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Cour fédérale

 

Federal Court

 

Date : 20100505

Dossier : T-1754-09

Référence : 2010 CF 498

Montréal (Québec), le 5 mai 2010

En présence de monsieur le juge Mainville

 

ENTRE :

CHERYL RHODES et

KERRY MURPHY

 

demanderesses

et

 

COMPAGNIE AMWAY CANADA et

AMWAY GLOBAL

défenderesses

 

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

 

 

[1]               Les demanderesses ont intenté une action en recours collectif dans la présente affaire et ont présenté à cette fin une déclaration dans laquelle elles qualifient le système de distribution des défenderesses de système de commercialisation à paliers multiples et d’opération pyramidale qui vont à l’encontre des articles 52, 55 et 55.1 de la Loi sur la concurrence, L.R.C. 1985, ch. C-34 (la Loi). Les demanderesses cherchent donc à se faire rembourser par les défenderesses, en application de l’article 36 de la Loi, les pertes et les dommages qu’elles ont subis en conséquence et qu’elles estiment à 15 000 $. Pour les besoins d’un recours collectif fondé sur la même cause d’action ou une cause d’action semblable, les demanderesses prétendent également représenter tous les résidents du Canada ayant distribué les produits des défenderesses depuis le 23 octobre 2007, sauf les employés de celles-ci, les parents de ces employés ainsi que les sociétés affiliées des défenderesses.

 

[2]               Les défenderesses ont répondu à ces actes de procédure en déposant une requête qui vise à obtenir une ordonnance rejetant ou suspendant en permanence l’action au motif que la Cour fédérale n’a pas compétence étant donné que l’affaire est assujettie à une procédure d’arbitrage obligatoire et exécutoire selon la convention d’arbitrage signée par les parties. Les défenderesses cherchent à faire entendre et trancher cette requête avant toute autre question en l’espèce.

 

[3]               À la demande de la Cour, les défenderesses ont aussi fait savoir qu’elles avaient l’intention de déposer au moins trois autres requêtes préliminaires au cas où leur requête en irrecevabilité fondée sur la convention d’arbitrage serait rejetée, à savoir a) une requête soutenant que l’article 36 de la Loi n’est pas applicable pour des raisons constitutionnelles, de sorte que la Cour fédérale n’est pas compétente pour connaître des demandes des demanderesses ; b) une requête en radiation partielle de la déclaration où l’on cherche principalement à faire radier la défenderesse Amway Global de l’action; c) une requête en communication de renseignements supplémentaires.

 

[4]               En réponse, les demanderesses ont déposé, en application de l’article 54 des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106, une requête en vue d’obtenir des directives, dans laquelle elles sollicitent une ordonnance établissant un calendrier pour que la Cour entende et tranche la requête que présenteront plus tard les demanderesses pour faire autoriser leur instance comme recours collectif. Les demanderesses affirment qu’elles seront en mesure de déposer une telle requête en juin 2010. Les demanderesses réclament explicitement que la requête en radiation des défenderesses fondée sur la convention d’arbitrage soit entendue et tranchée en même temps que leur requête en autorisation d’un recours collectif.

 

[5]               Les parties ont débattu de la requête des demanderesses en vue d’obtenir des directives le 16 avril 2010 à Montréal. La présente ordonnance n’intéresse que la requête des demanderesses visant à obtenir des directives.

 

Position des parties

[6]               Les demanderesses font valoir que les défenderesses cherchent à faire instaurer un système de « contentieux par tranches » en déposant une requête en radiation fondée sur la convention d’arbitrage et, si les défenderesses n’ont pas gain de cause, une requête en radiation pour motifs constitutionnels, pour que les requêtes soient toutes entendues au début de l’instance.  

