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Cour fédérale

 

Federal Court

 

Date : 20101021

Dossier : IMM-5908-10

Référence : 2010 CF 1019

Montréal (Québec), le 21 octobre 2010

En présence de l’honorable juge Pinard

ENTRE :

Edgardo ARITA

Etelvina GOMEZ ARITA

demandeurs

 

et

LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ

PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

défendeur

 

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

  • [1] Les demandeurs demandent le sursis de l’exécution de la mesure de renvoi dont ils font l’objet pour un départ vers le Honduras le 23 octobre 2010.

 

  • [2] La requête est rattachée à la demande d’autorisation et de contrôle judiciaire à l’encontre de la décision d’un agent d’examen des risques avant renvoi (l’agent ERAR) d’effectuer le renvoi des demandeurs sans égard à leur demande d’exemption fondée sur des considérations humanitaires (demande CH).

 

  • [3] La décision de l’agent ERAR a été communiquée aux demandeurs le 17 septembre 2010. Cependant, ce n’est que le 12 octobre 2010 que les demandeurs ont déposé leur demande d’autorisation et de contrôle judiciaire à l’encontre de cette décision. La présente requête en sursis est donc greffée à une demande d’autorisation déposée hors délai.

 

  • [4] Dans leur avis de demande d’autorisation, les demandeurs allèguent que le retard est dû au fait que leur procureur ait été à l’extérieur du Canada du 22 septembre 2010 au 5 octobre 2010. Cette allégation n’est appuyée par aucun affidavit ni aucune preuve objective. Ainsi, les demandeurs ont fait défaut de démontrer qu’il existe une justification pour le retard « pendant toute la période du retard » (voir Beilin et al. c. ministre de l’Emploi et de l’Immigration (1994), 88 F.T.R. 132).

 

  • [5] Dans l’affaire Butt c. Solliciteur général, 2004 CF 1032, le juge Luc Martineau, tel qu’il appert des extraits suivants, a rejeté la requête en sursis pour absence de question sérieuse, les demandeurs n’ayant pas fourni d’explication valable pour le dépôt tardif de la demande d’autorisation et de contrôle judiciaire :

[4] Puisque la prorogation du délai est une condition préalable à l’étude de leur demande d’autorisation, les demandeurs doivent également, pour les fins de la présente demande de sursis, démontrer que la demande de prorogation de délai faite dans leur demande d’autorisation soulève une question grave. Pour ce faire, les demandeurs doivent me présenter des éléments de preuve qui me permettent de conclure à l’existence de motifs valables permettant à la Cour de proroger le délai. À cet égard, la jurisprudence exige que les demandeurs démontrent qu’ils avaient, tout au long de la période visée par la demande de prorogation de délai, l’intention de contester la décision en question, mais qu’ils étaient empêchés de le faire en raison de facteurs hors de leur contrôle : Semenduev c. ministre de l’Emploi et de l’Immigration, [1997] A.C.F. no 70, au paragraphe 2 (1re inst.) (QL). Manifestement, ces conditions ne sont pas remplies dans la présente affaire.

 

[. . .]

 

[9] Puisque les demandeurs n’ont pas réussi à me présenter des éléments de preuve me permettant de conclure que leur demande de prorogation de délai soulève une question sérieuse, il s’ensuit que je suis incapable de conclure que leur demande de contrôle judiciaire soulève une question sérieuse. Puisque la première exigence du critère à trois volets (question sérieuse, préjudice irréparable et prépondérance des inconvénients) énoncé dans l’arrêt Toth c. Canada (M.E.I.) (1988), 86 N.R. 302 (C.A.F.), (1988), 6 Imm.L.R. (2nd) 123 (C.A.F.) n’est pas remplie dans le présent cas, la présente demande de sursis doit être rejetée.

 

 

Voir, au même effet, Dessertine et al. c. ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration (le 14 août 2000), IMM-3931-00; Paredes c. ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration (le 20 octobre 1997), IMM-3889-97; Shellner c. ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration (le 23 avril 1996), IMM-1378-96 et Semenduev, ci-dessus.

