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Cour fédérale

 

Federal Court

 


Date : 20100118

Dossier : T-943-09

Référence : 2010 CF 48

Montréal (Québec), le 18 janvier 2010

En présence de monsieur le juge Harrington

 

ENTRE :

ROSE MARLENE MONK

demanderesse

 

 

 

et

 

 

LE PROCUREUR GÉNÉRAL

DU CANADA

 

défendeur

 

 

MOTIFS DE L'ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

[1]               En 2006, Marlene Monk a demandé une pension d'invalidité au titre du Régime de pensions du Canada (le Régime). Le Régime prévoit, entre autres, le versement de prestations d'invalidité au travailleur qui y a cotisé à partir de ses gains, que l'invalidité soit liée au travail ou non. Pour y être admissible, Mme Monk devait satisfaire aux exigences quant aux gains et aux cotisations au Régime pendant au moins quatre des six années civiles précédant le début de l'invalidité (article 44 du Régime). Cette « période minimale d'admissibilité » s'est terminée en décembre 2001.

 

[2]               Par conséquent, la principale question n'était pas de savoir si Mme Monk était invalide en 2006, mais plutôt de savoir si le début de son invalidité remontait à 2001. Sa demande a été rejetée. Elle avait le droit de demander que sa demande soit reconsidérée, et c'est ce qu'elle a fait.

 

[3]               Bien que le tribunal de révision ait reconnu que l'invalidité de Mme Monk était prolongée selon la définition qu'en donne le sous‑alinéa 42(2)a)(ii) du Régime, en ce sens qu'elle paraissait être continue et indéfinie, ce n'était pas le cas à l'époque de sa « période minimale d'admissibilité », en décembre 2001. Le tribunal a conclu que les gains et les cotisations de quatre des six dernières années précédant l'invalidité n'étaient pas suffisants et a rejeté son appel.

 

[4]               L'étape suivante est l'appel interjeté auprès de la Commission d'appel des pensions, dans la mesure où l'autorisation d'interjeter appel a été obtenue de l'un de ses membres désignés. Si l'autorisation est refusée, le décideur doit, conformément à l'article 83 du Régime, donner les motifs de son refus. L'autorisation a été refusée. Il s'agit ici du contrôle judiciaire de cette décision. L'affaire de Mme Monk a deux volets. Elle allègue que les motifs donnés étaient inadéquats, et que, subsidiairement, ils étaient déraisonnables.

 

LES FAITS

[5]               Mme Monk a travaillé de façon continue de 1992 à 1999, gagnant entre 18 000 $ et 22 000 $ annuellement. Son registre des gains ne montre aucun revenu pour les années 2000 et 2001, et en 2002, son revenu était inférieur à l'exemption de base. En 2003, son revenu était d'environ 21 000 $ et, en 2004, d'environ  15 000 $. La décision du tribunal de révision, décision à l'encontre de laquelle la demanderesse a demandé l'autorisation d'interjeter appel, relate ses antécédents professionnels et il n'est pas nécessaire de les relater de nouveau, sauf pour dire que, en 2001 et en 2002, Mme Monk était employée par la bande indienne de Kamloops, qui n'avait pas juridiquement l'obligation de déduire de ses gains des cotisations au Régime, et ne l'a pas fait. Lorsqu'elle a demandé sa pension d'invalidité et qu'elle s'est rendu compte que ces déductions n'avaient pas été faites, elle a tenté de se prévaloir de la faculté de payer ces cotisations pour ces années. Cependant, l'Agence du revenu du Canada a décidé que le délai pour ce faire était expiré. La Cour n'est pas saisie de cette décision. Par conséquent, l'exigence de verser des cotisations pendant quatre des six dernières années civiles avant le début de l'invalidité fait en sorte en l'espèce que le début de l'invalidité doit dater de décembre 2001 au plus tard.

 

[6]               Le tribunal de révision a conclu que Mme Monk n'était pas invalide à ce moment-là, se basant fortement sur ses revenus gagnés en 2003 et en 2004, qui correspondaient à ses gains antérieurs.

 

[7]               Dans sa demande d'autorisation d'interjeter appel de cette décision, Mme Monk a mentionné les chirurgies auxquelles elle doit se soumettre régulièrement et elle a tenté de qualifier les gains de 2003 et 2004 comme étant le résultat d'une vaine tentative de retour au travail. Elle aussi tenté de minimiser l'importance du fait que, de 2004 à 2006, elle avait reçu des prestations d'assurance-emploi, prestations auxquelles une personne n'est pas admissible à moins de se déclarer prête, disposée à travailler et capable de le faire.

