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Cour fédérale

 

Federal Court

 

 


Date : 20110506

Dossier : IMM-2963-11

Référence : 2011 CF 532

Ottawa (Ontario), le 6 mai 2011

En présence de monsieur le juge Shore 

 

ENTRE :

 

LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE

 

 

 

demandeur

 

et

 

 

 

SIU KWAN HONG

 

 

 

 

défenderesse

 

         MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

I.  Introduction

[1]               Il s’agit d’une requête en sursis par laquelle le demandeur demande à la Cour de prolonger la détention du défendeur jusqu’à la détermination de la demande d’autorisation et de contrôle judiciaire à l’encontre du refus du commissaire de la Section de l’immigration de la Commission de l’immigration et du statut de réfugié de procéder au contrôle des motifs de la détention de la défenderesse conformément au paragraphe 57(2) de la Loi sur l'immigration et la protection des réfugiés, LC 2001, c. 27 (LIPR) et/ou jusqu’à ce que la Section de l’immigration procède à un nouveau contrôle des motifs de détention de la défenderesse en conformité avec le paragraphe 57(2) de la LIPR.

 

[2]               La Cour est entièrement d’accord avec les arguments de l’avocate du demandeur et donc les propos de l’avocate du demandeur sont entièrement adoptés par la Cour.

 

II.  Faits

[3]               Le 19 avril 2011, la défenderesse fut arrêtée par la police de Laval dans un salon de massage et fut remise à l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) parce qu’elle n’a pas de statut légal au Canada.

 

[4]               En conséquence, la défenderesse fut arrêtée en vertu de l’article 55 de la LIPR.

 

[5]               Le 20 avril 2011, la défenderesse a demandé l’asile au Canada.

 

[6]               Le 21 avril 2011, la défenderesse a bénéficié d’une première révision de détention conformément au paragraphe 57(1) de la LIPR.

 

[7]               Le 28 avril 2011, la défenderesse a bénéficié d’une deuxième révision de détention conformément au paragraphe 57(2) de la LIPR. Suite à l’audience, le commissaire a ordonné la mise en liberté de la défenderesse moyennant certaines conditions, dont faire la preuve que la garante, madame Sin Fu, a soit le statut de citoyenne canadienne, de résidente permanente ou de réfugiée reconnue.

[8]               Par télécopie, datée du 2 mai 2011, l’avocate de la défenderesse a avisé la Section de l’immigration que madame Sin Fu ne pourra pas remplir les conditions nécessaires à la remise en liberté de madame Hong.

 

[9]               Dans sa lettre du 2 mai 2011, l’avocate a également demandé une audience anticipée pour faire entendre un nouveau garant potentiel, soit monsieur Way Keung Wong.

 

[10]           L’audience anticipée a eu lieu le 4 mai 2011.

 

[11]           À l’audience du 4 mai 2011, le procureur de la défenderesse a expliqué au tribunal que madame Sin Fu, qui est une demandeure d’asile, n’avait pas le statut exigé pour être garante selon les conditions imposées par le tribunal.

 

[12]           Lors de son témoignage sous serment, monsieur Wong, un deuxième garant potentiel, a admis avoir été propriétaire d’un salon de massage et avoir été trouvé coupable, en qualité de propriétaire d’un local, d’avoir permit sciemment que ce local ou une partie du local soit loué ou employé aux fins de maison de débauche (alinéa 210(2)c) du Code criminel, LRC 1985 c-46).

 

[13]           Suite au témoignage de monsieur Wong, qui prétendait n’être qu’un garçon de table, l’avocate du ministre a voulu déposer le rapport de police concernant les événements ayant mené à la condamnation de monsieur Wong.

 

[14]           Le commissaire a refusé le dépôt du rapport de police au motif que le rapport n’avait pas été traduit en mandarin, alors que l’obligation est de déposer les documents dans la mesure du possible dans la langue des procédures et de l’audience soit l’une des deux langues officielles canadiennes soit le français ou l’anglais. Dans le cas présent, l’audience s’est déroulée en français avec l’aide d’une interprète mandarin/français.

 

[15]           Le ministre s’opposait à la libération de la défenderesse au motif que monsieur Wong n’avait pas les qualités recherchées chez un garant dans les circonstances particulières de la présente affaire, soit que la défenderesse avait été arrêtée dans un salon de massage, que, selon que les vérifications effectuées auprès du registraire des entreprises du Québec, monsieur Wong était toujours propriétaire d’un salon de massage alors qu’il a témoigné n’être qu’un garçon de table.

 

[16]           L’avocate du ministre a opposé la remise en liberté de la défenderesse au motif qu’elle représente un risque de fuite et que l’alternative présentée ne contrebalançait pas ce risque de fuite.