 

[7]               Les demanderesses estiment que la Cour a le large pouvoir discrétionnaire d’établir le calendrier de l’instance, et qu’elle doit le faire de manière à assurer l’audition équitable et rapide de toutes les requêtes et de tous les arguments des deux parties. La meilleure façon de réaliser cet objectif consiste à entendre et à trancher simultanément les différentes requêtes des défenderesses et la requête des demanderesses en autorisation du recours collectif. Les demanderesses ajoutent que, dans les ressorts canadiens de common law, les tribunaux ont l’habitude de trancher, au stade de l’instance consacré à l’autorisation du recours collectif, les requêtes préliminaires, notamment les requêtes concernant l’absence de compétence fondées sur des conventions d’arbitrage. Elles font référence, à cet égard, à l’arrêt récent de la Cour d’appel de l’Ontario dans Griffin c. Dell Canada Inc., 2010 ONCA 29, 64 D.L.R. (4th) 199, [2010] O.J. no177 (QL).

 

[8]               Les demanderesses reconnaissent l’existence d’une controverse juridique entre la Cour d’appel de l’Ontario et son homologue de la Colombie-Britannique quant à la possibilité d’introduire un recours collectif dans les ressorts de common law lorsqu’une convention d’arbitrage s’applique au litige. En effet, dans McKinnon c. National Money Mart Co., 2009 BCCA 103, 304 D.L.R. (4th) 331, [2009] B.C.J. no 468 (QL), la Cour d’appel de la Colombie-Britannique a décidé que les arrêts rendus par la Cour suprême du Canada sur le fondement de la législation québécoise dans Dell Computer Corp. c. Union des Consommateurs, 2007 CSC 34, [2007] 2 R.C.S. 801, et Rogers Sans-fil inc. c. Muroff, 2007 CSC 35, [2007] 2 S.C.R. 921, s’étendent au droit de la Colombie-Britannique. Par conséquent, les arrêts antérieurs où cette cour a statué que l’autorisation d’un recours collectif rend invalide une clause d’arbitrage ont effectivement été annulés. La Cour suprême du Canada règlera enfin cette question sous peu, étant donné qu’elle est présentement saisie de la décision McKinnon. Cependant, quelle que soit l’issue de ce pourvoi à la Cour suprême du Canada sur le fond, dans McKinnon, la question a été instruite et tranchée à l’étape de l’autorisation du recours collectif, et non à titre de question préliminaire avant l’autorisation. Il convient donc en l’espèce d’adopter la même démarche afin de statuer sur la requête en radiation des défenderesses.

 

[9]               Les défenderesses font plutôt valoir que les requêtes contestant la compétence de la Cour d’instruire une instance, qu’il s’agisse d’un recours collectif ou d’une autre action, doivent être, et sont, tranchées au début de l’instance. Les défenderesses renvoient à un grand nombre de décisions où ce principe a été confirmé, tout particulièrement les décisions de la Cour dans Galarneau c. Canada (Procureur général), 2005 CF 39, 306 F.T.R. 1, [2005] A.C.F. no 42 (QL), et dans Merchant Law Group c. Canada (Agence du revenu du Canada), 2008 CF 1371, 338 F.T.R. 181, [2008] A.C.F. no 1767 (QL). Il s’agit aussi du principe retenu par la Cour d’appel du Québec dans Société Asbestos Limitée c. Lacroix, 2004 CanLII 21635 (C.A. Qué.).

 

[10]           Les défenderesses soutiennent donc que la Cour doit entendre et trancher leur requête en radiation fondée sur la convention d’arbitrage avant de se pencher sur toute autre question en l’espèce.

 

Analyse

[11]           Il existe deux écoles de pensée concurrentes quant à la bonne manière de gérer une procédure de recours collectif lorsque la compétence de la cour de connaître de la procédure est remise en question. Une école examine la question de manière pragmatique, tandis que l’autre le fait en s’appuyant sur des principes.

 

[12]           La première école exige généralement qu’il soit statué sur la question de la compétence au même moment que sur l’autorisation du recours collectif. Cette démarche permet d’éviter la multiplicité des audiences et de réduire le nombre d’appel éventuels, garantissant ainsi en théorie que les instances soient instruites en temps opportun tout en assurant une meilleure utilisation des ressources judiciaires limitées.

