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Cour fédérale

 

Federal Court

 

 

 


Date : 20110211

Dossier : IMM-1610-10

Référence : 2011 CF 172

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 11 février 2011

En présent de monsieur le juge Kelen

 

 

ENTRE :

 

INDRADEI PARRASRAM DHRUMU

 

 

 

demanderesse

 

et

 

 

 

LE MINISTRE DE LA CITOYENNETÉ ET DE L’IMMIGRATION

 

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

      MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               Il s’agit d’une demande de contrôle judiciaire visant la décision du 16 février 2010 par laquelle un agent d’examen des risques avant renvoi (ERAR) a rejeté la demande de protection présentée par la demanderesse en vertu des articles 96 et 97 de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés, L.C. 2001, ch. 27 (la Loi).

 

LES FAITS

Le contexte

[2]               La demanderesse, une citoyenne du Guyana âgée de 49 ans, est arrivée au Canada le 5 décembre 2003 et elle a demandé l’asile en prétendant craindre d’être persécutée en raison de sa race, de son sexe et de ses opinions politiques, et ce, parce qu’elle est d’origine indo-guyanaise, une femme et membre du Parti populaire progressiste (PPP), le parti au pouvoir.

 

[3]               Le 18 janvier 2005, la Section de la protection des réfugiés de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié (la Commission) a rejeté la demande d’asile de la demanderesse. La Commission a statué que le manque de crédibilité constituait la question déterminante, et elle a exposé de manière détaillée les incohérences et les omissions qui entachaient la preuve de la demanderesse.

 

[4]               La demanderesse a présenté une demande d’ERAR qui a été rejetée le 16 février 2010. C’est la décision de rejeter la demande d’ERAR qui fait l’objet de la présente demande de contrôle judiciaire.

 

La décision à l’examen

[5]               L’agent d’ERAR a rejeté la demande d’ERAR après avoir conclu que la demanderesse ne serait pas exposée à plus qu’une simple possibilité de persécution au sens de l’article 96 de la Loi, et qu’il n’était guère probable qu’elle serait exposée à une menace à sa vie ou à un risque de torture ou de traitements ou peines cruels et inusités au sens de l’article 97.

 

[6]               L’agent a examiné la preuve de la demanderesse qui n’avait pas été soumise dans le cadre de la demande d’asile. Il a aussi procédé à une recherche indépendante sur les conditions au Guyana en lien avec la situation de la demanderesse.

 

[7]               L’agent a examiné si les éléments de preuve soumis par la demanderesse étaient « nouveaux » au sens de l’article 113 de la Loi. L’agent s’est tout particulièrement penché sur les éléments suivants qu’avait produits la demanderesse :

1.                  La preuve documentaire sur les risques d’attaques criminelles courus par la demanderesse en tant que Guyanaise revenant de l’étranger et en tant que femme. L’agent a conclu comme suit au sujet de cette preuve :

[traduction]

L’avocat a prétendu qu’une preuve démontrait que des gangs de criminels prenaient pour cible les Guyanais revenant de l’étranger et que la violence contre les femmes constituait un problème endémique au Guyana, et qu’ainsi la demanderesse risquait d’être la victime de gangs de criminels, d’autant qu’elle serait seule au Guyana, n’y disposant d’aucune protection ni d’aucune aide de la part de sa famille. Cette preuve n’est toutefois pas nouvelle, selon moi, parce qu’elle était normalement accessible pour examen par la Commission. J’estime qu’il ne s’agit pas là d’une preuve de risques nouveaux qui viseraient personnellement la demanderesse et seraient survenus depuis la date de la décision de la Commission.

 

2.                  Les affidavits de deux amis de la demanderesse. L’auteure du premier affidavit était une connaissance de longue date de la demanderesse qui a déclaré avoir agi comme bénévole avec la demanderesse lors des élections générales de 1992 au Guyana. Elle a confirmé le grand nombre d’agressions à caractère racial dans ce pays, et a déclaré que la demanderesse faisait constamment l’objet de menaces de mort et était allée trouver refuge chez elle à plusieurs reprises avant, finalement, de s’enfuir du Guyana. L’auteure de l’affidavit a déclaré être certaine que la vie de la demanderesse serait en danger au Guyana. L’auteur du second affidavit était un ami de longue date de la demanderesse. Il a déclaré qu’en 2003, en raison de son appartenance au PPP, la demanderesse avait été victime de sévices et sa maison avait été saccagée, ce qui avait entraîné son départ. L’auteur de cet affidavit a aussi déclaré que la vie de la demanderesse serait en danger si elle devait retourner chez elle au Guyana. L’agent a conclu que ces affidavits n’étaient pas non plus une preuve nouvelle au sens de l’article 113 de la Loi :

