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Cour fédérale

Federal Court

 

 


Date : 20110222

Dossier : T-1630-10

Référence : 2011 CF 212

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Vancouver (Colombie-Britannique), le 22 février 2011

En présence de monsieur le juge Shore

 

ENTRE :

 

AQUASMART TECHNOLOGIES INC.

 

 

 

demanderesse

 

et

 

 

 

ROBERT KLASSEN

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

 

           MOTIFS DE L’ORDONNANCE ET ORDONNANCE

 

I. Introduction

[1]               Par la présente action, la demanderesse demande réparation en application de la Loi sur les marques de commerce pour la contrefaçon de sa marque de commerce déposée AQUASMART & Design résultant de l’emploi non autorisé par le défendeur de la marque de commerce ou du nom commercial AQUASMART.

 

[2]               La demanderesse est propriétaire de la marque déposée AQUASMART & Design employée en liaison avec divers produits relatifs à l’eau, notamment des purificateurs d’eau. La demanderesse utilise sa marque de commerce pour des produits distribués dans l’ensemble du Canada au moyen de commandes par correspondance téléphoniques, postales et par Internet et grâce à un réseau national de détaillants. La demanderesse utilise sa marque depuis près de 26 ans (à tout le moins depuis le 1er août 1991). Une valeur d’achalandage et de renommée se rattache pour la demanderesse à la marque vu que, de longue date, celle-ci fait l’objet d’une vaste publicité et d’un large emploi.

 

[3]               Les activités du défendeur, pour sa part, consistent à vendre à domicile des systèmes de purification d’eau en Ontario. Sans y avoir été autorisé par la demanderesse, le défendeur a adopté et utilisé en liaison avec ses activités et les systèmes de purification qu’il vend la marque de commerce ou le nom commercial AQUASMART, qui crée de la confusion avec la marque de commerce de la demanderesse. Le défendeur soutient avoir changé de nom commercial, mais il est toujours nécessaire dans la présente action de traiter de l’emploi antérieur et éventuel par lui de la marque ou du nom commercial créant de la confusion  

 

 

[4]               Le défendeur a utilisé une marque de commerce ou un nom commercial créant de la confusion avec la marque de commerce de la demanderesse, et il est ainsi réputé avoir violé le droit de celle-ci à l’emploi exclusif de sa marque de commerce déposée, en contravention de l’article 20 de la Loi sur les marques de commerce, L.R.C. 1985, ch. T-13. Par la présente requête, la demanderesse ne cherche pas à obtenir réparation quant aux éléments allégués dans la déclaration qui ont trait aux alinéas 7b) et c) et à l’article 19 de la Loi sur les marques de commerce.   

[5]               La Cour partage les vues exprimées par la demanderesse et, au vu de la preuve, se range à sa position. Il s’agit d’un cas où il convient de rendre jugement par défaut. Après s’être fait signifier à personne la déclaration, le défendeur n’a pas déposé de défense dans le délai prescrit. L’avocat de la demanderesse, M. Jeffrey W. Robinson, a produit avec grande compétence au nom de sa cliente une preuve qui permet à la Cour de conclure en la responsabilité du défendeur, selon la prépondérance de la preuve, et qui démontre le droit de la demanderesse à la réparation sollicitée. La demanderesse n’a pu fonder sur un ensemble élaboré de faits, en raison de la non-participation du défendeur à la présente instance, son droit à un montant précis de dommages-intérêts. La demanderesse a par conséquent suggéré à la Cour de fixer un montant forfaitaire de dommages-intérêts en fonction de l’échelle habituellement utilisée par la Cour fédérale dans des situations semblables.     

 

II. Le contexte

A. Activités et renommée de la demanderesse liées à la marque de commerce AQUASMART

[6]               La demanderesse est propriétaire de la marque de commerce AQUASMART & Design (la marque déposée), enregistrée le 30 décembre 1994 sous le numéro TMA437,536 relativement à divers produits liés à l’eau, notamment des purificateurs d’eau (les marchandises de la demanderesse). La marque déposée est reproduite ci-après :

AQUASMART & DESIGN

(affidavit de Reidel, pièce A; affidavit de Testa, paragraphe 4, pièce A)

 

[7]               Depuis 1991 environ, la demanderesse ou Emily Testa Marketing Ltd., la société qu’elle a remplacée, vendent au Canada les marchandises de la demanderesse. Depuis au moins 1991, la marque déposée est apposée dans le cours normal des affaires sur les marchandises de la demanderesse et sur les colis servant à la distribution de ces marchandises, au moment du transfert de possession de celles-ci. Depuis août 1997, en outre, la demanderesse exerce ses activités sous le nom commercial d’Aquasmart Technologies Inc. (le nom commercial de la demanderesse) (affidavit de Testa, paragraphes 4, 6 et 7, pièces B et C).

 

[8]               La demanderesse vend ses produits liés à l’eau aux acheteurs-consommateurs. Elle les leur vend directement au moyen de commandes téléphoniques depuis au moins 1991. Elle les vend également à sa propre salle de vente de détail de Burnaby, en Colombie-Britannique, et par l’entremise de détaillants dans chacune des provinces canadiennes (affidavit de Testa, paragraphes 8 à 10, pièce D).   

 

 

[9]               Depuis au moins septembre 1997, la demanderesse vend ses produits et en fait la promotion sur le site Web www.aquasmart.com. Depuis lors, la marque déposée et le nom commercial Aquasmart ont toujours été exposés sur le site Web, qui dispense de l’information sur les produits liés à l’eau de la demanderesse. Depuis juin 2009, en outre, les consommateurs peuvent acheter en ligne ces produits sur le site Web de la demanderesse (affidavit de Testa, paragraphe 11, pièce E).     

