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Cour fédérale

 

 

Federal Court


Date : 20100505

Dossier : T-929-09

Référence : 2010 CF 496

Toronto (Ontario), le 5 mai 2010

En présence de monsieur le juge Crampton

 

 

ENTRE :

CECIL SCOTT

demandeur

et

 

 

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

défendeur

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire d’une décision de la Section d’appel de la Commission nationale des libérations conditionnelles qui confirmait la révocation par la Commission nationale des libérations conditionnelles (la Commission) de la semi-liberté accordée au demandeur, M. Cecil Scott.

 

[2]               M. Scott allègue que la Commission a commis plusieurs erreurs susceptibles de révision et que la décision de la Section d’appel est déraisonnable parce que celle-ci a confirmé la décision de la Commission.

 

[3]               Plus précisément, M. Scott allègue ce qui suit :

 

                         i.          la Commission a commis une erreur de droit en prenant en considération le fait qu’en qualité de citoyen du Royaume-Uni (R.-U.) qui serait expulsé immédiatement et serait réputé avoir purgé sa peine au moment où il serait mis en liberté conditionnelle totale, il ne ferait l’objet d’aucun suivi permanent pour vérifier s’il respecte sa thérapie médicamenteuse;

 

                        ii.          la Commission a commis une erreur de droit en déclarant, à la fin de l’audience, qu’il devrait « se renseigner sur la possibilité d’un transfert international de la libération conditionnelle avant toute audience future »;

 

                      iii.          la Commission a rendu une décision déraisonnable parce qu’elle n’a pas tenu compte des nombreux éléments positifs de son dossier, qu’elle a formulé des hypothèses erronées et a qualifié d’« important » son risque de récidive avec violence;

 

                      iv.          la Commission a violé l’article 7 de la Charte canadienne des droits et libertés,  partie I de la Loi constitutionnelle de 1982, annexe B de la Loi de 1982 sur le Canada (R.‑U.), 1982, ch. 11 (la Charte).

 

[4]               M. Scott allègue également que la décision de la Section d’appel est déraisonnable parce qu’elle a confirmé la décision de la Commission.

 

[5]               Pour les motifs qui suivent, j’ai conclu que les décisions rendues par la Section d’appel et par la Commission étaient raisonnables et que ni la Section d’appel ni la Commission n’ont commis d’erreur de droit lorsqu’elles ont pris leurs décisions respectives.

 

I.       Le contexte

[6]               M. Scott purge une peine d’emprisonnement à perpétuité pour avoir attaqué et tué à coups de couteau un jeune homme de 17 ans dans un ascenseur en 1996. Il est traité depuis longtemps pour des troubles psychiatriques et a souvent omis de prendre ses médicaments, il semble toutefois qu’il n’a omis de le faire qu’une fois depuis 2002.

 

[7]               Le 24 février 1998, il a été déclaré coupable de meurtre au deuxième degré et condamné à l’emprisonnement à perpétuité, avec possibilité de demander la libération conditionnelle après avoir purgé 15 ans de sa peine. Le 6 mars 2002, sa peine a été modifiée pour lui accorder la possibilité de demander la libération conditionnelle après avoir purgé 10 ans de sa peine.

 

[8]               En tant que citoyen du R.-U., M. Scott sera expulsé immédiatement au R.‑U. dès qu’il sera libéré, après avoir fini de purger sa peine ou après avoir obtenu la libération conditionnelle totale. En 2008, il a demandé la libération conditionnelle totale avec expulsion vers le R.‑U.

 

[9]               L’équipe de gestion de cas de Service correctionnel Canada (SCC) a appuyé sa demande de libération conditionnelle. De plus, les évaluations psychiatriques et psychologiques les plus récentes, effectuées en 2007 et 2008, respectivement, étaient favorables à sa demande. Cependant, ces évaluations étaient fondées sur la continuation de la surveillance médicale dont il faisait l’objet et sur le respect de sa thérapie médicamenteuse. En fait, l’évaluation psychologique insistait sur le fait qu’il était essentiel que M. Scott continue d’être suivi sur le plan psychiatrique, parce que, si sa santé mentale se détériorait, le risque de récidive avec violence qu’il représente augmenterait. L’importance accordée à la surveillance et au respect de sa thérapie médicamenteuse était conforme aux évaluations antérieures qui remontaient jusqu’à 1998.

 

[10]           Un agent d’Interpol à Londres a confirmé par écrit qu’au R.‑U. les autorités [traduction] « ne reconnaissent pas les conditions associées à une libération conditionnelle ou à un permis étranger de sorte que la libération et le retour [de M. Scott] au Royaume-Uni ne seraient assortis d’aucune condition. »

 

[11]           Le plan de libération conditionnelle de M. Scott prévoyait qu’il vivrait avec ses parents (qui ont plus de 80 ans), qu’il obtiendrait un emploi dans un domaine dans lequel il possède de l’expérience, qu’il continuerait à prendre les médicaments prescrits, qu’il obtiendrait le soutien de Prisoners Abroad (organisme qui a confirmé être disposé à l’aider à réintégrer la société britannique) et à obtenir le soutien médical de sa sœur, une ancienne infirmière qui a travaillé dans un hôpital où elle s’occupait de patients souffrant de troubles mentaux. Le père de M. Scott a affirmé que si M. Scott était mis en liberté conditionnelle, il résiderait avec ses parents et que ses parents veilleraient à ce que dès son arrivée au Royaume-Uni, il soit pris en charge par un psychiatre agréé.

 

II.      Les dispositions législatives pertinentes

[12]           Aux termes de l’alinéa 50b) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (LIPR), il y a sursis de la mesure de renvoi prise à l’égard d’un étranger, tant que celui-ci n’a pas purgé la peine d’emprisonnement qui lui a été infligée au Canada.

