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Cour fédérale

Federal Court

 

Date : 20100222

Dossier : IMM-2617-09

Référence : 2010 CF 190

Ottawa (Ontario), le 22 février 2010

En présence de monsieur le juge Boivin

 

 

Entre :

HAMAWATTIE MANBODH

demanderesse

 

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

 

défendeur

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire présentée en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la Loi), d’une décision rendue le 17 avril 2009 par un agent d’immigration (l’agent) de Citoyenneté et Immigration Canada, dans laquelle l’agent a rejeté la demande de résidence permanente présentée par la demanderesse au titre de la catégorie des époux ou conjoints de fait au Canada.

 

 

Le contexte factuel

[2]               La demanderesse est une citoyenne de la Guyana qui est arrivée au Canada le 22 août 2001 munie de son propre passeport guyanien, lequel était valide. Après son arrivée, la demanderesse s’est rendue à la résidence de sa sœur, Mme Madhumattie Hardiyal, et elle y a vécu jusqu’à ce qu’elle dépose une demande d’asile le 19 septembre 2002.

 

[3]               Après le dépôt de sa demande, la demanderesse a obtenu un permis de travail. Elle a travaillé pour divers employeurs depuis ce temps et elle travaille actuellement pour une entreprise de fabrication de portes et fenêtres.

 

[4]               La demanderesse a fait la connaissance de son époux, M. Bobby Allard, en mars 2005. Le couple affirme que l’union de fait a commencé peu après mars 2005. Le couple loue une chambre et vit à l’étage dans la maison de la sœur de la demanderesse.

 

[5]               La demanderesse allègue que ni son époux ni elle-même n’ont déjà été mariés et qu’ils n’ont pas d’enfant. Ils prévoient se marier au cours de l’été 2010.

 

La décision contestée

[6]               Pour qu’un demandeur appartienne à la catégorie des époux ou conjoints de fait au Canada, il doit établir que, suivant l’alinéa 124a) du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002‑227 (le Règlement), il est « l’époux ou le conjoint de fait d’un répondant et vit avec ce répondant au Canada ». L’agent a conclu que la demanderesse n’avait pas établi que le couple vivait ensemble.

 

Les observations du défendeur

[7]               Le défendeur soutient que l’appréciation des questions de fait est au cœur de la compétence de l’agent. La Cour suprême du Canada a récemment confirmé que les conclusions de fait tirées par les tribunaux administratifs doivent faire l’objet d’une grande retenue et que les cours de révision ne peuvent pas substituer la solution qu’elles jugent elles-mêmes appropriée à celle qui a été retenue.

 

[8]               La Cour a conclu que les agents possèdent une expertise bien établie pour apprécier les questions de fait. En outre, il a été reconnu et confirmé que, en ce qui a trait à l’appréciation de la preuve, la Cour ne peut pas substituer sa décision à celle de l’agent si le demandeur n’a pas réussi à établir que la décision de l’agent était fondée sur une conclusion de fait erronée, tirée de façon abusive ou arbitraire ou sans qu’il soit tenu compte des éléments dont il disposait (Aguebor c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), (1993), 160 N.R. 315, 42 A.C.W.S.(3d) 886 (C.A.F.); Grewal c. Canada (Ministre de l’Emploi et de l’Immigration), [1983] A.C.F. no 129 (QL) (C.A.F.)).

 

Analyse

[9]               La norme de contrôle applicable à la conclusion tirée en l’espèce – soit la conclusion portant sur la question de savoir si la preuve établissait que la demanderesse vivait avec son répondant au Canada suivant l’alinéa 124a) du Règlement – est la raisonnabilité, soit la nouvelle norme de contrôle établie dans l’arrêt Dunsmuir c. Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 R.C.S. 190.

 

[10]           La disposition pertinente du Règlement est la suivante :

124. Fait partie de la catégorie des époux ou conjoints de fait au Canada l’étranger qui remplit les conditions suivantes :

 

a) il est l’époux ou le conjoint de fait d’un répondant et vit avec ce répondant au Canada;

 

 

b) il détient le statut de résident temporaire au Canada;

 

c) une demande de parrainage a été déposée à son égard.