 

  • [6] Quoi qu’il en soit, je suis d’avis, après audition des procureurs des parties et révision du dossier, que la demande de sursis est sans mérite, et ce, pour les raisons additionnelles suivantes :

    1. la discrétion des agents de renvoi de différer le renvoi est très limitée. Pour ce qui est notamment des demandes CH, celles-ci ne justifient un report que si elles sont fondées sur une menace à la sécurité personnelle, ce qui n’est pas ici le cas. Les demandeurs n’ont établi l’existence d’aucune considération spéciale pouvant justifier une dérogation à ce principe (voir Wang c. Canada (M.C.I.), [2001] 3 C.F. 682; Baron c. ministre de la Sécurité publique et de la Protection civile, 2009 CAF 81; Adviento c. ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration, 2003 CF 1430 et Presad c. ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration, 2003 FCT 614).

En ce qui concerne les arguments des demandeurs basés sur la Charte canadienne des droits et libertés (la Charte) et sur le droit international, il est bien établi que le renvoi d’une personne après une évaluation complète des risques avant renvoi n’est pas contraire aux articles 7 et 12 de la Charte (voir Suresh c. Canada (M.C.I.), [2002] 1 R.C.S. 3; Chieu c. Canada (M.C.I.), [2002] 1 R.C.S. 84; Al Sagban c. Canada (M.C.I.), [2002] 1 R.C.S. 133). En ce qui concerne l’article 3 de la Convention contre la torture, le juge Martineau a exprimé, dans Sidhu c. ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration, 2004 CF 39, ce qui suit :

[26] L’alinéa 97(1)a) de la Loi renvoie précisément à la notion de torture au sens de l’article premier de la Convention et intègre donc les principes énoncés à l’article 3 de celle-ci. Par voie de conséquence, la réponse à cette question se trouve dans la loi elle-même et la question n’a pas besoin d’être certifiée.

 

Ainsi, les demandeurs ont fait défaut d’établir l’existence d’une question sérieuse dans leur demande sous-jacente d’autorisation et de contrôle judiciaire.

  1. la séparation de la famille invoquée par les demandeurs, dans les circonstances, ne saurait constituer un préjudice irréparable, lequel doit correspondre à un préjudice au-delà de ce qui est inhérent aux conséquences d’une expulsion (voir Melo c. Canada (M.C.I.), [2000] A.C.F. no 403 (1re inst.) (QL)).

Quant aux risques de retour invoqués par les demandeurs, il importe de souligner que leur demande d’asile a déjà été évaluée par la Section de la protection des réfugiés dont la décision négative a été confirmée par cette Cour. En outre, les risques de retour ont été attentivement évalués par l’agent ERAR, lequel a conclu à l’absence de risques personnels pour les demandeurs. Rien n’indique que cette décision ERAR a été contestée devant cette Cour.

  1. dans tout ce contexte, il y va de l’intérêt public d’appliquer le paragraphe 48(2) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. (2001), ch. 27, qui requiert du ministre de renvoyer toute personne visée par une mesure de renvoi exécutoire dès que les circonstances le permettent.

 

  • [7] Pour toutes ces raisons, la demande de sursis des demandeurs est rejetée.


 

ORDONNANCE

 

  La demande de sursis des demandeurs est rejetée.

 

 

« Yvon Pinard »

Juge

 

 

 

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :  IMM-5908-10

 

INTITULÉ :  Edgardo ARITA, Etelvina GOMEZ ARITA c. LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :  Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :  Le 18 octobre 2010

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :  Le juge Pinard

 

DATE DES MOTIFS :  Le 21 octobre 2010

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Stewart Istvanffy  POUR LES DEMANDEURS

 

Thi My Dung Tran  POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Stewart Istvanffy  POUR LES DEMANDEURS

Montréal (Québec)

 

Myles J. Kirvan  POUR LE DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

 

 

 

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