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Cour fédérale

 

Federal Court

 


Date : 20110519

Dossier : T-1565-07

Référence : 2011 CF 591

[TRADUCTION FRANÇAISE CERTIFIÉE, NON RÉVISÉE]

Ottawa (Ontario), le 19 mai 2011

En présence de Monsieur le juge Rennie

 

 

ENTRE :

 

MILENKO PANTIC

 

 

 

demandeur

 

et

 

 

 

LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

 

 

 

défendeur

 

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT ET JUGEMENT

 

[1]               La Cour est saisie d’une demande de contrôle judiciaire fondée sur le paragraphe 18(1) de la Loi sur les Cours fédérales (L.R.C. 1985, ch. F‑7), visant le refus de la Commission d’appel des pensions du Canada (CAP) d’autoriser le demandeur à interjeter appel d’une décision du tribunal de révision qui lui était défavorable.   

 

[2]               La CAP a rejeté la demande d’autorisation d’appel de la décision par laquelle le tribunal de révision avait débouté l’intéressé de la demande de prestation d’invalidité qu’il avait présentée en vertu du Régime de pensions du Canada (L.R.C. 1985, ch. C‑8) (RPC). La CAP a jugé que le demandeur n’avait pas démontré l’existence d’une cause défendable pouvant être accueillie en appel. La Cour d’appel fédérale a statué que, dans le contexte d’une demande d’autorisation d’appel, il faut, pour qu’une cause soit défendable, qu’elle ait une chance raisonnable de succès : Fancy c. Canada (Procureur général), 2010 CAF 63.

 

[3]               Le présent contrôle porte sur la décision relative à l’autorisation d’appel, non sur la décision du tribunal de révision, mais ce n’est qu’en examinant cette dernière que l’on pourra juger du caractère raisonnable de la décision sur l’autorisation d’appel, et il faut, en conséquence, examiner de plus près le dossier soumis au tribunal de révision. Cependant, la présente affaire est centrée en totalité sur la conclusion du tribunal de révision selon laquelle le demandeur n’a pas souffert et ne souffre pas de troubles graves et prolongés, la condition établie au paragraphe 42(2) du RPC pour l’approbation d’une demande de prestation d’invalidité.

 

[4]               Le demandeur vient de la Bosnie‑Herzégovine. Il est arrivé au Canada en 1996. Il possédait un diplôme d’études collégiales à son arrivée au Canada. Il a étudié et appris l’anglais pendant un an, puis il a travaillé pour Postes Canada au contrôle de la qualité et, par la suite, comme opérateur en salle d’impression. Il occupait cet emploi à plein temps lorsqu’il se serait blessé au dos au mois d’octobre 2002. Il avait alors quarante‑six ans.

 

[5]               Le 24 février 2005, il a présenté une demande de prestation d’invalidité en vertu du RPC à Ressources humaines et Développement des compétences Canada (RHDCC), qui l’a rejetée au motif qu’elle ne satisfaisait pas aux conditions énoncées au paragraphe 42(2) du RPC. Voici le texte de cette disposition :

Personnes déclarées invalides

 

(2) Pour l’application de la présente loi :

 

a) une personne n’est considérée comme invalide que si elle est déclarée, de la manière prescrite, atteinte d’une invalidité physique ou mentale grave et prolongée, et pour l’application du présent alinéa :

 

(i) une invalidité n’est grave que si elle rend la personne à laquelle se rapporte la déclaration régulièrement incapable de détenir une occupation véritablement rémunératrice,

 

 

(ii) une invalidité n’est prolongée que si elle est déclarée, de la manière prescrite, devoir vraisemblablement durer pendant une période longue, continue et indéfinie ou devoir entraîner vraisemblablement le décès;…

 

[Notre soulignement]

When person deemed disabled

 

(2) For the purposes of this Act,

 

 

(a) a person shall be considered to be disabled only if he is determined in prescribed manner to have a severe and prolonged mental or physical disability, and for the purposes of this paragraph,

 

(i) a disability is severe only if by reason thereof the person in respect of whom the determination is made is incapable regularly of pursuing any substantially gainful occupation, and

 

(ii) a disability is prolonged only if it is determined in prescribed manner that the disability is likely to be long continued and of indefinite duration or is likely to result in death; …

 

[Emphasis added]

 

 

[6]               RHDCC a conclu que le demandeur avait satisfait aux exigences du RPC en matière de cotisation, mais non aux conditions établies aux sous-alinéas 42(2)a)(i) et (ii), en ce que l’invalidité dont il se disait atteint n’était ni grave ni prolongée.

 

[7]               Le demandeur a requis le réexamen de cette décision initiale de refus, à l’issue duquel un autre décideur a conclu lui aussi au rejet de la demande de prestation d’invalidité, le 23 janvier 2006 :

[traduction] Il appert du dossier que les spécialistes ne parviennent pas à trouver la cause de votre douleur. En conséquence, votre incapacité de travailler ne repose sur aucune raison médicale objective. Le dossier comporte aussi la preuve que vous suivez un programme de gestion de la douleur qui peut vous aider à maîtriser la douleur.

 

Le dossier indique également qu’au moment de votre demande de prestation d’invalidité vous étiez capable d’accomplir régulièrement certaines tâches compatibles avec votre état et vos limites. Par conséquent, votre état ne peut être considéré comme « grave » au sens des dispositions du Régime de pensions du Canada, ce qui vous rend inadmissible à la prestation d’invalidité.

 

Vous pouvez porter cette décision en appel devant un tribunal de révision.