 

[13]           Le paragraphe 128(3) de la Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, L.C. 1992, ch. 20 (LSCMLC) énonce ce qui suit :

 

(3) Pour l’application de l’alinéa 50b) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés et de l’article 40 de la Loi sur l’extradition, la peine d’emprisonnement du délinquant qui bénéficie d’une libération conditionnelle d’office ou d’une permission de sortir sans escorte est, par dérogation au paragraphe (1), réputée être purgée sauf s’il y a eu révocation, suspension ou cessation de la libération ou de la permission de sortir sans escorte ou si le délinquant est revenu au Canada avant son expiration légale.

(3) Despite subsection (1), for the purposes of paragraph 50(b) of the Immigration and Refugee Protection Act and section 40 of the Extradition Act, the sentence of an offender who has been released on parole, statutory release or an unescorted temporary absence is deemed to be completed unless the parole or statutory release has been suspended, terminated or revoked or the unescorted temporary absence is suspended or cancelled or the offender has returned to Canada before the expiration of the sentence according to law.

 

 

[14]           Aux termes du paragraphe 128(4) de la LSCMLC, « l’admissibilité à la libération conditionnelle totale de quiconque est visé par une mesure de renvoi au titre de la [LIPR] est préalable à l’admissibilité à la semi-liberté ou à l’absence temporaire sans escorte. »

 

[15]           Il découle concrètement des dispositions qui précèdent, conjuguées à la confirmation mentionnée ci-dessus d’Interpol Londres, que M. Scott (i) sera expulsé au R.‑U. dès qu’il sera admissible à la libération conditionnelle totale, (ii) il ne sera pas assujetti à un suivi ou à une surveillance, y compris à l'égard de son traitement médical, de la part de l’État au R.‑U. et (iii) il n’obtiendra pas la semi-liberté ou une absence temporaire sans escorte au Canada.

 

[16]           L’article 3 de la LSCMLC énonce ce qui suit :

 

3. Le système correctionnel vise à contribuer au maintien d’une société juste, vivant en paix et en sécurité, d’une part, en assurant l’exécution des peines par des mesures de garde et de surveillance sécuritaires et humaines, et d’autre part, en aidant au moyen de programmes appropriés dans les pénitenciers ou dans la collectivité, à la réadaptation des délinquants et à leur réinsertion sociale à titre de citoyens respectueux des lois.

 

3. The purpose of the federal correctional system is to contribute to the maintenance of a just, peaceful and safe society by

(a) carrying out sentences imposed by courts through the safe and humane custody and supervision of offenders; and

(b) assisting the rehabilitation of offenders and their reintegration into the community as law-abiding citizens through the provision of programs in penitentiaries and in the community.

 

 

 

[17]           On trouvera le texte intégral de l’article 128 de la LSCMLC ainsi que celui de certaines autres dispositions législatives examinées dans la présente décision à l’annexe A de la présente décision.

 

III.     Les décisions attaquées

[18]           M. Scott demande le contrôle judiciaire de la décision de la Section d’appel datée du 4 mai 2009. Cependant, les questions soulevées dans les observations de M. Scott concernent la décision de la Commission datée du 21 novembre 2008. Les observations présentées par le procureur général en réponse visent principalement la décision de la Section d’appel.

 

[19]           Dans Cartier c. Canada (Procureur général), 2002 CAF 384, [2002] A.C.F. no 1386, aux paragraphes 8 et 9, la Cour d’appel fait remarquer que la compétence de la Section d’appel est étroitement circonscrite par les dispositions explicites de l’article 147 de la LSCMLC. En bref, la Section d’appel ne peut intervenir que si la Commission a commis une erreur décrite aux alinéas 147(1)a) à e), et seulement si cette erreur était déraisonnable.

 

[20]           Dans ces circonstances, lorsqu’une autre demande est présentée à la Cour, « le juge est théoriquement saisi d’une demande de contrôle judiciaire relative à la Section d’appel, mais lorsque celle-ci confirme la décision de la Commission, il est en réalité appelé à s’assurer, ultimement, de la légalité de cette dernière. » (Cartier, précité, au paragraphe 10. Voir également Aney c. Canada (Procureur général), 2005 CF 182, [2005] A.C.F. no 228, au paragraphe 29; et Ngo c. Canada (Procureur général), 2005 CF 49, [2005] A.C.F. no 71, au paragraphe 8.)

 

          A. La décision de la Commission

[21]      Après avoir examiné les circonstances relatives à l’infraction de M. Scott et ses antécédents en matière de santé mentale, la Commission a brièvement analysé la déclaration de la victime figurant au dossier et le fait que M. Scott n’a jamais eu affaire au système de justice pénale avant la perpétration de l’infraction à l’origine de la peine.

 

[22]           La Commission mentionne ensuite divers éléments susceptibles de susciter certaines préoccupations. Ces éléments comprenaient le fait que M. Scott semblait avoir oublié la plupart des événements ayant précédé l’infraction, le fait qu’il a reconnu ne pas avoir lu son dossier en préparation de l’audience, le fait qu’il nie avoir entendu des voix depuis l’âge de 11 ans et le fait qu’il semblait visiblement confus pour ce qui est des gestes qu’il avait posés au cours des jours ayant précédé son infraction.

 

[23]           De plus, la Commission a souligné que le fait que M. Scott se soit enfui du lieu du meurtre est incompatible avec son affirmation selon laquelle il avait commis le meurtre pour tenter d’obtenir un traitement psychiatrique et une protection pour lui-même. La Commission a également souligné que le fait qu’il ait été admis à plusieurs reprises dans un hôpital démontrait qu’il avait reçu de l’aide lorsqu’il en avait eu besoin et qu’il avait admis ne pas avoir suivi les conseils de son médecin au sujet des médicaments qui lui avaient été prescrits.