 

[10]           La demanderesse n’a jamais vendu ses produits à domicile, ni soumis l’eau de clients éventuels à des tests dans le cadre, notamment, d’une présentation des produits (affidavit de Testa, paragraphe 12).      

 

 

[11]           Depuis 1985, la demanderesse promeut et vend ses produits lors de foires commerciales axées sur le marché de la santé et du mieux-être. En 2010, la demanderesse a utilisé un stand pour promouvoir et vendre ses produits dans neuf foires commerciales tenues en Colombie-Britannique, au Manitoba et en Ontario, ce qui est représentatif de sa participation à des foires au fil des ans (affidavit de Testa, paragraphe 13, pièce F).     

 

[12]           Depuis 1990, la demanderesse fait paraître une publicité dans chaque numéro mensuel de l’édition canadienne du magazine Alive, la plus importante revue dans le domaine de la santé et du mieux-être au Canada. La demanderesse a dépensé plus de 18 000 $ pour faire sa publicité dans ce magazine en 2010. Plus de 500 000 lecteurs par mois lisent actuellement le magazine Alive (affidavit de Testa, paragraphes 14 et 15, pièces G, H et I). 

 

 

[13]           Au fil des ans, la demanderesse a vendu au Canada un très grand nombre de ses produits liés à l’eau sur lesquels était apposée la marque déposée. Lors de chacune des cinq dernières années, la demanderesse a vendu directement ses produits à plus de 10 000 clients individuels. En particulier, la demanderesse a effectué de nombreuses ventes dans les environs de St. Catharines, en Ontario.  Dans la seule année 2010, la demanderesse a vendu directement ses produits à plus de 60 clients ayant comme indicatif régional le 905, soit celui qui recouvre cette ville (affidavit de Testa, paragraphes 16 et 17).

 

[14]           La demanderesse a bonne réputation au plan commercial et quant à la qualité de ses services, et ses clients lui adressent fréquemment des témoignages d’appréciation (affidavit de Testa, paragraphe 19, pièces E et J).   

 

[15]           La demanderesse n’a accordé au défendeur ni licence ni autorisation lui permettant d’utiliser la marque déposée, le nom commercial de la demanderesse ou quelque marque de commerce ou nom commercial que ce soit qui comporte le mot « Aquasmart » ou de faire une telle marque ou un tel nom (affidavit de Testa, paragraphe 43).   

 

 

B. Utilisation du nom AQUASMART par le défendeur et activités de celui-ci menées sous ce nom  

[16]           Le défendeur est un particulier qui a fait enregistrer la raison sociale AQUASMART en vue de l’exercice par une entreprise individuelle en Ontario d’activités de [traduction] « VENTE DE PRODUITS POUR LE TRAITEMENT DE L’EAU ET DE PRESTATION DE SERVICES CONNEXES » (affidavit de Reidel, pièce B).       

 

[17]           Le défendeur a exploité à St. Catharines, en Ontario, une entreprise offrant en vente, vendant et installant des systèmes de purification d’eau (affidavit de Brenchley, paragraphes 2 à 6; affidavit de McKeown, paragraphes 7, 8 et 10 à 14, pièces C à E; affidavit d’Elizabeth Jansen, paragraphes 7, 10 et 11, pièces C et E).      

 

[18]           Par l’entremise de ses employés, le défendeur a offert en vente et vendu des systèmes de purification d’eau au Canada en liaison avec la marque de commerce ou le nom commercial AQUASMART. Pour son compte, ses employés ont ainsi présenté à des gens des cartes professionnelles, de la documentation sur les produits et des factures de vente sur lesquelles était apposée la marque de commerce ou le nom commercial AQUASMART. Le défendeur a également utilisé la marque AQUASMART en la faisant figurer sur les factures de ses produits vendus (affidavit de Brenchley, paragraphes 2 à 4, pièces A, B et C; affidavit de McKeown, paragraphe 11).    

 

 

[19]           Verbalement, les employés du défendeur ont également fait allusion à la marque de commerce ou au nom commercial AQUASMART pour désigner tant l’entreprise du défendeur que ses systèmes de purification d’eau offerts en vente (affidavit de Brenchley, paragraphe 3; affidavit de McKeown, paragraphe 11).

 

[20]           Par l’entremise de ses employés, le défendeur a également installé des systèmes de purification d’eau au Canada en liaison avec la marque de commerce AQUASMART. Pour son compte, ses employés ont notamment remis aux acheteurs de systèmes de purification d’eau, lors de leur installation, des certificats de garantie, des bulletins et des lettres du défendeur où était apposée la marque de commerce AQUASMART (affidavit de Brenchley, paragraphe 6, pièces D, E et F).

 

[21]           Sur les véhicules utilisés par les employés du défendeur pour installer ses systèmes de purification d’eau, des signes ont été inscrits comportant le nom commercial AQUASMART (affidavit de McKeown, paragraphe 17).

 

[22]           Le défendeur a utilisé le nom commercial AQUASMART pour désigner son entreprise dans des offres d’emploi affichées sur Internet (affidavit de Testa, pièces O, Q, R et W; affidavit de McKeown, pièce A; affidavit d’Elizabeth Jansen, pièce A). 