 

[8]               Le demandeur a effectivement interjeté appel de cette deuxième décision au tribunal de révision. Le 7 mars 2007, le tribunal a rejeté l’appel, formulant notamment les conclusions suivantes :

[traduction] Après examen de la preuve documentaire présentée, le tribunal constate qu’elle ne comporte aucune conclusion objective étayant l’allégation de l’appelant qu’il était atteint d’une invalidité grave et prolongée en décembre 2004 ou avant cette date. Par exemple, la Dre MacGregor indique dans son rapport du mois d’avril 2003 (page 33, dossier cartonné) que l’appelant travaillait quatre heures par jour et était en physiothérapie quatre heures par jour, ce qui indique clairement qu’il n’est pas invalide. Elle écrit aussi que, malgré les limites que l’appelant s’impose lui‑même il devrait être capable d’effectuer du travail léger. De même, dans un rapport du Dr Day daté de mai 2003 (page 35, dossier cartonné), celui-ci note que les problèmes du demandeur semblent relever de la crainte plutôt que d’une blessure mécanique. Un examen tomodensitométrique (TDM) effectué en octobre 2003 (page 47, dossier cartonné) a révélé une légère compression de la racine nerveuse L4 du côté gauche; aucune chirurgie n’a toutefois été recommandée à ce moment-là (page 52, dossier cartonné). Dans le rapport du Dr Rhodes d’octobre 2004, environ deux mois avant la date de la période minimale d’admissibilité (PMA), celui‑ci note un « changement dégénératif très léger dans la partie moyenne et inférieure du rachis thoracique ». En outre, dans le rapport d’électromyographie du Dr Pringle, daté de décembre 2004, il est fait état d’une radiculopathie L4 gauche avec un certain degré de dénervation.

 

Le tribunal relève que beaucoup des rapports médicaux précités, qui sont antérieurs à décembre 2004, n’indiquent pas que l’appelant souffre de graves problèmes au dos pouvant empêcher un retour au travail. Ils exposent plutôt que les conclusions objectives ne correspondent pas aux descriptions subjectives du patient, et ils ne décrivent aucune limitation fonctionnelle qui aurait empêché l’appelant de travailler avant le mois de décembre 2004. Bien qu’il y ait des signes de radiculopathie, rien d’autre n’indique que l’atteinte soit grave au point d’empêcher la poursuite du travail.

 

En outre, il est apparu clairement au tribunal, lors du témoignage de l’appelant à l’audience, que ce dernier est un homme relativement jeune possédant un niveau d’instruction et de compétence élevé et une grande intelligence. Il ressort aussi du témoignage de l’appelant, en dépit de la présence d’un interprète à l’audience, qu’il maîtrise bien l’anglais. Par exemple, il a pu trouver un emploi exigeant une bonne connaissance de l’anglais un an seulement après s’être installé au Canada. De plus, il a reçu la formation afférente à son dernier emploi — un poste assez spécialisé — en anglais. Les compétences, l’instruction et la formation de l’appelant indiquent qu’il n’existait pas alors et qu’il n’existe pas maintenant d’obstacle à son employabilité. Pourtant, malgré les nombreux talents qu’il possède, l’appelant ne semble pas avoir sérieusement tenté de se réorienter ou de retourner de quelque façon sur le marché du travail. Le tribunal, bien qu’il puisse être touché par la déclaration de l’appelant qu’il est incapable de travailler en ce moment, n’est pas habilité à rendre des décisions fondées sur des considérations humanitaires; l’appel est donc rejeté. [Notre soulignement]

 

[9]               Le demandeur a alors sollicité l’autorisation de porter la décision du tribunal de révision en appel devant la CAP. Il a invoqué quatre motifs d’appel à l’appui de sa demande, mais il n’a soumis aucune nouvelle preuve médicale les étayant.

 

[10]           Le 24 juillet 2007, le président de la CAP, M. K.C. Binks, a rejeté la demande d’autorisation d’appel :

[traduction] L’appelant désire être autorisé à interjeter appel de la décision du tribunal en date du 17 avril 2007.

 

La preuve soumise au tribunal démontrait clairement qu’il n’y avait pas de cause défendable. Or, il en faut une pour être autorisé à interjeter appel.

 

Par conséquent, la demande est rejetée.

 

 

[11]           Le contrôle judiciaire de cette décision de la CAP de refuser d’autoriser le demandeur à interjeter appel soulève deux questions :

 

                                             i.              la question de savoir si la CAP a appliqué le bon critère, c’est‑à-dire la question de savoir si la demande a des chances sérieuses d’être accueillie, sans que le fond de la demande soit examiné;

 

                                           ii.              la question de savoir si la CAP a commis une erreur de droit ou d’appréciation des faits au moment de déterminer s’il s’agit d’une demande ayant des chances sérieuses d’être accueillie. Dans le cas où une nouvelle preuve est présentée lors de la demande, si la demande soulève une question de droit ou un fait pertinent qui n’a pas été pris en considération de façon appropriée par le tribunal de révision dans sa décision, une question sérieuse est soulevée et elle justifie d’accorder l’autorisation.

 

Callihoo c. Canada (Procureur général) 2000 ACF no 612, par. 15.

 

La CAP a-t-elle appliqué le bon critère ?

[12]           C’est la norme de la décision correcte qui s’applique à la première question, et celle de la décision raisonnable qui s’applique à la seconde : Mebrahtu c. Canada (Procureur général) 2010 CF 920. La Cour d’appel a précisé le critère, statuant que, dans le contexte d’une autorisation d’appel, il faut pour qu’une cause soit défendable que soit invoqué un motif d’appel ayant une chance raisonnable de succès : Fancy, précité. 