 

[24]           La Commission a ensuite examiné le dossier positif de M. Scott en matière de récidive, certaines difficultés personnelles et sociales qu’il continuait d’éprouver, son comportement en établissement qui était, d’une façon générale, satisfaisant, son plan de libération et les points essentiels des évaluations psychologiques et psychiatriques effectuées en 2007, 2008 et 1998. Au cours de l’analyse de ces évaluations, la Commission a souligné que les évaluations de 2007 et 2008 n’avaient peut-être pas tenu compte du fait qu’il ne serait pas surveillé ni assujetti à des conditions en cas d’expulsion aux R.‑U. et qu’elles n’avaient peut-être pas été préparées à la lumière de l’évaluation de 1998. La Commission a également examiné les antécédents de M. Scott en matière de défaut de suivre sa thérapie médicamenteuse.

 

[25]           En fin de compte, la Commission a refusé d’accorder la libération conditionnelle à M. Scott pour le motif qu’il présentait encore un risque important de récidive violente. Cette conclusion était fondée sur le fait que la Commission estimait que le plan de libération de M. Scott était insuffisant sur le plan de la gestion du risque, en particulier, compte tenu des éléments suivants (i) il ne serait pas assujetti à des conditions et à une surveillance par les autorités s’il était libéré au R.‑U.; (ii) ses évaluations psychiatriques et psychologiques insistaient sur l’importance d’une surveillance et du respect de sa thérapie médicamenteuse et (iii) ses antécédents [traduction] « comprenaient de nombreux exemples » de son omission de suivre sa thérapie.

 

          B.           La décision de la Section d’appel

[26]           M. Scott a interjeté appel de la décision de la Commission devant la Section d’appel pour le motif que la décision de la Commission était déraisonnable, était fondée sur des renseignements erronés et omettait de prendre en compte des renseignements pertinents et fiables. M. Scott alléguait également que la Commission avait commis une erreur de droit lorsqu’elle avait affirmé à la toute fin de sa décision qu’il devrait examiner la possibilité de demander le transfert international de la libération conditionnelle avant toute audience future.

 

[27]           Après avoir attentivement examiné le dossier, écouté l’enregistrement de l’audience de la Commission, résumé les moyens d’appel de M. Scott et analysé en détail la décision de la Commission, la Section d’appel a rejeté l’appel de M. Scott.

 

[28]           Pour ce qui est de l’affirmation selon laquelle la décision de la Commission était déraisonnable, la Section d’appel a fait remarquer que l’évaluation du risque à laquelle avait procédé la Commission était équitable et conforme aux critères décisionnels préalables à la libération contenus dans la loi et les politiques de la Commission. La Section d’appel a conclu que la Commission avait tenu compte des divers éléments positifs qui militaient en faveur de sa demande de libération conditionnelle et a conclu, de façon raisonnable, qu’un certain nombre d’autres éléments, à savoir ceux qui sont mentionnés à la partie III. A. ci-dessus, l’emportaient sur les éléments positifs. La Section d’appel a rejeté l’argument selon lequel la Commission avait posé des questions inappropriées au sujet de la santé mentale de M. Scott et a conclu qu’au contraire, ces questions étaient pertinentes d’après les renseignements figurant au dossier.

 

[29]           La Section d’appel a également conclu qu’il n’était pas déraisonnable ou erroné que la Commission ait exprimé certaines préoccupations sur la question de savoir si les auteurs des évaluations psychiatriques et psychologiques de 2008 et 2007 savaient que M. Scott ne serait pas assujetti à des conditions ou surveillé par les autorités du R.‑U. s’il était expulsé vers ce pays. De plus, la Section d’appel a conclu qu’il n’était pas inéquitable ou déraisonnable que la Commission se soit préoccupée du respect par M. Scott de sa thérapie médicamenteuse une fois libéré dans la collectivité au R.‑U., en particulier parce qu’il n’avait pas convaincu la Commission qu’il ferait l’objet d’un suivi et d’une surveillance psychiatrique appropriée.

 

[30]           Enfin, la Section d’appel a rejeté l’argument selon lequel la Commission avait commis une erreur de droit lorsqu’elle avait mentionné, à la toute fin de l’audience, que M. Scott devrait examiner la possibilité d’obtenir un transfert international de la libération conditionnelle avant toute audience future. La Section d’appel a fait remarquer que ce commentaire avait été formulé après que la Commission ait rendu sa décision et que la Commission essayait uniquement de lui faire comprendre qu’il existait d’autres façons pour un contrevenant d’être renvoyé dans un autre pays.

 

[31]           En se fondant sur ce qui précède, la Section d’appel a conclu que la décision de la Commission était (i) raisonnable et fondée sur des renseignements suffisants, pertinents, fiables et convaincants et (ii) était la décision la moins privative de liberté compatible avec la protection de la société.

 

IV.       La norme de contrôle

[32]           Les questions de fait, mixtes de fait et de droit et d’interprétation législative que M. Scott a soulevées devant la Cour appellent l’application de la norme de la raisonnabilité. (Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, aux paragraphes 53 et 54 et Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) c. Khosa, 2009 CSC 12, aux paragraphes 44 à 46. Voir également Sychuk c. Canada (Procureur général), 2009 CC 105, au paragraphe 45, Bouchard c. Canada (Commission nationale des libérations conditionnelles), 2008 CF 248, au paragraphe 37, Tozzi c. Canada (Procureur général), 2007 CF 825, au paragraphe 32 et Strachan c. Canada (Procureur général), 2006 CF 155, au paragraphe 15.)

 

[33]           Toutefois, la prétendue violation de l’article 7 de la Charte doit être examinée selon la norme de la décision correcte. (Dunsmuir, précité, au paragraphe 55 et Khosa, précité, au paragraphe 44.)

 

[34]           Les diverses questions précises soulevées par M. Scott concernent toutes la décision de la Commission. La seule question distincte qui touche la décision de la Section d’appel est l’affirmation selon laquelle il n’était pas raisonnable que la Section d’appel confirme la décision de la Commission, compte tenu des prétendues erreurs commises par la Commission.

 

[35]           Il en résulte que, si la Cour est convaincue que la décision de la Commission ne va pas à l’encontre de l’article 7 de la Charte et est par ailleurs raisonnablement conforme aux faits et au droit, la confirmation de la décision de la Commission par la Section d’appel devrait également être jugée raisonnable, à moins que la Section d’appel ait commis une erreur distincte qui rende sa décision déraisonnable, comme, par exemple, l’omission de motiver suffisamment sa décision.