 

[23]           Des enseignes comportant le nom commercial AQUASMART ont été affichés à la vue du public au lieu d’affaires du défendeur (affidavit de Rene Jansen, paragraphes 6 et 8; affidavit d’Elizabeth Jansen, paragraphe 14).

 

[24]           L’entreprise du défendeur a été inscrite sous le nom commercial AQUASMART dans l’annuaire téléphonique en ligne canada411.ca. Lorsqu’on appelait à l’un des numéros de téléphone de l’entreprise du défendeur, le message enregistré faisait état du nom d’AQUASMART (affidavit de Testa, paragraphes 34, 35 et 40).

 

[25]           On peut entendre ou voir le nom commercial ou la marque de commerce «  Aquasmart » dans les annonces publicitaires de l’entreprise du défendeur affichées sur YouTube. Le défendeur figure lui-même dans ces vidéos, et il désigne sous le nom d’ [traduction] « eau Aquasmart » l’eau traitée au moyen des systèmes de purification d’eau de son entreprise. Dans l’une des vidéos, on dit que le défendeur est [traduction] « Robert Klassen, président et PDG d’Aquasmart ». On mentionne notamment dans la légende accompagnant cette vidéo sur YouTube que les [traduction] «  systèmes de purification de l’eau Aquasmart constituent le seul moyen d’éliminer tous les types divers de bactéries et de substances chimiques que contient l’eau potable municipale » (affidavit de Testa, paragraphes 37 et 38, pièces T, U et V).

 

C. Confusion effective découlant des activités du défendeur 

[26]           L’emploi par le défendeur du nom AQUASMART a conduit divers membres du public à croire à tort que le défendeur et son entreprise étaient liés à la demanderesse. Des acquéreurs insatisfaits de systèmes de purification d’eau du défendeur ont communiqué avec la demanderesse, de même que d’anciens employés du défendeur estimant ne pas avoir été traités équitablement par celui-ci, et le père d’un éventuel employé dont l’entreprise du défendeur éveillait la méfiance; toutes ces personnes pensaient que le défendeur et son entreprise étaient liés à la demanderesse (affidavit de Testa, paragraphes 20 à 22, 24 à 26, 37 et 40 à 42, pièces K, L, N et X; affidavit de Brenchley, paragraphes 10 à 13; affidavit de Rene Jansen, paragraphes 3 à 5).    

 

D. Contrefaçons persistantes par le défendeur de la marque de commerce de la demanderesse   

[27]           Le défendeur s’est montré agressif lorsque le président de la demanderesse s’est plaint pour la première fois de contrefaçons par lui de sa marque de commerce. Lorsque toutefois l’avocat de la demanderesse a communiqué avec lui le 7 juillet 2010, le défendeur a reconnu qu’il lui faudrait consulter un avocat et apporter des modifications au nom de son entreprise. Le 29 juillet 2010, l’avocat de la demanderesse a de nouveau communiqué avec le défendeur, qui lui a répondu qu’il allait voir un avocat et qu’il avait réservé un nouveau nom pour son entreprise. Le défendeur a par la suite refusé de prendre ou de retourner les appels de l’avocat de la demanderesse jusqu’à ce que lui ait été signifiée la déclaration dans la présente action (affidavit de Testa, paragraphe 27).      

 

[28]           Le 8 octobre 2010, le défendeur s’est fait signifier à personne la déclaration de la demanderesse dans le cadre de la présente action. Le 18 novembre 2010, le défendeur a informé l’avocat de la demanderesse que, sauf pour ce qui était d’un message vocal transmis par son cellulaire personnel, [traduction] « tout le reste » avait été modifié en ce qui concernait son usage de la marque de commerce ou du nom commercial AQUASMART (affidavit de Kuiper, paragraphes 1 et 2; affidavit de Testa, paragraphe 36).

 

[29]           Le défendeur a continué d’utiliser la marque de commerce ou le nom commercial AQUASMART après qu’on l’eut informé des droits de la demanderesse sur la marque, après qu’il eut dit à l’avocat de la demanderesse qu’il avait réservé un nouveau nom pour son entreprise puis qu’il en avait changé le nom et après qu’on lui eut signifié la déclaration dans le cadre de la présente action (affidavit de Testa, paragraphes 28, 32 à 35 et 37 à 40, pièces O, Q, R, T, U, V et W; affidavit de McKeown, paragraphes 2 à 4, 8, 9, 11, 12 et 17, pièces A à F et H; affidavit d’Elizabeth Jansen, paragraphes 2 à 4, 7 à 11 et 14).   

 

E. Dommages subis par la demanderesse       

[30]           Une plainte formulée contre le défendeur par l’un de ses clients a porté à l’attention de la demanderesse les contrefaçons de sa marque par le défendeur. Il est manifeste que les pratiques commerciales du défendeur ont suscité beaucoup de rancune (affidavit de Testa, paragraphes 20 à 26, 32, 40 à 42, pièces K, M, L, P et X).    

 

[31]           Le défendeur semble avoir usé de tromperie à l’endroit de ses clients et de ses employés. Il aurait ainsi incité ses employés à promettre la remise en « prime » de produits d’une valeur supérieure à 5 000 $ pour encourager l’achat de systèmes de purification d’eau par des clients, confirmé lui-même la validité de ces promesses une fois les achats effectués puis fait défaut de remettre les produits promis (affidavit de McKeown, paragraphe 8, pièce C; affidavit d’Elizabeth Jansen, paragraphe 7, pièce C; affidavit de Brenchley, paragraphes 3, 7 à 9 et 14; affidavit de Testa, pièce X).