 

[13]           Le critère appliqué par la CAP n’est pas contesté. Bien que la décision de la CAP soit brève, elle a retenu le bon critère. Je signale que le demandeur n’a pas formulé de motif d’appel fondé sur la suffisance des motifs de la décision.

 

L’existence d’une cause défendable

[14]           Je passe à présent à la question de savoir s’il était raisonnable de conclure qu’on n’avait établi l’existence d’aucun motif d’appel défendable ayant une chance raisonnable de succès. Dans Williams c. Canada (Procureur général), 2010 CF 701, le juge Blanchard a décrit l’analyse à effectuer :

En l’espèce, il s’agit de déterminer si la conclusion du membre désigné de la Commission selon laquelle le demandeur n’a soulevé aucune cause défendable est raisonnable. Selon Callihoo, au paragraphe 22 :

 

En l’absence d’une nouvelle preuve importante qui n’aurait pas été examinée par le tribunal de révision, une demande d’autorisation a des chances sérieuses d’être accueillie lorsque le décideur conclut qu’il en ressort une question ou une erreur de droit, appréciée en vertu de la norme de la décision correcte, ou une erreur de fait importante commise de façon déraisonnable ou arbitraire à la lumière de la preuve. [...]

 

 

Le tribunal de révision a conclu que le demandeur n’était pas invalide au sens du paragraphe 42(2) du RPC, car son invalidité n’était pas grave et prolongée. Le tribunal de révision a bien énoncé le droit applicable. Il a expliqué le concept d’invalidité dans le cadre du RPC, et a donné des définitions des termes « grave » et « prolongée ».

 

[15]           Comme je l’ai déjà indiqué, la Cour d’appel fédérale a statué que, dans le contexte d’une demande d’autorisation d’appel, une cause défendable nécessite que soit établi que la démarche ait juridiquement une chance raisonnable de succès. Le demandeur n’a pas démontré à la CAP que sa demande d’autorisation avait une chance raisonnable de succès. Il n’a pas non plus, par la suite, établi devant notre Cour que la décision de la CAP de ne pas accueillir sa demande d’autorisation d’appel était déraisonnable. En outre, le demandeur n’a pas établi que le tribunal de révision avait commis des erreurs de fait ou de droit rendant sa décision déraisonnable ou abusive compte tenu de la preuve ou pouvant donner naissance à une cause défendable possédant une chance raisonnable de succès.

 

[16]           Le cadre législatif et jurisprudentiel ayant été établi, je passe aux motifs d’appel et à l’appréciation de la raisonnabilité de la conclusion de la CAP qu’ils ne sont pas indicatifs de l’existence d’une cause défendable :

                    i.          le tribunal a jugé à tort que la preuve médicale au dossier ne permettait pas d’étayer une conclusion d’invalidité au mois de décembre 2004, alors que des opinions médicales exposaient que l’appelant était invalide pour ce qui est du travail, notamment celles des Dr Lee, Chan, Halle et Forget;

 

                   ii.          le tribunal a exigé à tort que des conclusions objectives étayent l’allégation d’invalidité;

 

                 iii.          le tribunal a commis une erreur en ne prenant pas en compte la preuve objective d’une pathologie associée aux symptômes de l’appelant et à l’invalidité en découlant;

 

                 iv.          le tribunal s’est fondé à tort sur l’opinion de la Dre MacGregor, laquelle était fournie en tenant pour acquis que l’état de l’appelant était attribuable à une atteinte musculaire sans participation neurologique ou pathologie de la colonne vertébrale et reposait donc sur une erreur de diagnostic.

 

[17]           Je n’ai pas l’intention d’examiner la totalité de la preuve médicale pour rendre jugement en l’espèce, sauf pour dire que le demandeur n’a pu signaler aucune erreur de fait importante qui était de nature déraisonnable ou abusive compte tenu de la preuve. Le dossier ne permet pas non plus d’affirmer que le poids de la preuve tendait vers la conclusion que le demandeur souffrait d’une invalidité grave et prolongée. C’est plutôt le contraire qui serait établi suivant la prépondérance de la preuve pertinente :

a.         Le 11 mars 2003, la Dre Lynne MacGregor, M.D., FRCPC, spécialiste de la médecine physique et de la réadaptation, a écrit à la Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail (CSPAAT) pour expliquer ce qui suit :

 

[traduction] M. Pantic a été vu aujourd’hui lors d’une consultation de suivi pour des douleurs lombaires liées à un accident de travail remontant à octobre 2002 […] Selon moi, il présentait des douleurs lombaires de nature mécanique relevant d’une étiologie ligamentaire ou des tissus mous sans signe neurologique ou articulaire précis, sauf une mobilité rachidienne réduite, accompagnée de comportements autolimitatifs; de plus, il présentait un comportement douloureux et était en mauvaise forme physique. Je l’ai aiguillé vers le Centre de réadaptation du dos (CRD) de Gatineau pour qu’il apprenne à gérer la douleur et qu’il effectue des exercices. Il a eu recours à ses médicaments après sa dernière consultation, soit OxyContin et Flexeril.