[traduction]

L’avocat a également présenté des affidavits qui ont été rédigés par la demanderesse et deux de ses amis et qui sont effectivement postérieurs à la décision de la Commission. Je conclus toutefois que ces affidavits étaient normalement accessibles pour l’audition de la demande d’asile de la demanderesse. Je conclus qu’il ne s’agit pas de nouveaux éléments de preuve, parce que ces affidavits ne portent que sur la situation de la demanderesse, laquelle situation a déjà été examinée par la Commission. Il n’est question dans ces affidavits d’aucun nouveau risque. En outre, ni la demanderesse ni son avocat n’a expliqué pourquoi ces affidavits n’avaient pas pu être soumis à la Commission. Je relève que les auteurs des affidavits (une proche connaissance et un ami) déclarent avoir été au fait de la situation de la demanderesse et que les renseignements fournis répètent pour l’essentiel ceux communiqués par la demanderesse à la SPR. La demanderesse n’a pas expliqué pourquoi ces affidavits n’auraient pas pu être fournis par leurs auteurs aux fins de l’audience relative à sa demande d’asile.

 

3.                  Cent treize pages de documents supplémentaires sur la situation au Guyana. L’agent a déclaré que cette information générale aidait à évaluer la situation actuelle au Guyana, mais ne constituait pas une preuve de risques nouveaux ou de risques courus personnellement par la demanderesse plutôt que par la population dans son ensemble. L’agent a conclu de la façon suivante :

[traduction]

J’estime que ce ne sont pas là des éléments de preuve nouveaux et qu’aucun d’eux ne contredit les conclusions principales de la Commission.

 

 

[8]               L’agent a conclu que les observations de la demanderesse ne révélaient pas non plus l’existence de nouveaux risques auxquelles la demanderesse aurait été exposée et que la Commission n’aurait pas examinés. L’agent a tiré la conclusion suivante :

[traduction]

Quant aux autres observations présentées par l’avocat, il me semble que la plupart des arguments avancés mettent en cause en réalité le bien-fondé de la décision de la SPR. Ces arguments ne sont pas à-propos, parce qu’ils auraient pu et dû être soumis dans le cadre d’une contestation de cette décision. La demanderesse ne peut, du fait qu’elle n’a pas demandé le contrôle judiciaire de la décision de la SPR, contester celle-ci d’une manière pouvant être qualifiée d’indirecte dans le cadre du processus d’ERAR.

 

 

 

[9]               L’agent a passé en revue le fruit de ses recherches sur la situation au Guyana. Il a conclu que ce pays était une véritable démocratie où les autorités civiles supervisaient habituellement de manière efficace les forces de sécurité et où le gouvernement était en mesure de protéger ses citoyens. L’agent a toutefois reconnu que les forces policières y étaient confrontées à d’importantes difficultés, soit notamment une formation déficiente, un piètre équipement, des restrictions budgétaires, de la corruption, une pénurie de personnel ainsi que la méfiance du public et son manque de coopération. L’agent a conclu, en citant l’arrêt Canada (Procureur général) c. Ward, (1992) 2 R.C.S. 689, que la demanderesse n’avait pas réfuté la présomption de protection de l’État qui s’appliquait en l’espèce.

 

[10]           L’agent a cité la décision Kaybaki c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2004 CF 32, dans laquelle le juge soussigné a déclaré ce qui suit (au paragraphe 11) : « La procédure d’évaluation du risque avant renvoi ne saurait se transformer en une seconde audience du statut de réfugié. Cette procédure a pour objet d’évaluer les nouveaux risques pouvant surgir entre l’audience et la date du renvoi. »

 

[11]           L’agent a conclu comme suit :

[traduction]

[…] En l’espèce, je ne suis pas saisi d’une preuve objective démontrant que la demanderesse serait privée de la protection de la police pour quelque motif que ce soit si elle en faisait la demande. Dans ses observations aux fins de l’ERAR, la demanderesse n’a pas démontré, au moyen d’une preuve claire et convaincante, que l’État ne pouvait pas la protéger. Elle n’a pas réfuté la présomption de protection de l’État. Je reconnais qu’il existe entre les communautés indo‑guyanaise et afro‑guyanaise des tensions qui nuisent à la vie sociale et politique, mais ces risques, toute la population y est exposée. Je conclus que la demanderesse n’a pas établi par une preuve objective suffisante qu’en raison de sa situation personnelle elle était exposée à davantage de risques que les autres citoyens du Guyana, ni que le gouvernement de ce pays ne pourrait pas ou ne voudrait pas lui offrir toute la protection requise. On ne m’a pas convaincu, par conséquent, que je devrais en arriver à une conclusion différente de celle de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié.