 

[36]           Dans Khosa, précité, au paragraphe 59, le juge Ian Binnie a exposé de la façon suivante la norme de la raisonnabilité :

Lorsque la norme de la raisonnabilité s’applique, elle commande la déférence. Les cours de révision ne peuvent substituer la solution qu’elles jugent elles-mêmes appropriée à celle qui a été retenue, mais doivent plutôt déterminer si celle-ci fait partie des « issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit » (Dunsmuir, par. 47). Il peut exister plus d’une issue raisonnable. Néanmoins, si le processus et l’issue en cause cadrent bien avec les principes de justification, de transparence et d’intelligibilité, la cour de révision ne peut y substituer l’issue qui serait à son avis préférable.

 

V.        L’analyse

A.         La Commission a-t-elle commis une erreur de droit en tenant compte du fait que M. Scott ne serait pas assujetti à une surveillance permanente relativement au respect de sa thérapie médicamenteuse au R.‑U.?

 

[37]            M. Scott soutient que la conclusion de la Commission selon laquelle son [traduction] « plan de libération en Grande-Bretagne est [...] insuffisant sur le plan de la gestion du risque » repose sur l’hypothèse erronée selon laquelle la Commission a l’obligation ou le pouvoir de protéger la société britannique. Il affirme que la Commission a formulé cette hypothèse incorrecte à partir de son interprétation du mot « société » qui figure à l’article 3 de la LSCMLC, susmentionnée.

 

[38]           M. Scott souligne que cette hypothèse se retrouve également dans le Manuel des politiques de la Commission nationale des libérations conditionnelles, qui énonce, à l’article 4.4 :

 

Lorsqu’ils examinent des cas à des fins d’expulsion, d’extradition ou de départ volontaire, les membres de la Commission doivent tenir compte des critères touchant le risque inacceptable pour la société (pas uniquement la société canadienne) et la réinsertion sociale du délinquant.

 

[39]           Il est également pertinent de souligner que l’alinéa 101a) de la LSCMLC énonce que « la protection de la société » est le critère déterminant qui doit guider, dans tous les cas, la Commission. En outre, aux termes de l’article 102, le critère applicable à l’octroi de la libération conditionnelle est que la Commission doit être d’avis qu’« une récidive du délinquant [...] ne présentera pas un risque inacceptable pour la société » avant l’expiration légale de sa peine.

 

[40]           M. Scott soutient également que la Commission a mal interprété l’article 3 de la LSCMLC parce que le terme « société » est défini et précisé par les expressions « en assurant l’exécution des peines » et « au moyen de programmes appropriés », deux types de mesures qui ne peuvent qu’être prises au Canada. Il soutient que la Commission n’a pas de compétence en matière de protection des pays étrangers et que le fait que sa peine sera réputée avoir été purgée dès qu’il aura obtenu la libération conditionnelle totale vient étayer cette conclusion. Il affirme également qu’il n’est pas possible d’interpréter l’article 3 et le paragraphe 128(3) de façon à donner au mot « société » une portée extraterritoriale. Il affirme par conséquent que la Commission est tenue de ne pas prendre en compte le risque que le contrevenant peut représenter pour une société étrangère après son renvoi du Canada.

 

[41]           M. Scott soutient également que la Commission doit évaluer le risque que pose le délinquant à la société canadienne même s’il sera renvoyé immédiatement du Canada, dès qu’il aura obtenu la libération conditionnelle. Il affirme que la Commission doit, à cette fin, se fonder sur la fiction juridique que le risque que pose le demandeur serait gérable au Canada, s’il était libéré aux termes d’une libération conditionnelle totale, assortie de conditions.

 

[42]           J’estime que ces arguments ne sont pas convaincants.

 

[43]           Le fait que le législateur ait choisi d’introduire le mot « société » dans divers articles de la LSCMLC, y compris dans l’exposé de ses objets à l’article 3, alors qu’il a choisi l’expression « société canadienne » pour exposer les objets de la LIPR, comme cela ressort de l’article 3 de cette loi, montre qu’il n’a pas eu l’intention de limiter la portée du mot « société », tel qu’il est utilisé dans la LSCMLC, à la « société canadienne. »

 

[44]           Ne pas tenir compte de l’intérêt d’un pays étranger pour décider s’il y a lieu d’y expulser un délinquant que l’on croit poser un risque grave de récidive en matière de meurtre ou d’autre crime grave et dans quelles circonstances cette récidive aurait lieu, déboucherait sur une forme extrême de politique internationale basée sur l’égoïsme. Une telle politique serait incompatible avec l’intérêt des nations à promouvoir des relations harmonieuses entre elles, voire à respecter les obligations d’ordre moral qu’elles ont les unes envers les autres.

 

[45]           Pour ce qui est de la décision relative au choix du moment de l’expulsion, je conviens avec mon collègue, le juge Russell, que c’est la prise en compte des intérêts internationaux du Canada qui ont probablement influencé le législateur et l’ont amené à faire de l’admissibilité à la libération conditionnelle totale le moment à partir duquel le délinquant peut être renvoyé du Canada, en particulier compte tenu du fait qu’un tel délinquant « n’est soumis à la supervision d’aucune autorité canadienne » (Capra c. Canada (Procureur général), 2008 CF 1212 au paragraphe 34). Comme l’a fait remarquer le juge Russell (au paragraphe 36), avant l’adoption de la LSCMLC, « [n]ombreux étaient ceux qui critiquaient le fait que certains délinquants étrangers se voyaient imposer de longues peines pour des crimes graves, mais étaient renvoyés dans leur pays d’origine après quelques mois seulement, sans restriction correctionnelle. »

 