 

[13]           En général, les tribunaux des ressorts canadiens de common law ont préconisé cette approche, concluant qu’eu égard aux objectifs du recours collectif, les requêtes en autorisation d’un recours collectif doivent normalement avoir priorité sur les autres requêtes préliminaires, notamment celles remettant en question la compétence d’instruire le recours collectif, lesquelles peuvent être tranchées comme il se doit à l’étape de l’autorisation. L’examen de la jurisprudence sur ce point effectué par la juge Hansen dans Campbell c. Canada (Procureur général), 2008 CF 353, [2008] A.C.F. no 456, démontre qu’il en est ainsi, à l’instar de certaines des décisions invoquées par les demanderesses dans leur argumentation : voir surtout 2038724 Ontario Ltd. c. Quizno’s Canada Restaurant Corp., [2007] O.J. no 2404 (QL), au paragraphe 59. Il ne s’agit toutefois pas d’une règle absolue dans les ressorts canadiens de common law. D’autres considérations peuvent amener les tribunaux à prendre une autre démarche dans les circonstances indiquées.

 

[14]           Les commentaires suivants, tirés de Baxter c. Canada (Procureur général), [2005] O.J. no 165, aux paragraphes 11, 12 et 14, résument l’approche adoptée en Ontario et, par extension, dans d’autres ressorts canadiens de common law :

[traduction]

Avant l’autorisation, une action intentée en application de la Loi sur les recours collectifs n’est rien de plus qu’une proposition de recours collectif : Logan c. Canada (Ministre de la Santé) (2003), 36 C.P.C. (5th) 176 (C.S), au paragraphe 23, confirmé par 71 O.R. (3d) 451 (C.A.) (voir aussi : Boulanger c. Johnson & Johnson Corp. (2003), 64 O.R. (3d) 208 (C. div.); Attis, précitée, au paragraphe 14). On ne sait pas d’avance avec certitude si une instance finira par être autorisée comme recours collectif. En outre, il y a un élément de fluidité en ce qui concerne les définitions des groupes et les questions communes. En conséquence, les requêtes présentées avant l’autorisation peuvent se révéler inutiles, trop complexes ou incomplètes.

De plus, les tribunaux n’ont pas toujours suffisamment d’information pour trancher convenablement les requêtes avant l’autorisation. Cela est particulièrement évident dans le cas des requêtes en matière de compétence. Il a été statué dans plusieurs décisions récentes que les questions communes jugées recevables dans un recours collectif peuvent servir de fondement à la présomption de compétence du tribunal sur des parties de l’extérieur de la province (voir : Harington c. Dow Corning Corp (2000), 193 D.L.R. (4th) 67 (C.A. C.-B.); Wilson c. Servier (2000), 50 O.R. (3d) 219 (C.S.), (2000), 52 O.R. (3d) 20 (C. div.), autorisation de pourvoi refusée [2001] C.S.C.R. no 88, Bulletin de la C.S.C., 2001, à la page 1539). L’essentiel des jugements Harrington et Wilson, pour ce qui est de la décision portant sur la compétence, est que, quand il est possible d’autoriser un recours collectif mettant en cause des demandeurs d’une même province, et que les questions communes constituant la base de l’autorisation touchent à la fois les demandeurs résidant dans la province et les autres à l’encontre du défendeur, l’existence de ces questions communes établit un « lien réel et substantiel » entre les non-résidents et l’action. Donc, les assises d’une requête accueillie en autorisation peuvent influer directement sur l’analyse de la compétence. En revanche, si la requête en autorisation est rejetée, la requête concernant la compétence deviendra, selon toute vraisemblance, théorique. Il ne servirait donc à rien d’entendre la requête concernant la compétence avant celle en autorisation en ce sens que, du moins dans cette mesure, on ne dispose pas de tous les renseignements nécessaires sur la compétence.

[...]

