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Cour fédérale

 

Federal Court

 


Date : 20100720

Dossier : IMM-6375-09

Référence : 2010 CF 761

[traduction française certifiée non révisée]

Ottawa (Ontario), le 20 juillet 2010

En présence de madame la juge Heneghan

 

 

ENTRE :

SAID ALEM MOUDOODI

demandeur

 

et

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

 ET DE L’IMMIGRATION

défendeur

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               M. Said Alem Moudoodi (le demandeur) sollicite le contrôle judiciaire de la décision de la Section d’appel de l’immigration de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (SAI). Dans sa décision rendue le 16 novembre 2009, la SAI a rejeté l’appel interjeté par le demandeur contre le refus d’un agent des visas d’approuver la demande de résidence permanente de l’épouse du demandeur en tant que personne appartement à la catégorie du regroupement familial, en application de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 289 (la Loi) et du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227 (le Règlement).

 

[2]               Le demandeur est né en Afghanistan en 1964. Il a déménagé en Russie en 1989 et a fréquenté le Collège militaire pendant cinq ans. Il est demeuré en Russie en tant que réfugié jusqu’à son entrée au Canada en septembre, toujours en tant que réfugié. Ce statut lui avait été décerné par le HCNUR et des agents d’immigration canadiens à l’époque où il demeurait au Kirghizstan.

 

[3]               Le demandeur a demandé la résidence permanente au Canada en janvier 2004. À l’époque, il était célibataire, et ce statut matrimonial est indiqué sur sa demande.

 

[4]               En mai 2004, le demandeur s’est marié avec Nazanain Hassan Khail, une citoyenne de l’Afghanistan, au Pakistan. Il n’a pas modifié sa demande de résidence permanente et n’a pas fait part du changement de son état matrimonial.

 

[5]               Le demandeur est entré au Canada en septembre 2004. Il s’est installé à Calgary (Alberta). En février 2006, il a déposé une demande de parrainage de la demande de résidence permanente de son épouse à titre de membre de la catégorie du regroupement familial. Cette demande a été refusée par l’agent des visas le 15 janvier 2008, au motif que le demandeur avait omis de révéler l’existence de son épouse au point d’entrée.

 

[6]               Lors de l’appel devant la SAI, le demandeur a témoigné au sujet de sa visite à l’ambassade du Canada à Moscou avant de quitter le Kirghizstan et de la conversation qu’il avait engagée avec un employé nommé « Gulbara » à l’égard de son mariage. Il a également témoigné au sujet de son entrée au Canada et de son premier contact avec les agents d’immigration au Canada à l’aéroport, où il n’avait pas accès à des services d’interprétation.

 

[7]               La SAI a rejeté l'appel interjeté par le demandeur. Elle a conclu qu’il était crédible, mais que le fait qu’il n’avait pas dévoilé son mariage avant son arrivée au Canada signifie que sa femme n’appartenait pas à la catégorie du regroupement familial en application de l’alinéa 117(9)d) du Règlement. La conversation tenue entre « Gulbara » et le demandeur avant le départ de ce dernier pour le Canada ne constitue pas une renonciation, au sens du paragraphe 117(10) du Règlement, à l’obligation de soumettre l’épouse du demandeur à un contrôle. La SAI a conclu que la décision défavorable de l’agent des visas à l’égard de la demande de parrainage en vue d’obtenir la résidence permanente pour l’épouse du demandeur était étayée par la preuve.

 

[8]               La SAI s’est également penchée sur la question de l’équité procédurale et a conclu que l’absence d’un interprète au moment où le demandeur est arrivé au Canada ne constituait pas un manquement à l’équité procédurale.

 

[9]               Comme l’épouse parrainée n’appartenait pas à la catégorie du regroupement familial, la SAI a souligné dans sa conclusion qu’elle n’avait pas compétence pour envisager d’exercer son pouvoir discrétionnaire pour des motifs humanitaires en application de l’article 65 de la Loi. Toutefois, la SAI s’est expressément prononcée comme suit au sujet de l’existence d’un recours en vertu du paragraphe 25(1) de la Loi, au moyen d’une demande fondée sur des motifs humanitaires :     

[31] Dans le cas où l’appelant désire présenter une demande aux termes de l’article 25, il lui est loisible de le faire nonobstant la présente décision, en plus de se prévaloir de tout recours en matière de contrôle qui lui soit accessible en ce qui concerne la présente décision.