 

 

LES DISPOSITIONS LÉGALES ET RÉGLEMENTAIRES PERTINENTES

[12]           L’article 96 de la Loi confère protection aux réfugiés au sens de la Convention :

96. A qualité de réfugié au sens de la Convention — le réfugié — la personne qui, craignant avec raison d’être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un groupe social ou de ses opinions politiques :   

 

a) soit se trouve hors de tout pays dont elle a la nationalité et ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de chacun de ces pays;   

 

b) soit, si elle n’a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle, ne peut ni, du fait de cette crainte, ne veut y retourner.

96. A Convention refugee is a person who, by reason of a well-founded fear of persecution for reasons of race, religion, nationality, membership in a particular social group or political opinion,   

 

(a) is outside each of their countries of nationality and is unable or, by reason of that fear, unwilling to avail themself of the protection of each of those countries; or   

 

(b) not having a country of nationality, is outside the country of their former habitual residence and is unable or, by reason of that fear, unwilling to return to that country

 

[13]           L’article 97 de la Loi accorde pour sa part protection aux personnes qui seraient, par suite de leur renvoi, personnellement exposées à une menace à leur vie ou au risque de torture ou de traitements ou peines cruels et inusités :

97. (1) A qualité de personne à protéger la personne qui se trouve au Canada et serait personnellement, par son renvoi vers tout pays dont elle a la nationalité ou, si elle n’a pas de nationalité, dans lequel elle avait sa résidence habituelle, exposée :   

 

a) soit au risque, s’il y a des motifs sérieux de le croire, d’être soumise à la torture au sens de l’article premier de la Convention contre la torture;   

 

b) soit à une menace à sa vie ou au risque de traitements ou peines cruels et inusités dans le cas suivant :

(i) elle ne peut ou, de ce fait, ne veut se réclamer de la protection de ce pays,

(ii) elle y est exposée en tout lieu de ce pays alors que d’autres personnes originaires de ce pays ou qui s’y trouvent ne le sont généralement pas,

(iii) la menace ou le risque ne résulte pas de sanctions légitimes — sauf celles infligées au mépris des normes internationales — et inhérents à celles-ci ou occasionnés par elles,

(iv) la menace ou le risque ne résulte pas de l’incapacité du pays de fournir des soins médicaux ou de santé adéquats.

97. (1) A person in need of protection is a person in Canada whose removal to their country or countries of nationality or, if they do not have a country of nationality, their country of former habitual residence, would subject them personally   

 

 

(a) to a danger, believed on substantial grounds to exist, of torture within the meaning of Article 1 of the Convention Against Torture; or   

 

(b) to a risk to their life or to a risk of cruel and unusual treatment or punishment if

(i) the person is unable or, because of that risk, unwilling to avail themself of the protection of that country,

(ii) the risk would be faced by the person in every part of that country and is not faced generally by other individuals in or from that country,

(iii) the risk is not inherent or incidental to lawful sanctions, unless imposed in disregard of accepted international standards, and

(iv) the risk is not caused by the inability of that country to provide adequate health or medical care.

 

[14]           Suivant l’alinéa 113a) de la Loi, la personne qui demande un ERAR ne peut présenter que des éléments de preuve survenus depuis le rejet de la demande d’asile :

113. Il est disposé de la demande comme il suit: 

 

 

a) le demandeur d’asile débouté ne peut présenter que des éléments de preuve survenus depuis le rejet ou qui n’étaient alors pas normalement accessibles ou, s’ils l’étaient, qu’il n’était pas raisonnable, dans les circonstances, de s’attendre à ce qu’il les ait présentés au moment du rejet; 

 

[…]

113. Consideration of an application for protection shall be as follows: 

 

(a) an applicant whose claim to refugee protection has been rejected may present only new evidence that arose after the rejection or was not reasonably available, or that the applicant could not reasonably have been expected in the circumstances to have presented, at the time of the rejection; 

 

. . .