Certes, il y a des cas où, comme l’indiquent à la fois Attis et Moyes, il peut exister des exceptions à la règle selon laquelle il vaut mieux commencer par entendre et trancher la question procédurale de la requête en autorisation. Il peut être opportun de faire une exception quand le fait de statuer sur une requête préliminaire avant celle en autorisation servirait l’intérêt de toutes les parties ou favoriserait l’utilisation efficace des ressources judiciaires, comme dans le cas d’une requête en radiation en vertu de la règle 21 ou d’une requête en jugement sommaire en application de la règle 20. De telles requêtes peuvent avoir pour effets positifs de circonscrire les questions, d’orienter l’instruction de l’affaire et de faire avancer le litige. Une exception peut aussi être justifiée lorsque la requête préliminaire risque de devenir théorique, ou s’imposer pour assurer le déroulement équitable de l’instance (voir : Moyes, précité, au paragraphe 12; Re Holmes and London Life c. London Life Insurance Co. et al. (2000), 50 O.R. (3d) 388 (C.S.), aux paragraphes 7 et 8; Hughes c. Sunbeam Corp. (Canada) Ltd. (2002), 61 O.R. (3d) 433 (C.A.), au paragraphe 15, autorisation de pourvoi rejetée [2002] C.S.C.R. no 446; Segnitz c. Royal and SunAlliance Insurance Co. of Canada, [2001] O.J. no 6016 (C.S.); Stone c. Wellington County Board of Education (1999), 29 C.P.C. (4th) 320 (C.A.), autorisation de pourvoi refusée [1999] C.S.C.R. no 336.); Vitelli c. Villa Giardino (2001), 54 O.R. (3d) 334 (C.S.); Pearson c. Inco (2001), 57 O.R. (3d) 278 (C.S.)).

 

[15]           L’autre école perçoit la compétence d’une cour d’instruire un recours collectif comme une question fondamentale qu’il faut trancher dès qu’elle est soulevée. Selon cette école, la compétence est une question d’ordre public qu’on ne saurait passer sous silence, même si le fait de statuer sur cette question à un stade préliminaire risque de donner lieu à un appel qui fera augmenter le temps nécessaire pour débattre du recours collectif si l’on juge que la cour est compétente à cet égard. Il en est ainsi parce qu’il serait inacceptable sur le plan juridique pour une cour de connaître d’une action qui ne relève pas de sa compétence, même si cette façon de faire serait plus efficace.  

 

[16]           Cette deuxième école reflète l’approche adoptée par les tribunaux du Québec. En effet, la Cour d’appel du Québec a clairement fait valoir que, dans le contexte des procédures de recours collectif, il y a lieu de statuer sur les requêtes contestant la compétence de la cour avant la requête en autorisation, car elles soulèvent des questions d’ordre public : voir tout particulièrement Société Asbestos Limitée c. Lacroix, précité, aux paragraphes 20 à 27.

 

[17]            À mon avis, il n’y a pas lieu d’opter pour l’une ou l’autre école, ce que les parties au présent litige m’ont convié implicitement à faire.

 

[18]           Il faut décider au cas par cas l’ordre dans lequel les requêtes seront entendues et tranchées dans le cadre d’un recours collectif eu égard aux circonstances en cause et aux questions soulevées. Je ne vois aucune raison de graver dans la pierre le principe préétabli selon lequel il faut entendre et trancher avant l’autorisation les requêtes contestant la compétence de la Cour. Je ne vois pas non plus de raison de décider qu’il faut entendre toujours ou habituellement ces requêtes à l’étape de l’instance concernant l’autorisation. Il convient plutôt de statuer sur chaque affaire dans le contexte qui lui est propre, et ce contexte oriente l’ordre d’audition des requêtes déposées au cours de la procédure de recours collectif.

