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Cour fédérale

 

Federal Court

 


Date : 20110110

Dossier : IMM-1757-10

Référence : 2011 CF 13

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 10 janvier 2011

En présence de monsieur le juge Russell

 

 

ENTRE :

 

CESIA MONTOYA MARTINEZ

et

MIRIAM LIVIER REAL RAMIREZ

 

 

 

demandeurs

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ

ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

           MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire présentée en vertu du paragraphe 72(1) de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la Loi), et visant une décision de la Section de la protection des réfugiés (la SPR) de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié datée du 5 mars 2010 (la décision), par laquelle les demandeurs se sont vu refuser la qualité de réfugiés au sens de la Convention ou de personnes à protéger au sens des articles 96 et 97 de la Loi.

 

HISTORIQUE

 

[2]               Les demandeurs sont des citoyens du Mexique et biologiquement des femmes. Cesia Montoya Martinez (Montoya Martinez) se présente comme étant un homme transgenre et Miriam Livier Real Ramirez (Real Ramirez), comme étant une lesbienne. Ils forment un couple et sont venus au Canada en quête de protection contre la persécution et la discrimination assimilable à de la persécution dont ils ont été victimes à titre de femmes, de lesbiennes et de couple transgenre; Montoya Martinez sollicite également la protection à titre d'homme transgenre. Ils désirent vivre comme couple transgenre et avoir des enfants, mais ils affirment ne pas pouvoir le faire au Mexique.

 

[3]               Les demandeurs ont tous deux été victimes de violence familiale. En 1997, Real Ramirez a été témoin, après le fait, du meurtre de sa mère par son père. Pour autant que la demanderesse le sache, le père demeure incarcéré pour ce crime. Montoya Martinez a été victime de sévices de la part de sa mère, de violence verbale de la part de son père et a été finalement banni de sa famille, parce qu’il se comportait et s’habillait comme un homme.

 

[4]               Les demandeurs ont fait connaissance au Mexique et ont commencé à vivre ensemble à Guadalajara en février 2003. En juillet 2005, ils ont commencé à recevoir des menaces par téléphone du père et du beau-frère de Real Ramirez, qui entretiennent des relations amicales. Le beau-frère, qui avait été arrêté pour voie de fait sur sa fille, s’est mis à harceler la sœur de Real Ramirez (son épouse) et leurs enfants après sa libération. La sœur de Real Ramirez a demandé à la police de la protéger contre son mari, mais les agents lui ont dit qu’on ne pouvait rien faire pour elle.

 

[5]               Lors de leurs appels téléphoniques, le père et le beau-frère de Real Ramirez ordonnaient aux demandeurs de mettre fin à leur [traduction] « sale relation ». Les hommes ont d’abord adressé leurs menaces à Montoya Martinez, mais, avec le temps, le père s’est mis à menacer Real Ramirez de l’assassiner à son tour, comme il avait fait pour sa mère. En conséquence, les demandeurs ont déménagé. Le 17 février 2007, le beau-frère de Real Ramirez a agressé physiquement Montoya Martinez. Il a dit aux demandeurs qu’il leur livrait un message du père de Real Ramirez : que c’était ce que des lesbiennes méritaient et que, la prochaine fois, il les tuerait.

 

[6]               Les demandeurs affirment avoir quitté le Mexique pour échapper à la persécution dont ils étaient victimes de la part de ces deux hommes. Ils soutiennent également que, au Mexique, ils ne bénéficiaient d’aucun soutien et qu’il leur fallait cacher la véritable nature de leur relation et leur identité. Ils sont arrivés au Canada le 5 juin 2008 et ont demandé l’asile le 16 juin 2008.

 

[7]               Il avait d’abord été prévu que les demandes des demandeurs seraient entendues par la SPR le 9 avril 2009. À cette date, des pièces ont été consignées en preuve et cotées. Cependant, à la suite d'une requête des demandeurs, le commissaire présidant l’audience s’est récusé. Une instance de novo a débuté le 15 septembre 2009 et les pièces déposées pour l’audience du 9 avril ont été censément consignées en preuve pour l’audience du 15 septembre.

 

LA DÉCISION CONTRÔLÉE

 

[8]               Les demandes des demandeurs ont été jointes. L'audience de la SPR a eu lieu le 15 septembre 2009 et le 12 décembre 2009. Ils étaient représentés par une avocate, et un interprète était présent.

 

[9]               La SPR a rejeté leurs demandes. Sur le fondement de la preuve dont elle disposait, elle a conclu que l’État du Mexique était capable de protéger les demandeurs contre le type de harcèlement et de voies de fait dont ils auraient été victimes au Mexique. Il incombait aux demandeurs de prendre toutes les mesures raisonnables pour se prévaloir de la protection de l’État avant de venir au Canada, mais ils ne l’avaient jamais fait. En l’absence d’une preuve claire et convaincante réfutant la présomption de protection de l’État, la SPR a conclu que les allégations des demandeurs n’étaient pas objectivement raisonnables. Pour ce motif, la SPR a conclu que les demandeurs n’étaient ni des réfugiés au sens de la Convention, ni des personnes à protéger aux termes de la Loi.

 

[10]           Pour parvenir à sa décision, la SPR a formulé plusieurs conclusions importantes. En tout premier lieu, elle a conclu que le Mexique est une démocratie forte. Le fardeau de démontrer l’absence de protection de l’État qui incombe aux demandeurs est proportionnel au degré de démocratie dans l’État et, en l’espèce, est très lourd. Aucun État ne peut garantir une protection parfaite à ses citoyens. Selon Martinez Ortiz c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2006 CF 1365, pour démontrer l’absence de protection de l’État, un demandeur ne doit pas seulement démontrer qu’il s’est adressé à la police et que ses démarches ont été infructueuses. En l'espèce, comme ils craignaient que leur relation fût révélée et fît l’objet de moqueries et qu’ils n’avaient pas confiance dans les autorités, les demandeurs n’ont pas même fait cela.

 

[11]           La SPR a reconnu que la violence familiale, la discrimination fondée sur le sexe et l’homophobie sont des problèmes sérieux au Mexique et que la corruption des fonctionnaires demeure préoccupante. Elle a, toutefois, conclu que le gouvernement mexicain fait « des efforts considérables et concertés » pour s’attaquer à ces problèmes dans tout le pays au moyen d’un ensemble de mesures législatives et par la mise sur pied de programmes appropriés et d’organismes de l’État, que la SPR a décrits. La SPR a également noté les efforts du gouvernement du Mexique pour modifier les mentalités de la société en ce qui a trait à l’orientation sexuelle. Tous ces efforts portent fruits, particulièrement dans les zones urbaines, telles que Guadalajara, où les demandeurs vivaient. La SPR a demandé à Montoya Martinez s’il savait que l’une ou l'autre de ces mesures gouvernementales existait et il a répondu négativement. Quant à d’autres organisations sociales, Montoya Martinez a répondu qu’il n’était pas au courant de l’existence de groupes de femmes qui aident les lesbiennes et que les organisations de gays et de lesbiennes étaient surtout intéressées à organiser des marches et à recueillir des dons pour augmenter le nombre de leurs membres.