[46]           Pour ce qui est des circonstances dans lesquelles le délinquant est renvoyé du Canada, ces mêmes intérêts internationaux, conjugués au fait que le législateur s’est abstenu de qualifier le mot « société » utilisé dans la LSCMLC (comme il l’a fait dans l’article 3 de la LIPR), donnent à la Commission le pouvoir de se demander si le plan de libération du délinquant à l’étranger a pour effet d’atténuer suffisamment le risque qu’il représente pour la société étrangère et de justifier le renvoi du délinquant dans cette société. Comme mon confrère, le juge Phelan l’a fait remarquer dans Pashkurlatov c. Canada (Procureur général), 2008 CF 153, au paragraphe 10, « [i]l semble absurde qu’un détenu étranger puisse obtenir sa libération conditionnelle sans qu’il soit tenu compte de la surveillance ultérieure suivant son renvoi, alors qu’un détenu canadien ferait l’objet de surveillance au pays. »

 

[47]           Il souligne que dans Ng c. Canada, 2003 CFPI 781, [2003] A.C.F. no 1018, aux paragraphes 21 à 26, mon confère, le juge Gibson, a également été incité à interpréter le terme « société » tel qu’il figure dans la LSCMLC de façon à englober la « société au sens large », plutôt que la « société canadienne » ou la « société » dans un sens plus étroit. Cependant, compte tenu des faits de l’espèce, il n’a pas jugé utile de se prononcer sur cette question précise.

 

[48]           M. Scott soutient que sa position est étayée par le fait que le juge Russell a utilisé l’expression « société canadienne » dans Capra, précité. Cette affaire concernait toutefois un délinquant qui avait obtenu le statut de réfugié et qui, par conséquent, ne devait pas être renvoyé du Canada à moins que le ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration ne rende un avis indiquant qu’il constituait un danger pour le public au Canada. Cette affaire portait principalement sur la question de savoir si le paragraphe 128(4) de la LSCMLC était contraire à la Charte parce qu’il avait un effet discriminatoire sur le délinquant en raison de sa citoyenneté. C’est pourquoi la question de savoir si le terme « société », tel qu’il figure dans la LSCMLC, vise la « société canadienne » ou la « société au sens large » n’a pas été abordée directement. Dans ce contexte, les références qu’a faites le juge Russell à la protection de la société canadienne étaient tout à fait appropriées et ne semblent avoir eu pour but d’appuyer de quelque façon que ce soit l’argument avancé par M. Scott. En fait, la conclusion du juge Russell selon laquelle « [l]’objet fondamental du régime que créent les paragraphes 128(3) à (7) de la LSCMLC est de veiller à ce qu’on tienne compte des circonstances d’un renvoi imminent dans la façon dont un délinquant purge la peine qui lui est infligée » est tout à fait compatible avec mon opinion selon laquelle le législateur avait l’intention d’accorder à la Commission le pouvoir de prendre en compte les éléments du plan de libération du délinquant à l’étranger pour décider s’il y avait lieu d’accorder la libération conditionnelle totale au délinquant (Capra, précité, aux paragraphes 42 et 72).

 

[49]           Pour résumer, j’estime qu’il y a lieu de retenir l’argument du défendeur selon lequel le mot « société » utilisé dans la LSCMLC doit s’interpréter comme englobant « n’importe quelle société », et non pas simplement la « société canadienne. »

 

[50]           J’estime également que cette interprétation est tout à fait conforme à l’obligation de la Commission, énoncée à l’alinéa 101b) de la LSCMLC, de tenir compte de « toute l’information pertinente disponible ». J’éprouve de la difficulté à accepter que le plan de libération d’un contrevenant dans la société dans laquelle il sera renvoyé et le fait qu’il ne sera pas soumis à un suivi ou à une surveillance permanente et efficace de la part d’un État ou d’un autre organisme ne constitue pas une « information pertinente disponible ».

 

          B. La Commission a-t-elle commis une erreur de droit lorsqu’elle a fait la déclaration en question à la fin de l’audience?

 

[51]           M. Scott soutient que la Commission a commis une erreur de droit en déclarant, à la fin de l’audience, qu’il devrait « envisager la possibilité de demander le transfert international de sa libération conditionnelle avant toute audience future. » Il soutient que cela constitue une erreur susceptible d’être révisée parce que, pour transférer sa libération conditionnelle, il faudrait d’abord qu’il obtienne la semi-liberté, ce qui, aux termes du paragraphe 128(4) de la LSCMLC, n’est pas possible.

 

[52]           Je n’estime pas que cette déclaration constitue une erreur susceptible de révision. J’estime que cette déclaration et le prétendu malentendu que la Commission a peut-être commis au sujet des solutions offertes à M. Scott n’ont aucunement influencé la décision que la Commission a rendue.

 

[53]           Comme la Section d’appel l’a fait remarquer, cette déclaration a été faite après que la Commission ait rendu sa décision. J’estime que la Commission tentait tout simplement de présenter à M. Scott une proposition qui pouvait lui être utile. Je souligne sur ce point que l’avocat du demandeur a admis à l’audience de la Cour que l’interprétation qu’avait donnée la Section d’appel de la déclaration de la Commission n’était pas déraisonnable.

 

          C. La Commission a-t-elle commis une erreur en écartant les divers éléments positifs qui militaient en faveur de la demande de M. Scott en formulant une hypothèse erronée ou en qualifiant « d’important » son risque de récidive avec violence?

 

[54]           Dans ses observations écrites, M. Scott affirme, de façon abrupte, que la Commission [traduction] « a écarté tous les éléments positifs qui montraient que son risque de récidive était faible et que ses troubles mentaux étaient en rémission grâce à l’efficacité de son traitement médicamenteux. » Je ne peux souscrire à cette affirmation. Comme son avocat l’a admis à l’audience de la Cour, la Commission a en fait analysé la plupart de ces éléments dans le cadre de sa décision. Ces éléments comprenaient l’absence de rapports antérieurs de M. Scott avec le système de justice pénale, son dossier favorable en matière de récidive, l’évaluation selon laquelle il était très motivé, associée à un potentiel moyen de réintégration, le fait qu’il avait achevé son plan correctionnel, sa conduite généralement satisfaisante dans l’établissement et son comportement « très positif ». La Commission n’était aucunement tenue d’examiner ces différents éléments de façon plus approfondie.