 

[19]           L’alinéa 334.16(1)a) des Règles des Cours fédérales (les Règles) permet d’autoriser une instance comme recours collectif lorsque « les actes de procédure révèlent une cause d’action valable ». Pour sa part, l’article 334.11 des Règles prévoit que les règles applicables aux actions s’appliquent aux recours collectifs dans la mesure où elles ne sont pas incompatibles avec les règles portant sur les recours de ce genre.  L’alinéa 221(1)a) permet de radier à tout moment une action au motif qu’elle « ne révèle aucune cause d’action [...] valable ». La similitude entre l’alinéa 334.16(1)a) et l’alinéa 221(1)a) m’amène à conclure qu’il est possible de statuer sur les arguments quant à l’absence de compétence soit dans le contexte de l’audience concernant l’autorisation, soit à titre de question distincte devant faire l’objet d’une requête entendue et tranchée avant l’autorisation. Il n’existe toutefois aucune règle ni aucun principe accordant la priorité à l’alinéa 221(1)a) aux dépens de l’alinéa 334.16(1)a) ou vice-versa. Dans les circonstances, la décision d’instruire et de trancher les questions de compétence avant ou durant l’étape de l’autorisation du recours collectif relève du pouvoir discrétionnaire de la Cour de gérer ses propres procédures.  

 

[20]           À mon avis, la décision de la Cour Campbell c. Canada (Procureur général), précitée, confirme l’approche susmentionnée. Dans Campbell, une affaire semblable à celle en l’espèce, on a déposé une requête en radiation d’une déclaration avant l’autorisation d’un recours collectif, et la question à trancher, comme dans la présente affaire, était de savoir s’il fallait entendre la requête en radiation avant la requête en autorisation. Bien que la juge Hansen ait bel et bien répondu oui à cette question, elle en a décidé ainsi en raison des circonstances propres à l’affaire, et non sur le fondement d’un principe juridique absolu. La juge Hansen a fait remarquer ce qui suit au paragraphe 23 de cette décision :

[traduction]

Il ressort clairement de la jurisprudence que, même si une requête en autorisation doit en principe l’emporter sur d’autres requêtes préliminaires, en dernière analyse, l’ordre des requêtes est établi selon les circonstances de l’affaire en cause.

 

[21]           La Cour est aussi parvenue à la conclusion, dans Galarneau c. Canada (Procureur général), précitée, et dans Merchant Law Group c. Canada (Agence du revenu du Canada), précitée, qu’il faut entendre une requête en radiation fondée sur des motifs de compétence avant la requête pour faire autoriser l’instance comme recours collectif. Dans ces décisions, la Cour renvoie avec approbation à l’arrêt de la Cour d’appel du Québec Société Asbestos, précité. Elle a agi ainsi non parce qu’elle était liée par cet arrêt, mais parce que le raisonnement de la Cour d’appel du Québec [traduction] « est convaincant et applicable en l’espèce » : Merchant Law Group, précitée, au paragraphe 19. Il est donc possible de considérer ces décisions comme ayant été rendues sur le fondement des circonstances en cause dans chaque affaire.

 

[22]           Il peut en effet y avoir des circonstances où il vaudrait mieux statuer sur une contestation en matière de compétence à l’étape de l’autorisation du recours collectif, ou même après que celui-ci eut été autorisé. À titre d’exemple, en l’espèce, il serait sans doute préférable de trancher les contestations qu’ont présentées les défenderesses en matière de compétence en se fondant sur des considérations constitutionnelles, si besoin est, après que l’autorisation du recours collectif eut été accordée ou non. Cette façon de faire permettrait d’éviter un débat d’ordre constitutionnel à l’étape de l’autorisation, ainsi que l’intervention du procureur général du Canada et, peut-être, celle du procureur général de la province à propos d’une question qui pourrait ne jamais être certifiée.

 

[23]           Par conséquent, j’estime vivement qu’il y a lieu d’établir au cas par cas, compte tenu des circonstances de chaque affaire et des questions soulevées dans celles-ci, l’ordre dans lequel la Cour entend et tranche les requêtes dans le cadre d’une procédure de recours collectif.  

 

[24]           En l’espèce, les défenderesses m’ont convaincu qu’il convient d’entendre la requête préliminaire dans laquelle elles contestent la compétence de la Cour sur la base de la convention d’arbitrage avant la requête en autorisation du recours collectif.  