 

[32]           Il semble également que le défendeur, ou quelqu’un d’autre à son bureau, a apposé une fausse signature à un contrat de vente (affidavit de McKeown, paragraphes 12 à 14, pièces G et H).     

 

[33]           Le défendeur a aussi offert une « garantie de rémunération » de manière trompeuse à ses employés (affidavit de McKeown, paragraphes 10 et 18, pièces A et D).    

 

[34]           Le défendeur a également incité ses employés à faire des allégations douteuses quant aux produits et à la santé et à recourir à des méthodes de vente forcée lorsqu’ils offraient en vente des systèmes de purification de l’eau en liaison avec la marque de commerce AQUASMART (affidavit de McKeown, paragraphe 8, pièce C; affidavit d’Elizabeth Jansen, paragraphe 7, pièce C).

 

[35]           L’emploi par le défendeur de la marque de commerce ou du nom commercial AQUASMART ont fait conclure à tort à des membres du public que le défendeur était lié à la demanderesse. Et les façons d’agir du défendeur ont conduit au moins l’un de ses clients à mettre en garde ses amis et sa famille contre une entreprise nommée « Aquasmart » (affidavit de Brenchley, paragraphe 13; affidavit de Testa, paragraphes 20 à 26 et 40 à 42, pièces K, M, L et X).    

 

[36]           Les activités du défendeur ont donné lieu à un échange sur Internet d’avis défavorables à son endroit. Dans les messages affichés, on associait au défendeur la marque de commerce ou le nom commercial AQUASMART (affidavit de Testa, paragraphes 23 et 25, pièces M et N).     

 

[37]           Le défendeur a exploité son entreprise dans une région géographique où la demanderesse compte actuellement des clients (affidavit de Testa, paragraphe 17).

 

F. Faits favorisant la délivrance d’une ordonnance de jugement par défaut   

[38]           Le 7 octobre 2010, la demanderesse a déposé sa déclaration dans le cadre de la présente action (déclaration dans le dossier T-1630-10 de la Cour fédérale).

 

[39]           Le 8 octobre 2010, la déclaration a été signifiée à personne au défendeur au Canada (affidavit de Kuiper, paragraphes 1 et 2).

 

[40]           En date du 16 février 2011, aucune défense n’avait été déposée dans la présente action.    

 

III. Les questions en litige

[41]           Les questions en litige sont les suivantes :

            1.         Le défendeur a-t-il fait défaut, au sens de l’article 210 des Règles des Cours fédérales (les Règles), de déposer sa défense dans le délai prévu à l’article 204 des Règles?    

            2.         Que doit établir la demanderesse pour obtenir un jugement par défaut par voie de requête en application de l’article 210 des Règles?

            3.         La preuve présentée au soutien de la requête justifie-t-elle d’accorder le jugement sollicité en application de l’article 210 des Règles? La preuve démontre-t-elle plus particulièrement, selon la prépondérance de la preuve, que la marque de commerce au Canada portant le numéro d’enregistrement TMA437,536 est valide et a été contrefaite par le défendeur?     

            4.         Quel montant de dommages-intérêts convient-il d’octroyer?    

 

IV. Analyse

            (1)        Le défendeur a-t-il fait défaut, au sens de l’article 210 des Règles des Cours fédérales, de déposer sa défense dans le délai prévu à l’article 204 des Règles?     

 

 

[42]           Pour démontrer que le défendeur est en défaut au sens de l’article 210 des Règles, DORS/98-106, la demanderesse doit établir que la déclaration lui a été signifiée et qu’il n’a pas déposé de défense dans le délai prévu à l’article 204 des Règles (article 210 des Règles; Louis Vuitton Malletier S.A. c. Yang, 2007 CF 1179, 62 C.P.R. (4th) 362).

 

[43]           Un défendeur doit déposer sa défense dans les 30 jours après avoir reçu signification au Canada de la déclaration  (alinéa 204a) des Règles).  

 

[44]           Le défendeur s’est fait signifier la déclaration à personne au Canada le 8 octobre 2010. Le délai prévu à l’article 204 des Règles pour le dépôt par le défendeur de sa défense venait ainsi à expiration le 8 novembre 2010. Or, en date du 16 février 2011, le défendeur n’avait pas déposé de défense (affidavit de Kuiper, paragraphes 1 et 2; affidavit de Reidel, pièce D).     

 

 

 

 

(2)        Que doit établir la demanderesse pour obtenir un jugement par défaut par voie de requête en application de l’article 210 des Règles?      

 

 

[45]           Lorsqu’il s’agit d’une requête en jugement par défaut et qu’aucune défense n’a été déposée, toutes les allégations formulées dans la déclaration doivent être tenues pour niées. La preuve présentée doit permettre à la Cour de conclure, selon la prépondérance de la preuve, en la responsabilité de la partie défenderesse. Le demandeur doit aussi démontrer par une preuve par affidavit qu’il a droit à la réparation demandée  (Louis Vuitton Malletier S.A. c. Yang, 2007 CF 1179, 62 C.P.R. (4th) 362; Ragdoll Productions (UK) Ltd. c. Mme Unetelle, 2002 CFPI 918, 21 C.P.R. (4th) 213).

 

 

(3)        La preuve présentée au soutien de la requête justifie-t-elle d’accorder le jugement sollicité?    

 

 

[46]           Ce qui est en cause dans la présente requête, c’est la prétention de la demanderesse selon laquelle il y a eu violation par le défendeur, au sens de l’article 20 de la Loi sur les marques de commerce, de son droit à l’emploi exclusif de sa marque déposée (article 20, Loi sur les marques de commerce).    

