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Cour fédérale

Federal Court

 

Date : 20101028

Dossier : T-600-09

Référence : 2010 CF 1066

[TRADUCTION FRANÇAISE]

 

Action réelle en matière d’amirauté

 

ENTRE :

F.C. YACHTS LTD.

demanderesse

et

 

P.R. YACHT BUILDERS LTD. et

LES PROPRIÉTAIRES ET TOUTES LES AUTRES PERSONNES AYANT UN DROIT SUR L’AUTOYACHT EXPEDITION DE 95 PIEDS, IMMATRICULÉ SOUS LE NUMÉRO QFY95001D810

 

défendeurs

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

Relative au statut d’intervenant

 

LE JUGE PHELAN

 

  • [1] New World Yachts, LLC (New World), Gary Olsen (M. Olsen) et RS&I Inc. (RS&I – la société de M. Olsen), collectivement les intervenants intimés, cherchent à être ajoutés comme parties au présent litige pour ensuite présenter une demande visant à faire lever la suspension d’instance actuelle et solliciter un certain nombre de mesures interlocutoires, y compris une injonction.

 

  • [2] New World était le concepteur du yacht et avait embauché P.R. Yacht Builders Ltd. (PRYB) pour la construction du bateau. M. Olson et RS&I ont remis les fonds pour la construction à New World, qui les a remis ensuite à PRYB. PRYB a embauché la demanderesse (FCY) afin qu’elle lui fournisse des services relatifs à la construction du yacht.

 

  • [3] Dans le cadre de la présente action, FCY a poursuivi PRYB pour rupture de contrat à l’égard des travailleurs et des biens fournis pour la construction du yacht. Le yacht a été saisi, mais, en raison du dépôt d’une lettre de crédit, il y a eu mainlevée de la saisie et, selon l’information communiquée à la Cour, le yacht a été déplacé aux États-Unis. M. Olsen a fourni une lettre de crédit de 1,9 million de dollars; il y a un désaccord sur la question de savoir si elle était liée à une garantie visant le yacht ou à la mainlevée de la saisie du yacht. Quoi qu’il en soit, la lettre de crédit avait trait au yacht.

 

  • [4] Le différend entre FCY et PRYB a été soumis à un arbitrage commercial, et il fait l’objet de procédures devant la Cour suprême de la Colombie-Britannique. Les intervenants proposés ont été des intervenants dans le cadre de l’arbitrage et devant l’instance de la Cour suprême. FCY a eu gain de cause dans le cadre de l’arbitrage. L’instance de la présente Cour a été suspendue.

 

  • [5] Les intervenants proposés ont informé la Cour qu’ils proposaient tout ce qui suit :

a)  annuler le mandat de saisie malgré le fait que la saisie du yacht a déjà été levée;

b)  annuler la décision de l’arbitre en ce qui concerne sa conclusion selon laquelle les droits de FCY aux termes de la lettre de crédit avaient priorité sur l’hypothèque maritime détenue par New World, mais maintenant cédée à RS&I, en dépit du fait que les procédures de contestation de la décision de l’arbitre sont maintenant en cours devant la Cour suprême de la Colombie-Britannique;

c)  ordonner le retour de la sûreté enregistrée par M. Olsen.

  • [6] Les intervenants proposés soutiennent que ce litige n’est qu’un stratagème ou une tromperie entre le père et le fils (respectivement propriétaires de PRYB et de FCY), et que le mandat de saisie a été obtenu par fraude auprès de la Cour.

 

  • [7] Le pouvoir d’accorder le statut d’intervenant est hautement discrétionnaire. Parmi les facteurs qui doivent être examinés figurent les suivants :

    1. La personne qui se propose d’intervenir est-elle directement touchée par l’issue du litige?

    2. Y a-t-il une question qui est de la compétence des tribunaux ainsi qu’un véritable intérêt public?

    3. S’agit-il d’un cas où il semble n’y avoir aucun autre moyen raisonnable ou efficace de soumettre la question à la Cour?

    4. La position de la personne qui se propose d’intervenir est-elle défendue adéquatement par l’une des parties au litige?