 

[12]           La SPR a conclu que, bien que la preuve documentaire comportât des incohérences en ce qui avait trait au caractère adéquat de la protection de l’État, la prépondérance de la preuve donnait à penser qu’il existe un niveau de protection adéquat pour les demandeurs au Mexique. La SPR a accordé plus de poids à cette preuve objective qu’à la preuve des demandeurs, qui avaient un intérêt dans l’issue de l’affaire.

 

LES QUESTIONS EN LITIGE

 

[13]           Les demandeurs soulèvent les questions suivantes :

1.                  La question de savoir si la conclusion de la SPR selon laquelle Montoya Martinez est une femme transgenre plutôt qu’un homme transgenre était erronée.

2.                  La question de savoir si l’évaluation du degré de protection offert par l’État qu’a faite la SPR concernait un groupe protégé erroné et si la SPR a en conséquence omis de prendre en compte des éléments de preuve pertinents sur le manque de protection de l’État.

3.                  La question de savoir si la SPR a violé les principes de justice naturelle et d’équité procédurale en ne tenant pas compte de toute la preuve de fond relative au dossier des demandeurs.

4.                  La question de savoir si la SPR a mal appliqué les Directives concernant la persécution fondée sur le sexe.

5.                  La question de savoir si la SPR a omis de statuer sur l’allégation des demandeurs selon laquelle ils faisaient face à de la discrimination assimilable à de la persécution fondée sur leur identité sexuelle, leur orientation sexuelle et la présentation de leur sexualité.

 

LES DISPOSITIONS LÉGALES

 

[14]           Les dispositions suivantes de la Loi s’appliquent à la présente instance :

Définition de « réfugié »

 

96. A qualité de réfugié au sens de la Convention — le réfugié — la personne qui, craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques :

 

a) soit se trouve hors de tout pays dont elle a la nationalité et ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de chacun de ces pays;

 

b) soit, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle, ne peut ni, du fait de cette crainte, ne veut y retourner.

 

 

 Personne à protéger

 

97. (1) A qualité de personne à protéger la personne qui se trouve au Canada et serait personnellement, par son renvoi vers tout pays dont elle a la nationalité ou, si elle n’a pas de nationalité, dans lequel elle avait sa résidence habituelle, exposée :

 

a) soit au risque, s’il y a des motifs sérieux de le croire, d’être soumise à la torture au sens de l’article premier de la Convention contre la torture;

 

b) soit à une menace à sa vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités dans le cas suivant :

 

(i) elle ne peut ou, de ce fait, ne veut se réclamer de la protection de ce pays,

 

 

(ii) elle y est exposée en tout lieu de ce pays alors que d’autres personnes originaires de ce pays ou qui s’y trouvent ne le sont généralement pas,

 

(iii) la menace ou le risque ne résulte pas de sanctions légitimes — sauf celles infligées au mépris des normes internationales — et inhérents à celles-ci ou occasionnés par elles,

 

(iv) la menace ou le risque ne résulte pas de l’incapacité du pays de fournir des soins médicaux ou de santé adéquats.

 

Personne à protéger

 

(2) A également qualité de personne à protéger la personne qui se trouve au Canada et fait partie d’une catégorie de personnes auxquelles est reconnu par règlement le besoin de protection.

Convention refugee

 

96. A Convention refugee is a person who, by reason of a well-founded fear of persecution for reasons of race, religion, nationality, membership in a particular social group or political opinion,

 

  

 

(a) is outside each of their countries of nationality and is unable or, by reason of that fear, unwilling to avail themself of the protection of each of those countries; or

 

(b) not having a country of nationality, is outside the country of their former habitual residence and is unable or, by reason of that fear, unwilling to return to that country.

 

Person in need of protection

 

97. (1) A person in need of protection is a person in Canada whose removal to their country or countries of nationality or, if they do not have a country of nationality, their country of former habitual residence, would subject them personally

 

(a) to a danger, believed on substantial grounds to exist, of torture within the meaning of Article 1 of the Convention Against Torture; or

 

(b) to a risk to their life or to a risk of cruel and unusual treatment or punishment if

 

 

(i) the person is unable or, because of that risk, unwilling to avail themself of the protection of that country,

 

(ii) the risk would be faced by the person in every part of that country and is not faced generally by other individuals in or from that country,

 

(iii) the risk is not inherent or incidental to lawful sanctions, unless imposed in disregard of accepted international standards, and

 

 

 

(iv) the risk is not caused by the inability of that country to provide adequate health or medical care.

 

 

Person in need of protection

 

(2) A person in Canada who is a member of a class of persons prescribed by the regulations as being in need of protection is also a person in need of protection.

 

 

 

 

 

 

LA NORME DE CONTRÔLE APPLICABLE

 

[15]           La Cour suprême du Canada dans Dunsmuir c. Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 R.C.S. 190 (Dunsmuir), a décidé que l’analyse de la norme de contrôle n’a pas besoin d’être menée dans chaque instance. Plutôt, lorsque la norme de contrôle applicable à une question précise présentée à la cour est bien établie par la jurisprudence, la cour de révision peut adopter cette norme de contrôle. Ce n’est que lorsque cette démarche se révèle infructueuse que la cour de révision doit entreprendre l’analyse des quatre facteurs qui permettent de déterminer la bonne norme de contrôle.

 

[16]           La première question litigieuse est une question de fait et elle est donc susceptible de révision selon la norme de raisonnabilité.

[17]           La deuxième question litigieuse concerne le défaut de la SPR d’appliquer son analyse de la protection de l’État au [traduction] « groupe protégé particulier » désigné dans les demandes d'asile des demandeurs et son défaut consécutif de tenir compte de la preuve pertinente pour une analyse appropriée. La Cour a statué que le défaut d’un tribunal de reconnaître l’un des fondements de la demande d’un demandeur est susceptible de révision selon la norme de raisonnabilité. Voir Martinez Klemp c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2008 CF 901. La Cour a également statué qu’une interprétation fondamentalement fausse du fondement de la demande exige l’annulation de la décision. Voir Adamjee c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1997] A.C.F. no 1815 (QL). De plus, le défaut de mentionner des faits qui fondent une demande constitue également une erreur susceptible de révision. Voir Fainshtein c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), [1995] A.C.F. no 941 (QL).

 

[18]           La quatrième question litigieuse concerne l’application appropriée des Directives concernant la persécution fondée sur le sexe. Il s’agit d’une question susceptible de révision selon la norme de raisonnabilité. Voir Correa Juarez c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2010 CF 890, au paragraphe 12.

 

[19]           Lorsque la Cour effectue le contrôle de la décision selon la raisonnabilité, son analyse tiendra « à la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel, ainsi qu’à l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit. » Dunsmuir, au paragraphe 47. Autrement dit, la Cour devrait intervenir seulement si la décision est déraisonnable en ce sens qu’elle n’appartient pas aux « issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit ».