 

a)         La preuve démontre-t-elle, selon la prépondérance de la preuve, que la marque de commerce au Canada portant le numéro d’enregistrement TMA437,536 est valide et est bien la propriété de la demanderesse? 

 

 

[47]           Une copie de l’inscription de l’enregistrement d’une marque de commerce, donnée comme étant certifiée conforme par le registraire, fait foi des faits y énoncés et de ce que la personne y nommée comme propriétaire est le propriétaire inscrit de cette marque de commerce aux fins et dans la région territoriale qui y sont indiquées (paragraphe 54(3), Loi sur les marques de commerce).   

 

 

b)         La preuve démontre-t-elle, selon la prépondérance de la preuve, que la marque de commerce au Canada portant le numéro d’enregistrement  TMA437,536 a été contrefaite?

 

 

[48]           L’article 19 de la Loi sur les marques de commerce prévoit que, sous réserve des articles 21, 32 et 67 de cette loi, l’enregistrement d’une marque de commerce à l’égard de marchandises ou services, sauf si son invalidité est démontrée, donne au propriétaire le droit exclusif à l’emploi de celle-ci, dans tout le Canada, en ce qui concerne ces marchandises ou services. Le paragraphe 20(1) de la Loi sur les marques de commerce, pour sa part, prévoit que le droit du propriétaire d’une marque de commerce déposée à l’emploi exclusif de cette dernière est réputé être violé par une personne qui vend, distribue ou annonce des marchandises ou services en liaison avec une marque de commerce ou un nom commercial créant de la confusion (articles 19 et 20, Loi sur les marques de commerce).   

 

[49]           L’expression « créant de  la confusion » s’entend, relativement à une marque de commerce ou un nom commercial, au sens de l’article 6 (article 2, Loi sur les marques de commerce).    

 

 

[50]           L’article 6 de la Loi sur les marques de commerce précise, comme suit, ce qui crée de la confusion :   

6.(1)     Pour l’application de la présente loi, une marque de commerce ou un nom commercial crée de la confusion avec une autre marque de commerce ou un autre nom commercial si l’emploi de la marque de commerce ou du nom commercial en premier lieu mentionnés cause de la confusion avec la marque de commerce ou le nom commercial en dernier lieu mentionnés, de la manière et dans les circonstances décrites au présent article.

 

(2)        L’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec une autre marque de commerce lorsque l’emploi des deux marques de commerce dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à ces marques de commerce sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à ces marques sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou ces services soient ou non de la même catégorie générale.

 

(3)        L’emploi d’une marque de commerce crée de la confusion avec un nom commercial, lorsque l’emploi des deux dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à cette marque et les marchandises liées à l’entreprise poursuivie sous ce nom sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à cette marque et les services liés à l’entreprise poursuivie sous ce nom sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou services soient ou non de la même catégorie générale.

 

(4)        L’emploi d’un nom commercial crée de la confusion avec une marque de commerce, lorsque l’emploi des deux dans la même région serait susceptible de faire conclure que les marchandises liées à l’entreprise poursuivie sous ce nom et les marchandises liées à cette marque sont fabriquées, vendues, données à bail ou louées, ou que les services liés à l’entreprise poursuivie sous ce nom et les services liés à cette marque sont loués ou exécutés, par la même personne, que ces marchandises ou services soient ou non de la même catégorie générale.

 

(5)        En décidant si des marques de commerce ou des noms commerciaux créent de la confusion, le tribunal ou le registraire, selon le cas, tient compte de toutes les circonstances de l’espèce, y compris

 

          a)           le caractère distinctif inhérent des marques de commerce ou noms commerciaux, et la mesure dans laquelle ils sont devenus connus;

          b)           la période pendant laquelle les marques de commerce ou noms commerciaux ont été en usage;

          c)           le genre de marchandises, services ou entreprises;

          d)           la nature du commerce;

          e)           le degré de ressemblance entre les marques de commerce ou les noms commerciaux dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’ils suggèrent.

 

(article 6, Loi sur les marques de commerce)  

[51]           La liste de circonstances d’espèce énoncée au paragraphe 6(5) n’est pas exhaustive. On n’a pas à attacher une importance égale aux divers facteurs; un poids différent leur sera plutôt accordé selon le contexte (Mattel, Inc. c. 3894207 Canada Inc., 2006 CSC 22, paragraphes 51 et 54).

 

[52]           Pour évaluer la probabilité de confusion, il faut adopter le point de vue du consommateur ordinaire pressé, ayant une réminiscence imparfaite de la première marque, qui pourrait tomber sur la marque de commerce de la demanderesse utilisée sur le marché en liaison avec ses marchandises. Il faut accorder une certaine confiance au consommateur moyen; on ne doit pas procéder en partant du principe qu’il est complètement dénué d’intelligence ou de mémoire, ou est totalement inconscient ou mal informé au sujet de ce qui se passe autour de lui (Mattel, paragraphes 56 et 57).        

 

 

[53]           La demanderesse n’a pas à prouver l’intention du défendeur de commettre une contrefaçon. L’intention du défendeur est à cet égard sans importance (Kun Shoulder Rest Inc. c. Joseph Kun Violin and Bow Maker Inc. (1997) 76 C.P.R. (3d) 488 (C.F. 1re inst.)).

