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Cour fédérale

 

 

 

 

 

 

 

 

Federal Court

 

Date : 2011004

Dossier : IMM-3905-10

Référence : 2011 CF 132

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 4 février 2011

En présence du juge en chef

 

ENTRE :

 

MASSIMO THOMAS MORETTO

 

 

 

demandeur

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

           MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Le demandeur, un citoyen né en Italie en 1969, est devenu un résident permanent du Canada avant son premier anniversaire de naissance et y habite toujours. Il n’a qu’un très vague souvenir, tout au plus, d’être allé en Italie pendant un mois lors de vacances en famille lorsqu’il était âgé d’environ huit ans.

 

[2]               La vie criminelle du demandeur a débuté en 1997, peu de temps après qu’il eut reçu un diagnostic de trouble bipolaire. Il a commencé à consommer abusivement de la cocaïne épurée après la mort de son père en 2002. Rien ne donne à penser que le demandeur a entraîné d’autres personnes dans la consommation de cocaïne.

 

 

[3]               Depuis 1997, le demandeur a été déclaré coupable de plus de vingt-cinq infractions criminelles telles que l’utilisation d’un véhicule motorisé sans le consentement du propriétaire, la fraude, le non-respect d’une ordonnance de probation, le vol avec effraction, le non-respect d’un engagement, la violation d’une ordonnance de sursis et l’escroquerie. Ses victimes étaient pour la plupart des gens habitant dans des résidences pour personnes âgées. Il a plaidé coupable à chacune des accusations.

 

[4]               Selon le demandeur, sa toxicomanie et ses troubles mentaux ont joué un rôle important dans les infractions criminelles qu’il a commises.

 

[5]               En 2009, une mesure de renvoi pour grande criminalité a été prise contre le demandeur. Son appel relatif à la mesure de renvoi devant la Section d’appel de l’immigration (la commissaire) a été rejeté. La commissaire a également rejeté la demande de sursis à la mesure de renvoi du demandeur. Le sursis avait été demandé pour des motifs d’ordre humanitaire, incluant l’intérêt supérieur de sa fille, née en 2001.

 

[6]               La commissaire a bien compris qu’elle devait considérer les facteurs énoncés dans Ribic c. Canada (Minister of Employment and Immigration), [1985] I.A.B.D. no 4 (QL), modifiés par la Cour suprême du Canada dans Chieu c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CSC 3, et plus particulièrement la durée du séjour du demandeur au Canada, le degré auquel il y est établi et le degré de difficultés que causerait son renvoi en Italie.

 

[7]               Dans son évaluation des facteurs en question, plus particulièrement de celui des difficultés, la commissaire a mal interprété les éléments de preuve présentés.

 

[8]               Premièrement, l’évaluation des difficultés faite par la commissaire ne tenait pas compte du renvoi en Italie auquel le demandeur, pour qui ce pays est inconnu, faisait face. La référence à l’aptitude du demandeur à se « réintégrer » à ce pays donne à penser qu’il retournera dans un endroit familier. En fait, il n’a qu’un très vague souvenir d’y être allé lors de vacances lorsqu’il était un enfant, il y a plus de trente ans.

 

[9]               Deuxièmement, la commissaire n’a pas su tenir compte des conséquences qu’aurait l’absence du soutien de sa famille sur les capacités du demandeur à lutter contre ses problèmes de santé mentale et de toxicomanie. Bien que la commissaire reconnaisse le soutien apporté au demandeur par sa famille, elle infère que ce soutien pourrait être remplacé par celui des membres de sa famille qui habitent en Italie. Cependant, le demandeur ne connaît pas ces personnes qui, selon la commissaire, sont censées remplacer la structure de soutien de sa famille canadienne.

 

[10]           Troisièmement, la commissaire n’a pas tenu compte des conséquences qu’aurait un renvoi sur un individu souffrant de troubles mentaux et de toxicomanie. Elle ne fait ni mention de la présence de la sœur du demandeur à tous les rendez-vous médicaux de celui-ci, ni mention du témoignage du demandeur et de sa sœur à propos du stress excessif que le retour en Italie causera, un facteur qui pourrait faire rechuter le demandeur dans la consommation de cocaïne.

 

[11]           Finalement et surtout, la commissaire n’a pas tenu compte de la preuve non contredite que le demandeur avait une relation positive et affectueuse avec sa fille. La commissaire a omis d’expliquer pourquoi la poursuite de cette relation, au Canada, n’était pas au mieux des intérêts de l’enfant : Hawthorne c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2002 CAF 475, au paragraphe 5.

 

 

[12]           Le demandeur est pratiquement canadien. Il est arrivé au Canada lorsqu’il était âgé de neuf mois. La décision de la commissaire voudrait que le demandeur retourne dans un pays où il n’a jamais vécu et qu’il ne connaît pas. À mon avis, la commissaire a fait une mauvaise interprétation de la preuve dans la présente affaire, qui est exceptionnelle. Elle a tiré ses conclusions en ne tenant pas compte des éléments de preuve présentés, ce qui a mené à un résultat déraisonnable.

 

[13]           La Cour et les parties conviennent qu’il n’y a aucune question grave à certifier.

 


JUGEMENT

 

LA COUR STATUE comme suit :

1.                  La demande de contrôle judiciaire est accueillie;

2.                  La décision de la Section d’appel de l’immigration en date du 31 mai 2010 est annulée et l’affaire est renvoyée pour qu’un autre commissaire rende une nouvelle décision.

 

« Allan Lutfy »

Juge en chef

 

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

Jacques Deschênes, LL.B.

 


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM-3905-10

 

INTITULÉ :                                       MASSIMO THOMAS MORETTO

 

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Vancouver (Colombie-Britannique)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 20 janvier 2011

 

MOTIFS DU JUGEMENT :            LE JUGE EN CHEF

 

DATE DES MOTIFS :                      LE 4 FÉVRIER 2011

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Adrian Huzel

 

POUR LE DEMANDEUR

Kimberly Shane

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Embarkation Law Group

Vancouver

 

POUR LE DEMANDEUR

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

Ministère de la Justice

Vancouver

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

 

 

 

 

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