 

[20]           La troisième question litigieuse concerne l’équité procédurale, particulièrement la question de savoir si tous les éléments de preuve fondamentaux ayant trait à la demande ont été pris en compte par la SPR et la question de savoir si les demandeurs ont eu la possibilité de répondre aux questions et aux doutes de la SPR. Cette question litigieuse est susceptible de révision selon la décision correcte. Voir Suresh c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CSC 1, aux paragraphes 115 et 123.

 

[21]           La cinquième question concerne le défaut de la SPR d’énoncer des conclusions relativement à l’un des motifs invoqués dans les demandes d’asile des demandeurs. Cette question concerne le caractère adéquat de la décision et est à ce titre susceptible de révision selon la décision correcte. Voir Emangongo c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2010 CF 208, au paragraphe 14; Kareem Jabari c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2008 CF 225, au paragraphe 12; Via Rail Canada Inc. c. Office national des transports, [2001] 2 C.F. 25 (C.A.), au paragraphe 22.

 

LES OBSERVATIONS

            Les demandeurs

                        La SPR a commis une erreur quant à la désignation du groupe social particulier

 

[22]           Il ressort clairement de son FRP modifié, de la transcription de l’audience et de son évaluation psychologique que Montoya Martinez se présente comme étant un homme transgenre, et non comme étant une lesbienne ou une femme transgenre. Sa préférence sera respectée et j'utiliserai des pronoms personnels masculins.

 

[23]           La décision contestée fait référence à Montoya Martinez comme s'agissant d'une femme transgenre et utilise des pronoms féminins. Les demandeurs soutiennent que cela ne constitue pas seulement une erreur de fait, mais aussi un problème fondamental dans la décision : la SPR n’a pas bien compris la nature du groupe social particulier dont il est question dans les demandes d'asile et, par conséquent, elle ne peut pas être parvenue à des conclusions fiables en ce qui a trait à l’analyse des risques et avoir tranché l’affaire de manière appropriée.

 

La SPR n’a pas pris en compte la preuve sur la protection offerte par l’État aux hommes et couples transgenres

 

[24]           Les demandes des demandeurs reposaient sur leur appartenance à un groupe singulier : des personnes qui sont biologiquement des femmes dans des relations transgenres, qui peuvent être perçues comme étant des lesbiennes ou comme transgressant les rôles dans la présentation de leur sexualité à titre d'hommes transgenres, et qui font face à la violence familiale masculine et à la discrimination, à la fois comme couple transgenre et comme lesbiennes. La SPR a divisé ce groupe en trois groupes : des femmes aux prises avec la violence familiale; des lesbiennes aux prises avec la violence homophobe; des personnes transgenres. La SPR a considéré la preuve sur la protection de l’État relativement aux groupes un et deux, mais n’a pas considéré la preuve sur la protection de l’État relativement au groupe trois : les hommes transgenres et les couples transgenres. Les demandeurs soutiennent que la SPR a commis une erreur en parvenant à sa conclusion sans avoir jamais considéré le groupe qui était désigné dans leurs demandes.

 

[25]           La SPR a conclu que les Directives concernant la persécution fondée sur le sexe s’appliquaient à la présente affaire parce que Montoya Martinez et Real Ramirez étaient tous deux victimes de violence familiale. Les demandeurs soutiennent, toutefois, que tous les éléments des demandes d'asile des demandeurs relèvent des Directives concernant la persécution fondée sur le sexe, et pas seulement leur allégation ayant trait à la violence familiale. Ces personnes sont lesbiennes, ou sont perçues comme telles. Elles renversent les normes sociales fondées sur le sexe. La SPR comprend de manière fondamentalement erronée leur demande. Elle ne comprend pas ce que signifie pour Montoya Martinez le fait d’être un homme transgenre ou même qu’il en est un. L’application limitée des Directives concernant la persécution fondée sur le sexe qui est faite dans la décision donne à penser que la référence de la SPR à ces directives n’était que déclamatoire et que la SPR n’en comprenait ni l’esprit ni le rôle.

 

La SPR ne disposait pas à l’audience de toute la preuve pertinente

 

[26]           La SPR a reçu des documents le 9 avril 2009 qui ont alors été admis en preuve lors de la première partie de l’audience le 15 septembre 2009. Ces documents étaient cotés « pièce C‑4 ». Dans la décision, toutefois, la SPR note que quelques‑uns de ces documents, auxquels l'avocate a fait référence dans ses observations écrites postérieures à l’audience, manquaient. La SPR, de sa propre initiative, a par la suite admis la preuve manquante – les demandeurs ne savent pas si la preuve a été admise en totalité ou en partie – comme preuve postérieure à l’audience.

 

[27]           Les demandeurs font valoir que la preuve manquante est constituée de 52 pages de [traduction] « preuve documentaire personnelle déposée par les demandeurs à l’appui de leurs demandes », y compris deux lettres d’appui provenant du Mexique qui ont trait à la question de l’homophobie, de la discrimination et de la violence familiale et qui soulèvent la question de la transphobie, ainsi que les évaluations psychologiques des deux demandeurs. Ils soutiennent qu’ils ont déposé la preuve bien à l’intérieur de la période de 20 jours précédant l’audience et qu’ils avaient le droit que toute la preuve soit devant la SPR au cours de l’audience de manière à pouvoir présenter l’ensemble de leurs arguments et à appuyer sur la totalité de la preuve. Quoique la preuve ait été admise après l’audience, les demandeurs ont été privés de la possibilité de répondre et peut-être de convaincre la SPR relativement à toute question que ces documents avaient pu soulever dans l’esprit de la SPR, ce qui aurait pu donner lieu à une décision différente.

 

[28]           Les demandeurs soutiennent que la SPR n’avait aucune raison valable de ne pas admettre la preuve au moment de l’audience. Les actions de la SPR violaient ses propres procédures ainsi que les principes d’équité et de justice naturelle. La solution appropriée est que le tribunal procède à un réexamen. Voir Chandler c. Alberta Association of Architects, [1989] 2 R.C.S. 848.

 

Il était objectivement raisonnable de la part des demandeurs de ne pas solliciter la protection de l’État

 

[29]           Les demandeurs soutiennent que la SPR n’a pas pris en compte la preuve qui démontrait qu’il était raisonnable de ne pas avoir sollicité la protection de l’État au Mexique. Premièrement, ils avaient été témoins des vaines tentatives d’autres victimes pour obtenir la protection de l’État. Par exemple, les autorités n’avaient pas secouru la sœur de Real Ramirez lorsque celle-ci s’était plainte du harcèlement que son mari (le beau‑frère de Real Ramirez) lui faisait subir à elle ainsi qu’à sa famille. Les autorités n’étaient pas non plus intervenues pour secourir la mère de Real Ramirez, qui avait été assassinée. Ces exemples corroborent les rapports de 2008 et de 2009 de Human Rights Watch et d’Amnesty International relativement à l’inefficacité des lois mexicaines et des autorités chargées de leur application en matière de violence familiale. Deuxièmement, les demandeurs ont été témoins de l’humiliation infligée par la police aux gays et aux travestis.