 

[54]           La preuve présentée au soutien de la présente requête démontre que le défendeur, ou ses employés en son nom, ont annoncé, offert en vente, vendu et installé des systèmes de purification d’eau en liaison avec la marque de commerce ou le nom commercial AQUASMART. L’examen des circonstances de l’espèce permet clairement de constater que l’emploi de cette marque commerciale ou de ce nom commercial par le défendeur a créé de la confusion avec la marque déposée.

 

(i)         Alinéa 6(5)e) – Degré de ressemblance entre les marques (dans la présentation ou le son, ou dans les idées qu’elles suggèrent)      

 

[55]           Même si le paragraphe 6(5) enjoint de prendre en compte toutes les circonstances d’espèce pour évaluer la probabilité de confusion, le degré de ressemblance entre les marques, dans la présentation, le son ou le sens suggéré, est habituellement le facteur le plus important (Beverly Bedding & Upholstery Co. c. Regal Bedding Ltd. (1980), 47 C.P.R. (2d) 145, page 149 (C.F. 1re inst.).

 

[56]           Pour qu’il y ait confusion, il n’est pas nécessaire que chaque élément de la marque ait été copié; il suffit qu’assez d’éléments aient été copiés pour que cela tende à créer de la confusion dans le public (K. Gill et R.S. Joliffe, Fox on Trade-marks and Unfair Competition, 4e éd. (feuilles mobiles) (Carswell, Toronto), pages 8 à 56).

 

[57]           On l’a dit, la marque déposée renferme l’élément verbal AQUASMART, qui est identique à la marque de commerce ou au nom commercial AQUASMART utilisé par le défendeur. Le degré de ressemblance dans la présentation est donc élevé. Puisque l’élément verbal AQUASMART est le seul que renferme la marque déposée, la ressemblance dans le son est totale entre la marque déposée et la marque de commerce ou le nom commercial utilisé par le défendeur.

 

 

[58]           Ce facteur incite fortement à conclure en la probabilité d’une confusion entre les marques de commerce et nom commerciaux divers utilisés par le défendeur et la marque déposée de la demanderesse.    

 

 

(ii)        Alinéas 6(5)c) et 6(5)d) – Genre de marchandises et nature du commerce

 

[59]           Le défendeur annonce, offre en vente, vend et installe des purificateurs d’eau, soit des marchandises visées par suite de l’enregistrement de la marque de la demanderesse. Le défendeur et la demanderesse vendent en outre leurs produits au même segment de marché : les acheteurs‑consommateurs. Le chevauchement pur et simple entre les marchandises et les segments de marché du défendeur et de la demanderesse donnent aussi fortement à croire en la probabilité d’une confusion.  

 

(iii)       Alinéa 6(5)b) – Période pendant laquelle les marques de commerce ont été en usage

 

[60]           La demanderesse a déposé une copie certifiée de l’inscription de l’enregistrement de sa marque de commerce, qui fait foi des faits y énoncés et de ce que la demanderesse est propriétaire de la marque déposée. L’enregistrement atteste également l’emploi par la demanderesse de sa marque depuis au moins le 1er août 1991 (article 54, Loi sur les marques de commerce, affidavit de Reidel, pièce A).     

 

[61]           Pour sa part, le défendeur semble avoir utilisé la marque de commerce ou le nom commercial AQUASMART au plus tôt en mai 2010  (affidavit de Reidel, pièce B).

 

[62]            La preuve de la demanderesse démontre que dans la courte période de temps où le défendeur a utilisé la marque de commerce ou le nom commercial AQUASMART, de la confusion a effectivement été créée à plusieurs reprises. Bien que la demanderesse n’ait pas à prouver la confusion effective, la preuve de situations effectives de confusion confère beaucoup de poids à son argumentation et influe fortement sur l’issue de l’affaire (Mr. Submarine Ltd. c. Amandista Investments Ltd. (1987), 19 C.P.R. (3d) 3, page 14 (C.A.)).

 

[63]           Tout particulièrement, la demanderesse a produit une preuve directe montrant que l’emploi  de la marque de commerce ou du nom commercial AQUASMART par le défendeur avait conduit certains à conclure que les produits et l’entreprise de ce dernier étaient liés aux siens. Lorsqu’il y a pareille « confusion inverse », soit lorsque les consommateurs voyant la marque de l’utilisateur plus ancien (la demanderesse) croient qu’elle provient du nouvel utilisateur (le défendeur), cela donne ouverture à des poursuites par l’ancien utilisateur sur le fondement du paragraphe 6(2) (K. Gill et R.S. Joliffe, Fox on Trade-marks and Unfair Competition, 4e éd. (feuilles mobiles) (Carswell, Toronto), p. 8-4; Services alimentaires A & W du Canada Inc. c. Restaurants McDonald du Canada Ltée, 2005 CF 406, paragraphes 23 à 33).

 

 

[64]           L’affidavit de Mme Emily Testa renferme en outre des éléments de preuve indirecte quant à l’existence d’une confusion effective dans le public. Le fait que des personnes qui, tentant de communiquer avec le défendeur par suite de son emploi d’une marque semblable au point de prêter à confusion à la marque déposée, aient en réalité communiqué avec la demanderesse prouve indirectement que l’emploi par le défendeur de la marque de commerce ou du nom commercial  AQUASMART a conduit des gens à conclure que la demanderesse exécutait les services du défendeur et exploitait son entreprise.    

 

[65]           Le large emploi de longue date de la marque déposée par la demanderesse, la période relativement courte pendant laquelle le défendeur a utilisé la marque de commerce ou le nom commercial AQUASMART et les nombreux cas attestés par la preuve de confusion effective  laissent fortement croire en la probabilité d’une confusion.   