 

M. Pantic est traité au CRD de Gatineau depuis maintenant trois semaines et il a continué à suivre, en parallèle, un programme en milieu de travail avec son employeur, bénéficiant ainsi d’une modification de ses heures et de ses tâches. Il travaille quatre heures par jour tout en suivant un traitement de physiothérapie. Sa fille a déclaré qu’il effectuait des tâches modifiées, mais qu’elle ne savait pas quelles étaient ses capacités fonctionnelles à ce stade-ci, et je n’ai pas reçu de document concernant ses capacités fonctionnelles actuelles. J’ai bien reçu le rapport originel, ou l’évaluation, du CRD, mais aucun formulaire à jour ne m’a été transmis aujourd’hui. Selon sa fille, M. Pantic se porte un peu mieux. Il fait ses exercices, mais ses douleurs le préoccupent encore beaucoup.

 

J’aimerais le voir dans environ trois à quatre semaines avec une note d’évolution. Je lui ai aussi demandé qu’il m’en fasse parvenir une par télécopieur sur ses capacités fonctionnelles actuelles. J’ai dit à chacun d’eux qu’il était normal que les exigences physiques liées à son emploi soient connues du physiothérapeute ou qu’elles puissent être obtenues de l’employeur, et qu’elles sont généralement prises en compte lorsqu’on envisage un allègement ou une modification des tâches. Je compte revoir M. Pantic pour un suivi, mais je suis d’accord avec le plan actuel. [Notre soulignement]

 

 

b.         Dans une autre lettre adressée à la CSPAAT en date du 10 avril 2003, la Dr MacGregor a ajouté ceci :

 

[traduction] Le but de l’évaluation aujourd’hui était de voir comment se déroulait son programme de physiothérapie au Centre de réadaptation du dos de Hull, où il s’est rendu de février à avril 2001. Le patient dit avoir reçu son congé et, dans l’ensemble, le rapport de congé du CRD indique qu’il peut effectuer des travaux d’intensité légère et que, d’un point de vue objectif, son état s’est amélioré. Du point de vue du patient, M. Pantic a signalé une légère diminution de la douleur, mais certaines tâches au travail lui posent problème. D’après un résumé de ses capacités fonctionnelles, il est capable de porter une charge de 9 kg (20 livres) sur une distance de 9 mètres (30 pieds) et de lever une charge allant jusqu’à 9 kg, à répétition, de la taille jusqu’aux épaules; du sol jusqu’à la taille, il peut soulever à répétition 2 kg (5 livres). Dans l’ensemble, le rapport mentionne qu’il a démontré une capacité à effectuer des travaux légers, suivant la description des exigences physiques et des caractéristiques de travail associées à ce niveau d’effort figurant dans le Dictionary of Occupation Titles. On a indiqué qu’il était capable de soulever une charge de 9 kg à l’occasion et de 4,5 kg (10 livres) de manière fréquente. Durant les évaluations fonctionnelles, il n’a pas montré les signes d’effort maximal normalement observés à l’épuisement. Il a manifesté un comportement autolimitatif en raison d’une exacerbation de ses symptômes lorsqu’il exécute des tâches. Par conséquent, selon le rapport, il serait en mesure de soulever des charges plus lourdes que ce qui a été démontré. Le conditionnement au travail a pris fin le 2 avril, comme il a été discuté avec la CSPAAT. 

 

Il y avait un bref résumé des descriptions de travail et des tâches ordinaires donnant un aperçu de son emploi en tant qu’imprimeur/opérateur. On y mentionne que le poids moyen transporté auparavant par le demandeur se situait entre 100 g et 14 kg, mais qu’il pouvait utiliser un chariot selon la quantité de dossiers qu’il devait transporter, et qu’il pouvait compter sur ses collègues pour l’aider à classer des commandes de marchandises. Selon ce rapport, constitué d’une seule page sans autre commentaire, ses tâches modifiées consistent à s’asseoir et à marcher en alternance, comme bon lui semble, à surveiller les imprimantes, à remplacer les rubans, à transporter de petits colis vers le chariot et à installer des imprimantes dont le poids moyen varie de 100 à 400 g. Il est mentionné qu’il ne soulève aucune boîte lourde. J’ai passé en revue ce rapport en présence de M. Pantic, qui ne semblait pas être d’accord avec la description de travail. Je lui ai expliqué que s’il contestait les exigences physiques liées à l’emploi, il devrait alors obtenir de son employeur une description signée en bonne et due forme des exigences physiques et les examiner en détail. Toutefois, d’après le dictionnaire des professions et le formulaire présenté au physiothérapeute, on semble penser qu’il était capable d’exécuter des travaux légers. Il travaille actuellement quatre heures par jour en plus de suivre un traitement de physiothérapie d’une durée de quatre heures, ce qui représente une journée de travail bien remplie. Selon le rapport du physiothérapeute, M. Pantic travaillait plus fort au cours de sa physiothérapie qu’au travail. J’ai dit à M. Pantic et à sa femme aujourd’hui qu’il serait raisonnable pour lui de reprendre ses tâches à temps plein, et qu’on pense qu’il est en mesure d’effectuer des travaux légers. Je lui ai de nouveau expliqué la différence entre avoir mal et avoir une lésion physique, et qu’il présentait un problème lombaire musculoligamentaire qui risque de ne pas se résoudre complètement. Il semble que sa femme et lui aient de la difficulté à comprendre cette notion. Je vous les ai adressés à nouveau afin que vous puissiez examiner le différend concernant les exigences physiques liées à son travail. À mon avis toutefois, s’il s’agit tout au plus d’exécuter des tâches légères avec des changements de position, il devrait en être capable. Je lui ai dit qu’il n’était PAS nécessaire que je le revoie pour un suivi, étant donné que je n’ai pas l’impression de pouvoir faire quelque chose de plus à ce stade-ci. Je l’ai donc ré‑aiguillé vers son médecin de famille et vous-même. [Notre soulignement]

 

 

c.         Le 22 mai 2003, le Dr Edward Day, un autre spécialiste de la médecine physique et de la réadaptation, a adressé une lettre au Dr Vincent Chan, le médecin de famille de M. Pantic à Ottawa, dans laquelle il déclare :

 

[traduction] À mon avis, cet homme présente un problème d’ordre mécanique. C’est ce qui semble ressortir des antécédents et des observations antérieures. Il présentait un blocage facettaire bilatéral au niveau C7 et T1, bilatéral au niveau L5, et l’articulation sacro-iliaque gauche était bloquée.