 

[30]           Les demandeurs citent douze affaires dans lesquelles la Cour fédérale et la Cour d’appel fédérale ont rejeté les décisions de la SPR pour le motif que le tribunal n’avait pas tenu compte de la preuve de la violence familiale.

[31]           Selon les demandeurs, la SPR a commis une erreur en concluant que le fait qu’ils n’avaient pas démontré avoir fait des efforts suffisants pour obtenir protection était déterminant dans l’analyse de la protection de l’État. La SPR aurait dû considérer la [traduction] « probabilité réelle » que des efforts donnent lieu à une réponse utile. Voir Ballesteros c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2008 CF 1246; Sanchez c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 1336; Medina c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2008 CF 728; Dominguez Hernandez c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2007 CF 1211, au paragraphe 27. En l’espèce, la SPR a établi une [traduction] « norme arbitraire » relativement à la question de savoir en quoi consistent des efforts suffisants.

 

La SPR n’a pas statué sur l’allégation de discrimination dans sa totalité

 

[32]           La SPR a reconnu que Montoya Martinez n’aurait pas accès aux soins de santé ou à l’emploi au Mexique en raison de la présentation de sa sexualité et de son identité sexuelle. Elle a également reconnu que les demandeurs ne pourraient pas vivre au Mexique comme couple transgenre avec des enfants à eux. Cependant, elle a estimé que « peu d’éléments de preuve » existaient concernant le traitement des personnes transgenres au Mexique. En conséquence, elle a conclu qu'il n'y avait pas de preuve convaincante selon laquelle les personnes transgenres font face à de la discrimination assimilable à de la persécution et ne peuvent pas se prévaloir de la protection de l’État. Par conséquent, la présomption de la protection de l’État n’a pas été réfutée.

 

[33]           Les demandeurs soutiennent que la SPR est parvenue à cette conclusion sans tenir compte du témoignage oral et de la preuve par affidavit de Montoya Martinez, un homme transgenre, ainsi que de trois autres éléments de la preuve documentaire. Le risque de préjudice n’a nullement été étudié.

 

Le défendeur

                        La SPR a considéré le bon groupe social

 

[34]           Bien que la SPR ait utilisé le terme « femme transgenre », il ressort manifestement de la décision qu’elle a bien compris la situation de Montoya Martinez, soit qu’il est biologiquement une femme qui depuis un jeune âge se sent de sexe masculin et se présente désormais comme étant un homme. La SPR a pris en compte les allégations de risques des demandeurs en se fondant sur le bon groupe social, et aucune erreur susceptible de révision n’a été commise.

 

La SPR a évalué la preuve sur la protection offerte par l’État aux hommes et aux couples transgenres

 

[35]           La SPR a fait des commentaires sur le peu d’éléments de preuve dans les documents sur la situation régnant dans le pays en ce qui concerne le traitement des hommes et couples transgenres. Cependant, elle a considéré ces éléments de preuve et a conclu qu’ils ne suffisaient pas à réfuter la présomption de protection de l’État. Les demandeurs n’ont renvoyé à aucun élément de preuve documentaire précis sur les hommes et couples transgenres et n’ont relevé aucun élément de preuve précis qui, selon eux, n’aurait pas été pris en compte.

 

La SPR disposait de toute la preuve

 

[36]           La SPR a expliqué que, après avoir lu les observations écrites de l'avocate des demandeurs, elle s’était rendu compte que certains documents – en particulier, les évaluations psychologiques – n’avaient pas été admis en preuve. L’avocate des demandeurs a été jointe et il s'est révélé qu’elle avait commis elle‑même une erreur en ne faisant pas admettre les documents en preuve lors de l’audience. Elle a corrigé cette erreur le 19 février 2010. La SPR traite explicitement des rapports psychologiques dans la décision. Par conséquent, il est clair que la SPR a disposé de toute la preuve et que les demandeurs n’ont pas été privés de leur droit à s’appuyer sur ces documents.

 

Les Directives concernant la persécution fondée sur le sexe ont été appliquées de manière appropriée

 

[37]           Les Directives concernant la persécution fondée sur le sexe visent à sensibiliser les commissaires de la SPR aux difficultés particulières que les femmes sont susceptibles d'éprouver pour démontrer leurs allégations, en raison des normes sociétales, culturelles et juridiques différentes qui s’appliquent aux femmes dans d’autres pays. Les Directives ne constituent pas une panacée contre toutes les lacunes dans la preuve ou les allégations.

 

[38]           Les demandeurs avaient le fardeau de démontrer le fondement de leur crainte de persécution et l’absence de protection de l’État. À la lumière de la preuve documentaire, la SPR a évalué les allégations des demandeurs à la fois en tant que femmes et personnes perçues comme étant lesbiennes, ainsi que la demande de Montoya Martinez en tant que personne transgenre. Il était raisonnable de la part de la SPR de conclure que les demandeurs pouvaient bénéficier de la protection de l’État et qu’ils n’avaient pas réfuté la présomption de protection de l’État parce qu'ils ne s’étaient jamais adressés à la police.

 

La SPR a examiné la raisonnabilité objective du refus des demandeurs de solliciter la protection de l’État

 

[39]           La prétention des demandeurs selon laquelle la SPR ne s'est pas demandé s’il était objectivement raisonnable de la part des demandeurs de ne pas solliciter la protection de l’État est sans fondement. La SPR a énoncé en détail les raisons pour lesquelles les demandeurs n’avaient pas sollicité la protection de l’État avant de quitter le Mexique. Elle a ensuite procédé à l’examen approfondi de la preuve documentaire favorable et défavorable ayant trait à la violence familiale, à la corruption de la police et à l’homophobie au Mexique. Sur le fondement de cet examen, la SPR a raisonnablement conclu qu’il avait été objectivement déraisonnable de la part des demandeurs de ne pas solliciter la protection de l’État avant de venir au Canada. Le fait que la Cour fédérale et la Cour d’appel fédérale aient rejeté des décisions de la SPR pour le motif que le tribunal n’avait pas tenu compte de certains éléments de preuve n’est pas pertinent dans la présente affaire, où la SPR a tenu compte de la preuve pertinente.

 

L’analyse de la protection de l’État est correcte

 

[40]           Les demandeurs soutiennent que la SPR a commis une erreur en concluant que le défaut de solliciter la protection avait été déterminant dans l’analyse de la protection de l’État. Cet argument est erroné. Dans Samuel c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 762, le juge Maurice Lagacé, de la Cour, a conclu ce qui suit :

 

Quant à la question de savoir si le critère approprié pour évaluer la protection de l’État est celui du caractère adéquat ou du caractère efficace, la Cour estime que le premier critère est le bon. Exiger la pleine efficacité des systèmes policier et judiciaire de pays étrangers serait imposer à d’autres États une norme que nous ne pouvons pas toujours nous-mêmes respecter au Canada. Lorsqu’il y a des éléments de preuve solides démontrant que les systèmes policier et judiciaire d’États démocratiques sont inefficaces au point d’être inadéquats, cela peut permettre de conclure que la protection de l’État n’existe pas.