 

 

(iv)       Alinéa 6(5)a) – Le caractère distinctif inhérent des marques et la mesure dans laquelle elles sont devenues connues  

 

[66]           Pour ce qui est du caractère distinctif inhérent, les marques constituées de mots inventés ou créés ont un fort caractère distinctif qui leur vaut une large protection, tandis que les marques constituées de mots descriptifs sont peu distinctives et commandent une faible protection, des différences négligeables suffisant alors à les distinguer (Weetabix of Canada Ltd. c. Kellogg Canada Inc., 2002 CFPI 724, paragraphe 42).

 

[67]           La marque déposée renferme l’élément verbal AQUASMART, un mot-valise inventé qui réunit les mots AQUA et SMART. L’élément verbal AQUASMART évoque les marchandises de la demanderesse plutôt qu’il ne les décrit. La marque déposée, ainsi, dispose d’un caractère distinctif inhérent qui appelle une large protection.    

 

[68]           Pour ce qui est de la mesure dans laquelle les marques et les noms sont devenus connus, il ne fait guère de doute que la marque déposée de la demanderesse est beaucoup plus connue que ne l’est la marque ou le nom du défendeur. La demanderesse a fait beaucoup de publicité autour de sa marque de commerce, notamment au moyen d’annonces publiées dans le plus important magazine sur la santé et le mieux-être au Canada, de stands dans des foires commerciales, d’un site Web et d’un affichage extérieur et intérieur à son magasin de détail. En 2010, la demanderesse a dépensé environ 18 000 $ en frais de publicité dans les magazines et, ces dernières années, elle a compté plus de 10 000 clients individuels par année. La marque de la demanderesse, grâce à la vaste publicité et au large emploi dont elle a fait l’objet, est assurément devenue beaucoup plus connue que l’une ou l’autre des marques du défendeur, qui toutes ont été utilisées pendant des périodes relativement courtes.     

 

V. Les mesures de réparation

[69]           On a démontré que la réparation demandée selon les termes de l’ordonnance sollicitée avait été attribuée dans des actions de ce type, et elle est par conséquent accordée.

 

[70]           L’injonction et la remise sollicitées satisfont aux paramètres des mesures de réparation octroyées par la Cour lorsqu’il y a eu violation de la  Loi sur les marques de commerce  (article 53.2 de la Loi sur les marques de commerce).

 

[71]           Pour ce qui est de la réparation pécuniaire, la Cour peut rendre une ordonnance pour le recouvrement de dommages-intérêts ou de profits. La demanderesse n’a rien pu se faire communiquer, le défendeur n’ayant pas participé à la présente instance, et elle n’a ainsi pu disposer de moyens pratiques pour établir précisément la portée véritable des violations du défendeur et des profits réalisés par lui. Il n’est toutefois pas nécessaire de prouver avec certitude les dommages réellement subis. Une fois qu’un demandeur a prouvé l’existence de la violation et de dommages, il a droit aux dommages-intérêts, pas nécessairement symboliques, jugés être appropriés par la Cour (article 53.2, Loi sur les marques de commerce; Ragdoll Productions (UK) Ltd. c. Mme Unetelle, 2002 CFPI 918, 21 C.P.R. (4th) 213, paragraphes 40 à 45; Louis Vuitton Malletier S.A. c. Yang, 2007 CF 1179, 62 C.P.R. (4th) 362, paragraphe 28).

 

[72]           Dans les cas où les activités des défendeurs rendaient difficile l’évaluation précise du  montant des dommages-intérêts imputables à la contrefaçon de la marque de commerce, les tribunaux se sont guidés dans leur évaluation des dommages subis par les demandeurs sur un barème variant en fonction des activités des défendeurs. Dans des décisions antérieures, la Cour a plus particulièrement établi un barème selon lequel, en dollars de 1997, les dommages-intérêts des demandeurs étaient fixés à 3 000 $ dans le cas de vendeurs ambulants et d’exploitants de marchés aux puces, à 6 000 $ dans le cas de ventes effectuées dans des locaux fixes et à 24 000 $ dans le cas de fabricants et de distributeurs. La Cour a reconnu la nécessité d’un rajustement du barème pour tenir compte de l’inflation et la possibilité du recours à une échelle plus précise (Oakley, Inc. c. Untel (2000), 8 C.P.R. (4th) 506, paragraphe 3; Ragdoll Productions, précitée, paragraphe 48; D. & A.'s Pet Food'n More Ltd. c. Seiveright, 2006 CF 175, 48 C.P.R. (4th) 281, paragraphe 9).

 

[73]           Dans une décision, on a multiplié le montant du barème par le nombre d’actes de contrefaçon distincts démontrés par la demanderesse. La Cour a attribué des dommages-intérêts de 87 000 $ dans cette affaire, soit six actes de contrefaçon distincts fois le montant de 6 000 $ rajusté pour tenir compte de l’inflation  (Louis Vuitton, précitée, paragraphe 43).