 

[17]           Malgré ceci, le commissaire a accepté monsieur Wong comme garant parce qu’il était d’avis que l’alternative proposée était appropriée dans les circonstances, que le témoignage de monsieur Wong était crédible et qu’il n’avait été condamné qu’à une seule reprise.

 

[18]           En conséquence, le commissaire a ordonné la remise en liberté de la défenderesse moyennant le paiement par le garant, monsieur Wong, d’une somme de 1 500 $ payable en argent comptant.

 

III.  Points en litige

[19]           Est-ce qu’une personne, suite à une condamnation après avoir purgé une peine récente, sans avoir été pardonné, peut être acceptée comme garant pour un individu impliqué dans un contexte d’activités connexes pour lesquels une personne garante a été condamnée; et, donc, le présent dossier soulève trois questions : est-ce que le demandeur a démontré l’existence d’une question sérieuse, d’un préjudice irréparable et a-t-il démontré que la balance des inconvénients penche en sa faveur?

 

IV.  Analyse

A.  Question sérieuse

[20]           Le 4 mai 2010, le commissaire a commis une erreur de droit en refusant le dépôt du rapport de police au motif que le document n’avait pas été traduit en mandarin alors que l’examen du rapport lui aurait permis de vérifier les faits concernant monsieur Wong.

 

[21]           De plus, le commissaire a erré en exigeant que le rapport de police soit traduit en mandarin qui n’est pas une des deux langues officielles.

 

[22]           Le commissaire a erré en droit en n’admettant pas en preuve un document important, et ce, sans motifs valables.

 

[23]           Le commissaire a commis une autre erreur en considérant que le garant, qui prétendait n’être qu’un garçon de table, avait été un témoin crédible alors que la preuve soumise par le ministre démontrait que le garant était toujours propriétaire d’un salon de massage.

[24]           Finalement, le commissaire a commis une erreur en retenant que le garant n’avait été condamné qu’une seule fois, ignorant par le fait même la nature de l’infraction dont le garant avait été trouvé coupable et la pertinence de cette infraction par rapport aux faits de cette cause.

 

B.  Préjudice irréparable

[25]           Le ministre subira un préjudice irréparable puisqu’il est très probable que, si libérée, la défenderesse ne respectera pas les autres conditions prévues par l’ordonnance de mise en liberté, soit entre autres de se rapporter aux autorités canadiennes.

 

[26]           D’ailleurs, il faut noter que la défenderesse résidait illégalement au Canada et que si elle n’avait pas été arrêtée elle n’aurait pas tenté de régulariser sa situation.

 

C.  Balance des inconvénients

[27]           La LIPR oblige le ministre à faire respecter les dispositions de cette Loi. Il ne s'agit pas simplement d'une question de commodité administrative, il s'agit plutôt de l'intégrité et de l'équité du système canadien de contrôle de l'immigration, ainsi que de la confiance du public dans ce système. Il est d'intérêt public de disposer d'un régime qui fonctionne de façon efficace, expéditive et juste.

 

V.  Conclusion

[28]           Pour toutes les raisons ci-dessus, la requête du demandeur est accueillie et la Cour prolonge la détention de la défenderesse jusqu’au prochain contrôle des motifs de détention par la Section d’immigration en conformité avec le paragraphe 57(2) de la LIPR.


JUGEMENT

LA COUR STATUE que la requête du demandeur est accueillie et la Cour prolonge la détention de la défenderesse jusqu’au prochain contrôle des motifs de détention par la Section d’immigration en conformité avec le paragraphe 57(2) de la LIPR.

 

« Michel M.J. Shore »

Juge


COUR FÉDÉRALE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

DOSSIER :                                        IMM-2963-11

 

INTITULÉ :                                       LE MINISTRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE ET DE LA PROTECTION CIVILE c SIU KWAN HONG

 

 

REQUÊTE CONSIDÉRÉE PAR TÉLÉCONFÉRENCE LE 6 MAI 2011 ENTRE OTTAWA, ONTARIO ET MONTRÉAL, QUÉBEC

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT :                              LE JUGE SHORE

 

DATE DES MOTIFS :                      le 6 mai 2011

 

 

 

PRÉTENTION ORALES ET ÉCRITES PAR :

 

Me Michèle Joubert

 

POUR LE DEMANDEUR

 

Me Marie-Hélène Giroux

M. Laurent Carignan (Stagiaire)

POUR LA DEMANDERESSE

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

Montréal (Québec)

 

POUR LE DEMANDEUR

 

 

Monterosso Giroux, s.e.n.c.

Montréal (Québec)

POUR LA DEMANDERESSE

 

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