 

[25]           En effet, les demanderesses en l’espèce ont déposé leur déclaration sous la forme d’une proposition de recours collectif le 23 octobre 2009, mais n’ont pas donné suite à cette proposition depuis son dépôt. Les demanderesses auraient pu présenter leur requête en autorisation d’un recours collectif, mais elles ont décidé de ne pas le faire. L’avocat des demanderesses affirme maintenant qu’une requête de cette nature sera peut-être présentée en juin prochain; ce n’est toutefois pas une certitude. Si l’on avait déposé en l’espèce une requête en autorisation d’un recours collectif et qu’une date avait été fixée pour l’audition de cette requête, j’aurais peut-être été enclin à statuer sur la requête en radiation pour des motifs de compétence en même temps que la requête en autorisation. Cependant, ce n’est pas ce qui s’est produit ici, et je ne vois pas pourquoi l’on devrait empêcher aux défenderesses de faire entendre par la Cour leur requête en radiation, vu que les demanderesses n’ont pas encore déposé leur requête en autorisation.

 

[26]           En outre, si elle est accueillie, la requête des défenderesses peut mettre un terme à la procédure tout entière ou limiter la portée des arguments en faveur de l’autorisation. Les demanderesses reconnaissent elles-mêmes que, si les défenderesses réussissent à faire déclarer la convention d’arbitrage applicable à leur demande, elles pourraient être obligées de demander, dans un recours collectif, des dommages-intérêts égaux ou inférieurs à 1 000 $.

 

[27]           Pour ces motifs, je conclus qu’il faut entendre et trancher le plus tôt possible la requête en radiation et, quoiqu’il arrive, avant l’audition de la requête en autorisation que déposeront peut‑être les demanderesses en l’espèce.

 

[28]           La Cour rendra donc une ordonnance fixant la date de la requête en radiation.

 

[29]           Les dépens de la présente requête suivront l’issue de la cause.


ORDONNANCE

 

LA COUR ORDONNE :

 

1.         À moins qu’un juge de la Cour n’en décide autrement, la requête des défenderesses en date du 7 avril 2010 visant à suspendre l’instance et à soumettre l’affaire à l’arbitrage sera entendue à Montréal le vendredi 18 juin 2010, à 9 h 30, pendant un maximum de trois heures et demi.

 

2.         Le dossier modifié de requête des défenderesses qui figure au dossier de la Cour est reconnu comme ayant été déposé à la Cour et signifié aux demanderesses.

 

3.         Les demanderesses compléteront, le 21 mai 2010 ou avant cette date, tous les contre‑interrogatoires sur les affidavits figurant au dossier de requête des défenderesses, et présenteront à la Cour, et en remettront copie à l’avocat des défenderesses, leur propre dossier de requête le ou avant le 28 mai 2010.

 

4.         Les défenderesses compléteront, le 11 juin 2010 ou avant cette date, tous les contre‑interrogatoires sur les affidavits figurant au dossier de requête des demanderesses.

 

 

 

« Robert M. Mainville »

Juge

 

Traduction certifiée conforme

David Aubry, LL.B.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        T-1754-09

 

 

INTITULÉ :                                       CHERYL RHODES et KERRY MURPHY c.

                                                            COMPAGNIE AMWAY CANADA et AMWAY GLOBAL

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 16 avril 2010

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                       Le juge Mainville

 

DATE DES MOTIFS :                      Le 5 mai 2010

 

 

COMPARUTIONS :

 

André Lespérance

Careen Hannouche

 

POUR LES DEMANDERESSES

Robert Torralbo

Claude Marseille

POUR LES DÉFENDERESSES

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

TRUDEL & JOHNSTON

Montréal, QC

 

LAUZON BÉLANGER INC.

Montréal, QC

 

POUR LES DEMANDERESSES

BLAKE CASSELS & GRAYDON LLP

Montréal, QC

POUR LES DÉFENDERESSES

 

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