 

[15]           Le paragraphe 161(2) du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, D.O.R.S./2002-227, exige que le demandeur désigne ses nouveaux éléments de preuve : 

[…] (2) Il désigne, dans ses observations écrites, les éléments de preuve qui satisfont aux exigences prévues à l’alinéa 113a) de la Loi et indique dans quelle mesure ils s’appliquent dans son cas.

[…]

. . .  (2) A person who makes written submissions must identify the evidence presented that meets the requirements of paragraph 113(a) of the Act and indicate how that evidence relates to them.  

. . .  

 

 LES QUESTIONS EN LITIGE

[16]           La demanderesse soulève les deux questions qui suivent :

1.      L’agent a-t-il omis d’apprécier des éléments de preuve nouveaux, importants et pertinents quant au risque personnel couru par la demanderesse?

2.      L’interprétation par l’agent de ce qui constituait une preuve nouvelle était-elle erronée au plan juridique?

 

LA NORME DE CONTRÔLE JUDICIAIRE

[17]           Dans l’arrêt Dunsmuir c. Nouveau-Brunswick, 2008 CSC 9, [2008] 1 R.C.S. 190, la Cour suprême du Canada a statué, au paragraphe 62, que la première étape, lorsqu’on procédait à l’analyse relative à la norme de contrôle, consistait à vérifier « si la jurisprudence établit déjà de manière satisfaisante le degré de déférence correspondant à une catégorie de questions en particulier »; (se reporter également à Canada (Citoyenneté et Immigration) c. Khosa, 2009 CSC 12, [2009] 1 R.C.S. 339, le juge Binnie, paragraphe 53).

 

[18]           Or il est clairement établi en jurisprudence que les conclusions de fait tirées par un agent d’ERAR appellent la norme de contrôle de la raisonnabilité (se reporter, par exemple, à la décision Girmaeyesus c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2010 CF 53, le juge soussigné, paragraphe 23).

 

[19]           La Cour va s’attarder, en examinant la décision de la Commission en fonction de la norme de la raisonnabilité, « à la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel, ainsi qu’à l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit » (Dunsmuir, précité, paragraphe 47; Khosa, précité, paragraphe 59).

 

[20]           Quant à l’interprétation qu’il convient de donner à l’obligation de présentation d’une preuve nouvelle établie par l’article 113 de la Loi, il s’agit d’une question de droit à laquelle s’applique la norme de la décision correcte (se reporter, par exemple, à la décision Singh c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2009 CF 774, le juge soussigné, paragraphe 13).

 

ANALYSE

1re question –  L’agent a-t-il omis d’apprécier des éléments de preuve nouveaux, importants et pertinents quant au risque personnel couru par la demanderesse?

[21]           La demanderesse soutient que l’agent a omis d’apprécier la preuve nouvelle qu’elle avait présentée. Je ne partage pas cet avis. On l’a dit, l’agent d’ERAR a énuméré et évalué tous les éléments de preuve que lui avait soumis la demanderesse. Celle-ci ne peut désigner aucun élément de preuve qu’elle aurait présenté à l’agent d’ERAR et que ce dernier n’aurait pas expressément pris en compte dans ses motifs.

 

2e question –   L’interprétation par l’agent de ce qui constituait une preuve nouvelle était-elle erronée au plan juridique?

[22]           La demanderesse prétend que l’agent d’ERAR a interprété erronément au plan juridique ce qui constituait une preuve nouvelle au sens de l’article 113 de la Loi. La demanderesse fait valoir la décision Kirindage De Silva c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2007 CF 841, et l’arrêt Raza c. Canada (Citoyenneté et Immigration), 2007 CAF 385, pour soutenir que de nouveaux éléments venant éclaircir ou confirmer un risque redouté pouvaient être considérés constituer une nouvelle preuve.

 

[23]           Dans l’arrêt Raza, la Cour d’appel fédérale s’est penchée sur le sens de l’alinéa 113a) de la Loi. Elle a déclaré au paragraphe 13 de l’arrêt que le critère de la « nouveauté » mettait en cause trois facteurs : la preuve quant à la situation en cours dans le pays de renvoi ou à un fait postérieur à l’audition de la demande d’asile; la preuve d’un fait qui n’était pas connu du demandeur d’asile au moment de cette audition; la réfutation d’une conclusion de fait tirée à cette audition.