124. A foreign national is a member of the spouse or common-law partner in Canada class if they

 

 

(a) are the spouse or common-law partner of a sponsor and cohabit with that sponsor in Canada;

 

(b) have temporary resident status in Canada; and

 

(c) are the subject of a sponsorship application.

 

 

[11]           Le non-respect par le demandeur d’une des conditions d’obtention de la résidence permanente est fatal à sa demande. Essentiellement, la demanderesse demande à la Cour de tenir compte des questions soulevées par l’agent et des explications qu’elle a fournies en réponse puis de réévaluer ces explications afin d’en arriver à une conclusion différente, ce qui n’est pas le rôle de la Cour.

 

[12]           La demanderesse affirme que la Commission a commis une erreur de droit parce qu’elle a mal interprété la preuve.

[13]           Après avoir attentivement examiné la décision de l’agent, la Cour ne peut pas conclure que l’agent a fondé sa décision sur une conclusion de fait erronée tirée d’une manière abusive ou arbitraire ou sans tenir compte des éléments de preuve dont il disposait.

 

[14]           La décision de l’agent ne portait pas principalement sur l’omission de la demanderesse de fournir un document particulier tel que des reçus communs de paiement de téléphone, de loyer ou de services publics. L’agent a plutôt conclu qu’il n’y avait pas suffisamment d’éléments de preuve crédibles établissant que la demanderesse et son répondant vivaient ensemble.

 

[15]           L’agent a tenu compte des arrangements de vie commune propres à la demanderesse et à son répondant. Cependant, le manque d’éléments de preuve établissant la cohabitation, de concert avec le manque apparent de connaissance de la demanderesse concernant l’emploi et les allées et venues du répondant, a mené l’agent à croire raisonnablement que l’union de fait n’était pas authentique et que le couple ne cohabitait pas. En particulier, la demanderesse a été incapable de fournir des renseignements précis et exacts quant à l’emploi de son conjoint de fait. Lorsque l’agent a téléphoné à la résidence du couple le 17 avril 2009, il a demandé à la demanderesse s’il pouvait parler à Bobby Allard. La demanderesse a affirmé que M. Allard avait commencé à travailler à Canstaff en tant que conducteur de chariot élévateur il y a deux jours. La demanderesse a donné le numéro de téléphone de Canstaff à l’agent, mais il s’agissait du numéro du consultant en immigration de la demanderesse. L’agent a retéléphoné à la demanderesse, qui lui a donné le numéro de téléphone de Canstaff. Lorsque l’agent a communiqué avec Canstaff, le répartiteur lui a dit qu’aucun Bobby Allard ne travaillait pour Canstaff en tant que conducteur de chariot élévateur et il a révélé que l’entreprise n’avait embauché personne depuis des mois en raison de la récession.

 

[16]           À mon avis, la demanderesse n’a pas fourni d’éléments de preuve valides justifiant que la Cour intervienne. Il n’était pas déraisonnable pour l’agent de conclure que, pour l’application de l’article 124 du Règlement, la cohabitation n’avait pas été établie. La Cour estime que la conclusion appartient aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit (Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. Khosa, 2009 CSC 12, [2009] 1 R.C.S. 339, paragraphes 45, 46 et 49).

 

[17]           Pour les motifs énoncés ci-dessus, la présente demande de contrôle judiciaire sera rejetée. Aucune question n’est soulevée aux fins de certification, et l’affaire n’en soulève aucune.

 

 


JUGEMENT

 

LA COUR STATUE que la demande de contrôle judiciaire est rejetée. Aucune question n’est certifiée.

 

 

« Richard Boivin »

Juge

 

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Jean-François Martin, LL.B., M.A.Trad.jur.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                                    IMM-2617-09

 

INTITULÉ :                                                   Hamawattie Manbodh c.

                                                            MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                             TORONTO (ONTARIO)

 

DATE DES MOTIFS :                                  LE 11 FÉVRIER 2010

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                        LE JUGE BOIVIN

 

DATE DES MOTIFS :                                  LE 22 FÉVRIER 2010

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Dov Maierovitz

 

POUR LA DEMANDERESSE

Neal Samson

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Gertler, Etienne LLP

Toronto (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

POUR LE DÉFENDEUR

 

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