 

[74]           On soutient qu’il conviendrait d’attribuer à la demanderesse en l’espèce, en fonction du barème de dommages-intérêts établi, la somme de 15 597, 35 $, soit l’équivalent en dollars actuels de la somme de 12 000 $ en dollars de 1997. Cette somme est appropriée, compte tenu du barème démontré convenir et de la nature des activités du défendeur, y compris des éléments suivants : 

·        cinq jours par semaine, le défendeur a exploité son entreprise dans des locaux annoncés par des enseignes où figurait un nom commercial contrevenant à la marque déposée de la demanderesse; 

·        les véhicules utilisés pour l’exploitation de l’entreprise du défendeur arboraient des appliqués comportant un nom commercial qui contrevenait à la marque déposée de la demanderesse;   

·        le défendeur recourait à un réseau de « vendeurs » pour distribuer des marchandises en liaison avec une marque de commerce ou un nom commercial qui contrevenait à la marque déposée de la demanderesse;      

·        les marchandises du défendeur étaient chères, leur prix unitaire étant selon la preuve d’environ 2 800 $ à 5 600 $;    

·        le défendeur a continué d’utiliser une marque de commerce ou un nom commercial qui contrevenait à la marque déposée de la demanderesse après qu’on l’eut informé des droits de cette dernière sur la marque, après qu’il eut dit à l’avocat de la demanderesse qu’il avait réservé un nouveau nom pour son entreprise puis qu’il en avait changé le nom et après qu’on lui eut signifié la déclaration dans le cadre de la présente action;    

·        selon la preuve, les pratiques commerciales du défendeur, qu’on peut qualifier de répréhensibles, ont suscité beaucoup de rancune et, par suite de l’emploi par le défendeur d’une marque de commerce ou d’un nom commercial qui contrevenait à la marque déposée de la demanderesse, cette rancune s’est reportée sur la demanderesse et ainsi a diminué la valeur de son achalandage (affidavit de Reidel, pièce C).     

[75]           La demanderesse demande également que, dans l’ordonnance de jugement par défaut, sous forme de montant forfaitaire, lui soient adjugés les dépens sur une base procureur-client. La Cour a récemment attribué des dépens sur une telle base dans des affaires où le défendeur avait fait abstraction des droits de propriété intellectuelle du demandeur de manière flagrante et délibérée et n’avait présenté aucune défense. La demanderesse demande ainsi que lui soient attribués des dépens et débours d’un montant de 10 000 $ (article 400, Règles des Cours fédérales (1998); Microsoft Corporation c. PC Village Co. Ltd., 2009 CF 401, paragraphe 46; Louis Vuitton, précitée, paragraphe 59).

 

 


ORDONNANCE

LA COUR ORDONNE :

1.         Jugement par défaut est rendu dans la présente action en faveur de la demanderesse.     

2.         Il est par la présente déclaré que le défendeur a contrefait la marque de commerce au Canada portant le numéro d’enregistrement TMA437,536, en contravention de l’article 20 de la Loi sur les marques de commerce.

3.         Une injonction permanente est par la présente accordée, qui interdit au défendeur ainsi que, notamment, à ses employés et mandataires :     

a)         de contrefaire la marque de commerce au Canada portant le numéro d’enregistrement TMA437,536;

b)         en liaison avec les marchandises, les services ou l’entreprise du défendeur, utiliser notamment comme nom, marque de commerce, nom commercial ou nom de domaine sur Internet, ou comme élément d’un tel nom ou d’une telle marque, la raison sociale ou la marque de commerce AQUASMART ou toute autre marque de commerce ou tout autre nom commercial créant ou susceptible de créer de la confusion avec la marque de commerce portant le numéro d’enregistrement TMA437,536;

c)         appeler l’attention du public sur les services ou l’entreprise du défendeur de manière à causer ou à vraisemblablement causer de la confusion au Canada entre les marchandises, les services ou l’entreprise du défendeur et ceux de la demanderesse;      

d)         faire passer les marchandises ou les services du défendeur pour ceux de la demanderesse;

e)         faussement laisser croire en l’existence d’un lien entre les marchandises, les services ou l’entreprise du défendeur et ceux de la demanderesse.

4.         Le défendeur doit remettre à la demanderesse, ou détruire et en attester sous serment, l’ensemble des enseignes, des marchandises, du matériel publicitaire ou autre et des documents qu’il a en son pouvoir, sous son contrôle, en sa possession ou sous sa garde et qui contreviennent à l’un ou l’autre élément précédemment ordonné.     

5.         Le défendeur doit verser la somme de 15 597, 35 $ à la demanderesse à titre de dommages‑intérêts dans les 30 jours suivant la signification de la présente ordonnance (en conformité avec la jurisprudence citée aux paragraphes 72 et 73 ci-dessus).     

6.         Le défendeur doit verser la somme de 10 000 $ à la demanderesse à titre de dépens sur la base procureur-client et de débours dans les 30 jours suivant la signification de la présente ordonnance.    

 

 

« Michel M.J. Shore »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

Evelyne Swenne, traductrice‑conseil


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        T-1630-10

 

INTITULÉ :                                       AQUASMART TECHNOLOGIES INC. c. ROBERT KLASSEN

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 VANCOUVER (COLOMBIE-BRITANNIQUE)

 

DATE DE L’AUDIENCE :               LE 21 FÉVRIER 2011

 

 

MOTIFS DE L’ORDONNANCE

ET ORDONNANCE :                       LE JUGE SHORE

 

DATE DES MOTIFS ET DE

L’ORDONNANCE :                         LE 22 FÉVRIER 2011

 

 

COMPARUTIONS :

 

Jeffrey W. Robinson

POUR LA DEMANDERESSE

 

Personne n’a comparu

 

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Oyen Wiggs Green & Mutala LLP

Vancouver (Colombie-Britannique)

 

POUR LA DEMANDERESSE

 

s.o.

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

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