 

Il semblait souffrir d’une douleur si intense que j’avais des doutes quant à ma capacité de relâcher les articulations. En fait, cela a été facile. Je n’ai eu aucune difficulté, à un point tel que je me suis questionné sur la corrélation entre l’intensité de la douleur et la facilité à laquelle les articulations ont été débloquées. Le déblocage des articulations n’a rien donné, selon lui.

 

Je le reverrai, mais j’hésite à croire que je puisse aider votre patient. Selon moi, ses préoccupations découlent davantage de la crainte ou d’un quelconque autre problème que d’une simple blessure mécanique. [Notre soulignement]

 

 

d.         Puis, le 12 juin 2003, le Dr R.J. McKendry, M.D., FRCPC, de l’unité des affections rhumatismales de l’Hôpital d’Ottawa, a également écrit au Dr Chan :

 

[traduction] Un examen physique a permis de constater qu’il s’agissait d’un homme aimable, qui semblait un peut craintif et qui se déplaçait lentement dans la salle d’examen. Sa fille l’accompagnait pour lui fournir un soutien et lui servir d’interprète. À l’examen musculosquelettique, j’ai observé une certaine restriction de mouvement de sa colonne cervicale dans tous les plans, accompagnée d’une gêne dans chaque direction. C’était difficile de l’examiner en profondeur parce que tout mouvement semblait lui causer un inconfort. Autant que j’ai pu le vérifier, l’élévation de la jambe tendue était normale et ses réflexes étaient égaux, bien qu’un peu hypoactifs. Il ne présentait pas beaucoup de points douloureux habituels de la fibromyalgie.

 

Le diagnostic du syndrome de douleur musculosquelettique post‑traumatique est celui qui correspond le mieux au tableau clinique. Comme c’est souvent le cas avec cette affection, une lésion relativement mineure est suivie d’une douleur beaucoup plus étendue, qui persiste et augmente avec le temps. Les patients finissent souvent par prendre des narcotiques; d’ailleurs, M. Pantic s’applique maintenant un timbre de Duragesic de 30 mg tous les deux ou trois jours. Il me dit que cela ne lui apporte aucun soulagement. Je présume que d’autres médecins ont examiné attentivement son cas, mais je n’ai aucun détail à ce sujet. S’il n’a pas déjà subi une scintigraphie osseuse et articulaire au technétium, cela pourrait en valoir la peine, en partie pour démontrer l’absence d’un processus inflammatoire généralisé. Les résultats des tests de laboratoire réalisés en mars dernier et que vous m’avez transmis sont tous tout à fait normaux ou négatifs (notamment une vitesse de sédimentation de 5, un test d’anticorps antinucléaires négatif ainsi que l’absence du facteur rhumatoïde). La douleur de M. Pantic est de plus en plus envahissante et elle fait maintenant partie intégrante de sa vie. Malheureusement, je ne connais aucun moyen pour améliorer la situation sur le plan affectif. Je me demande si l’utilisation d’antidépresseurs pourrait être utile, ou même une évaluation par un psychiatre peut-être, avec la participation de la famille, pour savoir si des facteurs de stress ou d’autres circonstances auraient un effet sur son état. [Notre soulignement]

 

 

e.         Le 8 juillet 2003, le Dr Robert Forget, M.D., B.A., CS (PQ), FRCS(C), a également écrit au Dr Chan :

 

[traduction] À l’examen, nous pouvons observer un homme en état de détresse évidente, qui a de la difficulté à marcher et à se tenir droit en position assise. Il garde son cou fléchi antérieurement. Il oppose une forte résistance à la manipulation passive du cou en hyperextension, en flexion et en rotation externe du côté gauche et droit. En ce qui concerne le rachis lombaire, il éprouve de la douleur dans la région sous-épineuse L5-S1. Il ne présente aucun déficit neurologique ou vasculaire des membres inférieurs. Le test d’élévation de la jambe tendue donne un résultat négatif.

 

Les résultats des radiographies du rachis lombaire se situaient dans les limites de la normale. Les radiographies de son cou montrent une discopathie dégénérative grave au niveau C5-C6.

 

Je vous saurais gré de bien vouloir adresser ce patient à un spécialiste en vue d’une évaluation neurologique de sa colonne cervicale. [Notre soulignement]

 

 

f.           Puis, le 11 juillet 2003, le Dr Reda El-Sawy, M.B., B. Ch., FRCP(C), un autre médecin (physiatre) qui a vu le demandeur, a écrit au Dr Chan 

 

[traduction] Tous les symptômes [de ses douleurs lombaires qui m’ont été décrites] étaient non spécifiques; il n’y avait aucune répartition particulière et le patient n’avait pas connaissance de facteurs aggravants ou améliorants.

