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Cour fédérale

 

Federal Court


 

Date : 20101110

Dossier : IMM-1777-10

Référence : 2010 CF 1127

Ottawa (Ontario), le 10 novembre 2010

En présence de monsieur le juge Simon Noël 

 

ENTRE :

 

LUIS HERNANDEZ RENDON

MARIA GUADALUPE RODRIGUEZ GARCIA

LUVIA IVETTE HERNANDEZ RODRIGUEZ

ROCIO ALEJANDRA HERNANDEZ RODRIGUEZ et

JOSE LUIS HERNANDEZ RODRIGUEZ

 

 

 

demandeurs

 

et

 

 

 

CANADA (MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET L'IMMIGRATION)

 

 

 

 

défendeurs

 

 

 

 

         MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire d’une décision de la Commission de l’immigration et du statut du réfugié (« la Commission ») de refuser l’asile aux demandeurs. Sous la plume de la commissaire Viviane Ducheine, les demandes dans les dossiers MA7-07334, MA8-02088, MA8-029089, MA8-02090 et MA8-02091 ont été refusées.

 

[2]               La décision de la Commission s’articule principalement autour de la question de la crédibilité des demandeurs. À ce titre, la Commission a relevé de nombreuses disparités, incongruités et contradictions dans la preuve déposée et les témoignages entendus. Face aux explications jugées insuffisantes, la Commission a estimé les contradictions et omissions importantes, rejetant ainsi les demandes d’asile.

 

[3]               Au stade de la révision judiciaire, la Cour doit cibler la ou les questions déterminantes et adresser la norme de contrôle applicable. En l’espèce, il s’agit d’une question d’appréciation de la crédibilité des demandeurs. Compte tenu que la jurisprudence a fixé une norme de contrôle applicable et que la Cour n’a pas à réévaluer cette question (Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, au para 57), la norme de contrôle applicable lorsqu’il est question de l’appréciation de la crédibilité par la Commission est celle de la décision raisonnable (Mxumalo c. Canada (Ministre de l'Immigration et de la Citoyenneté), 2003 CFPI 413; Wang v. Canada (Minister of Citizenship & Immigration), 2008 CF 1153). Ceci se voit d’ailleurs confirmé par le paragraphe 18.1(4)d) de la Loi sur les Cours fédérales, L.R.C. 1985, c. F-7 et l’interprétation de cet article dans l’affaire Canada (Citoyenneté et Immigration) c. Khosa, 2009 CSC 12.

 

[4]               Dans son analyse, la Cour doit donc considérer les justifications à la décision de la Commission, l’intelligibilité de la décision ainsi que son caractère raisonnable (Dunsmuir, au para 47). Les pouvoirs de la Cour ne s’étendent pas à une réappréciation de la preuve déposée devant la Commission (Zrig c. Canada (Ministre de l’Immigration et de la Citoyenneté), 2003 CAF 178).

 

[5]               Il est important de relever les contradictions et omissions soulevées par la Commission dans sa décision :

a.       Le fait que l’opération policière « Tractor » se serait déroulée à l’insu du supérieur immédiat du demandeur principal.

b.      Une demande d’information (MEX102992F) n’a révélé aucune information sur une opération nommée « Tractor » entreprise vers 2002. Une lettre attestant de ce fait a été envoyée au demandeur le 20 novembre 2008. Aucune explication raisonnable n’a été fournie quant à ce fait déterminant.

c.       Le fait que le demandeur impute au traducteur une erreur sur le nombre de personnes arrêtées dans l’opération « Tractor ». Le demandeur témoigne à l’effet que sept criminels auraient été arrêtés. Son récit indique « cinq ou six » et il attribue cette disparité à une erreur de traduction.

d.      L’omission d’avoir précisé un élément important à l’appui de sa demande dans son récit, notamment qu’il aurait reçu l’ordre de libérer les criminels le jour même de l’opération.