 

[55]           M. Scott soutient également que l’incapacité de la Commission de comprendre les aspects par nature irrationnels de son comportement ainsi que sa tentative de rationaliser son comportement avant et après le meurtre pour lequel il a été déclaré coupable était déraisonnable. Je ne souscris pas à cette affirmation. Il était tout à fait loisible à la Commission de procéder ainsi dans le cadre de son évaluation du risque de récidive. De toute façon, il ressort clairement de la décision de la Commission que son refus d’accorder à M. Scott la libération conditionnelle totale associée à l’expulsion repose principalement sur les lacunes de son plan de libération, sur le fait qu’il ne serait pas assujetti à un suivi et à une surveillance efficaces et sur le fait que ses antécédents « comprenaient de nombreux exemples de son omission de respecter » sa thérapie médicamenteuse.

 

[56]           M. Scott soutient également que la Commission a commis une erreur en formulant l’hypothèse que l’évaluation psychiatrique de 2007 n’avait peut-être pas pris en compte l’évaluation psychiatrique de 1998, non plus que le fait qu’il ne serait pas assujetti à des conditions ou à une surveillance s’il bénéficiait d’une libération conditionnelle totale, avec expulsion vers le R.‑U. M. Scott soutient qu’en tirant ces conclusions erronées, la Commission a compromis la valeur et la précision de l’évaluation de 2007. Je ne peux retenir cet argument. La Commission a expressément souligné que, d’après l’évaluation de 2007, le risque de récidive que représentait M. Scott augmenterait s’il avait une rechute, qui était décrite, dans l’évaluation de 2007, en termes d’interruption de sa thérapie médicamenteuse et de décompensation. C’est ce risque, qui avait également été souligné dans ses évaluations de 1998 et 2008, qui était la principale préoccupation à l’origine du refus de la part de la Commission d’accorder la libération conditionnelle.

 

[57]           Enfin, M. Scott affirme qu’il était déraisonnable que la Commission conclue, d’après les preuves dont elle disposait, qu’il représentait un niveau de risque de récidive violent « important ». Il affirme que la Commission aurait dû utiliser les termes cliniques de risque « faible, modéré ou élevé » qu’utilisent les évaluateurs de risque professionnels. Il affirme que le qualificatif « important » n’a aucun sens dans les évaluations cliniques ou actuarielles du risque de récidive avec violence. À l’audience devant la Cour, son avocat a toutefois admis que la Commission n’était pas tenue d’utiliser les termes « faible, modéré ou élevé » pour qualifier le risque.

 

[58]           Il m’est impossible de conclure que l’utilisation par la Commission du terme « important » dans la présente affaire était déraisonnable ou que l’utilisation de ce terme, plutôt qu’un autre terme qui fait référence à un niveau comparable de risque de récidive violent que la Commission a jugé exister, a pu influencer la conclusion finale à laquelle en est arrivée la Commission.

 

D.  La décision de la Commission va-t-elle à l’encontre de l’article 7 de la Charte?

 

[59]           M. Scott soutient que la décision de la Commission le prive de sa liberté de façon fondamentalement injuste parce que (i) elle le place dans une situation impossible où il ne pourra jamais démontrer qu’il fera l’objet d’une surveillance publique des soins psychiatriques qu’il recevra au R.‑U. et (ii) parce qu’elle a été influencée par l’erreur de compréhension selon laquelle il pourrait peut‑être transférer sa libération conditionnelle au R.‑U. Il n’a pas exposé en détail ces arguments dans ses observations écrites et son avocat ne les a pas présentés à l’audience de la Cour.

 

[60]           Je ne peux souscrire aux deux arguments présentés par M. Scott. Pour ce qui est du dernier, il suffit de rappeler que la proposition qu’a faite la Commission d’explorer la possibilité d’obtenir le transfert international de sa libération conditionnelle n’était qu’une proposition visant à lui être utile, formulée à la toute fin de l’audience de la Commission et après que celle-ci ait rendu sa décision. J’estime que toute erreur de compréhension que la Commission a pu commettre au sujet des solutions s’offrant à M. Scott n’a aucunement influencé sa décision.

 

[61]           Quant à l’affirmation selon laquelle la décision de la Commission place M. Scott dans une situation impossible, cela est tout simplement faux. Un des facteurs importants de la conclusion de la Commission était que le plan de libération de M. Scott était, de l’avis de la Commission, insuffisant en ce qui concerne la gestion du risque. Il est tout à fait possible que la Commission en arrive à une autre conclusion si celui-ci présentait à l’avenir un plan plus solide. En fait, c’est ce que semble avoir envisagé la Section d’appel lorsque celle-ci a fait remarquer que les plans de libération [traduction] « [de M. Scott] ne contenaient aucune lettre officielle émanant d’un psychiatre agréé en Angleterre énonçant qu’il serait disposé à le prendre comme patient et à suivre régulièrement ses problèmes de santé mentale ainsi que la prise de ses médicaments. » Je ne pense pas que ce commentaire indique qu’une telle lettre serait suffisante, en l’absence d’autres éléments faisant partie du plan de libération susceptibles de démontrer que le risque de récidive de M. Scott est faible, mais elle laisse entendre que la libération conditionnelle n’est pas une impossibilité, comme le soutient M. Scott.

 

[62]           De toute façon, je ne peux conclure que, même s’il était impossible que M. Scott obtienne la libération conditionnelle en raison d’une combinaison d’éléments particuliers à son affaire et de l’effet de la LSCMLC, cette situation n’entraînerait pas nécessairement une violation de ses droits reconnus à l’article 7 de la Charte.