    5. L’intérêt de la justice sera-t-il mieux servi si l’intervention demandée est autorisée?

    6. La Cour peut-elle entendre l’affaire et statuer sur le fond sans autoriser l’intervention?

(Voir Syndicat canadien de la fonction publique (Division du transport aérien) c. Lignes aériennes Canadien International Ltée, [2000] A.C.F. no 220 (CAF))

  • [8] La liste des facteurs susmentionnée n’est pas exhaustive, et le retard, le comportement et l’efficacité sont aussi des facteurs éventuellement pertinents.

 

  • [9] Il est un principe établi, en particulier dans les litiges entre parties privées, qu’un intervenant doit prendre l’affaire, les actes de procédure et les questions en litige tels qu’ils ont été présentés par les parties. Les intervenants ne doivent pas s’approprier le différend qui oppose les parties.

 

  • [10] L’argument central des intervenants proposés est que cette affaire est un stratagème. Il est évident qu’ils cherchent à usurper la position de PRYB « s’en prendre à FCY ». Comme ils l’ont dit à plusieurs reprises, c’est FCY qui est visée.

 

  • [11] Les intervenants proposés espèrent clairement soulever des questions dont la portée va bien au-delà de celle des questions mises en cause par les parties. Rien n’indique que la Cour ne peut pas trancher les questions en litige entre les parties sans les intervenants.

 

  • [12] Comme dans le cas d’une prédiction qui s’accomplit elle‑même, la Cour ne peut se prononcer sur les questions que les intervenants proposés souhaitent qu’elle tranche que s’ils sont intervenants parce que les parties ne les soulèveront pas. Or là n’est pas l’objet d’un véritable intervenant.

 

  • [13] Les intervenants proposés n’ont pas expliqué en quoi ils seraient parties prenantes au litige en cours si leurs questions ou requêtes n’étaient pas tranchées en leur faveur.

 

  • [14] L’intervention proposée porte toutes les marques d’un contournement de l’arbitrage et des procédures de la Cour suprême de la Colombie-Britannique. De plus, les intervenants proposés n’ont présenté aucune preuve de fraude à la Cour.

 

  • [15] Les intervenants proposés n’ont pas démontré que leur intervention est le moyen le plus efficace de présenter leurs questions, quelles qu’elles soient, à la Cour.

 

  • [16] En ce qui concerne leur théorie des circonstances, ils n’ont pas expliqué pourquoi ils ne sont pas déjà des défendeurs figurant parmi les personnes décrites comme « les propriétaires et toutes les autres personnes ayant un droit sur l’autoyacht Expedition de 95 pieds, immatriculé sous le numéro QFY95001D810 », ni pourquoi ils ne peuvent pas se faire ajouter comme défendeurs ou procéder à une mise en cause. Si leur théorie était quelque peu fondée, il serait curieux de croire que leurs intérêts seraient mieux contrôlés dans le cadre d’un litige qui n’est qu’un stratagème.

 

  • [17] Pour ces motifs, la Cour est d’avis que le statut d’intervenant n’est pas approprié. Les intervenants proposés cherchent en réalité à être de véritables parties (en supposant qu’ils peuvent établir leur droit à cet égard).

 

  • [18] Par conséquent, la Cour rejette leur requête avec dépens, sous réserve des droits des intervenants proposés tels qu’ils sont énoncés dans l’ordonnance formelle déjà délivrée.

 

 

 

« Michael L. Phelan »

Juge

 

 

Vancouver (Colombie-Britannique)

Le 29 octobre 2010

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :  T-600-09

 

INTITULÉ :  F.C. YACHTS LTD. c. P.R. YACHT BUILDERS LTD. et al.

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :  Vancouver (Colombie-Britannique)

 

DATE DE L’AUDIENCE :  Le 25 octobre 2010

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE :  LE JUGE PHELAN

 

DATE DES MOTIFS :  Le 29 octobre 2010

 

 

COMPARUTIONS :

 

Elyn Underhill

POUR LA DEMANDERESSE

 

W. Gary Wharton

 

POUR LES DÉFENDEURS

 

Rupert M. Shore

Greg Palm

POUR LES INTERVENANTS PROPOSÉS

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Giaschi & Margolis

Avocats

Vancouver (Colombie-Britannique)

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

Bernard & Partners

Avocats

Vancouver (Colombie-Britannique)

POUR LES DÉFENDEURS

 

 

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