e.       La nature des menaces n’a pas été clairement indiquée dans son FRP, alors qu’à l’audience, le demandeur insiste qu’il s’agit de menaces de mort. Cette disparité est attribuée au traducteur.

f.        Le blâme attribué au traducteur et au fait que son récit ne lui a pas été relu n’a pas été expliqué de manière satisfaisante. Le demandeur n’a pas indiqué au début de l’audience que son récit était incomplet ou qu’il avait quelque chose à ajouter. Les éléments liés à la traduction ont été qualifiés d’ajustement de témoignage.

g.       Son déménagement à Pueblo et au Chiapas ne figure pas dans son FRP, malgré l’exigence d’exhaustivité de ce formulaire.

h.       Le fait que le commandant Gonzalez aurait tenté de retracer le demandeur au Chiapas et que le demandeur l’aurait aperçu sans que le commandant ne le reconnaisse a été qualifié d’ajustement de témoignage.

i.         Les explications des disparités dans le nombre d’assaillants, de sa visite à l’hôpital ainsi que du comportement de sa femme lors de ces évènements n’ont pas été jugées satisfaisantes. La contradiction entre le témoignage de madame Hernandez Rodgriguez et monsieur Hernandez Rendon a été qualifiée d’importante.

j.        Le demandeur s’est prévalu de l’opportunité de modifier son FRP. Toutefois, il n’a pas inclus des informations qui auraient été essentielles à sa demande et a préféré les mentionnées à l’audience. Une inférence négative de ce fait à été tirée par la Commission.

k.      Le demandeur a été confronté à ces contradictions et omissions à l’audience et n’a pas fourni d’explications satisfaisantes aux yeux de la Commission et de cette Cour.

 

[6]               L’appréciation de la crédibilité est une tâche difficile. La Commission est très certainement la mieux placée pour ce faire. La Cour ne peut s’y substituer, encore moins sur la base d’un dossier écrit et sur la base des prétentions présentées à l’audience. Le contexte du contrôle judiciaire est tel que la Cour doit apprécier le dossier dans son ensemble et doit analyser le caractère raisonnable de la décision de la Commission. En l’espèce, la Commission s’est efforcée de soulever les omissions et contradictions importantes. Les demandeurs ont eu l’opportunité lors de l’audience de présenter leurs observations.

 

[7]               La Commission a tranché et a décidé qu’elle était en présence d’ajustements de témoignage et d’omissions importantes. Elle a noté des omissions dans le FRP du demandeur, omissions jugées importantes. Face à ces constats, force est de constater que la Commission a sérieusement analysé la preuve et les témoignages et a rendu une décision justifiée et claire quant à la crédibilité des demandeurs. La décision de la Commission est raisonnable.

 

[8]               La Cour n’est pas satisfaite que la Commission a erré au point de justifier son intervention. Il n’y a donc pas lieu de modifier les conclusions de la Commission ou de renvoyer l’affaire devant un nouveau banc.

 

[9]               Aucune question n’a été soumise pour fins de certification par les parties.

 

JUGEMENT

 

LA COUR ORDONNE ET ADJUGE que :

-          La présente demande de contrôle judiciaire soit rejetée;

-          Aucune question ne soit certifiée.

 

« Simon Noël »

Juge


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

 

DOSSIER :                                        IMM-1777-10

 

INTITULÉ :                                      LUIS HERNANDEZ RENDON ET AL

c.

MCI

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Montréal

 

DATE DE L’AUDIENCE :               5 novembre 2010

 

MOTIFS  :                                         monsieur le juge Simon Noël 

 

DATE DES MOTIFS :                      10 novembre 2010

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Me Claudia Aceituno

 

POUR LA PARTIE DEMANDERESSE

Me Isabelle Brochu

 

POUR LA PARTIE DÉFENDERESSE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Me Claudia Aceituno

Montréal (Québec)

 

POUR LA PARTIE DEMANDERESSE

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

Montréal (Québec)

 

POUR LA PARTIE DÉFENDERESSE

 

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