 

[10]           Dans la présente demande de contrôle judiciaire, le demandeur a présenté des observations à l’égard de conclusions de faits déraisonnables qu’aurait tirées la SAI en ce qui a trait à l’omission du demandeur de mentionner son état matrimonial avant son entrée au Canada et au prétendu manquement à la justice naturelle causé par l’absence d’un interprète au point d’entrée. Par suite de l’arrêt de la Cour suprême du Canada dans Dunsmuir c. Nouveau‑Brunswick, [2008] 1 R.C.S. 190, les questions de faits et les questions mixtes de fait et de droit sont susceptibles de contrôle selon la norme de la décision raisonnable. La question du prétendu manquement à l’équité procédurale est susceptible de contrôle selon la norme de la décision correcte; voir Ha c. Canada, [2004] 3 R.C.F. 195.

 

[11]           L'audience devant la SAI était une nouvelle audience. Même si le tribunal a fait mention de la décision antérieure de l’agent des visas, les motifs de la SAI montrent clairement qu’elle a examiné la preuve présentée en reprenant l’affaire depuis le début et qu’elle a tiré ses propres conclusions quant à la crédibilité. Je remarque que ces conclusions étaient favorables, contrairement à celles qu’avait tirées l’agent des visas. Je signale également que la procédure introduite devant la SAI était plus complète que la comparution devant l’agent des visas. Les conclusions favorables quant à la crédibilité que la SAI a tirées, sans lier un décideur subséquent, auront sans doute une certaine valeur de persuasion plus tard.

 

[12]           La SAI a confirmé le refus de la demande du demandeur en vue d’obtenir la résidence permanente pour son épouse, au motif que cette dernière ne pouvait pas être considérée comme une personne appartenant à la catégorie du regroupement familial puisqu’elle n’avait pas fait l’objet d’un contrôle avant que le demandeur ne devienne résident permanent.

 

[13]           L’alinéa 117(9)d) du Règlement est clair. Il prévoit ce qui suit :

(9) Ne sont pas considérées comme appartenant à la catégorie du regroupement familial du fait de leur relation avec le répondant les personnes suivantes

 

[…]

 

d) sous réserve du paragraphe (10), dans le cas où le répondant est devenu résident permanent à la suite d’une demande à cet effet, l’étranger qui, à l’époque où cette demande a été faite, était un membre de la famille du répondant n’accompagnant pas ce dernier et n’a pas fait l’objet d’un contrôle.

9) A foreign national shall not be considered a member of the family class by virtue of their relationship to a sponsor if

 

 

 

 

(d) subject to subsection (10), the sponsor previously made an application for permanent residence and became a permanent resident and, at the time of that application, the foreign national was a non-accompanying family member of the sponsor and was not examined.

 

[14]           Le demandeur a présenté ses arguments à l’égard de l’application du paragraphe 117(10) du Règlement à son cas, soutenant qu’on avait « renoncé » au contrôle dont son épouse devait faire l’objet.

 

[15]           La SAI a refusé ses arguments à cet égard. Elle a déterminé, d’après la preuve dont elle était saisie, que la renonciation n’avait pas été établie. Compte tenu de la preuve, j’estime que cette conclusion est raisonnable. Il n'y a pas d'erreur susceptible de contrôle à cet égard.

 

[16]           La dernière question est de savoir si l’absence d’interprète au point d’entrée constitue un manquement à l’équité procédurale, et justifie, de ce fait, l’intervention de la Cour.

 

[17]           La SAI n’était pas convaincue que l’absence d’un interprète ait causé un manquement à l’équité procédurale. Compte tenu de la preuve qui concerne la connaissance, par le demandeur, du processus qu’il a suivi dans le cadre de sa demande de résidence permanente, j’estime que sa mauvaise compréhension de certaines questions au point d’entrée ne peut pas être entièrement attribuable à l’absence d’un interprète. Je ne suis pas convaincue qu’il y ait eu une absence d’équité procédurale ou un manquement à l’équité procédurale.

 

[18]           Par conséquent, la présente demande de contrôle judiciaire est rejetée et l'affaire ne soulève aucune question aux fins de certification.

 

 


 

JUGEMENT

 

            LA COUR STATUE que la demande de contrôle judiciaire est rejetée et qu’il n’y a aucune question à certifier.

 

 

 

« E. Heneghan »

Juge

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

David Aubry, LL.B.


Cour fédérale

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM-6375-09

 

INTITULÉ :                                       SAID ALEM MOUDOODI

                                                            c.

                                                            LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

                                                            ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Calgary (Alberta)

 

DATE DE L'AUDIENCE :               Le 15 juin 2010

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              La juge Heneghan

 

DATE DES MOTIFS

ET DU JUGEMENT :                       Le 20 juillet 2010

 

 

COMPARUTIONS :

 

Lori O’Reilly

 

POUR LE DEMANDEUR

Rick Garvin

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

O'Reilly Law Office

Calgary (Alberta)

 

POUR LE DEMANDEUR

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

Calgary (Alberta)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

 

 

 

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