 

 

[41]           Les demandeurs avaient l’obligation de présenter une preuve « digne de foi » et ayant « valeur probante », ou « claire et convaincante », pour réfuter la présomption de protection de l’État. Voir Carillo c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CAF 94 (Carillo). Le juge Michael Phelan, dans Guzman c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2008 CF 490, au paragraphe 15, a conclu que le demandeur devait établir que la police n’avait pas voulu ou pu enquêter sur la plainte pour qu'il puisse être satisfait au critère énoncé dans Carillo.

 

[42]           En l’espèce, la SPR a agi raisonnablement en concluant que les raisons invoquées par les demandeurs pour n’avoir pas sollicité la protection de l’État, soit les expériences insatisfaisantes des deux autres victimes de violence familiale, ne suffisaient pas pour satisfaire au critère énoncé dans Carillo.

 

La SPR a statué sur l’allégation de discrimination dans sa totalité

 

[43]           Le défendeur n’est pas d’accord avec l’affirmation des demandeurs selon laquelle la SPR avait accepté leur témoignage oral selon lequel Montoya Martinez serait incapable d’avoir accès aux soins de santé et aux possibilités d’emploi au Mexique en raison de son identité sexuelle et de la présentation de sa sexualité et que les demandeurs seraient incapables de vivre comme couple et d’avoir des enfants. Quoique la SPR ne soit pas parvenue à des conclusions défavorables relativement à la crédibilité, elle a relevé que plusieurs États mexicains avaient promulgué en 2007 des lois autorisant les unions homosexuelles et accordant aux époux homosexuels les mêmes droits en matière d’héritage et de prestations de retraite. De plus, le défendeur note que, bien que la SPR n’ait pas fait référence à cette preuve, la ville de Mexico a promulgué une loi accordant tous les droits conjugaux aux couples homosexuels, y compris le droit d’adopter des enfants, en mars 2010. Par conséquent, l’affirmation des demandeurs selon laquelle ils ne pourraient pas se marier légalement et avoir une famille au Mexique n’était pas fondée.

 

[44]           Le défendeur note également que la preuve présentée par Montoya Martinez était qu’il était possible qu’il n’ait pas droit à l’assurance maladie payée par son employeur, et que l’assurance maladie ne prend pas en charge la procédure de changement de sexe. Le défendeur fait valoir que, dans de nombreux pays, les programmes de soins de santé ne prennent pas en charge le processus de changement de sexe et que le programme de santé de l’Ontario n’a commencé à le faire qu’en 2008.

 

[45]           Une vue d’ensemble de la décision montre que la SPR a tenu compte de ces éléments de l’allégation de discrimination des demandeurs, ainsi que de l’intégralité de l’allégation de discrimination, et qu’elle a conclu que la discrimination à laquelle ils faisaient face au Mexique n’équivalait pas à de la persécution.

 

La réponse des demandeurs

 

[46]           L’affirmation du défendeur selon laquelle la SPR a statué sur l’allégation de discrimination assimilable à de la persécution fondée sur l’identité sexuelle, l’orientation sexuelle et la présentation de la sexualité n’est étayée par aucun élément dans la décision. Le défendeur présente plutôt à l’appui sa propre analyse de la preuve documentaire.

 

[47]           Les affirmations du défendeur selon lesquelles la SPR n’a pas accepté le témoignage oral des demandeurs relatif au fait qu’ils n’avaient pas droit à l’assurance maladie et qu’il ne leur serait pas possible de se marier et d’avoir des enfants ne sont également étayées par aucun élément dans la décision. Le défendeur n’a pas réfuté la présomption selon laquelle, faute d’une conclusion défavorable sur la crédibilité, la preuve orale a été acceptée.

 

[48]           De plus, les commentaires du défendeur en ce qui a trait au paiement de la procédure de changement de sexe dans la province de l’Ontario et à la législation récente de la ville de Mexico qui autorise les mariages homosexuels constituent des éléments de preuve qui n’ont pas été présentés à la SPR et qui devraient être supprimés du dossier.

 

[49]           En outre, le défendeur n’a pas traité des trois arguments présentés dans le mémoire des demandeurs selon lesquels :

a)   l’analyse de la SPR relative à la protection de l’État a porté sur le mauvais groupe social;

b)   l’analyse de la SPR relative à la protection de l’État n’a pas pris en compte le groupe des demandeurs dans sa totalité;

c)   la SPR n’est parvenue à aucune conclusion relativement à l’application des Directives concernant la persécution fondée sur le sexe aux demandeurs à titre de personnes lesbiennes ou de lesbiennes perçues ou à Montoya Martinez, à titre d’homme transgenre.

 

[50]           Enfin, quoique la SPR ait déclaré qu’elle n’avait pas d’autre choix que de s’appuyer sur le « peu d’éléments de preuve » ayant trait à la situation régnant au Mexique pour les personnes transgenres, les demandeurs font valoir que la SPR n’a pas tenu compte de la preuve qui portait précisément sur ce point, soit le témoignage des demandeurs eux-mêmes, ainsi que deux autres documents mentionnés dans leur mémoire.

 

Le mémoire additionnel du défendeur

 

[51]           Le défendeur fait valoir que la SPR n’a pas accepté les allégations des demandeurs selon lesquelles ils ne pouvaient pas se marier ou avoir des enfants aux Mexique. La décision relève que deux États mexicains ont promulgué des lois autorisant les unions civiles homosexuelles, qui prévoient des droits en matière d’héritage et de prestations de retraite. L’un de ces États est le district fédéral, que la SPR a qualifié de possibilité de refuge intérieur viable pour les demandeurs.

 

[52]           Le défendeur fait également valoir que la SPR n’a pas accepté l’allégation des demandeurs selon laquelle ils ne pouvaient pas avoir d’enfants au Mexique. La documentation sur le pays présentée en preuve par les demandeurs montre que les couples homosexuels qui désirent fonder une famille au Mexique ou au Canada éprouvent des difficultés semblables : le faible nombre de cliniques de fertilité qui traitent les couples homosexuels et le coût élevé du traitement. Les demandeurs n’ont pas démontré que la difficulté d'obtenir une l’insémination artificielle gratuite, difficulté qui existe aussi bien au Canada qu’au Mexique, équivaut à de la persécution.

 

[53]           L’allégation des demandeurs selon laquelle ils n’auraient pas accès à l’emploi au Mexique n’est pas étayée par leurs antécédents professionnels, leur témoignage et la documentation sur le pays. Il ressort des FRP des deux demandeurs qu’ils ont été continuellement employés durant toute leur vie adulte. Il a été permis à Montoya Martinez de se présenter d’une façon plus masculine en portant des pantalons et des tee-shirts au travail lorsqu’il était employé dans un journal et dans une épicerie. Le défendeur soutient que les demandeurs prévoient avoir des difficultés à trouver des emplois aux Mexique, non à cause de la discrimination ou de persécutions, mais parce qu'ils n'ont pas de recommandations à présenter.