 

[…]

 

L’examen a révélé un homme musclé en bonne santé physique apparente, qui n’était pas en état de détresse aiguë. Il est demeuré assis durant toute l’anamnèse. Aussitôt que l’examen a commencé, il a présenté des problèmes fonctionnels extrêmement intenses. Il était incapable de marcher. En fait, c’était comme s’il marchait sur un câble et qu’il pouvait tomber à tout moment, mais cela n’est pas arrivé. Lorsque je lui ai demandé de marcher sur la pointe des pieds, sur ses talons ou encore de s’accroupir, il n’a fait aucun de ses gestes, mais a essayé « très fort » pendant une longue période durant laquelle il tremblait de partout, mais encore là, il n’est jamais tombé.

 

L’examen de la colonne vertébrale n’a révélé aucun spasme de défense ni aucune sensibilité au toucher. Aucune partie de la colonne vertébrale ne bougeait, peu importe la direction ou l’angle. Toutefois, lors de l’examen d’autres parties et, de toute évidence, pendant qu’il se tenait assis lors de l’entretien, il avait des mouvements connexes normaux de la colonne cervicale. Il n’a même pas bougé les articulations de ses membres supérieurs.

 

L’examen neurologique n’a révélé aucune débilitation ni fasciculation. Aucun changement n’a été observé dans les réflexes tendineux profonds, et les réflexes plantaires étaient bons des deux côtés. J’ai été incapable de bien évaluer la force. Il n’y avait aucun déficit sensoriel. À l’auscultation abdominale, les pouls périphériques étaient normaux

 

L’examen des articulations périphériques a été très difficile, mais je n’ai pas pu détecter d’œdème synovial, d’hypertrophie osseuse ou de signe d’inflammation aiguë. Les articulations des membres supérieurs étaient normales.

 

Rien dans l’anamnèse ou l’examen physique ne permet de soupçonner un problème d’ordre organique. Nous sommes rassurés par les résultats négatifs des radiographies et des examens de tomodensitométrie, comme vous l’avez mentionné dans votre lettre. Par contre, les signes ne sont pas typiques d’une névrose de conversion, car ils semblent pires encore. Par conséquent, l’origine de ces signes ne peut être déterminée à l’issue de l’examen d’aujourd’hui. Je suppose qu’il faudra recourir à un entretien exhaustif et à des tests psychologiques spécialisés. J’ai parlé longuement à M. Pantic. Je lui ai dit qu’il devrait consulter un psychiatre. Comme vous le savez, il se sent déjà déprimé, en plus d’avoir d’importants troubles du sommeil et une perte d’énergie, ce qui est compatible avec l’anxiété/la dépression.

 

Je n’ai pas d’autre recommandation. Je voudrais seulement souligner que plus le patient s’absente du travail, plus il lui sera difficile de revenir occuper un emploi rémunérateur. Bien entendu, cette situation serait très déplorable en raison de son jeune âge. [Notre soulignement]

 

 

g.         Le 30 juillet 2003, le rapport d’un examen neurophysiologique (électromyogramme) réalisé à l’Hôpital d’Ottawa conclut ceci :

 

[traduction] Ces tests électrophysiologiques sont normaux, à l’exception de l’absence de réflexe H dans le muscle soléaire droit, phénomène qui est simplement dû à la corrélation électrophysiologique de l’absence de secousse du côté droit. Par contre, on n’observe aucune dénervation active dans le myotome S1 droit. [Notre soulignement]

 

h.         Dans une lettre du 20 octobre 2003, le Dr Forget a écrit de nouveau au Dr Chan, laissant entendre qu’un [traduction] « tomodensitogramme du rachis lombaire a révélé une légère compression de la racine nerveuse L4 du côté droit ». [Notre soulignement]

 

i.           Le Dr Peter Jarzem, B.Sc., M.D. FRCS, orthopédiste, a déterminé que le demandeur n’était [traduction] « pas un candidat admissible à la chirurgie ».

 

j.           Dans une lettre adressée au Dr Chan, le Dr I. N. Rhodes a posé le diagnostic suivant à la lumière de l’examen d’imagerie diagnostique auquel s’est soumis le demandeur au CML Health Care :

 

[traduction] L’examen ne révèle aucune fracture. Quelques légers ostéophytes latéraux envahissent la partie inférieure du rachis thoracique. La hauteur des espaces intervertébraux est normale. Les éléments postérieurs et les tissus mous paravertébraux sont normaux. On observe des changements dégénératifs très légers dans la partie centrale et inférieure du rachis thoracique. [Notre soulignement]

 

 

[18]           Dans une lettre datée de mai 2005 et adressée au Dr Weatherhead, le nouveau médecin de famille du demandeur à Toronto, le Dr Ian J. Harrington, M.D., FRCS(C), M.S., M. Sc., professeur agrégé à l’Université de Toronto, a résumé une grande partie des antécédents ci‑dessus, en ajoutant ceci en ce qui concerne l’examen qu’il a fait lui-même du demandeur :

 