 

[63]           La libération conditionnelle est une des façons de purger une peine. Comme la Cour suprême du Canada l’a fait remarquer, « une modification de la façon dont une peine est purgée, qu’elle soit favorable ou défavorable à l’endroit du détenu n’est, en soi, contraire à aucun principe de la justice fondamentale » (Cunningham c. Canada, [1993] 2 R.C.S. 143, à la page 152). De la même façon, le refus d’accorder la libération conditionnelle ne constitue pas nécessairement une privation du droit à la liberté garanti par l’article 7 de la Charte (Cunningham, aux pages 149 à 151).

 

[64]           Compte tenu des faits de la présente espèce, je ne suis pas en mesure de conclure que le refus de la Commission et de la Section d’appel d’accorder la libération conditionnelle totale à M. Scott constitue la privation du droit à la liberté protégée par l’article 7 de la Charte. M. Scott aurait dû savoir dès le début de sa peine qu’il n’obtiendrait peut-être pas la libération conditionnelle combinée avec l’expulsion au R.‑U. tant que la Commission n’aurait pas décidé qu’il ne représentait plus un risque important de récidive avec violence. La possibilité qu’il n’obtienne jamais la libération conditionnelle totale associée à l’expulsion vers le R.‑U. existait depuis le tout début de sa peine.

 

[65]           De toute façon, même si la décision de la Commission constituait la privation du droit à la liberté protéger par l’article 7 de la Charte, cette privation n’était pas contraire aux principes de justice fondamentale prévus par l’article 7. Si le droit à la liberté de M. Scott a été restreint de façon préjudiciable par les décisions de la Commission et de la Section d’appel, il ne l’a été « que dans la mesure où l’on démontre que cela est nécessaire pour la protection du public » (Cunningham, précité, à la page 153).

 

[66]           En outre, la procédure à la suite de laquelle le droit à la liberté de M. Scott a pu être restreint de façon préjudiciable respectait les principes de justice fondamentale. Il a eu le droit de participer à une audience équitable et de se préparer à cette audience; il a été représenté par un avocat, il avait un droit d’appel qu’il a exercé. (Cunningham, ci-dessus, à la p. 153).

 

          E. La Section d’appel a-t-elle pris une décision déraisonnable en confirmant la décision de la Commission?

 

[67]           Le dernier argument de M. Scott est que la décision de la Section d’appel qui confirmait la décision de la Commission était déraisonnable parce que la décision de la Commission était déraisonnable et parce que la Commission avait commis les diverses erreurs alléguées qui ont été examinées ci-dessus.

 

[68]           Comme il a été souligné au paragraphe 19 ci-dessus, la Section d’appel ne peut intervenir que si la Commission a commis une erreur décrite aux alinéas 147(1)a) à e), et uniquement, si cette erreur est déraisonnable.

 

[69]           Compte tenu de mes conclusions selon lesquelles la décision de la Commission n’était pas déraisonnable et la Commission n’a pas commis les diverses erreurs alléguées par M. Scott, il en découle que la décision de la Section d’appel n’était pas déraisonnable, à moins que la Section d’appel ait commis une erreur distincte qui a eu pour effet de rendre sa décision déraisonnable, comme l’omission de motiver suffisamment sa décision.

 

[70]           Comme cela est examiné dans la partie III. B. ci-dessus, la Section d’appel a attentivement examiné le dossier de M. Scott et accordé à celui-ci la possibilité de présenter ses arguments. Elle a ensuite examiné chacun de ces arguments dans des motifs détaillés qui expliquent le fondement de ses diverses conclusions ainsi que sa conclusion générale selon laquelle la décision de la Commission de refuser la libération conditionnelle totale à M. Scott était raisonnable et fondée sur des renseignements suffisants, pertinents, fiables et convaincants.

 

[71]           La Section d’appel a également conclu que la décision de la Commission était la décision la moins privative de liberté compatible avec la protection de la société.

 

[72]           En se fondant sur ce qui précède, j’estime que la décision de la décision de la Section d’appel était correctement justifiée, transparente et intelligible.

 

[73]           Je conclus par conséquent que la décision de la Section d’appel était raisonnable.

 

VII.   Conclusion

[74]           La demande de contrôle judiciaire de M. Scott est rejetée avec dépens.

 

 

 

 

 

JUGEMENT

 

LA COUR ORDONNE QUE la présente demande de contrôle judiciaire soit rejetée avec dépens pour le défendeur.

 

« Paul S. Crampton »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

Claude Leclerc, LL.B.


ANNEXE A

 

DISPOSITIONS LÉGISLATIVES PERTINENTES

 

 

Loi sur le système correctionnel et la mise en liberté sous condition, L.C. 1992,

c. 20

 

Principes

 

101. La Commission et les commissions provinciales sont guidées dans l’exécution de leur mandat par les principes qui suivent :

 

a) la protection de la société est le critère déterminant dans tous les cas;

 

 

b) elles doivent tenir compte de toute l’information pertinente disponible, notamment les motifs et les recommandations du juge qui a infligé la peine, les renseignements disponibles lors du procès ou de la détermination de la peine, ceux qui ont été obtenus des victimes et des délinquants, ainsi que les renseignements et évaluations fournis par les autorités correctionnelles;

 [...]

 

Critères

 

102. La Commission et les commissions provinciales peuvent autoriser la libération conditionnelle si elles sont d’avis qu’une récidive du délinquant avant l’expiration légale de la peine qu’il purge ne présentera pas un risque inacceptable pour la société et que cette libération contribuera à la protection de celle-ci en favorisant sa réinsertion sociale en tant que citoyen respectueux des lois.

 

 

 

 

[...]

 

Présomption

 

128. (1) Le délinquant qui bénéficie d’une libération conditionnelle ou d’office ou d’une permission de sortir sans escorte continue, tant qu’il a le droit d’être en liberté, de purger sa peine d’emprisonnement jusqu’à l’expiration légale de celle-ci.