 

[24]           Dans la décision De Silva, le juge suppléant Teitelbaum a énoncé comme suit (au paragraphe 21) l’erreur qu’avait commise l’agente dans cette affaire :

L’agente a exclu ces documents en se fondant uniquement sur le fait qu’ils avaient trait à des allégations qui avaient été soulevées devant la Commission. Il ne s’agit pas là du critère applicable aux nouveaux éléments de preuve qui est formulé dans l’alinéa 113a).

 

 

 

[25]           En l’espèce, l’agent a exclu la preuve non parce qu’elle avait trait à des allégations de risque soulevées devant la Commission, mais plutôt parce qu’elle ne révélait l’existence de rien de nouveau quant à un risque quelconque exposé devant la Commission, d’aucun nouveau risque couru par la demanderesse ni d’aucun fait nouveau qui n’était pas connu de la demanderesse au moment de l’audition de la demande d’asile. Il a en outre conclu qu’aucun des éléments de preuve n’était parvenu à réfuter les conclusions de fait tirées par la Commission.

 

[26]           La demanderesse cite les propos suivants du juge Teitelbaum, au paragraphe 17 de la décision De Silva, quant à la question de savoir quand un agent d’ERAR peut prendre en considération des éléments de preuve nouveaux aux fins de l’article 113 de la Loi :

[…] cela ne veut pas dire que l’on ne peut pas prendre en considération des éléments de preuve nouveaux concernant d’anciens risques […] L’agent d’ERAR doit d’abord vérifier si le document est visé par l’un des trois volets de l’alinéa 113a) […]

 

Les trois volets en cause sont les suivants :

 

1.                  les éléments de preuve nouveaux sont survenus depuis le rejet de la demande par la Commission;

2.                  ces éléments n’étaient pas normalement accessibles (lors de l’audience de la Commission);

3.                  il n’était pas raisonnable de s’attendre à ce que ces éléments aient été présentés lors de l’audience devant la Commission.

 

 

[27]           En l’espèce, les éléments de preuve nouveaux présentés à l’agent d’ERAR étaient normalement accessibles lors de l’audience de la Commission et ils auraient pu être soumis à la Commission. Le fait que des éléments de preuve nouveaux corroborent des faits, qu’ils contredisent des conclusions de la Commission ou qu’ils précisent la preuve dont celle-ci était saisie ne fait pas d’eux une preuve nouvelle au sens de l’article 113 de la Loi. Si tel était le cas, le demandeur pourrait diviser sa preuve et présenter à l’étape de l’ERAR des éléments qui auraient pu l’être devant la Commission. Or c’est précisément là ce que l’article 113 de la Loi vise à empêcher, comme la Cour d’appel fédérale l’a confirmé dans l’arrêt Raza, précité.

 

[28]           La demanderesse s’appuie également sur le passage suivant de la décision Komahe c. Canada (Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration), 2006 CF 1521, paragraphe 28 :

[…] il lui était évidemment impossible [au demandeur] de prendre des mesures pour présenter les documents à la Commission avant qu’elle rende sa décision.

 

En l’espèce, tous les éléments de preuve de la demanderesse présentés à l’agent d’ERAR auraient pu être soumis à l’audience devant la Commission.

 

[29]           Il est donc manifeste pour la Cour qu’en l’espèce l’agent d’ERAR a correctement interprété, en regard de la preuve produite par la demanderesse dans le cadre de sa demande, les exigences prévues à l’alinéa 113a) de la Loi.

 

[30]           Rien ne permet par conséquent à la Cour d’intervenir quant aux conclusions tirées par l’agent d’ERAR.

 

LA CERTIFICATION D’UNE QUESTION

[31]           Les deux parties ont informé la Cour que la présente affaire ne soulevait aucune question grave de portée générale qui devrait être certifiée en vue d’un appel. La Cour est du même avis.

 


JUGEMENT

 

LA COUR STATUE que :

La présente demande de contrôle judiciaire est rejetée.

 

 

 

« Michael A. Kelen »

Juge

 

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

 

Jean-François Martin, LL.B., M.A.Trad.jur.


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM-1610-10

 

INTITULÉ :                                       Indradei Parrasram Dhrumu

                                                            c.

                                                            Ministre de la Citoyenneté et de l’Immigration

 

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 2 février 2011

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              LE JUGE KELEN

 

DATE DES MOTIFS :                      Le 11 février 2011

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Joel Etienne

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

Tessa Kroeker

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Gertler, Etienne LLP

Toronto (Ontario)

 

POUR LA DEMANDERESSE

Myles J. Kirvan,

Sous-procureur général du Canada

Toronto (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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