[traduction] À l’examen clinique, on observe que M. Pantic est un homme de grande taille, qui semble en bonne forme physique. Il se déplaçait avec une canne à la main gauche, se plaignant âprement d’une gêne au bas du dos et dans la fesse gauche. Il disait aussi souffrir de douleurs dans le cou et le haut du dos. Avec des encouragements, il a pu montrer qu’il était capable de marcher sur la pointe des pieds et sur ses talons. Il a montré une assez bonne amplitude de mouvement du rachis cervical, mais s’est plaint de douleurs dans tous les plans de mouvement. La palpation du rachis cervical a provoqué une réponse exagérée à la douleur, en position postérieure. Il n’y avait aucun signe de spasme musculaire paracervical. Le mouvement de la colonne sacro-lombaire était limité. Le patient s’est penché de façon à ce que le bout de ses doigts arrive à 3 ou 4 pouces au-dessus de la rotule. D’autres tentatives de flexion ont causé une exacerbation de la douleur dorsale. Les mouvements latéraux de flexion, de rotation et d’extension étaient limités, en plus de provoquer de la douleur dans la région lombo-sacrée. Le fait d’effectuer une rotation de son bassin d’un côté et de l’autre sans bouger son dos lui causait également des douleurs lombaires. À l’examen neurologique, les réflexes des membres supérieurs et inférieurs étaient généralement amoindris, mais de façon égale des deux côtés. Le patient a montré des signes anormaux d’hypoesthésie touchant sa jambe droite, son bras droit et certaines parties de son tronc et de son thorax du côté droit, qui n’est pas distribuée à la façon d’un dermatome – essentiellement, en « gants et chaussettes ». Toute tentative d’élévation de la jambe tendue sur chacun des côtés lors de l’examen en position couchée sur le dos s’est soldée par une résistance vigoureuse. Par contre, en position assise, il parvenait à soulever la jambe tendue à un angle de 90 degrés des deux côtés, sans se plaindre de douleurs au dos ou aux jambes. Les réflexes plantaires étaient bons. Il n’y avait aucun clonus du pied – aucun signe de lésion des motoneurones supérieurs. L’examen des épaules, coudes, mains, poignets, hanches, genoux, pieds et chevilles était considéré comme normal, même si M. Pantic s’est plaint d’une certaine gêne dans les deux épaules en abduction/rotation externe complète. La compression axiale de sa tête a provoqué une gêne dans la partie supérieure du thorax et dans le bas du dos. [Notre soulignement]

 

 

[19]           Enfin, dans une lettre du 12 décembre 2005 envoyée à M. D. Rideout, l’évaluateur médical qui a rejeté la demande de réexamen du demandeur concernant les prestations d’invalidité (c.‑à‑d. la deuxième décision), le Dr William J. Kraemer, M.D. FRC, médecin au Toronto East General and Orthopaedic Hospital et chargé de cours à l’Université de Toronto, a écrit ce qui suit 

 

[traduction] Les renseignements figurant dans le présent rapport font suite à une consultation en cabinet effectuée le 25 octobre 2005 par le patient, qui a été adressé par le DHarrington.

 

[…]

 

À l’examen physique, le patient [M. Pantic] a affiché une attitude plutôt inhabituelle en réaction à l’examen : il battait des bras et présentait de l’instabilité lorsqu’il était debout. À l’examen, son rachis lombaire était normal. À la palpation, le patient a dit ressentir de la douleur au milieu de la partie inférieure du rachis lombaire, de même que dans les muscles dorsaux et dans la partie centrale et supérieure du rachis thoracique. Il ne pouvait se pencher que de quelques degrés, en battant des bras, et il disait avoir très mal. L’extension dépassait tout juste la position neutre, et la flexion latérale était tout aussi limitée. Le patient avait de la difficulté à marcher sur ses talons et sur la pointe des pieds à cause de la douleur. Le test moteur manuel a révélé un dérobement douloureux, mais je n’ai décelé aucune faiblesse motrice. Le test sensoriel était normal. Ses réflexes étaient intacts et symétriques. Le test d’élévation de la jambe tendue a reproduit la douleur dorsale intense, mais n’a pas reproduit la douleur radiculaire. Les pouls aux pieds étaient normaux. La rotation de ses hanches a révélé une amplitude de mouvement complète; toutefois, il s’est plaint de douleurs dorsales intenses lors de cet exercice.

 

L’examen d’imagerie par résonance magnétique (IRM) n’a montré aucun signe de compression radiculaire ni de compression du sac thécal à quelque niveau que ce soit. On a observé de manière fortuite un hémangiome bénin (tumeur vasculaire bénigne) dans le corps vertébral L1, qui s’étendait jusqu’au pédicule gauche. Il n’y avait aucune expansion osseuse ni extension des tissus mous dans le canal rachidien et, encore une fois, aucun signe de compression de racine nerveuse à ce niveau.

 

En résumé, ce patient se plaint de douleurs très intenses dans de nombreuses parties de sa colonne vertébrale; toutefois, rien dans les résultats de l’IRM n’explique cette douleur. Le pronostic d’amélioration n’est pas favorable, compte tenu de la chronicité des symptômes, du comportement algique inhabituel et des résultats essentiellement normaux de l’IRM.

 

Ce patient ne tirerait aucun bénéfice d’une intervention chirurgicale. En ce qui concerne sa capacité de travailler, je n’ai observé aucun problème important touchant sa colonne vertébrale sur les clichés de l’IRM. Par conséquent, je ne connais pas la source de sa douleur. Essentiellement, toute incapacité de travailler reposerait sur ses propres limitations dues à la douleur plutôt que sur des restrictions imposées par un médecin. [Notre soulignement]

 

 

[20]           Voilà les éléments de preuve dont disposaient le tribunal de révision et la CAP lorsqu’ils ont rendu leur décision respective. Comme il appert de l’historique médical, aucun des éléments de preuve présentés au tribunal de révision ne s’approche de ce qui pourrait constituer une cause défendable. Bien qu’il soit fait mention de limitations dans la capacité de travailler du demandeur, de compression neurologique dans la colonne vertébrale et de douleur éprouvée lors de certains tests, la conclusion de la CAP selon laquelle l’appel envisagé n’avait pas de chance raisonnable de succès est raisonnable. Le demandeur ne peut indiquer d’élément de preuve étayant l’argument que son état est grave et prolongé ainsi que l’exige le paragraphe 42(2) du RPC. En l’absence du fondement de preuve requis, si la demande n’est pas accompagnée de nouveaux éléments de preuve ou si elle ne soulève pas de question de droit ou ne fait pas état d’une importante question de fait qui n’aurait pas été correctement examinée par le tribunal de révision, ce motif d’appel n’avait pas de chance raisonnable de succès.

