcription), je ne peux conclure que la SAI aurait dû, raisonnablement, s’apercevoir que le demandeur ne pouvait répondre pour son propre compte quant aux conditions de son sursis et qu’il avait besoin d’un avocat. Même aujourd’hui, il n’est pas facile de comprendre en quoi le demandeur conteste les conclusions de la SAI. Il a été en mesure de fournir des explications relativement à ses manquements aux conditions, bien que la SAI n’ait pas jugé ses réponses crédibles;

7.                  le demandeur n’a pas présenté suffisamment d’éléments de preuve pour montrer à la Cour que si l’affaire était renvoyée pour réexamen, il pourrait soumettre quelque document ou quelque preuve de soutien familial qui soit raisonnablement susceptible d’avoir une incidence quelconque sur la décision de la SAI.

 

[59]           En résumé, je ne peux conclure qu’il y a eu manquement à l’équité procédurale en l’espèce.


 

JUGEMENT

 

LA COUR STATUE que :

 

    1. La demande de contrôle judiciaire est rejetée.
    2. Il n’y a aucune question à certifier.

 

 

« James Russell »

Juge

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Christiane Bélanger, LL.L.

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                    IMM-2132-09

 

INTITULÉ :                                                   SHAUN XENON KHAN c.

                                                                        MCI

 

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                             Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                           Le 3 novembre 2009

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE :              LE JUGE RUSSELL

 

DATE DES MOTIFS :                                  Le 8 janvier 2010

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Mario D. Bellissimo

 

POUR LE DEMANDEUR

Gregory G. George

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Mario D. Bellissimo

Avocat

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

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