 

Mise en liberté

 

(2) Sauf dans la mesure permise par les modalités du régime de semi-liberté, il a le droit, sous réserve des autres dispositions de la présente partie, d’être en liberté aux conditions fixées et ne peut être réincarcéré au motif de la peine infligée à moins qu’il ne soit mis fin à la libération conditionnelle ou d’office ou à la permission de sortir ou que, le cas échéant, celle-ci ne soit suspendue, annulée ou révoquée.

 

 

 

Cas particulier

 

(3) Pour l’application de l’alinéa 50b) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés et de l’article 40 de la Loi sur l’extradition, la peine d’emprisonnement du délinquant qui bénéficie d’une libération conditionnelle d’office ou d’une permission de sortir sans escorte est, par dérogation au paragraphe (1), réputée être purgée sauf s’il y a eu révocation, suspension ou cessation de la libération ou de la permission de sortir sans escorte ou si le délinquant est revenu au Canada avant son expiration légale.

 

 

Mesure de renvoi

 

(4) Malgré la présente loi ou la Loi sur les prisons et les maisons de correction, l’admissibilité à la libération conditionnelle totale de quiconque est visé par une mesure de renvoi au titre de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés est préalable à l’admissibilité à la semi-liberté ou à l’absence temporaire sans escorte.

 

Réincarcération

 

 

(5) La libération conditionnelle du délinquant en semi-liberté ou en absence temporaire sans escorte devient ineffective s’il est visé, avant l’admissibilité à la libération conditionnelle totale, par une mesure de renvoi au titre de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés; il doit alors être réincarcéré.

 

 

Exception

 

(6) Toutefois, le paragraphe (4) ne s’applique pas si l’intéressé est visé par un sursis au titre des alinéas 50a) ou 66b) ou du paragraphe 114(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés.

 

 

Exception

 

(7) La semi-liberté ou la permission de sortir sans escorte redevient effective à la date du sursis de la mesure de renvoi visant le délinquant pris, avant son admissibilité à la libération conditionnelle totale, au titre des alinéas 50a) ou 66b) ou du paragraphe 114(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés.

 

 

Corrections and Conditional Release Act, S.C. 1992, c. 20

 

 

Principles guiding parole boards

 

101. The principles that shall guide the Board and the provincial parole boards in achieving the purpose of conditional release are

 

(a) that the protection of society be the paramount consideration in the determination of any case;

 

(b) that parole boards take into consideration all available information that is relevant to a case, including the stated reasons and recommendations of the sentencing judge, any other information from the trial or the sentencing hearing, information and assessments provided by correctional authorities, and information obtained from victims and the offender;

 

...

 

Criteria for granting parole

 

102. The Board or a provincial parole board may grant parole to an offender if, in its opinion,

 

(a) the offender will not, by reoffending, present an undue risk to society before the expiration according to law of the sentence the offender is serving; and

 

(b) the release of the offender will contribute to the protection of society by facilitating the reintegration of the offender into society as a law-abiding citizen.

 

...

 

Continuation of sentence

 

128. (1) An offender who is released on parole, statutory release or unescorted temporary absence continues, while entitled to be at large, to serve the sentence until its expiration according to law.

 

 

 

Freedom to be at large

 

(2) Except to the extent required by the conditions of any day parole, an offender who is released on parole, statutory release or unescorted temporary absence is entitled, subject to this Part, to remain at large in accordance with the conditions of the parole, statutory release or unescorted temporary absence and is not liable to be returned to custody by reason of the sentence unless the parole, statutory release or unescorted temporary absence is suspended, cancelled, terminated or revoked.

 

Deeming

 

(3) Despite subsection (1), for the purposes of paragraph 50(b) of the Immigration and Refugee Protection Act and section 40 of the Extradition Act, the sentence of an offender who has been released on parole, statutory release or an unescorted temporary absence is deemed to be completed unless the parole or statutory release has been suspended, terminated or revoked or the unescorted temporary absence is suspended or cancelled or the offender has returned to Canada before the expiration of the sentence according to law.

 

Removal order

 

(4) Despite this Act or the Prisons and Reformatories Act, an offender against whom a removal order has been made under the Immigration and Refugee Protection Act is ineligible for day parole or an unescorted temporary absence until the offender is eligible for full parole.

 

 

 

Parole inoperative where parole eligibility date in future

 

(5) If, before the full parole eligibility date, a removal order is made under the Immigration and Refugee Protection Act against an offender who has received day parole or an unescorted temporary absence, on the day that the removal order is made, the day parole or unescorted temporary absence becomes inoperative and the offender shall be reincarcerated.

 

Exception

 

(6) An offender referred to in subsection (4) is eligible for day parole or an unescorted temporary absence if the removal order is stayed under paragraph 50(a), 66(b) or 114(1)(b) of the Immigration and Refugee Protection Act.

 

Exception

 

(7) Where the removal order of an offender referred to in subsection (5) is stayed under paragraph 50(a), 66(b) or 114(1)(b) of the Immigration and Refugee Protection Act on a day prior to the full parole eligibility of the offender, the unescorted temporary absence or day parole of that offender is resumed as of the day of the stay.

 

 

 

Canadian Charter of Rights and Freedoms

 

Life, liberty and security of person

 

7. Everyone has the right to life, liberty and security of the person and the right not to be deprived thereof except in accordance with the principles of fundamental justice.

Charte canadienne des droits et libertés

 

Vie, liberté et sécurité

 

7. Chacun a droit à la vie, à la liberté et à la sécurité de sa personne; il ne peut être porté atteinte à ce droit qu'en conformité avec les principes de justice fondamentale.

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        T-929-09

 

INTITULÉ :                                       CECIL SCOTT c. LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

                                                           

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Kingston (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 11 mars 2010

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET

JUGEMENT :                                    LE JUGE CRAMPTON

 

DATE DES MOTIFS

ET DU JUGEMENT :                       Le 5 mai 2010

 

 

COMPARUTIONS :

 

 

Philip K. Casey

 

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Lorne Ptack

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

 

Philip Kenneth Casey

Avocats

Toronto (Ontario)

 

POUR LE DEMANDEUR

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

POUR LE DÉFENDEUR

 

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