 

[54]           L’allégation des demandeurs selon laquelle ils n’auraient pas accès au logement au Mexique n’est pas étayée non plus par cette même preuve. Dans leurs FRP, des demandeurs déclarent qu’ils ont cohabité au Mexique pendant cinq ans comme couple homosexuel. Montoya Martinez n’a jamais dit qu’on leur avait refusé un logement du fait qu’ils formaient un couple homosexuel. En fait, ils n’ont jamais demandé un logement à titre de couple homosexuel et, par conséquent, leur allégation selon laquelle ils feraient face à de la discrimination est conjecturale. Le défendeur soutient que, selon ce qui ressort de la preuve présentée par les demandeurs eux-mêmes, les demandeurs croyaient qu’ils éprouveraient des difficultés à trouver un bon logement au Mexique en raison d’un manque de fonds et de liens sociaux, deux éléments qui ne constituent pas de la persécution.

 

[55]           Le défendeur soutient en outre qu'il ressort de la preuve de Montoya Martinez qu’on ne lui a jamais refusé des soins de santé parce qu’il est une personne transgenre. Selon l’aveu même du demandeur, il n’a jamais fait de recherches sur les services disponibles pour les personnes qui désirent subir un changement de sexe ou l'ablation de leurs seins. Quoique le demandeur ait conjecturé que de tels traitements seraient très dispendieux, il n’a fait aucune démarche pour obtenir des renseignements à ce sujet.

 

[56]           Le défendeur fait valoir que l’affidavit déposé par Ibtisam Yusuf, l’adjointe juridique de l’avocate des demandeurs, devrait être radié. Premièrement, il ne repose pas sur la connaissance personnelle de la déposante, mais constitue plutôt une tentative [traduction] « à peine voilée » visant à verser au dossier le témoignage de l’avocate des demandeurs ayant trait à la preuve documentaire manquante à laquelle il est fait référence ci-dessus comme étant la pièce C‑4. Il est inapproprié pour l’avocate de déposer dans une procédure relativement à laquelle elle est inscrite au dossier. Voir Ali Akbar c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (9 avril 2008), doc. no IMM-4701-07; Butterfield c. Canada (Procureur général), 2005 CF 396; Addo c. OT Africa Line, 2006 CF 1099.

 

[57]           Deuxièmement, il ne devrait pas être permis à l’avocate des demandeurs d’utiliser cet affidavit pour se mettre à l’abri d’un contre-interrogatoire. L’affidavit constitue une preuve par ouï-dire et, dans la mesure où il en est ainsi, on devrait lui accorder peu de poids, voire aucun. Voir Zaman c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (1997), 131 F.T.R. 54; Samuel c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2010 CF 223, au paragraphe 22.

 

[58]           Troisièmement, contrairement à la jurisprudence acceptée, la souscriptrice d’affidavit présente des arguments juridiques et tire des conclusions de droit et, dans la mesure où elle le fait, ces arguments et ces conclusions devraient être radiés. Voir Deigan c. Canada (Ministre de l’Industrie) (1996), 206 N.R. 195, au paragraphe 2.

 

[59]           En ce qui concerne la preuve documentaire manquante, la pièce C‑4, le défendeur fait valoir qu’il ne fait pas de doute que la SPR a tenu compte de cette preuve documentaire avant de rendre sa décision. Cette preuve a été déposée comme étant la pièce C‑4 le 9 avril 2009, aux fins de l’audience antérieure concernant la même demande d'asile, qui était présidée par un autre commissaire de la SPR. Lorsque ce commissaire de la SPR s’est récusé, les demandeurs ont introduit une procédure de novo. Durant la conférence préparatoire à l’audience le 15 septembre 2009, la SPR a fait référence à la pièce C‑4 et a noté par erreur qu’elle contenait 49 éléments de preuve documentaire relatifs à la situation régnant dans le pays. En fait, elle contenait 49 éléments de preuve relatifs à la situation régnant dans le pays et 10 éléments de preuve documentaire d’une nature plus personnelle. L’avocate des demandeurs n’a pas corrigé l’erreur de la SPR. Lorsque la CISR a ensuite joint l’avocate des demandeurs pour s’enquérir des documents manquants auxquels elle avait fait référence dans ses observations postérieures à l’audience, l’avocate des demandeurs aurait pu demander la réouverture de l'audience ou que la possibilité lui soit donnée de répondre aux doutes éventuels de la SPR à propos de ces documents. Elle n’a pas fait cette demande. Le défendeur soutient que l’avocate des demandeurs a ainsi renoncé au droit de se plaindre d’un manquement à l’équité procédurale.

 

[60]           Ce qui est plus important, toutefois, c’est que la SPR montre clairement qu’elle a tenu compte des documents personnels et en vérité de tous les documents constituant la pièce C‑4 avant de rendre la décision. La SPR fait référence à deux des documents personnels dans sa décision et accepte la preuve contenue dans les dix documents personnels. Le défendeur fait valoir que, comme la SPR a tenu compte de l’intégralité de la pièce C‑4, il n’y a pas eu manquement à l’équité procédurale.

 

ANALYSE

 

[61]           La présente demande soulève (du moins selon mon expérience) des difficultés assez singulières quant à l’identité personnelle et sociale dans le contexte du droit des réfugiés, ainsi que des problèmes liés à l’évaluation de l’expérience subjective des demandeurs et de leurs préoccupations quant à leur avenir sur le fond d’une preuve objective qui ne porte pas directement sur ce que les demandeurs considèrent comme étant leur groupe particulier : des personnes qui sont biologiquement des femmes dans une relation transgenre qui peuvent être perçues comme transgressant les rôles dans la présentation de leur sexualité et qui font face à la violence familiale masculine, ainsi qu’à la discrimination sociale à titre de lesbiennes et de couple transgenre.

 

[62]           Étant donné leur orientation sexuelle et leurs identités sexuelles, réelles de même que perçues, ainsi que leur relation particulière et leurs expériences de vie au Mexique, il est inévitable que les demandeurs se sentent traités différemment des personnes et des couples plus conformistes. Ce traitement différent leur a posé des problèmes et continuera de leur en poser. Cela ne signifie pas toutefois qu’ils sont nécessairement des réfugiés au sens de la Convention ou des personnes requérant la protection du Canada du fait que leur vie au Mexique leur a posé des difficultés et continuera de leur en poser. Ils ont le sentiment qu’ils peuvent vivre de façon plus libre et plus épanouie au Canada et ils ne souhaitent pas retourner à leur vie antérieure au Mexique. À cet égard, du moins, les demandeurs ne sont pas différents des autres personnes et familles qui se présentent devant la SPR. Le fait que le Canada peut leur offrir une vie plus riche et plus libre ne confère pas aux demandeurs la qualité de réfugiés ou de personnes à protéger. La SPR doit travailler avec un ensemble beaucoup plus étroit de paramètres juridiques et il est inévitable que ses conclusions ne plaisent pas à tous ceux qui veulent demeurer au Canada, mais qui ne se qualifient pas juridiquement pour jouir de ce privilège.