 

LA DÉCISION CONTESTÉE

[8]               L'autorisation d'interjeter appel a été refusée par l'honorable Pierre Mercier, juge à la retraite d'une cour supérieure. Ses brefs motifs sont reproduits ci-dessous en entier :

                        [traduction]

[1]        La preuve établit sans l'ombre d'un doute que l'appelante n'était pas invalide en date de décembre 2001, date établissant sa période minimale d'admissibilité. Il ne fait aucun doute non plus que l'appelante était invalide au moment de l'audience du tribunal de révision.

 

[2]        La seule question qui reste à décider est de savoir si les gains de plus de 21 000 $ en 2003 et de plus de 15 000 $ en 2004 peuvent être traités comme étant le résultat d'une vaine tentative de retour au travail, auquel cas l'appelante pourrait avoir droit à des prestations d'invalidité fondées sur la période minimale d'admissibilité susmentionnée.

 

[3]        Les revenus gagnés en 2003 et en 2004 sont comparables à ceux gagnés par l'appelante alors qu'elle travaillait à plein temps de 1992 à 1999 et ce fait, en plus du temps travaillé en 2003 et en 2004, laisse l'appelante sans une cause défendable qui lui permettrait d'affirmer que son emploi en 2003 et en 2004 devrait être considéré simplement comme étant une vaine tentative de retour au travail.

 

[4]        L'autorisation d'interjeter appel est refusée.

 

ANALYSE

[9]               La norme de contrôle est la raisonnabilité (Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 R.C.S. 190). Dans l'application de cette norme à la présente affaire, les motifs exigés et donnés relativement au refus d'accorder l'autorisation d'interjeter appel étaient-ils compréhensibles pour la demanderesse et la cour de révision (R. c. Sheppard, 2002 CSC 26, [2002] 1 R.C.S. 869)? En outre, la décision serait non seulement déraisonnable, mais aussi incorrecte si la décision d'accorder ou de refuser l'autorisation n'était pas prise au regard du bon critère. L'autorisation doit être accordée si la demande laisse entrevoir une cause défendable. Autrement, il n'y pas lieu d'évaluer le fond. Mme Monk avait le droit de présenter de nouveaux faits lors de sa demande d'autorisation, mais elle ne l'a pas fait. Par conséquent, dans le présent contrôle judiciaire, je dois établir si le décideur a commis une erreur de droit ou s'il a mal interprété les faits quand il a décidé que la demande d'autorisation ne laissait entrevoir aucune cause défendable (Callihoo c. Canada (Procureur général) (2000), 190 F.T.R. 114).

 

[10]           À mon avis, il n'y a aucune raison d'annuler la décision de refuser l'autorisation. Les motifs doivent donc correspondre à la décision. Il n'y avait pas la moindre preuve médicale que Mme Monk était incapable de travailler en décembre 2001, date établissant sa « période minimale d'admissibilité », et il n'y avait aucun fondement sur lequel elle pouvait défendre son allégation que ses gains de 2003 et de 2004 ne devaient pas être traités comme étant une preuve de sa capacité de travailler. Les parties ont été incapables de trouver de la jurisprudence traitant de la notion de vaine tentative de retour au travail. Il n'est pas nécessaire, et il serait inapproprié que je tente de tracer une ligne de démarcation claire, laquelle de toute façon dépendrait des faits particuliers à chaque affaire. Il ne fait aucun doute qu'un retour au travail qui ne serait que de quelques jours serait une vaine tentative. Toutefois, deux années de gains comparables à ceux d'années précédentes ne sont pas le reflet d'une vaine tentative.

 

[11]           Pour ces motifs, la demande de contrôle judiciaire sera rejetée. Le procureur général n'a pas demandé les dépens, et aucuns ne seront adjugés.


 

ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE :

  1. La demande de contrôle judiciaire est rejetée.
  2. Aucuns dépens ne sont adjugés.

 

 

 

« Sean Harrington »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

Jacques Deschênes, LL.B.

 

 

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        T-943-09

 

INTITULÉ :                                       Rose Marlene Monk c. Procureur général du Canada

 

 

 

LIEU DE L'AUDIENCE:                  Vancouver (Colombie-Britannique)

 

DATE DE L'AUDIENCE:                Le 12 janvier 2010

 

MOTIFS DE L'ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                       Le juge HARRINGTON

 

DATE :                                               Le 18 janvier 2010

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Gillian Oliver

 

POUR LA DEMANDERESSE

Sandra Gruescu

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Morelli Chertkow LLP

Avocats

Kamloops (Colombie-Britannique)

 

POUR LA DEMANDERESSE

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

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