 

[21]           Le deuxième motif invoqué à l’appui de l’appel envisagé ne nécessite pas de longue analyse. Ce n’est pas une erreur de droit que d’exiger une preuve objective de l’invalidité. Comme la Cour d’appel l’a indiqué dans Warren c. Canada (Procureur général) 2008 CAF 377, au paragraphe 4 :

En l’espèce, la Commission n’a commis aucune erreur de droit en exigeant une preuve médicale objective à l’égard de l’invalidité du demandeur. Il est bien établi qu’un demandeur doit fournir quelques éléments de preuve objectifs de nature médicale (voir l’article 68 du Règlement sur le Régime de pensions du Canada, C.R.C., ch. 385, et les décisions suivantes : Inclima c. Canada (Procureur Général), 2003 CAF 117; Klabouch c. Canada (Développement social), 2008 CAF 33

 

 

[22]           La Cour n’a pas évalué le troisième motif d’appel car on n’a pu l’expliquer ou le clarifier avec assez de précision pour qu’il puisse être examiné, et il n’en a pas été question dans l’argumentation présentée à la Cour. Par conséquent, on ne peut dire qu’il ait une chance raisonnable de succès.

 

[23]           Le dernier motif d’appel reproche au tribunal de révision de s’être appuyé sur le rapport susmentionné de la Dre MacGregor. Le demandeur prétend que le tribunal a ainsi commis une erreur parce que cette opinion découlait d’une erreur diagnostique. Voici l’argument du demandeur à cet égard :

[traduction] … l’argument soumis par le ministère (officiellement [sic] RHDC) repose sur l’opinion de par [sic] la Dre Lynne McGregor [sic], physiatre. La Dre McGregror [sic] a conclu que mon état était attribuable à une atteinte musculaire sans participation neurologique ou pathologie de la colonne vertébrale. Son opinion découle donc d’une erreur de diagnostic (le tomodensitogramme et le test neurologique en sont la preuve). Elle m’a dirigé vers une clinique de gestion de la douleur (CGD) où l’on m’a expliqué que j’avais un nerf coincé entre des vertèbres. On m’a dit de faire des exercices, ce qui pourrait décoincer le nerf. Ça n’a aucun sens. La raison pour laquelle elle a persisté à affirmer que la lésion était uniquement musculaire n’est pas claire du tout, mais elle m’a envoyé subir des traitements neurologiques.  [Notre soulignement]

 

[24]           Il n’entre pas dans le rôle de la Cour, lorsqu’elle contrôle une décision de la CAP refusant l’autorisation d’interjeter appel d’une décision du tribunal de révision, d’accepter comme prémisse de l’appel envisagé qu’une opinion médicale est erronée. Il est vrai que le tomodensitogramme indique un [traduction] « changement dégénératif très léger dans la partie moyenne et inférieure du rachis thoracique », mais aucun élément de preuve au dossier n’étaye l’argument que le demandeur souffre d’une invalidité grave et prolongée. De fait, la preuve indique plutôt que le demandeur pourrait accomplir du travail léger.

 

Conclusion

[25]           Le rôle de notre Cour est de se prononcer sur le caractère raisonnable du refus par la CAP de l’autorisation d’appel sollicitée par le demandeur. Ce dernier n’a pas établi, à l’appui de sa demande, l’existence de motifs d’appel ayant une chance raisonnable de succès en droit. C’est pourquoi je suis d’avis que la décision de la CAP figure parmi les issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit et qu’elle est, en conséquence, raisonnable : Dunsmuir c. Nouveau‑Brunswick, 2008 CSC 9, paragraphe 47.

 


JUGEMENT

 

LA COUR REND LE JUGEMENT SUIVANT :

1.                  La demande de contrôle judiciaire est rejetée.

2.                  Aucuns dépens ne sont adjugés. 

3.                  L’intitulé de la cause est modifié pour que le procureur général du Canada y soit dûment nommé comme défendeur.

 

 

« Donald J. Rennie »

Juge

 

 

Traduction certifiée conforme

Ghislaine Poitras, LL.L., Trad. a.

 

 


Cour fédérale

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER

 

 

Dossier :                                        T-1565-07

 

INTITULÉ :                                       MILENKO PANTIC c.

                                                            LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU CANADA

 

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                 Toronto

 

DATE DE L’AUDIENCE :               Le 3 mars 2011

 

MOTIFS DU JUGEMENT

ET JUGEMENT:                               LE JUGE RENNIE

 

DATE DES MOTIFS :                      Le 19 mai 2011

 

 

 

COMPARUTIONS :

 

Milenko Pantic

demandeur

 

Carmelle Salomon-Labbe
Jennifer Hockey

POUR LE DÉFENDEUR

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

 

 

demandeur

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Ontario)

POUR LE DÉFENDEUR

 

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