 

[63]           La nature particulière de la demande d'asile des demandeurs est reflétée dans la décision contrôlée. La SPR a fait bien attention à ce qu’elle faisait et s’est efforcée autant qu’elle le pouvait de rendre son raisonnement transparent. Il s’agit d’une longue décision qui, à mon avis, révèle une tentative résolue pour répondre aux difficultés singulières inhérentes à la position des demandeurs. Les demandeurs croient que la SPR a commis une erreur ou qu’elle a été déraisonnable à certains égards mais, même si tel était le cas, ce n’était certainement pas faute d’avoir essayé de bien faire.

 

[64]           Les demandeurs ont soulevé diverses questions qui, selon eux, constituent des erreurs susceptibles de révision. Je pense que la meilleure manière de procéder est d’examiner simplement chacune des questions l’une après l’autre.

 

L'erreur de fait

 

[65]           Les demandeurs disent que la SPR a fait référence à Montoya Martinez en n’utilisant que des pronoms personnels féminins et qu’elle a conclu qu’il était une « femme transgenre » alors qu’il se voit et se présente comme étant un homme transgenre. Les demandeurs disent que cette erreur touche au cœur de leur demande, parce qu’elle signifie que la SPR n’a pas compris l’identité personnelle et le groupe social auquel appartient Montoya Martinez, ainsi que la sorte de couple qu’ils forment.

 

[66]           Après avoir examiné la décision et le dossier attentivement, je ne suis pas convaincu que cette faute de terminologie soit importante ou qu’elle reflète quelque incompréhension de la part de la SPR en ce qui a trait à l’identité personnelle de Montoya Martinez, aux problèmes auxquels il fait face dans ses tentatives pour construire une identité sociale ou aux problèmes que les demandeurs éprouvent à titre de couple en raison de leurs identités et orientations particulières.

 

[67]           La SPR s’est donné beaucoup de mal pour décrire les expériences de Montoya Martinez et les craintes que les demandeurs ont en raison de leurs identités particulières en tant que personnes, ainsi qu'en tant que couple.

 

[68]           À mon avis, la décision dans son ensemble et le dossier montrent que la SPR n’a commis aucune erreur à cet égard. Il est, bien sûr, malheureux que la SPR ait parlé de Montoya Martinez au moyen d’une terminologie qui ne reflète pas la notion que le demandeur a de lui-même, mais je ne peux pas dire que cette faute reflète une incompréhension de qui il est ou des risques auxquels il fait face, ou que la SPR n’a pas compris le fondement des allégations des demandeurs, à titre de personnes ou de couple. Je ne décèle aucune erreur susceptible de révision à cet égard.

 

L’équité procédurale – la SPR ne disposait pas de la preuve lors de l’audition de la demande

 

[69]           Au paragraphe 53 de la décision, la SPR elle-même traite de la pièce C‑4 et des documents manquants et de la façon dont elle les a acceptés après l’audience.

 

[70]           L’avocate des demandeurs a tenté de contester le compte rendu de la situation donné par la SPR, au moyen d’un affidavit signé par Ibtisam Yusuf, qui est son assistante. Au fond, cet affidavit n’est qu’une façon pour l’avocate de témoigner et de déposer des arguments par le biais de son assistante et de se soustraire ainsi aux interdictions qui pèsent sur elle de témoigner et, ensuite, de défendre la cause en se fondant sur son propre témoignage. L’auteure de l’affidavit n’a elle‑même aucune connaissance personnelle de quoi que ce soit de pertinent et l’affidavit est plein de ouï-dire et d’arguments. Cela contrevient à l'article 82 des Règles des Cours fédérales, DORS/98‑106, et est incorrect selon la jurisprudence applicable. Voir, par exemple, la décision Ali Akbar c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration) (9 avril 2008), IMM-4701-07, dans laquelle le protonotaire Kevin Aalto traite des interdictions qui empêchent un avocat d’agir à la fois comme témoin et comme avocat.

 

[71]           À mon avis, cet affidavit n’a pas été présenté régulièrement à la Cour et il ne peut donc en être tenu compte.

 

[72]           Quoi qu’il en soit, aucun élément de preuve ne m’a été présenté qui m’incline à penser que la SPR n’a pas considéré l’ensemble des arguments des demandeurs. Les documents en question ont été versés au dossier avant que la décision soit rendue et il y est fait référence dans la décision même. L’avocate des demandeurs était au courant de ce qui s’était produit avant que la décision ne soit rendue. Elle n’a sollicité aucune autre audience relativement aux documents et n’a soulevé aucune question d’équité procédurale. De plus, lorsque l’on examine les dix documents en question, la SPR semble avoir accepté les faits dont il y est question. Il ne m’a été présenté aucun élément de preuve qui m’incline à penser qu’un manquement à l’équité procédurale a eu lieu relativement à cette question ou que la façon dont les documents ont été versés au dossier a défavorisé les demandeurs. Je ne décèle aucune erreur susceptible de révision à cet égard.

 

L’application erronée des Directives concernant la persécution fondée sur le sexe

 

[73]            Les demandeurs soutiennent que la SPR n’a pas procédé à une évaluation de la protection de l’État pour leur groupe particulier et qu’elle a mal appliqué les Directives concernant la persécution fondée sur le sexe. Je traiterai de la question de la protection de l’État plus loin dans les présents motifs.

 

[74]           Il ne m’a été présenté aucun élément de preuve selon lequel, en l’espèce, la SPR n’a pas appliqué de manière appropriée les Directives concernant la persécution fondée sur le sexe. La SPR dit expressément qu’elle les a appliquées et, dans ses motifs, elle utilise des termes qui sont empruntés aux Directives concernant la persécution fondée sur le sexe, lorsqu’elle considère le contexte social et économique de la plainte des demandeurs. En fait, les demandeurs n’ont pas été clairs quant à ce qui, selon eux, aurait dû être fait ou quant à la manière dont les Directives concernant la persécution fondée sur le sexe auraient pu être appliquées différemment dans la présente affaire.

 

[75]           Je ne vois aucun fondement à cette allégation d’erreur susceptible de révision.

 

Le défaut de considérer la question de savoir si les demandeurs faisaient face à de la discrimination assimilable à de la persécution à cause de leur identité sexuelle, leur orientation sexuelle et la présentation de leur sexualité

 

[76]           Les demandeurs soutiennent que, comme la SPR n’est parvenue à aucune conclusion défavorable sur la crédibilité, il faut tenir pour acquis que le commissaire a accepté leur témoignage sur la discrimination. Les demandeurs soutiennent que, la SPR ayant accepté leur témoignage, elle a alors omis de considérer la question de savoir si la discrimination à laquelle ils faisaient face était assimilable à de la persécution.

 

[77]           Tout d’abord, il ne faut pas comprendre l’énumération et la description des « allégations » des demandeurs aux paragraphes 3 à 6 de la décision comme donnant à penser que la SPR acceptait l’évaluation des demandeurs selon laquelle ils avaient fait face et feraient face à de la discrimination et/ou de la persécution. La décision doit être interprétée dans son ensemble.

 

[78]           En examinant la preuve documentaire, la SPR a reconnu que « de nombreuses personnes homosexuelles et bisexuelles [au Mexique] subissent toujours les restrictions d’une société hautement homophobe et qu’elles traversent de longues périodes d’isolement avant de s’intégrer au réseau de la communauté homosexuelle ». Cependant, la SPR met ensuite en balance les difficultés évidentes éprouvées par ceux qui sont gays et bisexuels avec les changements qui se sont produits et avec des preuves de l’acceptation croissante de tous, sans égard à l'orientation sexuelle. « La preuve documentaire indique que l’homosexualité est de plus en plus reconnue et acceptée, et ce, même dans des régions où des lois officielles de lutte contre la discrimination n’ont pas été adoptées. » La SPR traite également de la reconnaissance officielle de l’homosexualité et de la légitimation des unions homosexuelles dans le district fédéral en 2007.

 

[79]           La SPR admet que « l’homophobie existe dans la société mexicaine » et que « la discrimination envers les homosexuels en raison de leur orientation sexuelle continue d’exister dans la société mexicaine [...] ». La SPR conclut, toutefois, que :

la prépondérance de la preuve documentaire indique que les autorités mexicaines déploient des efforts sérieux pour offrir une protection aux homosexuels, éliminer la corruption au sein du service de police, lutter contre la discrimination à l’encontre des homosexuels, lutter contre le crime en général dans la société mexicaine et modifier les attitudes homophobes de la société envers les homosexuels.t

 

 

[80]           La preuve examinée par la SPR ne portait pas expressément sur le groupe particulier, auquel les demandeurs appartiennent, des personnes qui sont biologiquement des femmes dans des relations transgenres qui peuvent être perçues comme transgressant les rôles de présentation de la sexualité, mais, comme les deux parties semblent en convenir, une telle preuve spécifique n’est pas disponible et n’était pas disponible à la SPR. Je pense que la décision montre clairement, sans mettre en doute ce que les demandeurs disent avoir vécu et sans traiter précisément de ce que les demandeurs disent ne pas pouvoir faire au Mexique, que la SPR, en travaillant avec ce dont elle disposait, a examiné le dossier documentaire et a conclu qu’il était possible que les demandeurs doivent faire face à des difficultés et même à de la discrimination, mais qu’ils peuvent vivre au Mexique sans persécution étant donné les changements sociaux et juridiques qui ont eu lieu dans ce pays. Par conséquent, je ne pense pas que l’on puisse dire que la SPR n’a pas considéré la question de la discrimination à laquelle les demandeurs ont fait face et à laquelle ils pourraient faire face s’ils retournaient au Mexique. Pour les motifs énoncés, la SPR ne croyait pas toutefois qu’ils faisaient face à de la persécution. On peut être en désaccord avec cette conclusion et discuter de ce que la preuve révèle au sujet de l’avenir des demandeurs. Cependant, étant donné la preuve présentée par les demandeurs sur la discrimination envers eux, ainsi que la preuve sur la discrimination qui était disponible dans le cartable de documentation, je ne peux pas dire que la SPR ne s’est pas penchée sur cette question ou que ses conclusions n'étaient pas raisonnables au regard de l’arrêt Dunsmuir.

 

La protection de l’État

 

[81]           Les demandeurs soutiennent que l’analyse de la protection de l’État à laquelle la SPR a procédé était erronée et, en particulier, que la SPR n’a pas appliqué cette analyse à leur groupe particulier.

 

[82]           Les deux parties ont reconnu qu'il y avait peu d’éléments de preuve documentaire ayant trait au groupe particulier auquel appartiennent les demandeurs.

 

[83]           Étant donné la preuve documentaire dont la SPR disposait, l’interprétation de la décision dans son ensemble révèle que la SPR a procédé à une analyse très approfondie de la protection de l’État et qu’elle a considéré les facteurs tant favorables que défavorables. La SPR a noté tous les éléments de preuve des demandeurs, ainsi que les raisons pour lesquelles ils ne se sont pas adressés à la police. Subjectivement, les demandeurs croyaient qu’ils ne recevraient pas d’aide, particulièrement en ce qui avait trait aux menaces de violence proférées par le père et le beau‑frère de Real Ramirez, et qu’on les ridiculiserait à cause de leur orientation sexuelle, réelle ou perçue, et de la présentation de leur sexualité. Cependant, ils n’ont jamais fait l’expérience de s’adresser aux autorités et, en ce qui a trait à leurs préoccupations relatives à leur orientation sexuelle et à leur sexe, aucune preuve n’a été présentée au sujet de personnes dans des situations semblables. Encore une fois, on peut être en désaccord avec les conclusions de la SPR, mais je ne crois pas pouvoir dire que l’analyse de la SPR n’appartient pas aux issues raisonnables, envisagées dans Dunsmuir.

 

[84]           Le juge Robert Barnes dans Sanchez c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2008 CF 134, au paragraphe 9, citant le juge Michael Phelan dans Kim c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2005 CF 1126, a déclaré :

[L]e demandeur d’asile ne réfute pas la présomption de l’existence de la protection de l’État dans un pays où la démocratie fonctionne en affirmant simplement qu’il a une « réticence subjective [...] à solliciter la protection de l’État ».

 

 

[85]           Je me rends compte que les demandeurs en l’espèce ont présenté des raisons fondées sur leurs observations de ce qui était arrivé à d’autres, mais je ne pense pas que les conclusions de la SPR en l’espèce, sur le fondement de la preuve dont elle disposait, puissent être considérées comme déraisonnables.

JUGEMENT

 

 

LA COUR statue comme suit :

 

1.                  La demande est rejetée.

2.                  Il n’y a pas de question à certifier.

 

 

« James Russell »

Juge

 


 

 

 

Traduction certifiée conforme

Jacques Deschênes, LL.B.

 

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM-1757-10

 

INTITULÉ :                                       CESIA MONTOYA MARTINEZ et

MIRIAM LIVIER REAL RAMIREZ

                                                            c.

MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 24 novembre 2010

                                                           

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              LE JUGE RUSSELL

 

DATE DES MOTIFS :                      Le 10 janvier 2011

 

 

COMPARUTIONS :   

 

Eugenia Cappellaro Zavaleta                                                     DEMANDEURS

                                                                                               

Maria Burgos                                                                           DÉFENDEUR

 

                            

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :    

 

Eugenia Cappelaro Zavaleta                                                      DEMANDEURS

Avocat

Toronto (Ontario)                                                                    

                                                                                        

Myles J. Kirvan                                                                        DÉFENDEUR

Sous-procureur général du Canada

 

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